Vie du pape Pie-IX/L’Immaculée Conception

CHAPITRE XVI.

L’immaculée Conception.


Depuis le commencement de son pontificat, le Saint-Père avait songé à la définition du dogme de l’Immaculée Conception, définition qui avait occupé les pensées de son prédécesseur, Grégoire XVI. Pendant son exil, comme nous l’avons déjà vu, Pie IX avait adressé une encyclique à l’épiscopat catholique dans le but de recueillir la tradition universelle de l’Église sur cette importante question. Il reçut six cent trois réponses. Presque tous les prélats de la sainte Église demandaient avec instance la définition du dogme ; quelques-uns seulement, tout en reconnaissant la croyance universelle à l’Immaculée Conception, exprimaient des doutes sur la question d’opportunité.

Ce concert si unanime, cet accord si parfait entre les peuples les plus éloignés qui se rencontraient dans une même pensée semblaient dire au Saint-Père : « Hâtez-vous de consacrer notre jugement par le sceau de votre puissance. Quels jours pourraient être plus opportuns. Celle qui a écrasé toutes les hérésies vous défendra contre vos ennemis et glorifiera-votre règne. »[1]

Le Pape appela à Rome tous les prélats qui pouvaient s’absenter afin de mettre la dernière main à la rédaction de la bulle.

Cinquante-six cardinaux et quarante-trois évêques et archevêques, réunis en assemblée solennelle au Vatican, discutèrent pendant longtemps la question théologique. On souleva aussi une autre question. Les évêques assistaient-ils comme juges pour prononcer la définition simultanément avec le Pape, ou fallait-il attribuer le jugement à la seule parole du Souverain-Pontife ?

La discussion fut terminée tout à coup par une inspiration du Saint-Esprit. Voici ce que raconte un témoin oculaire, Mgr Audisio : « C’était la dernière séance ; midi vint à sonner ; toute l’assemblée se mit à genoux pour réciter l’Angélus. Puis chacun reprit sa place et on avait à peine échangé quelques mots, qu’une acclamation au Saint-Père, un cri d’éternelle adhésion à la primauté du siège de Saint-Pierre s’élève, se propage et clôt le débat : Petre, doce nos ; confirma fratres tuos ! Pierre, enseigne-nous, confirme tes frères ! Et l’enseignement que ces pasteurs demandaient au Pasteur suprême, c’était la définition de la Conception immaculée. »

Enfin, le grand jour, le 8 décembre 1854, apparut. Le vénérable temple de Saint-Pierre, tombeau de tant de saints et témoin de tant de grandes choses, dût tressaillir d’allégresse en voyant Pie IX placer cette dernière couronne de gloire sur le front de la Reine des cieux.

Le divin sacrifice est terminé. On invoque une dernière fois le secours de l’Esprit-Saint. Pie IX, debout devant son trône élevé et entouré de toute la hiérarchie de l’Eglise, lit d’une voix entrecoupée par une douce émotion, la bulle qui proclame que la tache du péché originel n’a jamais souillé l’âme de la sainte Mère de Dieu : Et macula non est in te.

En souvenir de ce grand événement, on plaça à chaque côté de l’abside de Saint-Pierre deux inscriptions, gravées sur le marbre, contenant les noms des évêques et des archevêques présents à la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception. Plusieurs œuvres d’art, entre autre une colonne surmontée d’une statue en bronze de la sainte Vierge, furent exécutées pour rappeler aux âges à venir la mémoire de cette glorieuse journée.


  1. Francesco Massi, Biographie du souverain Pontife Pie IX.