Ls.-A. Proulx (p. 219-224).

LE MANOIR DE LA GRANDE-ANSE OU SAINT ROCH-DES-AULNAIES



L E 1er  avril 1656, le gouverneur de Lauzon concédait à Nicolas Juchereau, écuyer, sieur de Saint-Denys, trois lieues de terre de front sur le fleuve Saint-Laurent, du côté du sud, au lieu appelé par les Sauvages Kamouraska, sur deux lieues de profondeur. C’est la seigneurie de la Grande-Anse ou de Saint-Roch-des-Aulnaies.

Cette seigneurie resta la propriété de la famille Juchereau Duchesnay pendant plus de cent soixante-quinze ans. À la mort de l’honorable Jean-Baptiste Juchereau Duchesnay, décédé sans enfants le 12 janvier 1833, la seigneurie de la Grande-Anse ou des Aulnaies fut achetée par l’honorable Amable Dionne (1833-1837).

L’honorable M. Dionne légua la seigneurie de la Grande-Anse ou de Saint-Roch-des-Aulnaies à son fils, Pascal-Amable Dionne.

Le manoir de Saint-Roch-des-Aulnaies fut bâti sur les plans de l’architecte Baillairgé et le seigneur Dionne en prit possession en 1853.

Mgr Henri Têtu écrivait en 1898 :

« Le manoir de Saint-Roch-des-Aulnaies est admirablement situé à l’écart, sur une éminence, et le nouveau seigneur en fit comme un paradis terrestre. Il y planta à grands frais des arbres de toutes sortes, en particulier des arbres fruitiers dont il entendait à merveille la culture.

« Une petite rivière, formant cascade à cent pieds du château, fut mise à contribution. Elle faisait bien déjà tourner le moulin situé entre contre-bas : c’était là l’utile ; mais le seigneur Dionne cherchait toujours l’agréable. Une faible partie du courant fut détournée et vint s’étendre en nappe limpide dans le vaste bassin creusé pour elle au milieu du jardin. L’utile — je veux dire le moulin — était aussi la propriété de M. Dionne. Pendant longtemps, il avait été confié, ainsi que le domaine, à la charge de M. Étienne Etchenback, époux de Geneviève Perrault.

Le manoir de la Grande-Anse ou Saint-Roch-des-Aulnaies

« Jeune, riche, intelligent et instruit, marié à une femme accomplie et sachant faire les honneurs de son manoir, devenu le père de charmants enfants qui embellissaient et vivifiaient cette demeure déjà si belle, il semble qu’il n’aurait rien manqué au bonheur du seigneur des Aulnaies, si le vrai bonheur pouvait se trouver sur la terre.

« M. Dionne n’eut pas une carrière bien longue, car il mourut à quarante-trois ans. Attaqué de phtisie, il mena pendant plusieurs mois, la vie pénible et languissante de tous ceux qui souffrent de cette maladie. Soigné avec la tendresse intelligente de son épouse et de ses bien-aimés enfants, protégé et soutenu par les prières incessantes de sa pieuse mère, il put dire adieu sans trop de regrets aux biens périssables de ce monde, et se préparer, par la réception des sacrements de l’Église, à la jouissance des biens impérissables de l’autre vie. Son décès arriva le 16 septembre 1870, et ses restes furent inhumés dans les caveaux de l’église de Saint-Roch-des-Aulnaies »[1].

Le 2 février 1894, M. Arthur Miville Dechêne, plus tard l’honorable sénateur Dechêne, se rendait acquéreur de la seigneurie et du manoir de Saint-Roch-des-Aulnaies.

Par son testament reçu par le notaire Dupont le 14 mars 1901, le sénateur Dechêne légua sa seigneurie et son manoir à son fils, M. Arthur Miville Dechêne.

La maison Miville Dechêne à Saint-Roch-des-Aulnaies

Cette maison, dit-on, remonte au régime français. L’épaisseur des murs est de trois pieds et demi. Il est de tradition dans la famille Dechêne que dans l’été de 1759 les Anglais tentèrent d’incendier cette maison, mais qu’elle fut sauvée par la prompte intervention des habitants cachés dans les bois voisins.

Le moulin banal de Saint-Roch-des-Aulnaies

Ce moulin si bien conservé fut construit par le chevalier Jean-Baptiste Juchereau Duchesnay, seigneur de Saint-Roch-des-Aulnaies. Le seigneur Dionne l’exhaussa d’un étage et lui donna sa forme actuelle.

La maison Joseph Letourneau à Saint-Roch-des-Aulnaies
Cette maison plus vaste que bon nombre de couvents de campagne a près de cent ans d’existence.
  1. Histoire des familles Têtu, Bonenfant, Dionne et Perreault, p. 554.