Traité populaire d’agriculture/Ameublissement du sol

SECTION DEUXIÈME.

Ameublissement du sol.

L’ameublissement du sol, au moyen de certaines opérations mécaniques, n’est pas moins favorable à la végétation que l’entretien d’une humidité convenable.

Lors de la germination des graines, c’est la racine qui fournit la nourriture indispensable à la jeune plante. Pour mieux remplir cette destination, elle se ramifie et s’allonge pendant toute la durée de sa vie.

Il est donc important que le sol ne mette pas obstacle, par sa cohésion et son imperméabilité, à ce développement progressif.

D’un autre côté, les racines des plantes ne peuvent pas plus se passer du concours de l’air que leurs feuilles, et, sans la présence continuelle de ce fluide dans le sol, les engrais ne pourraient se décomposer et se convertir en substances nutritives.

L’ameublissement du sol augmente donc sa fertilité en facilitant l’allongement et les ramifications des racines, et la décomposition des engrais.

Les opérations mécaniques qui ameublissent les sols sont :

1oles labours ;

2ole hersage ;

3ole roulage ;

4ole binage ;

5ole buttage.

AMEUBLISSEMENT. Labours. Mode : à la main,
à la charrue.
Forme : à plat,
en planches,
en billons.
Profondeur : de défoncement,
profonds,
ordinaires,
superficiels.
Largeur.
Époque : état du terrain,
but spécial.
Hersage.
Roulage.
Binage.
Buttage.

I
DES LABOURS.

Le labour est la principale des opérations par lesquelles on amène le sol à cet état d’ameublissement qui convient à la germination des graines et à la végétation des plantes.

Le labour a de plus l’effet de détruire les plantes nuisibles, de mélanger le sous-sol avec le sol, d’enfouir les engrais et les amendements.

« L’effet des labours, dit Girardin, n’est pas seulement de déplacer latéralement la terre, de manière à en désunir les particules, et à lui permettre d’absorber l’air et les gaz fertilisants ; c’est encore de la remuer de telle sorte que les parties qui étaient placées au fond de la couche labourée soient ramenées à la surface, et celles de la surface replacées au fond. La couche superficielle, toujours plus fertile en raison de son exposition à l’air et de la décomposition, à sa surface, des matières organiques, se trouve ainsi mise en contact avec les racines des plantes et la couche inférieure, privée depuis quelque temps du contact de l’air, vient réparer les pertes qu’elle a éprouvées sous l’action absorbante des racines. »

Les labours peuvent être considérés sous plusieurs points de vue ; c’est ce que nous allons faire en en étudiant : 1o le mode ; 2o la forme ; 3o la profondeur ; 4o la largeur ; 5o l’époque.

1oMode.

On fait les labours avec différents instruments connus sous les noms de bêche, fourche, houe, charrue. De là, deux sortes de labour : le labour à la main, qui s’effectue à l’aide des trois premiers instruments, et le labour à la charrue.

a]Labour à la main. — Il est employé dans le jardinage et la petite culture.

De tous les moyens employés pour ameublir le sol, le labour à la bêche est celui qui remplit le plus parfaitement les conditions que nous venons d’exposer.

Le labour à la fourche est presqu’aussi parfait que celui de la bêche et s’exécute de la même manière.

Le labour à la houe (pic, pioche, gratte) n’a pas la même perfection que celui de la bêche ou de la fourche. La terre n’est pas retournée, elle n’est que déplacée.

Dans le labour à la houe, l’ouvrier avance continuellement sur la partie du sol qu’il vient de labourer, et va par conséquent en avant, tandis que c’est le contraire pour le labour à la bêche et à la fourche.

b]Labour à la charrue. — La charrue agit sur le sol en séparant et en détachant une bande de terre parallèle à la superficie, en la tranchant à la fois verticalement et horizontalement. Elle prend cette bande de terre à sa gauche, la retourne sur son propre axe, la renverse à droite de manière qu’elle soit à la portée de la herse qui doit la pulvériser.

Ce triple effet de trancher la terre dans les deux sens et de renverser cette tranche s’obtient simultanément au moyen du coutre, du soc et de l’oreille, les trois parties constitutives de toute charrue.

Un mot sur la charrue.

Il y a trois espèces de charrue : la charrue simple, la charrue composée et la charrue polysoc.

La charrue simple porte le nom d’araire.

Elle se compose des parties suivantes :

1ole coutre, espèce de couteau adapté en avant du soc, à l’age de la charrue, destiné à fendre la terre et à couper les racines ;

2ole soc, la partie principale de la charrue, sépare horizontalement la tranche de terre que le coutre a déjà coupée verticalement. Le soc est composé de deux parties, l’aile qui est sa partie tranchante et la douille qui sert à le fixer au corps de la charrue ;

3ole sep, base de la charrue, glissant au fond du sillon en s’appuyant contre la terre non labourée ;

4ole versoir ou oreille, partie caractéristique de la charrue, servant à verser, en la retournant, la tranche de terre coupée par le soc et le coutre ;

5ol’age, appelé aussi perche, forte pièce en bois, en fer ou en fonte, un peu aplatie sur les côtés et servant à transmettre le tirage au corps de la charrue ;

6oles étançons, supports en bois ou en fer, unissant le sep à l’age ;

7oles mancherons, pièces de bois à l’aide desquelles le laboureur engage sa charrue dans le sol et l’empêche de dévier de sa ligne régulière ;

8oenfin, le régulateur, placé à l’extrémité de l’age, destiné à faire varier, suivant les besoins, le degré de profondeur du labour et la largeur des bandes de terre.

