Vies des peintres, sculpteurs et architectes/tome 7/Niccolo Soggi


NICCOLÒ SOGGI,

PEINTRE FLORENTIN,


Des nombreux élèves de Pietro Perugino, aucun, à l’exception de Raphaël d’Urbin, ne fut plus studieux et plus diligent que Niccolo Soggi. Cet artiste naquit à Florence. Son père, Jacopo Soggi, homme de bien, mais fort peu riche, possédait un petit domaine à Marciano, près de l’habitation du cardinal Antonio di Monte. Ce voisinage établit entre eux des relations dont Niccolò profita plus tard à Rome pour entrer au service de ce puissant prélat.

Jacopo Soggi, ayant vu que son fils avait de grandes dispositions pour la peinture, le confia aux soins de Pietro Perugino. En peu de temps, grâce à une application assidue, le jeune élève fit de tels progrès, que son maître ne tarda pas à se servir de lui dans ses travaux.

Niccolo s’appliqua avec succès à la perspective et ne se montra pas moins habile à dessiner d’après nature. Malheureusement, l’habitude qu’il prit de peindre d’après des maquettes, qu’il modelait en cire ou en terre et qu’il drapait avec du parchemin mouillé, lui donna une manière si sèche, qu’il ne put jamais s’en débarrasser, malgré tous ses efforts. Le premier tableau de Niccolò, après la mort de son maître Pietro, fut une Annonciation qu’il peignit à l’huile derrière l’autel de l’hôpital des femmes de Bonifazio Lupi, dans la via San-Gallo. Cette composition renferme un édifice en perspective qui rappelle le genre du Perugino.

L’an 1512, Niccolò, après avoir fait pour divers citoyens quantité de Madones et d’autres petits ouvrages, se rendit à Rome avec l’espoir d’y accroître son talent et sa fortune. À peine arrivé, il alla visiter le cardinal di Monte, qui l’accueillit gracieusement. Il en reçut l’ordre de représenter à fresque sur la façade du palais, du côté de la statue de Maestro Pasquino, les Armes du pape Léon X, entre celles du peuple romain et celles du cardinal lui-même. Niccolò ne répondit pas en cette occasion à ce que l’on attendait de lui. Les figures nues et drapées dont il accompagna les armoiries réussirent mal, et lui montrèrent que l’emploi des maquettes est parfois nuisible. Pour réparer sa faute, il peignit à l’huile avec un soin extrême une sainte Praxède, martyre, pressant dans un vase une éponge pleine de sang. Ce tableau, l’une des meilleures productions de notre artiste, fut exécuté pour le cardinal di Monte, qui le plaça sur un autel de l’église de Santa-Prassedia. Niccolò fit ensuite, au milieu d’un beau paysage, une Madone avec l’Enfant Jésus à son cou et le petit saint Jean à ses côtés. Cet ouvrage est d’un fini si précieux, qu’on le prendrait plutôt pour une miniature que pour une peinture à l’huile. Il resta longtemps à Rome, dans la chambre du cardinal di Monte, qui plus tard, en reconnaissance de la généreuse hospitalité qu’il trouva à Santa-Fiore d’Arezzo, le donna à la sacristie de cette abbaye où on le voit encore aujourd’hui (1).

Niccolò avait suivi son protecteur à Arezzo. Cette ville devint le lieu de son séjour habituel. Il s’y lia avec Domenico Pecori qui peignait alors, pour la confrérie de la Trinità, une Circoncision du Christ. Dans ce tableau, Niccolò mit en perspective, à la prière de son nouvel ami, un beau temple à colonnes surmontées d’un plafond à rosaces, suivant la mode de cette époque. Pour le même artiste, Niccolò figura une masse de peuple en adoration devant la Vierge, sur un baldaquin qui appartenait à la confrérie d’Arezzo et qui fut brûlé à San-Francesco, pendant la célébration d’une fête, comme nous le racontons dans la vie de Domenico Pecori (2).

