Œuvres complètes de Buffon, éd. Lanessan/Histoire naturelle des minéraux/Pierres précieuses

PIERRES PRÉCIEUSES

Les caractères par lesquels on doit distinguer les vraies pierres précieuses de toutes les autres pierres transparentes sont la densité, la dureté, l’infusibilité, l’homogénéité et la combustibilité ; elles n’ont qu’une simple réfraction, tandis que toutes les autres, sans aucune exception, ont au moins une double réfraction et quelquefois une triple, quadruple, etc. Ces pierres précieuses sont en très petit nombre ; elles sont spécifiquement plus pesantes, plus homogènes et beaucoup plus dures que tous les cristaux et les spaths ; leur réfraction simple démontre qu’elles ne sont composées que d’une seule substance d’égale densité dans toutes ses parties, au lieu que les cristaux et tous les autres extraits des verres primitifs et des matières calcaires, pures ou mélangées, ayant une double réfraction, sont évidemment composés de lames ou couches alternatives de différente densité : nous avons donc exclu du nombre des pierres précieuses les améthystes, les topazes de Saxe et du Brésil, les émeraudes et péridots qu’on a jusqu’ici regardés comme telles, parce que l’on ignorait la différence de leur origine et de leurs propriétés. Nous avons démontré que toutes ces pierres ne sont que des cristaux et des produits des verres primitifs dont elles conservent les propriétés essentielles : les vraies pierres précieuses, telles que le diamant, le rubis, la topaze et le saphir d’Orient, n’ayant qu’une seule réfraction, sont évidemment homogènes dans toutes leurs parties, et en même temps elles sont beaucoup plus dures et plus denses que toutes ces pierres qui tirent leur origine des matières vitreuses.

On savait que le diamant est, de toutes les matières transparentes, celle dont la réfraction est la plus forte, et M. l’abbé Rochon, que j’ai déjà eu occasion de citer avec éloge, a observé qu’il en est de même des rubis, de la topaze et du saphir d’Orient ; ces pierres, quoique plus denses que le diamant, sont néanmoins également homogènes, puisqu’elles ne donnent qu’une simple réfraction : d’après ces caractères qu’on n’avait pas saisis, quoique très essentiels, et mettant pour un moment le diamant à part, nous nous croyons fondé à réduire les vraies pierres précieuses aux variétés suivantes : savoir, le rubis proprement dit, le rubis balais, le rubis spinelle, la vermeille, la topaze, le saphir et le girasol : ces pierres sont les seules qui n’offrent qu’une simple réfraction ; le balais n’est qu’un rubis d’un rouge plus clair, et le spinelle un rubis d’un rouge plus foncé : la vermeille n’est aussi qu’un rubis dont le rouge est mêlé d’orangé, et le girasol un saphir dont la transparence est nébuleuse, et la couleur bleue teinte d’une nuance de rouge : ainsi les rubis, topazes et saphirs n’ayant qu’une simple réfraction et étant en même temps d’une densité beaucoup plus grande que les extraits des verres primitifs, on doit les séparer des matières transparentes vitreuses et leur donner une tout autre origine.

Et, quoique le grenat et l’hyacinthe approchent des pierres précieuses par leur densité, nous n’avons pas cru devoir les admettre dans leur nombre, parce que ces pierres sont fusibles et qu’elles ont une double réfraction assez sensible pour démontrer que leur substance n’est point homogène, et qu’elles sont composées de deux matières d’une densité différente ; leur substance paraît aussi être mêlée de parties métalliques : on pourra me dire que les rubis, topazes, saphirs, et même les diamants colorés ne sont teints, comme le grenat et l’hyacinthe, que par les parties métalliques qui sont entrées dans leur composition ; mais nous avons déjà démontré que ces molécules métalliques, qui colorent les cristaux et autres pierres transparentes, sont en si petite quantité que la densité de ces pierres n’en est point augmentée ; il en est de même des diamants de couleur, leur densité est la même que celle des diamants blancs ; et ce qui prouve que dans les hyacinthes et les grenats les parties hétérogènes et métalliques sont en bien plus grande quantité que dans ces pierres précieuses, c’est qu’ils donnent une double réfraction : ces pierres sont donc réellement composées de deux matières de densité différente, et elles auront reçu non seulement leur teinture comme les autres pierres de couleur, mais aussi leur densité et leur double réfraction par le mélange d’une grande quantité de particules métalliques. Nos pierres précieuses blanches ou colorées n’ont au contraire qu’une seule réfraction, preuve évidente que la couleur n’altère pas sensiblement la simplicité de leur essence : la substance de ces pierres est homogène dans toutes ses parties ; elle n’est pas composée de couches alternatives de matière plus ou moins dense, comme celle des autres pierres transparentes, qui toutes donnent une double réfraction.

