Une Amitié de Balzac - Correspondance inédite/05

Marcel Bouteron
Une Amitié de Balzac - Correspondance inédite
Revue des Deux Mondes7e période, tome 14 (p. 666-688).
UNE AMITIÉ DE BALZAC
CORRESPONDANCE INÉDITE [1]

V [2]

Nous avons laissé Balzac débarquant à Genève le 18 décembre 1833 pour courtiser la comtesse Hanska, sa nouvelle conquête [3]. Cependant Mme Carraud, appelée à Frapesle par la mort de son père, écrivait au romancier :


Frapesle, le 4 janvier 1834.

J’ai eu une joie bien fugitive, mon cher Honoré ; Auguste m’écrivit qu’il était arrivé à la Poudrerie une lettre à votre adresse ; et, comme il supposait que vous la suivriez de fort près, il fit préparer votre appartement. Mais hélas ! il y a quatre jours, on me renvoya d’Angoulême la lettre de Laure, qui a détruit tous mes enchantements. Vous devez avoir reçu les deux lettres qui étaient pour vous. Je ne sais si vous avez reçu celle que je vous ai écrite d’ici, où je vous parlais de la perte que j’ai faite et du changement qu’elle apportait à mon existence. Je vais retourner à la Poudrerie pour la quitter. J’ai mille raisons de m’en réjouir. Depuis mon départ, il y eut une scène violente chez les voisins, scène dont les suites ont manqué être fatales à la pauvre dame ; elle a été agonisante pendant trois jours, étendue sur un matelas dans sa salle à manger.

Si vous êtes en Suisse, je n’espère pas vous voir à Angoulême ; sans doute, en rentrant en France, vous aurez mille choses à régler, et le matériel de votre vie éclipsera momentanément les exigences de vos affections. Si vous ne pouvez satisfaire au désir que j’ai de vous voir promptement, au moins, caro, rendez-vous à ma prière réitérée de me donner du 15 mai au 15 juin. Si vous étiez un gastronome, je n’insisterais pas, parce que, en province, ce mois est peu favorable ; mais vous vous prêtez avec si bonne grâce à nos habitudes simples, que j’ai confiance en la réussite de mon vif désir de vous avoir pour témoin du retour à la vie de mon petit éden. Vous y aurez une chambre toute prête, complète ; le parloir sera aussi définitivement arrangé, ainsi que le billard, sauf les papiers qui resteront encore, faute d’argent pour les remplacer. Je vous demanderai grâce pour le reste. Venez donc, Honoré. Cette mort m’a apporté mille douleurs ; outre celle d’un lien rompu, il y a eu des détails rebutants. Il me faut quelques jours de contact avec de belles âmes pour me remettre. C’est donc à une œuvre d’affection que je vous convie ; je vous en serai profondément reconnaissante.

Puisque vous avez pu quitter Paris, c’est que vos affaires vont bien ; tant mieux, mon cher ami, puissent tous les frottements disparaître de votre vie ! Je vais voir, aussitôt arrivée chez moi, à me procurer vos derniers ouvrages. Quand je vous lis, il me semble que cette communication n’est que pour moi, et j’en jouis comme de pensées émises pour moi toute seule ; et l’habitude de voir vos livres sur mes tablettes n’a point détruit cette bonne illusion. Ce sera donc une nouvelle participation de votre être moral, qui va me donner des joies dont j’ai vraiment bien besoin pour me remettre un peu en équilibre.

Adieu, bien cher, que 1834 vous sourie et vous apporte tons les plaisirs dont vous êtes le plus avide ! Mon amitié ne peut rien vous promettre de plus qu’elle ne vous a donné l’année précédente, mais aussi elle ne vous offrira jamais moins.

Je vous suis toute acquise, mon cher ami.

ZULMA.


Le 23 janvier 1834, Mme Carraud, de retour à la Poudrerie, lui écrit de nouveau :

