Coups de clairon/Du Guesclin/Ses Larmes

Coups de Clairon : Chants et Poèmes héroïques
Georges Ondet, Éditeur (p. 207-211).


Les Larmesxxxxxxxx
xxxxxxxxde Du Guesclin















LES LARMES DE DU GUESCLIN


Poésie lue par l’auteur à Saint-Brieuc, le 23 juillet 1899, lors des assises littéraires de la Société La Pomme, au pied de la statue du héros breton.


Bonjour, Pays ! Salut, grand Homme !
Je m’en viens troubler ton long somme
Pour te dire que, ces temps-ci,
J’ai rêvé que le Vent qui passe
T’apportait, à travers l’Espace,
L’appel désolé que voici :

« Écoute ! c’est moi, la Patrie,
C’est moi, la France, qui te crie :
À moi, Guesclin ! À moi, Guesclin !
Viens ! Ô le plus brave des Êtres !
Viens me venger encor des traîtres
Qui rêvent encore mon déclin !

« Entends mes plaintes, vois mes larmes !
S’il te faut des compagnons d’armes,
Réveille tous les Endormis !
Viens revivre ton Épopée !
Que l’éclair de ta grande Épée
Fasse trembler mes Ennemis


« À l’Est, au Nord, toujours je veille :
Voici que l’Anglais se réveille,
Plus arrogant sinon plus fort !
Le Léopard est en maraude :
Autour de moi toujours il rôde,
Prêt à me déchirer encor !

« Viens ! Il faudra que tu besognes,
Que tu disputes, que tu cognes,
Si tu veux être encor vainqueur !
Viens ! car les Grandes Compagnies
M’ont couverte d’ignominies
Et vont me ronger jusqu’au cœur !!!
..............

Alors, j’ai vu sous ta paupière,
Ô Bertrand ! des larmes de pierre
Qui s’en venaient de ton cœur mort,
Des larmes de rage impuissante
Qui de ta lèvre frémissante
Tombaient sur la Terre d’Armor…

Et, de chaque larme tombée,
Surgissait du sol une Épée,
La garde en bas, la pointe en l’air :
Et, pareil au blé quand il lève,
Chaque glaive frôlait un glaive
Et chacun lançait un éclair !


Puis je voyais, en longues bandes,
Nos gâs accourant par les landes,
Le fermier près du châtelain ;
Et chacun cueillait une Épée
Fière et solide… étant trempée
Dans les larmes de Du Guesclin !

Pleure encor ! Pleure avec la France,
Puisque chaque pleur de souffrance
Fait éclore un glaive puissant…
… Mais ceux qui causent vos alarmes
Paieront, au centuple, vos larmes
Avec des larmes de leur sang !

Oui ! près de la France, regarde :
C’est nous tous qui montons la garde,
Bretons ! prêts à la secourir !
Car nous la roulons Grande et Belle !…
Un Français doit vivre pour Elle
Pour Elle un Breton doit mourir !!!