Une parodie inédite de Zaïre.

UNE PARODIE INÉDITE DE ZAÏRE


La notice de l’édition Beuchot, tome III, reproduite par Moland, tome II, cite quatre parodies de Zaïre, dont trois ont été imprimées. Celle de l’abbé Nadal ylr/eottt’n au Parnasse ou la Folie de Melpomène, celle de Dominique, Romagnesi et Riccoboni Les Enfants trouvés ou le Sultan poli par r~4moar, enfin une parodie anonyme Caquire, imprimée à la fin du XVt!~ siècle, vraisemblablement à Lyon. Les deux premières ont été plusieurs fois réimprimées M. Fontaine a reproduit Les Bt~an~s trouvés à la fin de son édition critique de Zaïre. Quant à la parodie manuscrite, voici ce qu’en dit Beuchot « M. de Soleinne possède le manuscrit d’une Zaïre, parodie en un acte et en vers M. Fontaine ne paraît pas avoir eu connaissance de ce manuscrit, et l’on ne saurait s’en étonner en effet, le catalogue de la Bibliothèque Soleinne donne au numéro 3.062 une attribution inexacte de cet ouvrage il y est présenté comme Fœuvre de Dominique, Romagnesi et Riccoboni, et précédé du signe spécial t, qui indique qu’il a été imprimé. C’est là une erreur évidente, et l’on peut s’en convaincre sans peine en consultant à la Bibliothèque Nationale le manuscrit français 9.248, qui a été acquis par notre grand dépôt au moment de la dispersion de la bibliothèque Soleinne.

On sait qu’une très petite partie seulement de cette magnifique collection est passée à la Bibliothèque Nationale ce sont surtout des manuscrits de pièces le plus souvent inédites, généralement sans grande valeur littéraire, mais quelquefois fort curieuses. Il y en a 1.500 environ, représentant les dix-huit portefeuilles de la collection Soleinne, et figurant sous les numéros 9.242 à 9.34). Cette partie du catalogue des manuscrits de la Bibliothèque Nationale demanderait une revision complète et soigneuse. L’erreur d’attribution que je viens de signaler ici est loin d’être unique. H y a deux ans, une de mes élèves, M’~ Béatrice Abott, de Toronto, découvrait une trentaine de comédies de Robineau de Beaunoir, données comme anonymes dans le recueil Soleinne, et qu’une liste autographe de Beaunoir lui-même comprise dans un autre dossier de la Bibliothèque Nationale lui a permis d’identifier. Plus récemment encore, M. Keys, en recherchant le manuscrit de la première adaptation de Shakespeare jouée sur un théâtre français Les Deux Amies ou le Vieux Coquet, de Bret (d’après Les Joyeuses Commères de Windsor), avait la surprise de constater que cette pièce manquait dans le recueil où il pensait la trouver, d’après les indications formelles du catalogue Soleinne et de celui de la Bibliothèque Nationale (n° 9.243). Pourtant la pagination, deux fois remaniée, de l’ensemble du recueil, ne marque aucune lacune. En divisant les portefeuilles Soleinne pour les répartir sous la forme des volumes actuels, la Bibliothèque Nationale a vraisemblablement égaré ou interverti certaines pièces, tout en conservant fidèlement la description du catalogue Soleinne, que l’on a reproduite sans se livrer à la moindre vérification.

La parodie qui nous occupe, longtemps confondue avec celle de Dominique, Romagnesi et Riccoboni, en est pourtant tout à fait différente. Les personnages y conservent les mêmes noms que dans la tragédie de Voltaire, au lieu que chez les trois auteurs italiens Zaïre s’appelle Thérmre Lusignan, Alcidor Nérestan, Carabin, et Orosmane est désigné sous le nom de Sultan de Tripoli. La comparaison, même très superficielle, des deux pièces, ne pouvait laisser aucun doute à cet égard mais les indications du catalogue ont évidemment détourné les érudits de toute recherche à ce sujet. La seule mention qui ait été faite de cette parodie se trouve dans la thèse de Miss Valleria Belt Grannis (Dramatic Parody in Eighteenth Century France), dont j’avais attiré l’attention sur ce point et qui a consacré un peu moins de deux pages à ce petit ouvrage, qui pourtant mériterait mieux.