Niccolò eut ensuite à décorer la seconde chapelle que l’on rencontre en entrant à droite dans l’église de San-Francesco. Il y représenta la Vierge, saint Jean-Baptiste, saint Bernard, saint Antoine, saint François, trois anges et un Père éternel. Presque toutes ces figures s’écaillèrent complètement, parce que Niccolò avait essayé de les exécuter en détrempe. Il reconnut tout le désavantage de cette méthode, et saisit avec empressement la première occasion qui s’offrit à lui d’aborder la fresque, dont il comprit la supériorité sur tous les autres procédés. Un certain Scamarra l’ayant chargé de décorer une chapelle de Sant’-Agostino, il y peignit donc à fresque la Vierge planant dans les airs, au-dessus du peuple d’Arezzo, de saint Donato et de saint François agenouillés. Le meilleur morceau qu’il laissa dans cet endroit est un saint Roch placé au haut de la chapelle.

Cet ouvrage engagea Domenico Ricciardi à commander à Niccolò un tableau pour une chapelle de l’église de la Madonna-delle-Lagrime. Notre artiste lui fit une Nativité du Christ digne des plus grands éloges. Les moindres détails sont traités avec un soin incroyable. Près de la cabane où sont l’Enfant Jésus et la Vierge, on voit un édifice en ruines parfaitement mis en perspective. Sous les traits de saint Joseph et de divers pasteurs, on reconnaît plusieurs personnages de l’époque, parmi lesquels nous citerons le peintre Stagio Sassoli (3), ami de Niccolò, et son élève Papino dalla Pieve, qui serait allé loin dans son art s’il n’eùt été frappé par une mort prématurée. Trois anges d’un fini merveilleux, qui attestent le talent et la patience de Niccolò, complètent cette composition.

Aussitôt après avoir achevé ce travail, notre artiste retraça, pour la confrérie de Santa-Maria-della-Neve, de Monte-Sansovino, l’événement miraculeux de la neige qui tomba le 6 août à Santa-Maria-Maggiore de Rome, et en mémoire duquel ce temple fut bâti. Niccolò s’acquitta de sa tâche avec beaucoup de soin et fit ensuite, à Marciano, une fresque qui fut très-admirée.

L’an 1524, Antonio, frère de Giuliano da San-Gallo, voulant donner un témoignage de son amitié à Niccolò qu’il avait connu autrefois chez le cardinal di Monte, entreprit de lui faire confier l’exécution d’un tableau destiné à un tabernacle en marbre qu’il venait de sculpter lui-même à la Madonna-delle-Carceri, pour Messer Baldo Magini. Antonio présenta donc Niccolò à Messer Baldo, qui céda à ses prières, bien qu’il eût déjà songé à Andrea del Sarto, comme nous l’avons dit ailleurs (4). Niccolò se mit aussitôt à l’œuvre et ne négligea rien pour se distinguer ; mais ses efforts furent infructueux, car son tableau est dépourvu de toute espèce de qualités. Ses maquettes en terre et en cire l’amenaient presque toujours à des résultats d’une lourdeur et d’une dureté désespérantes. Cependant il était impossible de travailler plus consciencieusement que lui ; et comme il savait que personne[1]… jamais il ne put pendant nombre d’années se persuader qu’aucun autre peintre lui fût supérieur. Son tableau renferme le Père éternel qui envoie quelques anges porter à la Madone la couronne de la virginité et de l’humilité. Plusieurs de ces anges jouent de divers instruments. Niccolò introduisit dans cette composition Messer Baldo, que l’on voit agenouillé aux pieds de saint Ubaldo, évêque. De l’autre côté est saint Joseph. Entre ces deux saints se trouve cette image de la Vierge, qui a opéré des miracles en cet endroit.

Niccolò représenta ensuite d’après nature, dans un tableau de trois brasses de hauteur, Messer Baldo Magini debout et tenant en main le modèle de l’église de San-Fabiano de Prato. Ce portrait, l’un des meilleurs que notre artiste ait produits, fut placé par les chanoines dans la sacristie de San-Fabiano, en mémoire des bienfaits dont Messer Baldo combla cette église, rendue si célèbre par la ceinture de la Vierge que l’on y conserve.

Quelques personnes attribuent encore à Niccolò un petit tableau qui contient une foule de portraits d’après nature, et que possède la confrérie de San-Pier-Martino, sur la place de San-Domenico de Prato ; mais, en admettant que cette peinture soit réellement de Niccolò, elle est, selon moi du moins, bien antérieure à toutes celles dont nous avons parlé jusqu’ici.

