Zaïre/Avertissement de l’auteur

Œuvres complètes de VoltaireGarniertome 2 - Théâtre (1) (p. 555).

AVERTISSEMENT
(DE L’AUTEUR[1])

On a imprimé Français par un a, et on en usera ainsi dans la nouvelle édition de la Henriade. Il faut en tout se conformer à l’usage, et écrire autant qu’on peut comme on prononce ; il serait ridicule de dire en vers : les François et les Anglois, puisqu’en prose tout le monde prononce Français. Il n’est pas même à croire que jamais cette dure prononciation, François, revienne à la mode. Tous les peuples adoucissent insensiblement la prononciation de leur langue. Nous ne disons plus la Roine, mais la Reine. Août se prononce Oût, etc. On dira toujours Gaulois et Français, parce que l’idée d’une nation grossière inspire naturellement un son plus dur, et que l’idée d’une nation plus polie communique à la voix un son plus doux. Les Italiens en sont venus jusqu’à retrancher l’h absolument. Chez les Anglais, la moitié des consonnes qui remplissaient leurs mots, et qui les rendaient trop durs, ne se prononcent plus. En un mot, tout ce qui contribue à rendre une langue plus douce sans affectation doit être admis.


  1. Cet Avertissement ne se trouve que dans l’édition de 1736. (B.)