Nous avons eu bien peur, mon cher Honoré : Mme Grand-Besançon a faut une fausse-couche, accompagnée de circonstances si gradvs que nous avons craint de la perdre. C’est vous dire que je lui donne tout mon temps, et vous ne m’en voudrez pas si je vous ai négligé, vous heureux, pour elle souffrante. La voilà sauvée encore une fois, si son entourage ne tente pas quelque funeste expérience sur elle. Dans cette crise morale de toute cette maison, j’ai découvert que la grande demoiselle [4] n’a pas d’âme, et je ne me chargerais pas maintenant -de la marier à un homme qui demanderait autre chose au mariage qu’une maîtresse qui lui fit des enfants. Dans six semaines, j’aurai dit adieu à cette Poudrerie pour ne la plus revoir, et je me jetterai dans la vie agricole [5], si nuancée pour qui y assiste, si terne pour qui la voit de loin. Je crois, cher, que vous la redoutez un peu, car vous me donnez un peut-être affligeant, sur lequel je ne devais pas compter : vous m’aviez promis une visite, et dans les douze longs mois qui composent cette longue année, vous ne pouvez en désigner un à me consacrer. Vous aurez pourtant une bonne petite chambre à Frapesle, et, si vous n’avez pas oublié l’amitié des propriétaires, vous devez espérer quelque plaisir de ce séjour. J’ai lu vos deux volumes. Oh ! la Femme abandonnée [6] ! Excepté une odieuse réflexion de Gaston, tout y est admirable. Vous n’aurez pas souvent de semblables inspirations. Je suis glorieuse de la Grenadière [7]. C’est vraiment digne de vous. Cette bienheureuse libération n’arrive donc point, malgré vos efforts ? C’est odieux, toujours marcher, et ne pas arriver ! J’ai une prière à vous faire. Je serais extrêmement heureuse de recevoir Mme de Berny. Je ne puis lui faire une invitation que je ne pourrais motiver convenablement, ne la connaissant pas. Il faut donc que vous m’aimiez assez pour me l’amener, pour lui persuader que chez moi ce sera chez vous. Ici, je n’aurais osé insister, à cause du voisinage investigateur ; mais à Frapesle, elle sera une connaissance à moi, et l’on n’ira pas plus loin. Dites, Honoré, le voulez-vous, le pouvez-vous ? Vous travaillerez bien plus fructueusement aux côtés de votre bon ange et loin des misères comme des joies de Paris. Au mois de mai, votre chambre sera prête ; puis nous avons de bonnes vendanges, et ce n’est pas sans mérite pour un parisien. Adieu, Honoré, je retourne auprès de la malade ; courage et santé, et mémoire aussi.

ZULMA.


« Aller à Frapesle ? Mais certes, répond Balzac toujours à Genève. Mon Dieu, vous êtes angéliquement bonne d’avoir songé à celle que tous mes amis (je veux dire ma sœur et Borget) nomment mon bon ange... [8] » Il s’excuse d’être resté si longtemps sans écrire. Mais il a pensé à Mme Carraud, il a même parlé d’elle avec orgueil « en me félicitant, dit-il, d’avoir une seconde conscience en vous. » Pourquoi Mme Carraud ne lui parle-t-elle pas de la pauvre Eugénie Grandet, qui peint si bien la vie de province ? Il lui enverra bientôt un nouveau conte drôlatique, Berthe la repentie. L’Allemagne a acheté deux mille Louis Lambert, la France n’en a pas acheté deux cents ! Et cependant Balzac est en train de composer Séraphita ! Il est toujours accablé de travail et rentrera directement à Paris ; mais en mai, pour la Saint-Honoré, il promet d’être à Frapesle, auprès de ses amis. Le 8 février, de la Poudrerie, Mme Carraud lui répond :


