Vénus en rut, 1880.djvu/00

Texte établi par Sur l’imprimé à Luxurville : chez Hercule Tapefort, imprimeur des dames, 1771, À Interlaken : chez William Tell, l’an 999 de l’indépendance suisse (p. 5-6).
Avant-Propos

VÉNUS EN RUT

OU
VIE D’UNE CÉLÈBRE LIBERTINE


Tu veux, ma chère Folleville, que, pour exciter ton tempérament, je t’offre un crayon de mes aventures, que je t’apprenne par quelle gradation j’ai mérité une supériorité sur mes égales, et comment de l’obscurité où le sort m’avait placée, j’ai su parvenir à donner des plaisirs aux grands et à en recevoir des mortels les plus aimables. Tes désirs seront satisfaits : plus accoutumée à jouir qu’à combiner des phrases, tu ne trouveras pas mon style assez chaud, eh bien ! je te permets d’enchérir sur mes idées ; avec le feu de ton imagination et celui de tes sens, tu seras une Laïs très à la mode, et mon élève me primera avant peu. Si les portraits que je trace excitent ton amant à les réaliser, j’en serai flattée, et tu n’en seras pas plus mal. Je te crois trop mon amie pour publier mes petits aveux ; un lecteur austère serait révolté de mes gentillesses ; un indifférent dirait qu’après l’Académie des Dames, Thérèse, la Religieuse, et le fameux Portier, on sait tout ; j’espère te prouver le contraire ; je n’emprunterai rien de ces ouvrages, je peindrai ce que j’ai vu, fait, senti ; je ne veux de modèle que moi.

As-tu fini ton exorde ? s’écrie un mordant critique. Arrive-tu aux faits, auteur femelle et maladroit ? Combien faut-il sauter de pages pour trouver un soupçon d’aventures ? Pardon, monsieur l’Aristarque, je n’aime pas plus que vous les préfaces, et je ne veux que vous avertir que je divise ces instructions balsamiques en cinq chapitres et pas davantage. Pourquoi ce nombre déterminé ? Vous ne le savez pas ? ni moi non plus ; suffit que si vous me lisez, vous n’aurez plus besoin de maître ; je commence.