Épaves (Prudhomme)/L’Aurore

Pour les autres éditions de ce texte, voir L’Aurore.

ÉpavesAlphonse Lemerre. (p. 111).


L’AURORE


Le sommeil, enchaînant le mensonge et le crime,
Apaise l’air troublé ; l’homme dort, tout est pur.
Aïeule du Chaos, dans un repos sublime,
La Nuit plane et balance au-dessus de l’abîme
Le monde enveloppé de son suaire obscur.

« Te repens-tu ? dit-elle au Créateur qui rêve,
Le néant, c’est la fin ; parle et je lui rends tout. »
Sur la fange sanglante où fleurit encore Ève
Dieu se penche. Il se tait. Le Jour sauvé se lève,
Et, riant sous les pleurs, crie à l’homme : « Debout ! »


1870.