La densité de l’hyacinthe, quoique moindre que celle du grenat, surpasse encore la densité du diamant ; on pourrait donc mettre l’hyacinthe au rang des pierres précieuses, si sa réfraction était simple et aussi forte que celle de ces pierres ; mais elle est double et faible, et d’ailleurs sa couleur n’est pas franche : ainsi ces imperfections indiquent assez que son essence n’est pas pure. On doit observer aussi que l’hyacinthe ne brille qu’à sa surface et par la réflexion de la lumière, tandis que les vraies pierres précieuses brillent encore plus par la réfraction intérieure que par le reflet extérieur de la lumière : en général, dès que les pierres sont nuageuses et même chatoyantes, leurs reflets de couleurs ne sont pas purs, et l’intensité de leur lumière réfléchie ou réfractée est toujours faible, parce qu’elle est plutôt dispersée que rassemblée.

On peut donc assurer que le premier caractère des vraies pierres précieuses est la simplicité de leur essence ou l’homogénéité de leur substance qui se démontre par leur réfraction toujours simple, et que les deux autres caractères, qu’on doit réunir au premier, sont leur densité et leur dureté beaucoup plus grandes que celles d’aucun des verres ou matières vitreuses produites par la nature : on ne peut donc pas soutenir que ces pierres précieuses tirent leur origine, comme les cristaux, de la décomposition de ces verres primitifs, ni qu’elles en soient des extraits ; et certainement elles proviennent encore moins de la décomposition des spaths calcaires dont la densité est à peu près la même que celle des verres primitifs[1], et qui d’ailleurs se réduisent en chaux, au lieu de se fondre ou de brûler : ces pierres précieuses ne peuvent de même provenir de la décomposition des spaths fluors dont la pesanteur spécifique est à peu près égale à celle des schorls[2], et je ne vois dans la nature que les spaths pesants dont la densité puisse se comparer à celle des pierres précieuses ; la plus dense de toutes est le rubis d’Orient, dont la pesanteur spécifique est de 42 833 ; et celle du spath pesant, appelé pierre de Bologne, est de 44 409 ; celle du spath pesant octaèdre est de 44 712[3] ; on doit donc croire que les pierres précieuses ont quelque rapport d’origine avec ces spaths pesants, d’autant mieux qu’elles s’imbibent de lumière et qu’elles la conservent pendant quelque temps comme les spaths pesants ; mais ce qui démontre invinciblement que ni les verres primitifs, ni les substances calcaires, ni les spaths fluors, ni même les spaths pesants n’ont produit les pierres précieuses, c’est que toutes ces matières se trouvent à peu près également dans toutes les régions du globe, tandis que les diamants et les pierres précieuses ne se rencontrent que dans les climats les plus chauds, preuve certaine que, de quelque matière qu’elles tirent leur origine, cet excès de chaleur est nécessaire à leur production.

Mais la chaleur réelle de chaque climat est composée de la chaleur propre du globe[NdÉ 1] et de l’accession de la chaleur envoyée par le soleil ; l’une et l’autre sont plus grandes entre les tropiques que dans les zones tempérées et froides : la chaleur propre du globe y est plus forte, parce que le globe étant plus épais à l’équateur qu’aux pôles, cette partie de la terre a conservé plus de chaleur, puisque la déperdition de cette chaleur propre du globe s’est faite, comme celle de tous les autres corps chauds, en raison inverse de leur épaisseur. D’autre part, la chaleur qui arrive du soleil avec la lumière est, comme l’on sait, considérablement plus grande sous cette zone torride que dans tous les autres climats ; et c’est de la somme de ces deux chaleurs toujours réunies qu’est composée la chaleur locale de chaque région : les terres, sous l’équateur jusqu’aux deux tropiques, souffrent par ces deux causes un excès de chaleur qui influe non seulement sur la nature des animaux, des végétaux et de tous les êtres organisés, mais agit même sur les matières brutes, particulièrement sur la terre végétale qui est la couche la plus extérieure du globe ; aussi les diamants, rubis, topazes et saphirs ne se trouvent qu’à la surface ou à de très petites profondeurs dans le terrain de ces climats très chauds : il ne s’en rencontre dans aucune autre région de la terre. Le seul exemple contraire à cette exclusion générale est le saphir du Puy en Velay, qui est spécifiquement aussi et même un peu plus pesant que le saphir d’Orient[4] et qui prend, dit-on, un aussi beau poli ; mais j’ignore s’il n’a de même qu’une simple réfraction, et par conséquent si on doit l’admettre au rang des vraies pierres précieuses, dont la plus brillante propriété est de réfracter puissamment la lumière et d’en offrir les couleurs dans toute leur intensité : la double réfraction décolore les objets et diminue par conséquent plus ou moins cette intensité dans les couleurs, et dès lors toutes les matières transparentes qui donnent une double réfraction ne peuvent avoir autant d’éclat que les pierres précieuses dont la substance ainsi que la réfraction sont simples.