La charrue composée est connue sous le nom de charrue à avant-train ; c’est la charrue à rouelle qui règne encore en certains endroits.

L’avant-train est une pièce accessoire ordinairement représentée par deux roues qui se meuvent autour d’un essieu sur lequel repose l’extrémité de l’age et où sont attachées les bêtes de trait.

Toutes les charrues qui marchent avec un avant-train sont des charrues composées.

Pour donner aux charrues à avant-train plus de disposition à entrer en terre, on abaisse l’age sur son point d’appui, ce qui se pratique à l’aide des trous dont il est percé vers sa partie moyenne ; on produit l’effet contraire en élevant l’age.

Le régulateur de l’araire est donc supprimé dans la charrue à avant-train.

Les charrues polysocs, comme l’indique leur nom, contiennent plusieurs socs ; du même trait de charrue, il y a deux, trois ou quatre bandes de terre de retournées suivant qu’il y a deux, trois ou quatre socs attachés à la charrue et autant de versoirs.

Les charrues polysocs n’ont pas encore atteint toute la perfection désirable ; il en est une cependant qui fonctionne très bien, c’est la charrue bisocle anglaise, ainsi appelée parce qu’elle a deux socs. Elle est maintenant introduite dans le pays. Il faut trois chevaux pour l’utiliser : dans les terrains faciles, on peut quelquefois s’en servir avec deux chevaux seulement.

Quelle qu’elle soit, la charrue doit réunir les conditions suivantes :

1oconstruction simple, composée des seules pièces nécessaires ;

2osoc plat et tranchant ;

3ooreille disposée de manière qu’elle nettoie parfaitement le fond de la raie, et qu’elle donne une tranche de terre convenablement épaisse et la plus étroite possible ;

4otirage peu considérable ;

5oenfin, qu’elle obéisse avec précision à celui qui la conduit.

2oForme du labour.

Il y a trois espèces de labour sous le rapport de la forme qu’on peut lui donner : le labour à plat, le labour en planches, le labour en billons.

a]Labour à plat. — C’est celui où la surface d’un champ a été labourée de manière à être laissée parfaitement unie et non coupée de sillons ou de raies d’écoulement.

Ces labours s’exécutent ordinairement à l’aide d’une charrue tourne-oreille, c’est-à-dire, dont le versoir se change de côté à l’extrémité de chaque raie, en sorte que la charrue, revenant constamment dans la même raie, jette toujours la tranche de terre du même côté de l’horizon, en la versant alternativement à droite et à gauche du laboureur.

Lorsque la pièce est achevée, il ne reste aucune raie ouverte, si ce n’est la dernière par laquelle la charrue a terminé son travail.

Ce labour est le plus facile ; il se donne en travers, dans tous les sens, et remue ainsi le sol plus complètement que tout autre. Mais, pour le pratiquer, il faut avoir recours à des charrues spéciales, qui le plus souvent sont loin d’avoir la perfection que peut atteindre un instrument construit pour verser la terre d’un seul côté.

Ce labour convient très bien, néanmoins, aux terrains en pente qu’il faut labourer perpendiculairement à la pente, dans lesquels alors la bande de terre n’est jamais retournée avec perfection par les charrues ordinaires lorsqu’on la jette du côté du haut.

b]Labour en planches. — Une terre est labourée en planches lorsque, de distance en distance, on a ménagé, parallèlement entre elles, des raies d’égouttement, pour recevoir et conduire hors du champ les eaux surabondantes.

Le terrain se trouve donc alors divisé en planches qui ont toute la longueur de la pièce et une largeur variant de six à trente pieds.

Chaque planche se laboure à part par un labour fendu ou endossé.

On dit qu’on fend une planche, lorsque le laboureur ouvre d’abord les deux raies ou sillons extérieurs en se tournant de manière à jeter la terre en dehors de la planche.

C’est ce que nos cultivateurs appellent labourer à dia, parce que, arrivés au bout d’une raie, ils tournent toujours à gauche pour prendre la raie suivante.

Pour endosser on commence le labour par la ligne du milieu de la planche, c’est-à-dire en jetant la terre, en allant et en revenant, dans la raie laissée ouverte par un labour antérieur et qui se trouve comblée de cette façon. On continue de labourer ainsi en jetant la bande de terre du côté du milieu de la planche, jusqu’à ce qu’on soit arrivé aux deux côtés où se trouvent alors les raies qui restent ouvertes.

Nos cultivateurs donnent à ce genre de labour le nom de labour à hue, parce que, arrivés au bout d’une raie, ils tournent toujours à droite pour prendre la raie suivante.

Le labour en planches laisse le terrain presqu’à plat, le centre de chaque planche devenant l’emplacement de la raie d’égouttement au labour suivant.

Ce mode de labour convient à toutes les récoltes et à tous les sols. On peut, par cette disposition, donner aux raies d’égouttement la direction la plus propre à évacuer les eaux et les multiplier partout où le besoin s’en fait sentir.