On sait en quoi consiste le comique des parodies, principalement au XVtH** sièc)e d’une part il provient des effets burlesques qui s’obtiennent en accentuant le côté ridicule que pourraient présenter certaines situations, en faisant parler les héros de tragédie dans un style vulgaire, ou encore en leur attribuant des situations inférieures et en leur faisant parler le langage de leur état. D’autre part, et ceci intéresse davantage l’histoire littéraire, les auteurs de parodies s’amusent malignement à souligner les défauts de construction de la pièce, et donnent ainsi sous forme indirecte une véritable critique de l’ouvrage. Par exemple, dans Les Enfants trouvés, l’effet burlesque est obtenu par des vers comme ceux-ci, que prononce Thémire

Tout le monde en convient, le Roi de Tripoli

Est, malgré sa moustache, un seigneur très poli, ou encore par les jurons gascons dont Carabin-Nérestan émaille ses tirades.

Mais ces effets ne sont employés ici qu’avec discrétion. Par contre, les passages critiques sont nombreux, et souvent d’une réelle finesse. M. Lanson, dans son étude sur la parodie dramatique au xvn~ siècle (Hommes e< Livres, pp. 262 et suivantes) a montré comment cette petite pièce faisait ressortir admirablement le défaut principal de Zaïre la prolongation de l’inexplicable silence de t’héroïne à travers les trois entretiens qu’elle a avec le sultan. Il souligne aussi la malice des auteurs attribuant à Orosmane deux vers de Bo/o~ef, dont, en effet, le passage de Voltaire n’est qu’un délayage très inférieur. Lorsque Thémire prononce un vers que les auteurs empruntent directement à la tragédie Ou mon amour me trompe, ou Thémire aujourd’hui Pour l’élever à soi, descendrait jusqu’à lui. sa confidente réplique fort judicieusement le faut avouer, cette pensée est belle, Mais convenez aussi qu’elle n’est pas nouvelle. L’arbitraire de l’unité de lieu est souligné par ces vers jASMtN

Vous savez que toujours votre porte est fermée. LE SULTAN

Oui, c’était autrefois la règle accoutumée; Mais il faut que d’entrer on ait permission, Si veux qu’au sérail se jMMe l’action. Le récit des aventures de Nérestan est de même parodié de façon à en démontrer toute l’invraisemblance.

Ces deux sources de comique se retrouvent dans la parodie inédite. Mais il faut reconnaître qu’ici l’emploi du burlesque est beaucoup plus abondant, les traits en sont plus fortement appuyés, et l’auteur anonyme n’hésite pas, à certains moments, à les pousser jusqu’à la grossiéreté. Que l’on compare par exemple la parodie de la première tirade de Fatime au passage de Voltaire (vers 9 et suivants) Vous ne me parlez plus de ces belles contrées Où, d’un peuple poli les femmes adorées Reçoivent cet encens que l’on doit à leurs yeux Compagnes d’un époux et reines en tout lieux, Libres sans déshonneur et sages sans contrainte, Et ne devant jamais leurs vertus à la crainte. Voici la tirade telle qu’elle est parodiée dans Les Enfants trouvés Vous ne me parlez plus des plaisirs que la France Promet à notre se~e avec tant de licence.

Vous ne l’ignorez pas c’est là que les maris Vivent d’intelligence avec les favoris; Que la femme y bravant la contrainte fatale, Est prude avec renom, coquette sans scandale. Le ton est beaucoup plus vif dans la parodie manuscrite Avez-vous oublié ces charmantes contrées, Où de cent étourdis les filles adorées, Ayant à peine atteint l’âge de quatorze ans, En donnent à garder à dix ou douze amants? p Quel plaisir! Je le sais par mon expérience. Plus loin Fatime s’efforce de dégoûter Zaïre du sérail d’Orosmane, et voici en quels termes