Car il faut distinguer, dans la lumière réfractée par les corps transparents, deux effets différents, celui de la réfraction et celui de la dispersion de cette lumière : ces deux effets ne suivent pas la même loi et paraissent même être en raison inverse l’un à l’autre ; car la plus petite réfraction se trouve accompagnée de la plus grande dispersion, tandis que la plus grande réfraction ne donne que la plus petite dispersion. Le jeu des couleurs qui provient de cette dispersion de la lumière est plus varié dans les stras, verres de plomb ou d’antimoine, que dans le diamant ; mais ces couleurs des stras n’ont que très peu d’intensité en comparaison de celles qui sont produites par la réfraction du diamant.

La puissance réfractive est beaucoup plus grande dans le diamant que dans aucun autre corps transparent : avec des prismes dont l’angle est de 20 degrés, la réfraction du verre blanc est d’environ 10 1/2 ; celle du flint-glass de 11 1/4 ; celle du cristal de roche n’est tout au plus que de 10 1/2 ; celle du spath d’Islande d’environ 11 1/2 ; celle du péridot de 11 ; tandis que la réfraction du saphir d’Orient est entre 14 et 15, et que celle du diamant est au moins de 30. M. l’abbé Rochon, qui a fait ces observations, présume que la réfraction du rubis et de la topaze d’Orient est aussi entre 14 et 15, comme celle du saphir ; mais il me semble que ces deux premières pierres ayant plus d’éclat que la dernière, on peut penser qu’elles ont aussi une réfraction plus forte et un peu moins éloignée de celle du diamant : cette grande force de réfraction produit la vivacité, ou pour mieux dire la forte intensité des couleurs dans le spectre du diamant, et c’est précisément parce que ces couleurs conservent toute leur intensité que leur dispersion est moindre. Le fait confirme ici la théorie, car il est aisé de s’assurer que la dispersion de la lumière est bien plus petite dans le diamant que dans aucune autre matière transparente.

Le diamant, les pierres précieuses et toutes les substances inflammables ont plus de puissance réfractive que les autres corps transparents, parce qu’elles ont plus d’affinité avec la lumière, et par la même raison il y a moins de dispersion dans leur réfraction, puisque leur plus grande affinité avec la lumière doit en réunir les rayons de plus près. Le verre d’antimoine peut ici nous servir d’exemple : sa réfraction n’est que d’environ 11 1/2, tandis que sa dispersion est encore plus grande que celle du stras ou d’aucune autre matière connue, en sorte qu’on pourrait égaler et peut-être surpasser le diamant, pour le jeu des couleurs, avec le verre d’antimoine ; mais ces couleurs ne seraient que des bluettes encore plus faibles que celles du stras ou verre de plomb, et d’ailleurs ce verre d’antimoine est trop tendre pour pouvoir conserver longtemps son poli.

Cette homogénéité dans la substance du diamant et des pierres précieuses, qui nous est démontrée par leur réfraction toujours simple, cette grande densité que nous leur connaissons par la comparaison de leurs poids spécifiques, enfin leur très grande dureté, qui nous est également démontrée par leur résistance au frottement de la lime, sont des propriétés essentielles qui nous présentent des caractères tirés de la nature, et qui sont bien plus certains que tous ceux par lesquels on a voulu désigner et distinguer ces pierres : ils nous indiquent leur essence et nous démontrent en même temps qu’elles ne peuvent provenir des matières vitreuses, calcaires ou métalliques, et qu’il ne reste que la terre végétale ou limoneuse dont le diamant et les vraies pierres précieuses aient pu tirer leur origine. Cette présomption très bien fondée acquerra le titre de vérité lorsqu’on réfléchira sur deux faits généraux, également certains : le premier, que ces pierres ne se trouvent que dans les climats les plus chauds, et que cet excès de chaleur est par conséquent nécessaire à leur formation ; le second, qu’on ne les rencontre qu’à la surface ou dans la première couche de la terre et dans le sable des rivières, où elles ne sont qu’en petites masses isolées et souvent recouvertes d’une terre limoneuse ou bolaire, mais jamais attachées aux rochers, comme le sont les cristaux des autres pierres vitreuses ou calcaires.