Toutefois, si l’on avait affaire à un sol très argileux ou très humide, un léger bombement donné aux planches, loin d’être nuisible, serait utile en ce qu’il donnerait au sol la facilité de se ressuyer plus vite, circonstance fort importante quand les travaux pressent dans une exploitation d’une certaine étendue.

Ouvrir les premières raies d’une planche s’appelle enrayer, et on donne le nom de raie de bout à une raie transversale à la planche, tirée par la charrue, avant le labour, aux deux bouts d’une pièce.

La raie de bout forme ainsi une ligne droite sur laquelle la charrue doit piquer en commençant chaque raie au sortir de terre en la terminant.

Il est très important de tirer des raies de bout ; sans cette précaution, les raies de la planche sont toujours de longueur inégale, ce qui fait un travail très irrégulier et occasionne ensuite ce que, dans la pratique, on appelle des manques, lorsqu’il est question de labourer cette partie du champ sur laquelle ont tourné les chevaux en quittant une raie pour en prendre une autre et à laquelle on donne le nom de tournière.

La tournière que la raie de bout doit séparer distinctement de l’extrémité des planches, est généralement désignée sous le nom d’about ou ceintre.

La raie d’égouttement qui sépare deux planches se trouve naturellement fort large, puisqu’elle est formée par l’espace qu’occupaient les deux dernières tranches que l’on a jetées dehors en allant et revenant. Si on laisse les choses en cet état, comme cela arrive généralement, on perd un large espace qui ne donnera rien à la récolte et le fond du labour ne s’égouttera pas.

Pour remédier à ces défauts on termine le labour par une raie que l’on tire aussi profonde que possible, et qui, occupant la moitié de la largeur de la double raie restée ouverte, rejette la terre que l’on en tire sur l’autre moitié de cette largeur. De cette manière, au lieu de la double raie large et plate qui existait, on a une raie étroite et profonde qui égoutte bien mieux la planche, tout en lui laissant une plus grande surface productive.

La longueur des planches n’est pas toujours indifférente : plus elle est considérable, plus aussi les chevaux peuvent faire de labour dans le même espace de temps, pour la bonne raison qu’ils auront à tourner moins souvent. Dans les terres fortes et caillouteuses les planches doivent être moins longues que dans les terres légères. Dans les terrains en pente très inclinée, des raies trop longues seraient nuisibles, parce que l’eau provenant des averses ou de la fonte des neiges, emporterait facilement la meilleure partie de la terre végétale.

Quant à la largeur des planches, il est admis, en pratique, qu’elle doit être plus grande dans les terrains secs et légers, plus petite dans les terres fortes et humides. Dans ces derniers sols, les planches peuvent avoir, à moins de cas exceptionnels, une largeur variant de douze à dix-huit pieds.

c]Labours en billons. — Lorsque les raies d’égouttement sont très rapprochées les unes des autres et que la planche comprise entre deux raies, au lieu d’être plate, comme dans le second mode de labour, est plus ou moins bombée, on dit que le champ est labouré en billons.

L’usage des billons ne se justifie qu’autant que la couche arable a très peu d’épaisseur et repose sur un sous-sol de mauvaise nature.

Il est certain, en effet, qu’en ouvrant des raies très-rapprochées pour jeter entre elles la terre qu’on en tire, on accumule la terre végétale sur une partie de la surface du champ et qu’on obtient, ainsi, des produits qu’on n’aurait pas sans cette forme de labour.

Cet avantage est contrebalancé par de nombreux inconvénients.

Les plantes souffrent davantage des variations de la température ; elles ne jouissent pas également des influences du soleil sur les côtés du billon ; la végétation prospère au sommet pourvu d’une couche de terre suffisante et languit sur les épaules du billon qui en sont dégarnies ; l’engrais, inégalement réparti, tend à s’accumuler au fond des raies ; la semence, s’y distribuant mal, ne peut être enterrée uniformément ; le sarclage et le buttage ne peuvent s’y effectuer qu’à la main ; le travail de la faux et de la faucheuse y éprouve d’autant plus de difficultés que les billons sont plus relevés ; par des temps pluvieux, les récoltes sont plus exposées à être avariées ; enfin la multiplicité des raies qui séparent chaque billon entraîne une perte de terrain considérable, sans profit aucun pour l’assainissement du sol.

Par suite des graves inconvénients qu’ils présentent, les labours en billon ne doivent être employés qu’exceptionnellement. Il vaut toujours mieux adopter le labour en planches.

3oProfondeur du labour.

Elle se mesure dans la raie ouverte par la charrue, au bord de la terre que l’instrument n’a pas attaquée.

Considérés au point de vue de leur profondeur, les labours à la charrue peuvent être divisés en quatre sortes : les labours de défoncement, les labours profonds, les labours ordinaires, les labours superficiels.

Diverses considérations déterminent la profondeur du labour.

Tout labour doit répondre aux exigences des plantes que l’on cultive.

Certaines plantes n’étendent leurs racines qu’à la superficie du sol et dans une direction horizontale, — les céréales ; d’autres sont munies de racines pivotantes et s’enfoncent verticalement à une grande profondeur, — carottes, betteraves, etc.