Qoi, vous voulez rester dans ce maudit sérail. Où le plaisir de plaire est pour nous un travail, Où, pour ravigoter un Turc sans politesse, Par crainte nous feignons d’avoir de la tendresse. L’auteur fait abondamment appel à certaines particularités du sérail pour amuser son auditoire en congédiant Nérestan, Orosmane lui dit Oui, crois-moi si tu veux conserver ta perruque, Pour peu que ton cœur craigne une charge d’eunuque, Sors, et que le soleil levé sur mes Etats Chez moi, demain matin, ne te retrouve pas. Dans la scène 7, qui correspond à Il, 2 de Voltaire, Zaïre, en faisant ses adieux à Nérestan, lui promet d’user de son pouvoir sur le sultan pour

Protéger les chrétiens, leur tenir lieu de mère. Dans la parodie, le ton change ce ne sont pas du tout des soins maternels qu’elle se propose de prodiguer aux chrétiens. Voici ce que devient le passage

Un coup J o*</ par hasard lâché sur mon vainqueur En a fait mon esclave; excusez-moi, Seigneur, Mais quoique ma fortune ait d’éclat et de charmes Dans les bras du Sultan je vous donne des larmes. Je ne vous défends pas de former des désirs Je ferai plus, s’il faut, pour flatter vos soupirs. A fous, à vos Français, je tâcherai de plaire; Mes bienfaisantes mains calmeront leurs misères, Je pourrai bien, ~e crois, par ces tendres moyens, Sans manquer au Sultan, adoucir vos chagrins. Autant que je le puis, je ne suis pas cruelle. et Nérestan réplique

Grand Dieu~ que de vertu dans cette demoiselle. Le monologue de Zaïre (III, 5) est à la fois abrégé et tourné au grotesque Les chrétiens vont partir pour le Mississipi Et moi dans un sérail restant ensevelie, Je m’en vais m’occuper à peupler la Turquie. Non, je dois suivre un père et ne pas Mcnce)’ Mais quoi? et mon amant? dessus quel pied danser:’ Entre deux selles, oui, je suis le cul par terre. Les vers

Votre CfBUr, par un maître attaqué chaque jour, Vaincu par mes bienfaits, crut l’être par l’amour (IV, 6). deviennent

~o~re camr dans mon lit attaqué chaque jour, Vaincu par le plaisir, crut l’être par l’amour. Au lieu de

Lé sérail est plongé dans un profond silence, Tout dort, -tout est tranquille, et om~re de la nutf. (V, 6). nous lisons

Les étoiles ici sont en bonnet de nuit. Je ne puis être heureux ni souffrir que par elle. se transforme en

Je ne puis être heureux sans coucher avec elle. Assurément cette verve est assez grosse et ne suffirait pas à donner beaucoup d’intérêt à cette parodie, où le texte de la tragédie est suivi d’assez près, sauf la suppression des premières scènes de l’acte III et l’interversion des scènes 3 à 8 du Ve. Du moins y a-t-il là une certaine bonne humeur et un maniement très correct du vers classique qui tranche avec le style souvent barbare d’un grand nombre de pièces manuscrites recueillies par M. de Soleinne. Le dénouement, qui naturellement est heureux, se trouve quelque peu brusqué’; mais il reste sur le ton bon enfant qui caractérise toute la pièce Et pourquoi me cacher de qui vous êtes fille Quel diable de mystère, et quel en est la fin? Ces messieurs ont pensé perdre le goût du pain, Et fous, la belle, aussi. Voyez la belle cnute/ Vous Français, au sérail, allez chercher des filles; Nérestan, prends-en trois et prends les plus gentilles; Demeurez tous chez moi; faites-moi ce plaisir; Orosmane est heureux, tout doit s’en ressentir.

Ce qui donne plus de valeur à cette parodie, c’en est la partie critique. Par exemple, à la deuxième scène, après une tirade de 22 vers au lieu des 58 que comporte celle de Voltaire, Zaïre réplique à Orosmane Mais seigneur, permettez que je parle à mon tour, Haranguer si longtemps vous fatigue et vous gêne, Et vous avez besoin, je crois, de prendre haleine. Les derniers vers de la scène 5 soulignent la convention qui, pour maintenir l’unité de lieu, empêche arbitrairement les personnages de se rencontrer. Orosmane s’écrie

Mais que vois-je ? En ces lieux ce Français que j’abhorre Sortons, il ne faut pas que je lui parle encore. De même l’imprudence que commet Nérestan en se confiant à Châtillon tout près du séjour d’Orosmane (Zaïre, I, 1) est soulignée dans ces vers (sc. 6)

Taisez-vous donc, de grâce 1

Si vous criez si fort, le Sultan l’entendra Et ce qu’il m’a promis, peut-être il le tiendra. L’auteur n’est pas dupe de la chasteté supposée de Zaïre, élevée dans le sérail.

