Une voix dans la foule/Ta voix

Une voix dans la fouleMercure de France (p. 119-120).

TA VOIX

J’ai poursuivi ta voix dans le jardin des roses,
Ô toi dont je rêvais de respirer l’haleine !
Oh ! la sentir tiédir sur tes lèvres écloses
Et devenir le chant du ciel et de la plaine !

Mais ton ombre me fuit, m’ayant leurré sans trêve,
Et je suis seul, ce soir, dans le jardin des roses,
Sans avoir pu surprendre — oh ! que la vie est brève ! —
Le parfum de ton cœur sur tes lèvres écloses !


Je n’entends que le vent dans le jardin des roses,
Le lointain tintement d’une fontaine, et comme
Un bruit frais de baisers sur des lèvres écloses.
L’Amour, dieu de la nuit, rit de mon désir d’homme.

Ô ma sœur dont la voix vers les astres s’élève,
Reviendras-tu jamais dans le jardin des roses ?
Tu ne me réponds pas, et je meurs et je rêve
De n’être qu’un sanglot sur tes lèvres écloses !