Louis Joubin, Histoire de la Faculté des Sciences de Rennes

1900

PRÉFACE


En m’attribuant l’honneur, non désiré, de reconstituer l’histoire de notre Faculté des Sciences, je crois que mes collègues ne soupçonnaient pas la charge qu’ils m’imposaient, pas plus qu’en l’acceptant je ne me rendais compte de la somme de travail qu’elle représentait.

J’aurais pu, il est vrai, me borner à rappeler quelques faits précis, à marquer succinctement les diverses étapes parcourues par la Faculté dans son développement matériel et scientifique, additionner les nombreux bacheliers qu’elle a faits ; mais j’ai pensé que cette façon de procéder n’aurait présenté aucun intérêt, ni général, ni local, et j’ai préféré retracer les circonstances qui ont occasionné, accompagné ou suivi les principaux événements de notre petite histoire. Il m’a paru aussi qu’il était bon de faire ressortir l’influence qu’ont pu avoir sur notre évolution certaines personnalités scientifiques ou politiques, soit qu’elles aient appartenu à notre Faculté, soit qu’elles aient simplement figuré parmi les nombreux amis qu’elle a toujours comptés à Rennes.

J’ai aussi voulu montrer dans ce travail, par des faits et des documents, ce que peut faire pour son Université une Ville dont les ressources sont plutôt restreintes, mais dont les Municipalités successives ont toutes su ce qu’elles voulaient, l’ont voulu avec persistance, avec persévérance, et n’ont jamais songé à dire : notre œuvre est achevée, il n’y a plus rien à faire. Elles n’ont pas hésité à s’imposer les plus lourds sacrifices pour faire prospérer nos établissements d’enseignement supérieur, et je considère comme un devoir d’exprimer ici la reconnaissance de la Faculté des Sciences envers la Ville de Rennes ; si nous existons, c’est autant aux pouvoirs publics que nous le devons, qu’à l’intelligence éclairée et à la sollicitude invariable de nos édiles.

J’ai puisé la plupart des documents qui m’ont permis de reconstituer les faits principaux de cette histoire aux Archives municipales qui m’ont été ouvertes avec la plus grande complaisance par le savant bibliothécaire de la Ville, M. Le Hir ; qu’il veuille bien agréer l’expression de ma gratitude.

Malgré tous mes efforts, mon travail reste incomplet ; on y constatera de regrettables lacunes ; bien des documents dont il ne reste que des traces insuffisantes, ont disparu ; plusieurs points, fort curieux, n’ont pu être complètement élucidés ; j’espère que, malgré ces imperfections, ceux qui s’intéressent aux choses de notre Université, et ils sont nombreux à Rennes, liront sans ennui la courte Notice consacrée à notre jeune Faculté des Sciences ; c’est une page, et non la moins mouvementée, de l’histoire intellectuelle de cette Ville libérale et généreuse qui revendique, à bon droit, le vieux titre, dont elle reste toujours digne, de Capitale de la Bretagne.


L. Joubin.

CHAPITRE PREMIER
Création de la Faculté.



I. — Préliminaires.



Le Décret du 17 mars 1808 qui organisait l’Université impériale, avait spécifié les conditions que les villes devaient remplir pour être pourvues d’une Faculté des Sciences.

L’article 4 est ainsi conçu : L’Université Impériale sera composée d’autant d’Académies qu’il y a de Cours d’appel.

Rennes satisfaisait à cette première condition.

L’article 13 est ainsi conçu : Il sera établi prés de chaque Lycée chef-lieu d’une Académie, une Faculté des Sciences.

Il résulte de ces deux textes que la Faculté des Sciences de Rennes se trouvait virtuellement créée le 17 mars 1808. C’est, en quelque sorte, son acte de naissance.

Un second décret, en date du 17 septembre 1808, portant règlement de l’Université, détermine