Moi qui, même auprès des belles,
Voudrais vivre en passager,
Que je porte envie aux ailes
De l’oiseau vif et léger !
Combien d’espace il visite !
À voltiger tout l’invite :
L’air est doux, le ciel est beau.
Je volerais vite, vite, vite,
Si j’étais petit oiseau.
C’est alors que Philomèle
M’enseignant ses plus doux sons,
J’irais de la pastourelle
Accompagner les chansons.
Puis j’irais charmer l’ermite
Qui, sans vendre l’eau bénite,
Donne aux pauvres son manteau.
Je volerais vite, vite, vite,
Si j’étais petit oiseau.
Puis j’irais dans le bocage,
Où des buveurs en gaîté,
Attendris par mon ramage,
Ne boiraient qu’à la beauté.
Puis ma chanson favorite,
Aux guerriers qu’on déshérite
Ferait chérir le hameau.
Je volerais vite, vite, vite,
Si j’étais petit oiseau.
Puis j’irais sur les tourelles
Où sont de pauvres captifs,
En leur cachant bien mes ailes,
Former des accords plaintifs.
L’un sourit à ma visite ;
L’autre rêve, dans son gîte,
Aux champs où fut son berceau.
Je volerais vite, vite, vite,
Si j’étais petit oiseau.
Puis, voulant rendre sensible
Un roi qui fuirait l’ennui,
Sur un olivier paisible
J’irais chanter près de lui,
Puis j’irais jusqu’où s’abrite
Quelque famille proscrite,
Porter de l’arbre un rameau.
Je volerais vite, vite, vite,
Si j’étais petit oiseau.
Puis, jusques où naît l’aurore,
Vous, méchants, je vous fuirais,
À moins que l’Amour encore
Ne me surprît dans ses rets.
Que, sur un sein qu’il agite,
Ce chasseur que nul n’évite
Me dresse un piège nouveau,
J’y volerais vite, vite, vite,
Si j’étais petit oiseau.
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