Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres/8/Archytas

J. H. Schneider, Libraire (Tome IIp. 254-256).
◄  Epicharme
Alcméon  ►
Livre VIII
ARCHYTAS.


ARchytas de Tarente, issû de Mnesagoe, ou d’Hestiée selon Aristoxene, embrassa la secte de Pythagore. Ce fut lui qui, par une lettre qu’il écrivit à Denys, sauva la vie à Platon, dont le Tyran avoit résolu la mort. Il réunissoit en sa personne tant de vertus, qu’admiré des uns & des autres pour son mérite, on lui confias jusqu’à sept fois la Régence, malgré la Loi qui défendoit qu’on l’exerçat plus d’un an.

Platon lui écrivit deux fois en réponse à une lettre qu’il avoit reçue, & qui étoit conçue en ces termes.

Archytas à Platon, santé.

« Je vous félicite de votre rétablissement, suivant ce que vous m’en dites, & comme je l’ai appris de Damiscus. Quant aux écrits dont vous m’avez, j’en ai eu soin, & me suis rendu en Lucante auprès des parens d’Ocellus. Les Commentaires sur la Loi, la Royauté, la Pieté & la Génération de toutes choses sont entre mes mains. Je vous en ai même fait tenir une partie ; mais jusqu’ici on n’a Page:Diogène Laërce - Vies - tome 2.djvu/285 emcore pû recouvrer les autres. S’ils se retrouvent soiez persuadé que je ne manquerai pas de vous les envoyer ».

tel étoit le contenu de la lettre d’Archytas ; tel celui de la réponse suivante de Platon.

Platon à Archytas, sagesse.

« Je ne saurois assez vous exprimer la satisfaction avec laquelle j’ai reçu les écrits que vosu m’avez envoyés. Je fais de l’Auteur un cas infini, je l’admire en ce qu’il se montre digne de ses ancêtres du vieux tems, & si estimables pour leurs bonne qualités. On les dit originaires de Myra & du nombre de ces Troyenss que Laomedon amena avec lui ; tous gens pleins de vertus, selon le témoignage qu’en rend l’histoire. Les Commentaires, dont vous me parlez & que vous souhaitez, ne sont pas encore en assez bon état ; n’importe, je vous les envoye tels qu’ils se trouvent. Nous pensons de même l’un & l’autre sur le soin avec lequel ils méritent d’être conservés ; aussi n’ai-je rien à vous recommander là-dessus. Je finis, portez vous bien ».

Voilà en quels termes ils s’écrivoient de part & d’autre.

Il y a eu quatre Archytas. Le premier est celui dont nous parlons ; le second étoit de Mitylène

et musicien de profession ; le troisième a écrit de l’agriculture ; le quatrième a composé des épigrammes. Quelques auteurs en comptent un cinquième, qu’ils disent avoir été architecte-, & dont on a un ouvrage sur la mécanique, qui commence par ces mots : J’ai appris ceci de Teucer de Carthage. On rapporte aussi du musicien Archytas que quelqu’un lui disant qu’on ne l’écoutait pas lorsqu’il discourait, il répondit que son instrument de musique parlait pour lui. Aristoxène raconte d’Archytas le pythagoricien que, pendant qu’il fut général, il ne perdit jamais de combat ; mais qu’ayant été démis de cet emploi par envie, l’armée succomba, & tomba au pouvoir des ennemis.

Celui-ci est le premier qui ait traité des mécaniques par des principes qui leur sont propres, & qui ait communiqué un mouvement organique à une figure faite géométriquement, en cherchant, par le moyen de la section d’un demi-cylindre, deux lignes proportionnelles, pour trouver la duplication du cube. Platon, dans sa République, atteste qu’on lui est aussi redevable de la découverte de la duplication du cube par la géométrie.