Valentines et autres vers/Mon cœur stupide, étant bouché comme une gourde


Mon cœur stupide, étant bouché comme une gourde
Où les vins de l’amour, des siècles, dormiront :
Vous avez pris dans vos deux mains ma tête lourde
Et vous m’avez baisé doucement sur le front.

Et j’ai senti, sous les délices d’un baptême
Mystérieux, mes yeux orageux s’apaiser ;
Le jardin s’éteignait, et sur le chrysanthème
Ce rappel d’un oiseau sonna comme un baiser !

Vous m’aimâtes, ainsi qu’une Mère jalouse,
Portant le baume pur à mon mal remuant ;
Mais quand j’ai regardé vos yeux, j’ai vu l’Épouse
Qui souriait, dans leur miroir insinuant.

Votre sein m’a bercé comme un héros indigne,
Et depuis l’heure au ciel qui m’a fait vous aimant,
Un Désir solitaire et pâle comme un cygne
Sur un fleuve en moi nage avec enchantement.