Après avoir achevé ces travaux, Niccolò se rendit à Florence, abandonnant Prato, où il avait enseigné les principes de son art à Domenico Giuntalocchi. Ce jeune homme, originaire de Prato, était doué d’un beau génie ; mais le style de son maître, qu’il adopta, l’empêcha de faire de grands progrès en peinture, comme nous le dirons ailleurs.

À Florence, Niccolò, voyant que les entreprises importantes se donnaient aux maîtres les plus habiles et que son talent était loin de ressembler à celui d’Andrea del Sarto, du Pontormo et du Rosso, prit le parti de retourner à Arezzo, où il avait plus d’amis, plus de crédit et moins de concurrents. Aussitôt arrivé à Arezzo, il alla trouver l’un des plus notables citoyens, Messer Giuliano Bacci, et il lui témoigna le désir d’être chargé d’un ouvrage de longue haleine qui lui permît de prouver son talent à la ville d’Arezzo, qu’il voulait adopter pour patrie. Messer Giuliano accueillit favorablement sa demande, et opéra de façon qu’il détermina les chefs de la confrérie de la Nunziata à confier à son protégé la décoration d’une partie d’une voûte qu’ils venaient de construire dans leur église. Le reste de la voûte devait lui être alloué, si son premier travail recevait l’approbation de la confrérie. Niccolò se mit à l’œuvre avec ardeur, mais il ne lui fallut pas moins de deux ans pour conduire à fin la moitié de sa tâche. Il avait choisi pour sujet l’Empereur Octavien adorant le Christ et la Vierge que lui montre la sibylle Tiburtine. Sous la figure d’Octavien, il peignit Messer Giuliano Bacci, et sous celle d’un grand jeune homme vêtu de rouge, son élève Domenico. Les têtes de plusieurs autres personnages sont les portraits de divers de ses amis.

En somme, cette fresque ne déplut ni à la confrérie ni aux Arétins, et, malgré sa lenteur déplorable, il n’aurait assurément pas manqué d’obtenir le reste de l’entreprise, s’il n’eût été supplanté par le Rosso, peintre florentin d’un rare mérite, fortement appuyé par Giovan-Antonio Lappoli et par Messer Giovanni Pollastra (5). Niccolò en fut tellement irrité, que, sans sa femme qu’il avait épousée l’année précédente, et qui venait de lui donner un fils, il aurait immédiatement quitté Arezzo. Il s’apaisa cependant, à la fin, et peignit pour l’église de Sargiano, à deux milles d’Arezzo, une Vierge portée au ciel par des anges et jetant sa ceinture à saint Thomas, autour duquel se tiennent saint François, saint Louis, saint Jean-Baptiste et sainte Élisabeth, reine de Hongrie. Plusieurs de ces figures sont dignes d’éloges ; on peut en dire autant des petits sujets qui couvrent le gradin.

Niccolò fit encore à Sargiano, dans le couvent des Murate, un Christ mort avec les Maries, qui, pour une fresque, est très-bien exécuté. Derrière le Crucifix du maître-autel de l’abbaye de Santa-Fiore, il peignit à l’huile le Christ priant dans le Jardin des Oliviers, et l’ange qui le console en lui montrant le calice. Ce tableau est véritablement beau et bon. Au-dessus de la porte d’entrée du monastère des religieuses de San-Benedetto d’Arezzo, Niccolò représenta la Vierge, saint Benoît et sainte Catherine. Cette peinture fut détruite lorsque l’on voulut agrandir l’église.

Notre artiste habitait souvent Marciano, où il vivait en partie des revenus du domaine qu’il possédait dans ce village, et en partie de ce qu’il gagnait. Il y commença un Christ mort et plusieurs autres ouvrages. Il avait alors près de lui Domenico Giuntalocchi de Prato, qu’il aimait comme son propre fils et auquel il enseigna la perspective et le dessin avec une sollicitude extrême. Il espérait que ce jeune homme, en récompense de tant de soins et d’affection, lui serait un aide dans sa vieillesse. Du reste, Niccolò offrit toujours avec empressement ses services et ses conseils à tous ceux qui pouvaient les réclamer.