La profondeur du labour varie donc nécessairement suivant les différentes espèces de végétaux que l’on veut cultiver.

Elle varie aussi suivant la constitution du sol ; la couche arable, trop superficielle, reposant sur un sous-sol ingrat, ne doit pas être remuée au delà de son épaisseur ; mais si le sous-sol est de bonne qualité, si la couche arable est épaisse, la profondeur du labour peut être utilement augmentée, cette augmentation devenant quelquefois une impérieuse nécessité.

a]Labours de défoncement. — On nomme ainsi :

1oles labours qui ramènent à la surface une partie de la couche du sous-sol ;

2oles labours destinés à ameublir une partie du sous-sol, sans la ramener à la surface.

Avant de pratiquer un labour de défoncement, il faut s’assurer de la nature du sous-sol, afin de juger si, mélangé avec la couche superficielle, il n’en viciera pas la composition.

Cet examen indiquera si on doit ramener une partie du sous-sol à la surface ou se contenter de l’ameublir sans la déplacer.

Lorsque l’on veut ramener une partie du sous-sol à la surface par un labour de défoncement, on peut le faire en employant l’un des deux procédés suivants :

1oramener peu à peu à la surface une portion du sous-sol, en n’attaquant à chaque labour de défoncement qu’une couche de terre très mince ;

2odescendre tout d’un coup à une grande profondeur dans le sol, le défoncer dans toute la force du terme.

Le premier procédé est le plus généralement employé : nous allons en comprendre la raison.

La terre qu’un labour de défoncement ramène à la surface est toujours plus ou moins stérile, ayant été, jusque-là, privée des influences atmosphériques.

Si le sous-sol est d’excellente nature, il suffira de l’exposer, pendant quelque temps, aux principes fécondants de l’air, pour lui communiquer une partie des qualités de la couche arable.

Si, au contraire, ce qui a généralement lieu, le sous-sol est d’une nature inférieure, il est alors indispensable de fortifier l’action de l’atmosphère par une application d’engrais ; faute de ce secours, le sol serait appauvri.

Comme il n’est pas toujours facile de donner à un tel labour de défoncement tout l’engrais qui lui convient, et il lui en faut beaucoup, on n’opère le défoncement que d’une manière progressive. Ainsi, par un premier labour on n’entamera qu’un pouce du sous-sol. Trois ou quatre ans plus tard on approfondira encore d’un pouce, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on ait donné au sol cultivé, à la couche arable, une profondeur convenable, variant entre douze et dix-huit pouces.

Le défoncement du sol, suivant le second procédé que nous avons indiqué, peut avoir lieu de deux manières : en faisant passer deux charrues, l’une après l’autre, dans la même raie, ou bien en faisant suivre la charrue par des hommes armés de bêches, qui approfondissent le terrain avec cet outil.

Il n’est pas toujours nécessaire, dans un labour de défoncement, d’amener une partie du sous-sol à la surface ; il est souvent même préférable, quand on n’est pas riche en fumier, nécessaire quelquefois, lorsque le sous-sol est de mauvaise qualité, d’ameublir les couches inférieures au lieu de les mélanger avec la terre arable.

Cette opération s’effectue en faisant suivre la charrue ordinaire, par une deuxième charrue sans versoir, munie d’un soc convexe, appelée charrue sous-sol, charrue fouilleuse, qui fouille le terrain sans le retourner.

On obtient par ce moyen une amélioration notable.

L’ameublissement du sous-sol permet en effet à l’eau de descendre plus avant, aux engrais de s’y infiltrer, aux plantes d’y enfoncer leurs racines.

b]Labours profonds. — On nomme labours profonds ceux dont la profondeur est de huit à dix pouces.

L’avantage de ces labours consiste principalement en ce que les plantes trouvent à puiser leur nourriture dans une masse de terre plus considérable.

Le sol labouré profondément peut supporter sans inconvénient une plus grande quantité d’engrais que celui qui ne reçoit qu’un labour superficiel ; dans ce dernier, les principes fertilisants du fumier n’étant mélangés qu’à une petite masse de terre, sont fournis aux plantes trop promptement, ce qui donne lieu à une végétation trop active et occasionne les céréales à verser.

Les labours profonds, de même que les labours de défoncement, tendent essentiellement à prévenir les accidents qui résultent, pour les récoltes, soit des sécheresses, soit de l’excès des pluies.

En effet, une grande quantité d’eau détrempera en totalité une couche de trois ou quatre pouces de terre et ne tardera pas à refluer à la surface et à convertir tout le terrain en boue ; tandis que si la même quantité d’eau eût eu à détremper une masse double de terre, elle n’eût produit qu’une humidité favorable à la végétation.

D’un autre côté, cette humidité qui a pénétré à sept, huit ou dix pouces de profondeur, sera bien plus difficilement ensuite absorbée par le soleil et par les vents desséchants, que celle qui imprègne les couches superficielles du sol.

Règle générale, pour conserver ses qualités, la couche arable doit être remuée de temps en temps dans toute son épaisseur et exposée à l’influence de l’air. Elle finirait par perdre ses avantages si on se contentait de lui donner des labours superficiels. En effet, l’action réitérée du sep lisse le fond de la raie à la même profondeur et le corroye de manière à le rendre compact et à fermer aux couches inférieures toute communication avec l’atmosphère. Il se forme, ainsi, un sous-sol artificiel qui bientôt prend tous les caractères d’un véritable sous-sol.

c]Labours ordinaires. — Les labours ordinaires ne dépassent pas la couche de terre annuellement cultivée ; ils ont de cinq à sept et huit pouces de profondeur.

