1er siècle av. J.-C.
Traduction Leconte de Lisle, 1873
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IX. — À MÆCENAS.


Ce Cæcubium réservé pour les repas de fête, puisque Cæsar est victorieux et que cela plaît à Jupiter, quand le boirai-je avec toi, sous ta haute demeure, heureux Mæcenas, aux sons confondus de la lyre Dorienne et des flûtes Barbares ? Comme naguère, lorsque ce chef qu’on disait fils de Neptunus, ses nefs en flammes, s’enfuyait sur la mer, ayant menacé la Ville des chaînes dont il avait en ami délivré de perfides esclaves. Le soldat romain, hélas ! — temps futurs, vous le nierez ! — vendu à une femme, porte pour elle les palissades et les armes et peut servir sous des eunuques ridés ! Et, parmi les enseignes militaires, le soleil voit le honteux pavillon ! Deux mille cavaliers Galliques ont tourné bride, frémissant et criant : Cæsar ! Et les poupes des nefs ennemies, reculant vers l’Orient, se sont cachées dans le port. Io triomphe ! Où sont les chars dorés et les bœufs consacrés ? lo triomphe ! Tu n’as jamais ramené son égal, ni celui qui termina la guerre de Jugurtha, ni l’Africain qui a fondé sa tombe glorieuse sur Carthago. L’ennemi, vaincu par mer et par terre, a changé sa pourpre contre un sayon lugubre. Il gagne la noble Créta aux cent villes, avec des vents contraires, ou les Syrtes battues par le Notus, ou il est emporté au hasard sur la mer. Enfant, apporte de plus profondes coupes et des vins de Chios ou de Lesbos, ou mesure-nous le Cæcubium afin d’éviter les nausées. Il convient de dissiper par le doux Lyæus les soucis et la crainte éprouvés par Cæsar.