« Quand premier Hippolyte eut sur moy la victoire »

XL.


Quand premier Hippolyte eut sur moy la victoire,
Et que j’ouvry mes yeux au jour de sa beauté,
Je ne sçay qu’il m’advint : je fu si transporté
Que de moymesme, helas ! je perdi la memoire.

Mes sens estoyent ravis en l’amoureuse gloire,
Et mon œil esblouy de trop grande clarté,
Craignant ses chauds regards, s’abaissoit arresté
Sur son beau sein d’albatre, et sa gorge d’ivoire.

Je senti mal et bien, chaud et froid à l’instant :
J’esperai sans espoir, j’eu peur : j’osay pourtant,
Et parlay dans mon cœur mainte chose inconnuë.

Je le fortifiay pour les maux advenir :
Et, pour mieux y penser chassay le souvenir
De toute autre beauté que devant j’avois veuë.