Cette profondeur varie, est plus ou moins considérable, suivant la nature des plantes pour lesquelles on prépare le terrain et la tendance qu’ont leurs racines de s’enfoncer plus ou moins profondément.

Pratiqués l’automne, les labours demandent une augmentation de profondeur et cette profondeur varie aussi suivant qu’on laboure du chaume de grain, du chaume de foin ou du friche. Sous le même volume, la terre, dans ces différents états, ne contient pas la même quantité de matière ; on la lui donne en augmentant, suivant le besoin, la profondeur du labour.

On doit aussi avoir égard au but que l’on se propose en labourant. S’il s’agit d’enterrer les engrais, le labour devra présenter une profondeur telle, que ces engrais ne soient pas placés hors de la portée des racines.

d]Labours superficiels. — On donne ce nom aux labours qui ne pénètrent qu’à la profondeur de trois ou quatre pouces.

On en fait généralement usage pour détruire et enterrer les plantes nuisibles sur un champ en jachère ; pour enfouir des engrais pulvérulents, enfin, pour recouvrir les semences sous raies.

C’est par un labour superficiel que l’on enterre les pois et les pommes de terre lorsqu’on les sème sous raies.

4oLargeur du labour.

On entend ici par largeur du labour, la largeur de la bande de terre enlevée et retournée par la charrue.

Cette largeur dépend généralement du degré de profondeur du labour.

Deux exigences du labour déterminent le rapport qui doit exister entre la profondeur et la largeur.

La tranche de terre doit être renversée, en effet, de manière :

1oà offrir le plus de prise possible à l’action pulvérisante de la herse ;

2oà ce que les plantes nuisibles de sa surface se trouvent dans une position favorable à leur décomposition.

Pour remplir cette double condition, la tranche de terre doit être inclinée sur un angle de 45 degrés.

Si la tranche est plus épaisse que large, dans la proportion de 12 à 6, par exemple, elle sera inclinée, mais non suffisamment retournée et le gazon restera à la surface. Si, au contraire, elle est plus large qu’épaisse, dans la proportion, par exemple, de [illisible] sur 5, elle sera complètement retournée, retombera à plat dans le sillon et offrira très peu de prise à la herse.

C’est entre ces deux limites que se trouve la proportion convenable et la pratique a démontré que pour donner à la tranche de terre le degré d’inclinaison convenable, il faut que sa largeur soit à son épaisseur comme 3 est à 2 ; c’est-à-dire que si la tranche offre une épaisseur de six pouces, elle doit présenter une largeur de neuf pouces.

Cette proportion s’applique aux labours ordinaires et aux labours superficiels, mais lorsqu’il s’agit de labours profonds ou de labours de défoncement faits d’un seul trait de charrue, on se contente d’une largeur d’un quart plus considérable que l’épaisseur.

5oÉpoque des labours.

Le moment le plus favorable pour labourer dépend de l’état du terrain et du but qu’on se propose.

a]État du terrain. — On ne doit commencer les labours que lorsque le sol n’est ni trop sec, ni trop humide, c’est-à-dire, lorsqu’il n’est ni trop tenace, ni trop dur ; autrement, l’exécution du labour est très difficile à effectuer, quelquefois même impossible.

Lorsque le terrain est trop sec, le sol argileux, au lieu de se diviser en tranches égales, se déchire en mottes de diverses grosseurs ; le sol sableux, par le revirement d’une tranche de terre dont la surface serait desséchée, serait lui-même entièrement privé de son humidité.

Dans un terrain humide, les bandes de terre deviennent très adhérentes ; elles se durcissent en séchant et ne se divisent plus qu’en mottes qu’il est difficile de briser ; en outre, les semences des mauvaises herbes s’y conservent jusqu’à ce que l’ameublissement ultérieur du sol leur permette de lever.

b]But spécial du labour. — Pour parvenir aux différents buts que l’on peut avoir spécialement en vue dans la confection d’un labour, on a, relativement aux temps où ils se pratiquent, trois espèces de labours : les labours du printemps, les labours d’été et les labours d’automne.

A-t-on principalement en vue l’ameublissement d’un sol humide et compact, c’est aux labours d’automne qu’il faut recourir. La gelée vient alors en aide aux cultivateurs ; elle pulvérise le sol aussi bien, mieux même, que le meilleur des instruments, et le laisse, au printemps, dans un état d’ameublissement parfait.

Est-ce la destruction des mauvaises herbes qu’il s’agit d’obtenir par les labours, le moment le plus favorable au labour variera suivant le genre des mauvaises herbes que l’on a à combattre.

Les mauvaises herbes sont de deux sortes principales : les unes, annuelles ou bisannuelles, se reproduisent par leurs graines. Les autres sont vivaces et se propagent surtout par leurs racines.

Les semences des mauvaises herbes annuelles lèvent facilement dans un sol quelque peu ameubli par la herse ; on les détruit, en les culbutant par un labour lorsqu’elles sont en végétation, mais avant leur floraison.