Lorsque Giuntalocchi se sépara de Niccolò, celui-ci revint de Marciano à Arezzo au moment où la confrérie del Corpo di Cristo avait besoin d’un tableau pour le maître-autel de l’église de San-Domenico. Ce travail était vivement désiré par Vasari, alors fort jeune, et par Niccolò. Ce dernier tint en cette occasion une conduite qu’aucun artiste d’aujourd’hui peut-être ne serait disposé à imiter. Niccolò, par sa position de membre de la confrérie del Corpo di Cristo, avait la certitude de l’emporter sur Vasari ; mais, poussé par un noble désintéressement, il sacrifia ses propres intérêts à ceux de son concurrent, auquel il fit allouer le tableau, en voyant de quelle utilité un semblable travail pouvait être à ce jeune débutant.

Pendant ce temps, Domenico Giuntalocchi, étant allé à Rome, eut assez de bonheur pour se mettre en relation avec l’ambassadeur du roi de Portugal, Don Martino, qui se fit peindre par lui sur une grande toile au milieu d’une vingtaine de ses amis. Ce tableau plut tellement à Don Martino, qu’il regardait Domenico comme le premier peintre du monde.

Sur ces entrefaites. Don Ferrante Gonzaga, vice-roi de Sicile, voulant fortifier plusieurs points de ce royaume, écrivit à Don Martino de chercher et de lui envoyer le plus tôt possible un jeune dessinateur capable de retracer sur le papier tous les projets qu’il avait en tête. Don Martino expédia d’abord à Don Ferrante quelques dessins de la main de Domenico, parmi lesquels on remarquait un Colysée qui a été gravé sur acier par Girolamo de Bologne, pour Antonio Salamanca ; un Vieillard traîné dans un char, qui a été également gravé avec cette inscription : ANCORA IMPARO, et enfin le portrait de Don Martino lui-même. Ces dessins ayant plu à Don Ferrante, Domenico se rendit immédiatement en Sicile. Dès qu’il fut arrivé, le vice-roi lui assigna un traitement honorable et mit à ses ordres un cheval et un domestique. Bientôt après, Domenico fut employé aux fortifications du pays, et il abandonna peu à peu la peinture pour des occupations infiniment plus lucratives. Il entreprit de faire charrier du sable, de la chaux, et différents matériaux de construction, et, à ce métier, il réalisa promptement de si beaux bénéfices, qu’il put acheter, à Rome, pour deux mille écus, des offices auxquels il ne tarda pas à en joindre plusieurs autres. Peu de temps après, il fut nommé grand-maître de la garde-robe de Don Ferrante. Ce seigneur ayant ensuite changé son gouvernement de Sicile pour celui de Milan, Domenico l’y suivit, et, de nouveau, opéra si bien dans les fortifications de cet État, qu’il y gagna une immense fortune. De plus, il acquit un tel crédit, que l’on ne faisait presque rien sans lui.

En apprenant ces choses, Niccolò, qui était déjà parvenu à un âge assez avancé, et qui, faute de toute espèce de travail, vivait dans le besoin, à Arezzo, alla trouver Domenico à Milan, pensant que l’élève dont il avait protégé la jeunesse ne manquerait pas de venir en aide à sa misérable vieillesse. Mais il reconnut, à son profond chagrin, que celui qui compte sur autrui nourrit souvent une cruelle erreur, et que les hommes changent encore plus facilement de caractère que de profession. Arrivé à Milan, ce ne fut pas sans peine que Niccolò obtint la faveur de parler à Domenico. Il lui conta toutes ses misères et le supplia de lui accorder quelques travaux. Mais Domenico, oubliant, ou voulant oublier, que Niccolò l’avait élevé comme son propre fils, lui donna une honteuse petite somme d’argent et se débarrassa de lui au plus tôt.

Niccolò regagna Arezzo avec la tristesse au cœur, en voyant que l’enfant pour lequel il n’avait épargné ni soins ni dépenses était, à peu de chose près, son ennemi.

Afin de se sustenter, le pauvre vieillard accepta alors les plus minces ouvrages qu’on lui offrait, comme bien des années auparavant lorsqu’il peignit, entre autres choses, une Vierge avec deux saints à ses côtés et planant au-dessus de la commune de Monte-Sansavino. Ce tableau fut placé sur un autel de la Madonna di Vertigli, église de l’ordre des Camaldules où il plaît au Seigneur d’opérer chaque jour des miracles en faveur des fidèles qui se recommandent à la reine du ciel.

