Œuvres complètes de Buffon, éd. Lanessan/Histoire naturelle des oiseaux/Oiseaux étrangers qui ont rapport au chardonneret

Texte établi par J.-L. de LanessanA. Le Vasseur (Tome VI, Histoire naturelle des oiseauxp. 221-223).

OISEAUX ÉTRANGERS
QUI ONT RAPPORT AU CHARDONNERET

I.Le chardonneret vert ou le maracaxao.

M. Edwards, qui le premier a observé et décrit cet oiseau[NdÉ 1], donne la figure du mâle, dessinée d’après le vivant, planche 272, et celle de la femelle, dessinée d’après le mort, planche 128. De plus il nous apprend, dans une addition qu’il a mise à la tête de son premier volume, que c’est un oiseau du Brésil.

Le mâle a le bec, la gorge et la partie antérieure de la tête d’un rouge plus ou moins vif, excepté un petit espace entre le bec et l’œil qui est bleuâtre ; le derrière de la tête, du cou et le dos, d’un vert jaunâtre ; les couvertures supérieures des ailes et les pennes moyennes verdâtres, bordées de rouge ; les grandes pennes presque noires ; la queue et ses couvertures supérieures d’un rouge vif ; les couvertures inférieures d’un gris cendré ; tout le dessous du corps rayé transversalement de brun, sur un fond qui est vert d’olive à la poitrine, et qui va toujours s’éclaircissant, jusqu’à devenir tout à fait blanc sous le ventre. Cet oiseau est de la grosseur de nos chardonnerets ; il a le bec fait de même et les pieds gris.

La femelle diffère du mâle en ce qu’elle a le bec d’un jaune clair ; le dessus de la tête et du cou cendré ; la base des ailes et le croupion d’un vert jaunâtre, comme le dos, sans aucune teinte de rouge ; les pennes de la queue brunes, bordées en dehors d’un rouge vineux ; les couvertures inférieures blanches, et les pieds couleur de chair.

II.Le chardonneret jaune[1].

Tous ceux qui ont parlé de cet oiseau[NdÉ 2] se sont accordés à lui donner le nom de chardonneret d’Amérique, mais pour que cette dénomination fût bonne il faudrait que l’oiseau à qui on l’a appliquée fût le seul chardonneret qui existât dans tout le continent du Nouveau-Monde ; et non seulement cela est difficile à supposer, mais cela est démenti par le fait même, puisque le chardonneret de l’article précédent est aussi d’Amérique. J’ai donc cru devoir changer cette dénomination trop vague en une autre qui annonçât ce qu’il y a de plus remarquable dans le plumage de l’oiseau. Le chardonneret jaune a le bec à très peu près de même forme et de même couleur que notre chardonneret ; le front noir, ce qui est propre au mâle ; le reste de la tête, le cou, le dos et la poitrine d’un jaune éclatant ; les cuisses, le bas-ventre, les couvertures supérieures et inférieures de la queue d’un blanc jaunâtre ; les petites couvertures des ailes jaunes à l’extérieur, blanchâtres à l’intérieur, et terminées de blanc ; les grandes couvertures noires et terminées d’un blanc légèrement nuancé de brun, ce qui forme deux raies transversales bien marquées sur les ailes qui sont noires ; les pennes moyennes terminées de blanc ; celles qui avoisinent le dos et leurs couvertures bordées de jaune ; les pennes de la queue, au nombre de douze, égales entre elles, noires dessus, cendrées dessous ; les latérales blanches à l’intérieur vers le bout ; le bec et les pieds couleur de chair.

La femelle diffère du mâle en ce qu’elle n’a pas le front noir, mais d’un vert olive, ainsi que tout le dessus du corps, et en ce que le jaune du croupion et du dessous du corps est moins brillant, le noir des ailes moins foncé, et, au contraire, les raies transversales moins claires ; enfin, en ce qu’elle a le ventre tout blanc, ainsi que les couvertures inférieures de la queue.

Le jeune mâle ne diffère de la femelle que par son front noir.

La femelle observée par M. Edwards était seule dans sa cage, et cependant elle pondit au mois d’août 1755 un petit œuf gris de perle, sans aucune tache ; mais ce qui mérite plus d’attention, c’est que M. Edwards ajoute que constamment cette femelle a mué deux fois par an, savoir, aux mois de mars et de septembre. Pendant l’hiver, son corps était tout à fait brun, mais la tête, les ailes et la queue conservaient la même couleur qu’en été ; le mâle étant mort trop tôt, on n’a pu suivre cette observation sur lui ; mais il est plus que vraisemblable qu’il aurait mué deux fois comme sa femelle, et comme les bengalis, les veuves, le ministre, et beaucoup d’autres espèces des pays chauds.

L’individu observé par M. Brisson avait le ventre, les flancs, les couvertures inférieures de la queue et des ailes du même jaune que le reste du corps ; les couvertures supérieures de la queue d’un gris blanc ; le bec, les pieds et les ongles blancs ; mais la plupart de ces différences peuvent venir des différents états où l’oiseau a été observé. M. Edwards l’a dessiné vivant ; il paraît aussi qu’il était plus grand que celui de M. Brisson.

Catesby nous apprend qu’il est fort rare à la Caroline, moins à la Virginie, et très commun à la Nouvelle-York : celui qui est représenté dans nos planches enluminées venait du Canada, où le P. Charlevoix a vu plus d’un individu de la même espèce[2].

Longueur totale, quatre pouces un tiers ; bec, cinq à six lignes ; tarse de même ; vol, sept pouces un quart ; queue, dix-huit lignes, composée de douze pennes égales, dépasse les ailes de six lignes.


Notes de l’auteur
  1. The American gold-finch, le chardonneret d’Amérique. Catesby, p. 43. Edwards, pl. 274. « Fringilla, carduelis Americana, gelber distel-finck. » Klein, Ordo avium, § 45, p. 97. — « Fringilla flava fronte nigra, alis fuscis ; fringilla tristis. » Linnæus, Syst. nat., édit. X, g. 98, sp. 14. — « Carduelis lutea ; vertice nigro ; tæniâ transversâ in alis candidâ ; remigibus, rectricibusque nigris ; minorum remigum oris exterioribus et in apice albis… » Carduelis Americana, le chardonneret d’Amérique. Brisson, t. III, p. 64.
  2. Nouvelle-France, t. III, p. 156.
Notes de l’éditeur
  1. Fringilla Melba L. [Note de Wikisource : il s’agit de l’oiseau africain décrit plus haut sous le nom de beaumarquet, actuellement beaumarquet melba.]
  2. Fringilla tristis L. [Note de Wikisource : actuellement Spinus tristis Linnæus, vulgairement chardonneret jaune ou tarin jaune, genre frère de celui des serins vrais ; le groupe formé par les chardonnerets d’Amérique, les tarins et les serins vrais est lui-même frère de celui formé par les chardonnerets européens, les venturons et le serin malais.]