En donnant après l’enlèvement de la récolte un bon hersage, on facilite la germination immédiate des mauvaises graines qui recouvrent le champ. Le labour d’automne qui arrive au moment où ces plantes sont en pleine végétation, complète l’opération du déchaumage et détruit du coup une foule de mauvaises herbes qui auraient poussé l’année suivante en même temps que le bon grain.

Les mauvaises herbes vivaces qui se multiplient surtout par leurs racines, ne peuvent être détruites par les même moyens. C’est en brisant fréquemment leurs jeunes pousses et en exposant leurs racines au soleil, qu’on parvient à les extirper.

Il faut ici des labours d’été, labours superficiels, donnés par des temps de sécheresse et qu’on fait suivre du hersage lorsque les racines des plantes sont bien desséchées.

Ces labours d’été sont le fondement de la jachère.

On entend par jachère nue la série des préparations qu’on fait subir à la terre, laissée alors improductive, pour la disposer à avoir des récoltes.

La demi-jachère consiste dans les façons répétées données au sol, entre la récolte et l’ensemencement au printemps suivant, dans le but de détruire les mauvaises herbes et de mieux ameublir la terre.

Le principe dominant dans la jachère est de ne point permettre aux mauvaises herbes de se multiplier, c’est leur destruction même qu’on cherche à obtenir.

Le nombre de labours qu’on doit donner dépend de leur exécution et varie suivant que la température favorise plus ou moins le nettoiement du sol et son ameublissement.

II
DU HERSAGE.

Le hersage doit être regardé, après le labour, comme l’opération la plus importante dans la culture du sol.

L’instrument dont on se sert pour exécuter cette opération s’appelle herse. On emploie aussi le scarificateur.

La herse se compose en général d’un châssis en bois, horizontal et pourvu en dessous de dents en bois ou en fer plus ou moins inclinées en avant et qui sont tantôt cylindriques, tantôt prismatiques, tantôt tranchantes comme le coutre de la charrue. Cet instrument est traîné sur la terre à l’aide d’un ou de plusieurs chevaux.

Une herse doit être construite d’après les principes suivants :

1oses dents doivent être espacées de manière à ne pas laisser la terre s’amasser dans leur intervalle ;

2oelles doivent être également distantes les unes des autres ;

3ochacune d’elles doit faire sa raie particulière.

Inclinées en avant, les dents agissent avec plus d’énergie que lorsqu’elles sont placées perpendiculairement.

Avec une herse dont les dents sont ainsi inclinées en avant, on peut exécuter deux hersages différents. Quand on veut tasser et ameublir le sol sans ramener les mottes à la surface, on fait un hersage arrière-dents, c’est-à-dire qu’on attelle les bêtes de trait à l’arrière de la herse ; l’inclinaison des dents se trouve par là même changée, celles-ci n’ont plus la même tendance à s’enfoncer dans le sol. Ce hersage, beaucoup moins énergique que le hersage à pleines dents, qui se pratique les dents inclinées en avant, produit un excellent effet sur les prairies et sur le grain qui lève lorsque l’on veut détruire la mousse ou les mauvaises herbes.

Les herses peuvent être de formes différentes ; les plus communément employées sont les herses triangulaires et les quadrangulaires.

Les herses de même forme présentent ordinairement divers degrés de force : il y a la grande et la petite herse.

Le hersage a trois effets différents :

1oil pulvérise et ameublit la terre qui vient d’être labourée ;

2oil enlève, après un labour, les racines traçantes des plantes vivaces ;

3oil enterre les semences à une profondeur convenable.

Pour pulvériser la terre, on herse tantôt en long, c’est-à-dire sur le sens de la longueur des planches, tantôt en travers ; quelquefois on donne un hersage croisé, qui consiste à herser d’abord en long, puis en travers et enfin en long, comme la première fois.

Les circonstances indiquent lequel de ces procédés il faut employer.

On se sert aussi du hersage pour purger le sol des racines traçantes détachées par le labour. Le mode le plus convenable est alors le hersage en rond.

Quand il s’agit de recouvrir, d’enterrer la semence, le hersage doit être plus ou moins profond, plus ou moins répété, suivant le plus ou moins de grosseur des graines.

Le moment le plus convenable d’exécuter le hersage est celui où les mottes commencent d’elles-mêmes à tomber en poudre, ce qui arrive ordinairement lorsqu’une bonne pluie succède à une longue sécheresse.

L’usage ordinaire est de herser immédiatement après le labour parce que les mottes se trouvent alors dans un état à pouvoir être brisées avec facilité.

Lorsque le terrain est trop humide ou trop sec, le hersage ne peut être effectué que très imparfaitement. Dans le premier cas, la herse est traînée sur le sol et les mauvaises herbes, loin d’être arrachées, sont encore favorisées dans leur accroissement ; dans l’autre cas, il est impossible de briser les mottes.

Dans le sol argileux il faut savoir saisir le moment où la terre se laisse facilement attaquer par la herse. Ce moment arrivé, si la température est favorable, tous les autres travaux doivent céder le pas au hersage ; vingt-quatre heures de retard ne permettent plus parfois de mettre la herse dans le champ et l’on se voit forcé de renvoyer l’opération à une époque incertaine.