CHATILLON

Telle est des musulmans la coupable /;csnce De nos jeunes tendrons ils séduisent l’enfance. Et dès les premiers ans, savent former leur cœur A satisfaire en tout leur amoureuse ardeur. Croyez-vous que toujours elle ait été cruelle? M. Lanson s’étonne (Hommes et Livres, p. 287) que certains éléments mélodramatiques comme la croix de ma mère n’aient pas été critiqués par Dominique, Romagnesi et Riccoboni, et il l’explique ainsi C’est que la croix de ma mère n’était pas usée’; elle chassait les accessoires grecs et romains qui opéraient depuis deux mille ans les reconnaissances tragiques tissus, épées, cuirasses, etc. La croix de Zaïre ne valait-elle pas bien la cuirasse de Mérope ?’" !t en eût peut-être jugé autrement à la lecture de notre parodie manuscrite. Dès l’arrivée de Lusignan, la voix du sang parle en Zaïre

.Sans trop savoir pourquoi, ye sens que mon cœur l’aime, et la scène de la reconnaissance donne lieu à la parodie la plus bouffonne. Si mes enfants vivaient s’écrie Lusignan, et Nérestan dit Ses enfants! Autrefois, Seigneur, j’avais un père.

ZAÏRE | Je suis plus sûre encore que j'avais une mère! LusreNan … Vous dont le cœur soupire

Répondez-moi sans faute : à gauche sous le sein Par hasard auriez-vous un gros bout de boudin?

ZaÏRE Qui, seigneur, il est vrai. LuUSIGNAN Pendant une grossesse De votre mère, hélas !'ce fut une faiblesse.

Nérestan a subi la bastonnade :

LUSIGNAN

Que vous est-il resté de ce dur traitement? NÉRESTAN

Une incommodité que je n'ose vous dire! LusianaN

Et c'est? NÉRESTAN

“Qu'à tout moment mon derrière soupire Malgré moi. bardonnez.… ef même en cet instant.

LusiGNAN Tu m'en as dit assez, je reconnais mon sang. NÉRESTAN Moi votre fils! Zaïre Seigneur ! LusreNan

Heureux vent qui m'éclaire ! Akh{ mes pauvres enfants, embrassez votre père. A la scène 12 (Zaïre, III, 7) la complaisance inconsistante de Coras- min est plaisamment soulignée : Moi! ce que j'en ai dit, Seigneur, c'est d’après vous. Contre elle vous’ étiez tout à l'heure en courroux. Îl vous plaît à présent de la croire innocente. Je le veux bien...

Et la scène 13 nous offre une satire du rôle d’Orosmane Zaïre s’écrie Eh pourquoi mon amant n’est-il pas né Français? Etourdi, petit-maître, indiscret, plein d’audace, Prenant les ca°urs d’assaut comme on prend une place, Effronté, violent, jaloux et furieux,

S’il était de Paris, que serait-il de mieux)

Orosmane lui-même se définit ainsi à la scène 14 On vous ne savez pas ce que c’est qu’Orosmane. Comme un caméléon, il approuve, il condamme,