D’autres faits particuliers viendront à l’appui de ces faits généraux, et l’on ne pourra guère se refuser à croire que les diamants et autres pierres précieuses ne soient en effet des produits de la terre limoneuse, qui, conservant plus qu’aucune autre matière la substance du feu des corps organisés dont elle recueille les détriments, doit produire et produit réellement partout des concrétions combustibles et phosphoriques, telles que les pyrites, les spaths pesants, et peut par conséquent former des diamants également phosphoriques et combustibles dans les lieux où le feu fixe contenu dans cette terre est encore aidé par la plus grande chaleur du globe et du soleil.

Pour répondre d’avance aux objections qu’on pourrait faire contre cette opinion, nous conviendrons volontiers que ces saphirs trouvés au Puy en Velay, dont la densité est égale à celle du saphir d’Orient, semblent prouver qu’il se rencontre au moins quelqu’une des pierres que j’appelle précieuses dans les climats tempérés ; mais ne devons-nous pas en même temps observer que, quand il y a eu des volcans dans cette région tempérée, le terrain peut en être pendant longtemps aussi chaud que celui des régions du midi ? Le Velay, en particulier, est un terrain volcanisé, et je ne suis pas éloigné de penser qu’il peut se former dans ces terrains, par leur excès de chaleur, des pierres précieuses de la même qualité que celles qui se forment par le même excès de chaleur dans les climats voisins de l’équateur, pourvu néanmoins que cet excès dans les terrains volcanisés soit constant, ou du moins assez durable et assez uniformément soutenu pour donner le temps nécessaire à la formation de ces pierres : en général, leur dureté nous indique que leur formation exige beaucoup de temps, et les terres volcanisées ne conservant pas leur excès de chaleur pendant plusieurs siècles, il ne doit pas s’y former des diamants, qui de toutes les pierres sont les plus dures, tandis qu’il peut s’y former des pierres transparentes moins dures. Ce n’est donc que dans le cas très particulier où la terre végétale conserverait cet excès de chaleur pendant une longue suite de temps qu’elle pourrait produire ces stalactites précieuses dans un climat tempéré ou froid, et ce cas est infiniment rare et ne s’est jusqu’ici présenté qu’avec le saphir du Puy.

On pourra me faire une autre objection : d’après votre système, me dira-t-on, toutes les parties du globe ont joui de la même chaleur dont jouissent aujourd’hui les régions voisines de l’équateur ; il a donc dû se former des diamants et autres pierres précieuses dans toutes les régions de la terre, et l’on devrait y trouver quelques-unes de ces anciennes pierres qui, par leur essence, résistent aux injures de tous les éléments ; néanmoins on n’a nulle part, de temps immémorial, ni vu ni rencontré un seul diamant dans aucune des contrées froides ou tempérées : je réponds en convenant qu’il a dû se former en effet des diamants dans toutes les régions du globe lorsqu’elles jouissaient de la chaleur nécessaire à cette production ; mais, comme ils ne se trouvent que dans la première couche de la terre et jamais à de grandes profondeurs, il est plus probable que les diamants et les autres pierres précieuses ont été successivement recueillis par les hommes, de la même manière qu’ils ont recueilli les pépites d’or et d’argent, et même les blocs du cuivre primitif, lesquels ne se trouvent plus dans les pays habités, parce que toutes ces matières brillantes ou utiles ont été recherchées ou consommées par les anciens habitants de ces mêmes contrées.