Le labour en billons demande pour être hersé des instruments particuliers ; des herses courbes ou à double courbure sont employées à cet effet.

Un instrument qui remplace avantageusement la herse, surtout dans la destruction des mauvaises herbes, c’est le scarificateur, il est indispensable aux terres difficiles qui ne cèdent pas à l’action de la herse. (Voir la description du scarificateur à la page 82.)

III
DU ROULAGE.

Le roulage consiste à faire passer sur les terres fraîchement labourées ou ensemencées, un rouleau ou cylindre pesant, en bois, en pierre ou en fer, dans le but, soit de briser les mottes qui ont résisté à l’action de la herse, soit de plomber (tasser) le terrain.

On fait usage du rouleau dans les cas suivants :

1osur les terres meubles, légères, pour y effacer les mauvais effets des labours trop réitérés. Il plombe les terres de cette nature sans trop les durcir, et empêche par là l’évaporation trop prompte de l’humidité ;

2oon se sert du rouleau pour raffermir les plantes des semailles et leur donner plus d’adhérence avec le sol ;

3opour presser contre le sol les touffes d’herbe que la gelée soulève dans certaines prairies ;

4opour presser contre la terre les graines fines, qui demandent à être enterrées très peu profondément.

C’est surtout aux terres fortes que convient très bien le rouleau, pour briser les mottes qui ont échappé à l’action de la herse. Mais il est nécessaire que cette opération soit faite par un temps suffisamment sec ; car si la terre est humide, elle s’attache au rouleau ou bien les mottes ne sont qu’aplaties ; l’opération est alors plus nuisible qu’utile.

Il y a des rouleaux de dimensions et de formes différentes.

Le rouleau a d’autant plus d’action que sa pression s’exerce sur une moindre surface du sol, en d’autres termes, qu’il a moins de longueur et que son diamètre est plus grand. Un rouleau en bois de cinq à six pieds de longueur sur trois pieds de diamètre fonctionne mieux que les rouleaux longs et étroits dont on se sert communément.

Le rouleau a encore d’autant plus d’action que toute sa surface appuie sur la terre partout, quelles que soient d’ailleurs les inégalités du terrain.

Les rouleaux ordinaires, faits d’un seul morceau, ne remplissent pas cette condition importante. On devra leur préférer les rouleaux brisés, faits en plusieurs morceaux, composé de deux, trois, quatre fragments de cylindre, ayant un essieu unique, mobile, qui traverse des lumières très larges. Dans ces conditions, chaque partie, obéissant aux inégalités du terrain, s’élève ou s’abaisse ; on atteint par là même toutes les parties du sol.

Indépendamment de ces précieux avantages, quand le rouleau tourne au bout du champ, chaque partie étant indépendante de sa voisine, peut rouler isolément, dans un sens ou dans l’autre ; la terre alors ne se trouve pas creusée, comme cela arrive avec les rouleaux d’un seul morceau.

En plaçant, en arrière du rouleau, à deux pouces de sa surface, une barre rigide qu’on fixe dans le cadre-châssis du support, on a cette pièce importante du rouleau connue sous le nom de décrottoir.

Si le sol est un peu humide, la terre s’attache facilement au rouleau ; le décrottoir fait tomber la terre adhérente. S’il arrive que le décrottoir empêche la marche du rouleau, parce que la terre s’attache en trop grande quantité, il n’y a plus alors qu’à dételer ; l’opération du roulage est contre-indiquée mécaniquement par ce seul fait.

Les rouleaux offrent le plus souvent une surface unie, ce qui rend parfois leur action insuffisante dans les sols compacts, surpris par la sécheresse, après le labour. On les remplace alors, avec avantage, par des rouleaux dont la surface est armée de dents ou de disques. Ces rouleaux portent le nom spécial de brise-mottes. Il y a aussi des brise-mottes qui ont la forme de herses.

IV
DU BINAGE.

Le principal but du binage est de rompre, de pulvériser, jusqu’à la profondeur de deux ou trois pouces, la croûte qui se forme à la surface des terrains abandonnés à eux-mêmes.

La terre, ainsi remuée à sa surface, devient plus pénétrable à l’air, à la pluie, à la rosée, dont les influences se font d’abord sentir jusqu’aux racines des plantes.

Le binage a aussi pour effets :

1od’empêcher l’action de la sécheresse sur le sol, en interposant entre les rayons solaires et le milieu où végètent les plantes une couche de terre plus meuble, trop meuble pour pouvoir, en vertu de la capillarité, réparer, aux dépens de la couche inférieure, la perte d’humidité éprouvée par le desséchement ;

2ode détruire les plantes nuisibles.

Il ne faut pas confondre le binage avec le sarclage.

Le sarclage ne consiste que dans l’arrachage des plantes, à la main, sans façon donnée à la terre. Le binage, au contraire, en même temps qu’il détruit les plantes nuisibles, donne à la terre un léger labour superficiel et s’exécute avec des instruments à la main ou mus par des chevaux.

Le binage est soumis aux règles suivantes :

1oLe binage ne saurait avoir lieu quand la terre, déjà trop durcie par la sécheresse, se soulève et se casse en mottes, ni quand, trop humectée, elle se retourne en masse compacte ; il faut attendre l’époque où une partie de l’humidité étant déjà absorbée ou évaporée, la terre en conserve encore cependant assez pour s’émietter facilement.

