Serres chaudesPaul Lacomblez, Éditeur (p. 29-31).
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Âme

Mon âme !
Ô mon âme vraiment trop à l’abri !
Et ces troupeaux de mes désirs dans une serre !
Attendant une tempête sur les prairies !

Allons vers les plus malades !
Ils ont d’étranges exhalaisons.
Au milieu d’eux, je traverse un champ de bataille avec ma mère.

On enterre un frère d’armes à midi,
Tandis que les sentinelles prennent leur repas.

Allons aussi vers les plus faibles :
Ils ont d’étranges sueurs ;
Voici une fiancée malade,
Une trahison le dimanche
Et des petits enfants en prison.
(Et plus loin, à travers la vapeur,)
Est-ce une mourante à la porte d’une cuisine ?

Ou une sœur épluchant des légumes au pied du lit d’un incurable ?


Allons enfin vers les plus tristes :
(En dernier lieu, car ils ont des poisons.)
Oh ! mes lèvres acceptent les baisers d’un blessé !

Toutes les châtelaines sont mortes de faim, cet été, dans les tours de mon âme !

Voici le petit jour qui entre dans la fête !
J’entrevois des brebis le long des quais,
Et il y a une voile aux fenêtres de l’hôpital.

Il y a un long chemin de mon cœur à mon âme !
Et toutes les sentinelles sont mortes à leur poste !

Il y eut un jour une pauvre petite fête dans les faubourgs de mon âme !

On y fauchait la ciguë un dimanche matin ;

Et toutes les vierges du couvent regardaient passer les vaisseaux sur le canal, un jour de jeûne et de soleil.

Tandis que les cygnes souffraient sous un pont vénéneux ;
On émondait les arbres autour de la prison,
On apportait des remèdes une après-midi de Juin,
Et des repas de malades s’étendaient à tous les horizons !

Mon âme !

Et la tristesse de tout cela, mon âme ! et la tristesse de tout cela !