Il adore, il déteste, il jure, il se repend,

Et vingt fois dans un jour change de sentiment. Oui, c’est là chez les grands comme l’amour se mène. On voit que les principaux défauts de la pièce (fragilité de l’intrigue, invraisemblance de la reconnaissance, inexactitude de la couleur locale) ont été fort bien saisis par les contemporains, et c’est surtout à ce titre que cette petite pièce, restée si longtemps inédite, peut nous intéresser. C’est de l’ouvrage de Dominique, Romagnesi et Riccoboni que se rapproche le plus la parodie manuscrite. Celle de l’abbé Nadal, assez mordante et qui excita fort l’humeur de Voltaire, se présente sous une forme qui nous paraît aujourd’hui bien froide les cinq actes de la tragédie paraissent successivement devant Melpomène et se définissent eux-mêmes. Quand à Caquire, je voudrais bien pouvoir en parler, mais c’est une entreprise difficile. Le catalogue Soleinne la qualifie fort justement de «’ta plus sale de toutes les pièces de ce genre ce n’est qu’un ramassis d’obscénités et d’ordures. Tous les vers de Voltaire sont déformés de façon à faire allusion aux fonctions les plus basses de l’humanité, et cela dure pendant cinq actes, car ici, au lieu d’abréger, on n’a pas craint de consacrer deux mille vers à cette fantaisie dégoutante. L’auteur n’en a pas encore été nettement identiné le catalogue Soleine, le Dictionnaire des Anonymes de Barbier et M. L. Vallas, Un siècle de Musique e< de Théâtre à Lyon ne sont d’accord ni sur le nom, ni sur la personne. Mais, quel qu’il soit, on reste confondu à la pensée que cette pièce a pu être jouée à Lyon par des acteurs de société, qu’elle a connu au moins deux éditions, car la description donnée par le catalogue Soleinne ne se rapporte pas exactement à l’exemplaire que possède la collection Rondel. Les rares passages qui témoignent de quelque esprit ne sont pas citables à cause des grossièretés qui surgissent à chaque vers. Les costumes, minutieusement décrits, donneront une idée du ton de la pièce Cucuman (Orosmane), en habit turc, avec un turban formé d’un bassin d’étain de chaise percée.

Puputant (Lusignan), en vieil habit de cour bien râpé, couleur musc, un bas roulé, l’autre tombant sur les talons, appuyé sur une béquille. Foirine (Fatime), en robe appelée chemise, dont le derrière est taché ou moucheté en couleur de merde d’oie.

Caquire (Zaïre) en robe à la sultane, sous laquelle elle a un caleçon en nanquin couleur de chair, pour pouvoir fournir décemment les gestes et les attitudes convenables à son rôle, ayant une anse de pot de chambre suspendue au bout de son collier.

Néflairant (Nérestan), en pantalon, avec une tache noire au milieu du derrière, un fouet à la main, ayant sur le dos un pot de chambre en havresac, rempli de papier gris coupé en morceaux.

L’anse de pot de chambre jouera un rôle essentiel dans la pièce puisqu’à la fin il remplace la croix de Zaire. Toute la parodie repose sur les différences de régime intestinal entre les musulmans, toujours constipés, et les chrétiens (ici dénommés foireux), qui souffrent de l’incommodité contraire. Les premiers vers de Foirine sont les suivants Je ne m’attendais pas, jeune e< belle Caquire, A ces nouveaux besoins qu’un Soudan vous inspire. Quel changement s’opère en tous vos intestins? Au lieu d’étrons mollets, vous faites des crofHn~. La foire en ce moment n’a plus pour vous de charmes. On jugera de la différence de ton entre les trois parodies, qui suivent de près le texte de Voltaire, par la manière dont est transformée la fameuse exclamation d’Orosmane « Zaïre, vous pleurez 1» )’ (IV, 2). Dans Les Enfants Trouvés, cet hémistiche devient « Thémire, vous riez? car celle-ci ne prend pas au sérieux son terrible maître. Dans la parodie manuscrite, Orosmane s’écrie « Zaïre, vous jurez 1 » et en effet l’héroïne vient de prononcer un juron des plus grossiers. Dans la parodie lyonnaise, l’apostrophe se transforme en « Caquire, vous foirez 1 ». Une certaine édition ajoute cette note « ce qui s’exécute avec une fiole de chocolat qu’elle renverse.

It est fort douteux que t’en réédite jamais ou que l’on analyse avec plus de détails une pièce aussi ordurière que Caquire mais il n’était peut-être pas inutile de signaler aux bibliographes l’erreur d’attribution commise au sujet de la parodie manuscrite et d’en faire connaître les principaux passages, qui contribuent à compléter ce que nous savons de la critique dramatique sous forme de parodies au XV! 1~ siècle.


Félix Gaiffe.