2oUne petite pluie légère rend souvent le binage plus facile, mais elle a l’inconvénient de faciliter la repousse de quelques mauvaises herbes laissées sur le terrain, tandis que par un temps de sécheresse, toute plante attaquée par le binage périt infailliblement.

3oLe binage par un temps de grande sécheresse peut cependant être nuisible dans les terres légères et sablonneuses, en ce qu’il occasionne une déperdition plus abondante de l’humidité de la terre.

4oLorsqu’on donne plusieurs binages, les derniers doivent être plus profonds que les premiers.

5oLe binage se donne dès que la terre commence à durcir.

Le binage est usité soit pour les terres chargées de récoltes, soit pour les sols nus ou en jachère.

Dans le premier cas, on fait usage d’instruments à la main, de la bineuse et de la houe à cheval ; dans le second cas, on se sert de l’extirpateur, du scarificateur.

Lorsque l’on veut biner une terre chargée de récoltes, l’instrument employé diffère suivant que la terre porte des récoltes-racines ou des céréales semées en ligne.

Si la terre porte des récoltes-racines, pommes de terre, betteraves, etc., les lignes sont plus espacées, les raies plus larges, l’instrument par conséquent peut être plus grossier. On se sert, dans ce cas, de la houe à cheval qui bine le terrain compris entre les lignes, et ensuite de la houe à main pour biner dans la ligne même des plantes.

La houe à cheval se compose d’un châssis triangulaire, pourvu en dessous de dents se terminant en soc et en lames. Le soc principal, de forme triangulaire allongée, est placé sur la ligne centrale de l’instrument au sommet même du triangle ; chacune des deux lignes qui partent du sommet du triangle, qui en forment les côtés et auxquelles on donne le nom de branches latérales, est armée, elle aussi, de socs et de lames courbées horizontalement. Ces branches peuvent être éloignées ou rapprochées à volonté, selon l’écartement entre les lignes des plantes. Ce châssis triangulaire est fixé par son sommet à un age à l’extrémité antérieure duquel est adaptée une petite roue ou une semelle qu’on élève ou abaisse, à volonté, suivant le degré d’entrure qu’on fait prendre à la houe.

Inutile de faire une description de la houe à main qui termine le travail commencé par la houe à cheval. C’est l’instrument vulgairement appelé gratte.

Si la terre que l’on veut biner porte des céréales semées en lignes, l’opération devient alors plus délicate et exige pour sa confection un instrument différemment construit.

Ce nouvel instrument porte le nom spécial de bineuse.

Si le sol que l’on veut biner ne porte pas de récoltes au moment du binage, on emploie alors l’extirpateur ou le scarificateur.

L’extirpateur est un instrument armé de plusieurs socs qui coupe entre deux terres les plantes qu’il y rencontre et remue le sol à une certaine profondeur, mais sans le retourner.

Le scarificateur diffère de l’extirpateur en ce que ses pieds, de formes variées, au lieu de couper la terre horizontalement, la déchirent et la divisent verticalement à la manière des dents de la herse ou du coutre de la charrue. C’est un instrument très énergique.

Si l’on chausse les pieds du scarificateur des socs de l’extirpateur, on a un nouvel instrument, connu sous le nom de cultivateur, dont le travail produit à lui seul les effets séparément obtenus par l’usage et de l’extirpateur et du scarificateur.

V
DU BUTTAGE.

Le buttage, généralement connu ici sous le nom de re(n)chaussage, consiste à amasser une certaine quantité de terre au pied des plantes, de manière à enterrer la base de leurs tiges.

Le buttage produit les effets suivants :

1oil augmente la fertilité du sol ;

2oil détruit les plantes nuisibles ;

3oil agit enfin directement sur la végétation, soit en entretenant plus de fraîcheur autour des racines, soit en apportant aux plantes une terre nouvelle dans laquelle la partie fraîchement enterrée de leurs tiges émet des racines, soit, enfin, en fortifiant la tige elle-même contre les coups de vent.

Pour que le buttage produise de bons effets, il doit être pratiqué au moment où la terre a été récemment ameublie par un binage.

Le buttage des plantes dont on veut augmenter ainsi directement les produits, se donne lorsque les récoltes n’ont encore atteint que le tiers de leur développement.

Dans la petite culture, le buttage se fait à main, au moyen de la bêche, de la houe, etc. Dans la grande culture, on remplace ces instruments par le buttoir.

C’est une espèce de charrue à deux versoirs mobiles, pouvant s’écarter ou se rapprocher à volonté. Le buttoir trace des sillons, rejetant la terre des deux côtés, de sorte qu’en passant successivement entre les lignes des plantes, on amoncelle la terre contre leurs tiges.

Pour que le buttage soit parfait, la terre doit être relevée des deux côtés de l’ados, de manière à ne faire qu’une seule arête à son sommet, sur laquelle les tiges des plantes se trouvent ainsi placées. On obtient ce résultat en ouvrant plus ou moins les versoirs de l’instrument.

Si l’on donne plusieurs buttages, le premier doit être moins énergique que le second ; ce dernier se donne huit ou dix jours après le premier.