Jules III étant monté sur le trône pontifical, Niccolò se souvint des bontés que la famille di Monte avait eues pour lui et se rendit à Rome, malgré ses quatre-vingts ans. Il alla baiser les pieds de Sa Sainteté, et la pria de l’employer dans les fabriques que l’on avait le projet d’élever au Monte-Sansavino dont le duc de Florence avait fait hommage au pape. Jules III accueillit avec bienveillance notre artiste, et ordonna qu’on lui fournît de quoi vivre sans exiger de lui aucun travail en retour. Niccolò demeura ainsi quelques mois à Rome, où, pour passer le temps, il se mit à dessiner d’après l’antique. Sur ces entrefaites, le pape ayant résolu d’exécuter de nombreux embellissements au Monte-Sansavino sa patrie, et d’y construire, entre autres choses, un aqueduc, Giorgio Vasari supplia Sa Sainteté de nommer Niccolò Soggi surintendant de cette entreprise. Niccolò partit donc pour Arezzo ; mais, au bout de quelques jours, il y mourut accablé par les chagrins de ce monde et par l’ingratitude de son enfant d’adoption. Il fut enseveli dans l’église de San-Domenico d’Arezzo. À peu de temps de là, Don Ferrante Gonzaga étant mort, Domenico Giuntalocchi quitta Milan et revint à Prato avec l’intention d’y passer tranquillement le reste de ses jours ; mais, n’y trouvant ni parents ni amis, il se repentit trop tard de son ingratitude envers Niccolò, et retourna en Lombardie, au service des fils de Don Ferrante. Peu de temps après, il fut attaqué d’une maladie qui le conduisit au tombeau. Il laissa par testament à la commune de Prato dix mille écus, en stipulant que cette somme serait employée à acheter des biens dont les revenus serviraient à favoriser les études d’un certain nombre de jeunes gens du pays, comme cela se pratiquait déjà et se pratique encore aujourd’hui en vertu d’un autre legs. Les habitants de Prato, en reconnaissance de ce bienfait, qui est vraiment digne d’éloges, placèrent dans la salle de leur conseil le portrait de Domenico, comme celui d’un homme qui avait bien mérité de la patrie.



Cette biographie du Soggi confirme les remarques dont nous avons fait suivre celle d’Antonio Lappoli. Soggi fut homme d’un beau talent ; ses œuvres, pleines de recueillement, de soin et de patience, se recommandent encore par un sentiment exalté de dévotion et de pureté. Elève du Pérugin, condisciple de Raphaël, imitateur souvent de Lorenzo di Credi, on doit facilement saisir par la réflexion, et sans les avoir sous les yeux, le caractère de ses productions. Ce caractère le rapproche meme de cette famille de peintres mystiques que la critique moderne veut à toute force constituer, en tordant les faits et les traditions, et en prenant sans cesse le change entre les traits individuels du tempérament des artistes et les données générales de leurs écoles. Au reste, la biographie si naïvement écrite par le Vasari peint l’homme : froid, méthodique, vain, mais consciencieux, patient et bon, le vieux Soggi suivit franchement dans ses œuvres son organisation ; voilà tout le secret de son mysticisme, il nous semble. Les plus belles phrases ne peuvent démentir le sens si clair de sa légende. Et si phrases il y a, les nôtres, telles quelles, dans tout ce volume, et notamment à propos des Siennois et de Lorenzo di Credi, dont nous nous occuperons bientôt, doivent être prises en considération ; nous en faisons formellement la demande.



NOTES.

(1) On ne sait ce qu’est devenu ce tableau.

(2) Vasari voulait probablement écrire la vie du Pecori, mais il n’a pas mis ce projet à exécution.

(3) Stagio Sassoli eut un fils, nommé Fabiano, qui se distingua comme peintre verrier et dont le Vasari nous a parlé dans la vie de Guglielmo da Marcilla, tom. IV.

(4) Voyez, tom. VI, la vie d’Andrea del Sarto, où ce fait est raconté plus au long.

(5) Voyez la vie du Rosso, tom. V.

  1. Cette lacune inexplicable se trouve même dans la première édition du Vasari.