Mais ces objections et les doutes qu’elles pourraient faire naître doivent également disparaître à la vue des faits et des raisons qui démontrent que les diamants, les rubis, topazes et saphirs ne se trouvent qu’entre les tropiques, dans la première et la plus chaude couche de la terre ; et que ces mêmes pierres étant d’une densité plus grande et d’une essence plus simple que toutes les autres pierres transparentes vitreuses ou calcaires, on ne peut leur donner d’autre origine, d’autre matrice que la terre limoneuse qui, rassemblant les débris des autres matières et n’étant principalement composée que du détriment des êtres organisés, a pu seule former des corps pleins de feu, tels que les pyrites, les spaths pesants, les diamants et autres concrétions phosphoriques, brillantes et précieuses ; et ce qui vient victorieusement à l’appui de cette vérité, c’est le fait bien avéré du phosphorisme et de la combustion du diamant. Toute matière combustible ne provient que des corps organisés ou de leurs détriments ; et dès lors, le diamant, qui s’imbibe de lumière et qu’on a été forcé de mettre au nombre des substances combustibles, ne peut provenir que de la terre végétale, qui seule contient les débris combustibles des corps organisés[NdÉ 2].

J’avoue que la terre végétale et limoneuse est encore plus impure et moins simple que les matières vitreuses, calcaires et métalliques ; j’avoue qu’elle est le réceptacle général et commun des poussières de l’air, de l’égout des eaux et de tous les détriments des métaux et des autres matières dont nous faisons usage ; mais le fonds principal qui constitue son essence n’est ni métallique, ni vitreux, ni calcaire, il est plutôt igné : c’est le résidu, ce sont les détriments des animaux et des végétaux dont sa substance est spécialement composée, elle contient plus de feu fixe qu’aucune autre matière. Les bitumes, les huiles, les graisses, toutes les parties des animaux et des végétaux qui se sont converties en tourbe, en charbon, en limon, sont combustibles parce qu’elles proviennent des corps organisés. Le diamant, qui de même est combustible, ne peut donc provenir que de cette même terre végétale d’abord animée de son propre feu, et ensuite aidée d’un surplus de chaleur qui n’existe actuellement que dans les terres de la zone torride.

Les diamants, le rubis, la topaze et le saphir sont les seules vraies pierres précieuses, puisque leur substance est parfaitement homogène, et qu’elles sont en même temps plus dures et plus denses que toutes les autres pierres transparentes : elles seules, par toutes ces qualités réunies, méritent cette dénomination ; elles ne peuvent provenir des matières vitreuses, et encore moins des substances calcaires ou métalliques, d’où l’on doit conclure par exclusion, et indépendamment de toutes nos preuves positives, qu’elles ne doivent leur origine qu’à la terre limoneuse, puisque toutes les autres matières n’ont pu les produire.


Notes de Buffon
  1. Les pesanteurs spécifiques du quartz sont de 26 546 ; du feldspath, de 26 466 ; du mica blanc, de 27 044, et la pesanteur spécifique du spath calcaire (cristal d’Islande) est de 27 151 ; et celle du spath perlé, de 28 378. Tables de M. Brisson.
  2. La pesanteur spécifique du spath phosphorique cubique blanc est de 31 555 ; celle du spath phosphorique cubique violet, de 31 757 ; du spath phosphorique d’Auvergne, de 30 943 ; et la pesanteur spécifique du schorl cristallisé est de 30 926 ; du schorl violet de Dauphiné, de 32 956. Idem, ibidem.
  3. Voyez les mêmes Tables de M. Brisson.
  4. La pesanteur spécifique du saphir d’Orient bleu est de 39 941 ; du saphir d’Orient blanc, de 39 911 ; et la pesanteur spécifique du saphir du Puy est de 40 769. Tables de M. Brisson.
Notes de l’éditeur
  1. La chaleur propre du globe n’exerce qu’une influence extrêmement minime ou nulle sur « la chaleur réelle de chaque climat ». Cette dernière est due à l’influence du soleil et à la disposition topographique de la région envisagée, disposition qui expose cette région à certains vents plutôt qu’à d’autres, à des courants atmosphériques, etc.
  2. Le diamant est du carbone pur ; quant à son origine, elle est aussi obscure que possible. [Note de Wikisource : On a aujourd’hui une vision assez complète de la formation du diamant ; disons tout net qu’elle ne correspond en rien à l’hypothèse de Buffon. Le diamant est formé dans le manteau terrestre, à plus de 150 km de profondeur, dans des veines où circulent des fluides carbonés, il y a plus de 2,5 milliards d’années. Ce ne sont que lorsque les diamants sont amenés à la surface très rapidement, c’est-à-dire très exceptionnellement, qu’ils atteignent la surface sans se convertir en graphite, seule forme du carbone pur stable à des profondeurs moindres, d’où leur rareté.]