Œuvres complètes de Buffon, éd. Lanessan/Histoire naturelle des oiseaux/La petite perdrix grise

Texte établi par J.-L. de LanessanA. Le Vasseur (Tome V, Histoire naturelle des oiseauxp. 464-465).

LA PETITE PERDRIX GRISE

J’appelle ainsi la perdrix de Damas d’Aldrovande, qui est probablement la même que la petite perdrix de passage qui se montre de temps en temps en différentes provinces de France[NdÉ 1].

Elle ne diffère pas seulement de la perdrix grise par sa taille, qui est constamment plus petite, mais encore par son bec qui est plus allongé, par la couleur jaune de ses pieds, et surtout par l’habitude qu’elle a de changer de lieu et de voyager. On en voit quelquefois dans la Brie et ailleurs passer par bandes très nombreuses et poursuivre leur chemin sans s’arrêter. Un chasseur des environs de Monthard, qui chassait à la chanterelle au mois de mars dernier (1770), en vit une volée de cent cinquante ou deux cents qui parut se détourner, attirée par le cri de la chanterelle ; mais qui, dès le lendemain, avait entièrement disparu. Ce seul fait, qui est très certain, annonce et les rapports et les différences qu’il y a entre ces deux perdrix : les rapports, puisque ces perdrix étrangères furent attirées par le chant d’une perdrix grise ; les différences, puisque ces étrangères traversèrent si rapidement un pays qui convient aux perdrix grises et même aux rouges, les unes et les autres y demeurant toute l’année ; et ces différences supposent un autre instinct, et par conséquent une autre organisation, et au moins une autre race.

Il ne faut pas confondre cette perdrix de Damas ou de Syrie avec la syroperdix d’Élien[1], que l’on trouvait aux environs d’Antioche, qui avait le plumage noir, le bec de couleur fauve, la chair plus compacte et de meilleur goût, et le naturel plus sauvage que les autres perdrix ; car les couleurs, comme l’on voit, ne se rapportent point ; et Élien ne dit pas que sa syroperdix soit un oiseau de passage ; il ajoute, comme une singularité, qu’elle mangeait des pierres, ce qui cependant est assez ordinaire dans les granivores. Scaliger rapporte, comme témoin oculaire, un fait beaucoup plus singulier qui a rapport à celui-ci ; c’est que dans un canton de la Gascogne, où le terrain est fort sablonneux, la chair des perdrix était remplie d’une quantité de petits grains de sable fort incommodes[2].


Notes de Buffon
  1. Élien, de Naturâ animalium, lib. xvi, cap. vii.
  2. Scaliger, Comm. in P. L. ari. de Plant.
Notes de l’éditeur
  1. La Petite perdrix grise de Buffon n’est, comme sa Perdrix grise blanche, qu’une variété du Starna cinerea [Note de Wikisource : c’est-à-dire de l’actuelle Perdix perdix].