Albert Glatigny, Théâtre de Lunéville : Prologue d’ouverture 1863


THÉÂTRE DE LUNÉVILLE

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REPRÉSENTATIONS DE LA TROUPE

DU THÉÂTRE DE NANCY
Direction de M. Émile MARCK
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À

MESDAMES ET MESSIEURS
LES
ABONNÉS ET HABITUÉS
DU THÉÂTRE DE LUNÉVILLE


THÉÂTRE DE LUNÉVILLE

PROLOGUE D’OUVERTURE
Dit le 5 Octobre 1863
Par Mlle  JEANNE FAVRE.
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Nous arrivons, Messieurs, avec notre bagage
D’amour et de jeunesse, et, dans notre langage,
Modulé savamment sur un rhythme amoureux,
Prêts à vous raconter les belles aventures
De ceux dont le Mystère et les choses futures
Tentent le cœur aventureux.
Chacun, suivant notre manière,
Nous vous dirons notre chanson
Demandée à chaque buisson
Gazouillant près de nous dans la grande lumière !
Divertir les honnêtes gens
Ainsi que le voulait Molière,
Tel est le but, Messieurs, de nos soins diligents !
Vous pourrez, avec nous, quand viendra la soirée,
Assister à ces jeux où la Muse effarée,
Rit aux éclats, ou bien vient se percer le flanc
Au dernier acte avec un poignard en fer blanc,
Et voir se préciser les visions du rêve
Derrière ce rideau qu’un machiniste enlève ;
Vous rafraîchir, enfin, dans les clairs horizons
Que nous cachent les murs de ces noires prisons
Dont l’éternel labeur est le geôlier ; revivre
Dans ce monde idéal où toute âme s’enivre
Et noie, en souriant, ses déboires défunts,
Dans la musique, dans les chants et les parfums !

Ainsi, venez, Messieurs, la maison est ouverte,
Entrez, et nous ferons pour vous la forêt verte ;
Belles, les pieds cachés dans les gazons naissants,
Vous entendrez le chœur des filles de seize ans,
Et Luna passera sa tête par les branches
Pour baigner de lueurs tendres leurs formes blanches !

Dans l’air empli de frissons,
Mille divines chansons
Trempent l’azur de leurs ailes
Et, riant aux claires eaux,
À travers les grands roseaux,
Glissent, vertes demoiselles !

Les victimes dont le cœur
Exhale un chant de langueur,
Ici, vous les verrez toutes,
Et, près d’elles, ces bouffons