Vraiment, mon cher Honoré, j’avais besoin d’une lettre de vous ; quand ma pensée se reportait vers Genève, je n’étais pas contente de moi ; j’éprouvais quelque chose qui ressemblait à du remords. Expliquez ce phénomène moral ! Etait-ce parce que je m’en veux toujours, quand je ne suis pas à votre unisson dans mes jugements ? Pourtant, j’ai la vanité de me regarder comme une portion de votre conscience. Je me dis que, prévenue d’une idée, l’ayant considérée sous son aspect principal, la perspective déforme peut-être les autres. Puis, je ne me crois le goût nullement altéré par les préjugés du monde. Il est des choses sur lesquelles je ne saurais asseoir d’opinion, et celles-là, je n’en parle pas, reconnaissant bien mon insuffisance. J’attache beaucoup d’importance à mes impulsions, parce que j’ai foi en ma nature primitive, qui n’a point été faussée par une éducation précoce. Eugénie Grandet [9] m’a beaucoup plu. Si ce n’est pas la femme séduisante, c’est la femme vraie, dévouée, comme beaucoup le sont, sans éclat. L’illumination de son esprit, à la première sensation de l’amour, est vraie aussi, très vraie. J’aurais mieux aimé qu’elle ne se mariât qu’à un homme estimable, puisque son mariage n’était qu’un legs [10]. Le cercle des Grandet est vrai aussi, dans leur obsession de l’héritière et dans leurs cancans. La grande Nanon, admirable ! j’ai connu des servantes honnêtes qui volaient pour leurs maîtres avares ! Mme Grandet existe dans chaque ville de province. Cette femme, qui a tout donné à un mari qu’elle aime médiocrement, même son être moral, qui serait morte cent fois, si elle n’eût eu une fille, on la trouve partout. Il faut vivre en province, et observer un peu, pour être frappé du grand nombre de victimes de ce genre qui existent. Reste Grandet, c’est lui qui n’est pas vrai. D’abord, il est trop riche : en France, aucune épargne, aucune avarice ne peuvent amener, en vingt ans, en cinquante, à une pareille fortune. Il n’y a que la fortune de crédit qui va à tant de millions ; la fortune positive ne le peut, à moins qu’elle ne soit héréditaire, et dans un pays où l’hérédité égale n’existe pas. Vous n’avez pas eu de type réel pour cela. Puis, il est impossible à un homme d’accaparer autant d’or monnayé en France, où il y en a si peu, et surtout de l’accaparer en secret ; ce serait une révolution financière qui mettrait le trouble partout, et dans le commerce et dans l’administration. Comme avare, Grandet n’est pas vrai, il n’est que petit et pauvre. Un avare millionnaire qui a une intelligence assez vaste pour suffire à d’aussi immenses spéculations, et en même temps au détail de sa maison (et en cela, il est dans la réalité), cet avare-là ne dit pas à sa femme : Mange, cela ne coûte rien. Il n’entame pas le pâté, il le laisse gâter ; il ne l’apporte sur la table que moisi. Je vous mettrai en relations avec des avares millionnaires, à un ou deux millions seulement ; vous les verrez me dire, quand je voudrai servir quelque pièce sortable : « Oh ! de grâce, n’entamez pas cela, gardez-le ! » et souffrir quand le couteau s’y enfoncera ; puis, la chose servie, en manger avec timidité. L’avare, c’est l’oncle Robin de M. Périolas, ramassant tous les brins de paille qu’il trouve, pour faire du fumier ; buvant l’Hermitage de son cru, à quatre cents francs la barrique [11], pour ne pas acheter du vin ordinaire à cent francs. Prêt à mourir, il se fait descendre dans sa vaste cuisine, parce que son escalier est étroit, lui colossal en hauteur, et que, pour descendre sa bière, il faudrait deux hommes de corvée ; puis il désigne de vieilles planches pour son cercueil, parce que la vanité de sa femme et de ses enfants leur ferait employer des neuves ; il le fait confectionner devant lui et, se faisant apporter la boite aux vieux clous, il les donne lui-même, puis meurt en disant à sa femme ce qu’il faudra faire en vendanges, car leur fortune, c’est ce clos de l’Hermitage. Un autre avare (et je l’ai vu) prend les figues que sa femme a osé acheter à bon marché, les jette sur le fumier, afin que dans sa maison l’on ne s’accoutume point à ces friandises. Le reste d’Eugénie, le cousin, tout cela est bon, mais dans cette peinture vraie et nécessairement terne d’une vie terne, il ne faut pas que le premier plan soit aussi saillant. En province, rien n’est saillant. Jusqu’à vous, mon cher aristocrate, vous terniriez au brouillard d’une semblable existence. Les vertus, en province, sont profondes, mais sans éclat, on n’en a pas même la conscience.

La femme abandonnée, délicieux chef-d’œuvre, a pourtant une grosse tâche qui vous a échappé. Quand Gaston sait qu’elle est partie, il se dit : « Si elle m’aime, etc... » Il ne peut ni dire, ni penser cela, ou il n’est qu’un froid séducteur, et comme il est séduit, fort séduit, il ne peut faire cet affreux raisonnement, qui ne peut appartenir qu’à un roué. Cher, vous mettez trop d’esprit parfois, et vous savez bien, vous, analyste du cœur, que l’intelligence est une ; que, si elle se manifeste dans la passion, il ne reste plus rien pour ce qu’on appelle esprit. Les vies calmes permettent seules d’appliquer l’intelligence à toutes choses. Vous qui peignez la passion, mais qui ne l’éprouvez pas, il faut, bien cher, vous défier de votre exubérance d’esprit ; c’est par là que vous péchez, ce qui ne m’empêche pas de vous bien aimer, et sachez m’en gré, car je n’aime pas l’esprit, l’esprit tout pur ; c’est ce qui me fait détester Gaudissart [12]. Comment vous, Honoré, qui nous avez « trônées » nous autres femmes, allez-vous imaginer que la plus bornée, la moins sensible d’entre nous puisse prêter son mari, infirme de l’infirmité la plus respectable, pour une mystification ?... Puis, votre sortie contre les auteurs contemporains m’a fait mal. Alors vous aviez dépouillé l’homme que nous aimons tant. Quelle que soit Berthe la Repentie, ce ne sera pas Blanche d’Azai [13]. Il n’est pas donné à un homme d’être visité deux fois par l’esprit gracieux et chaste qui vous souffla le Péché Véniel. Il y a là de quoi immortaliser un homme. Vous pouviez, tranquille sur l’avenir, quitter la plume après avoir écrit ce chef-d’œuvre. Que Louis Lambert se soit peu vendu, je le conçois, il est à la portée de peu de gens ; puis vous l’aviez déjà fait imprimer ailleurs. Mais le Médecin de campagne, qui n’a qu’un défaut, celui d’être trop plein d’idées, trop pâté, si je puis dire, le Médecin de campagne devait avoir beaucoup de lecteurs, précisément à cause de ce défaut. Il y a là quelque diablerie de libraire. Votre procès vous a nui, en province surtout. Si j’avais été auprès de vous, je vous aurais dit : « Donnez le deuxième volume gratis à Mame, et prenez en échange le droit de l’appeler fripon. » Rien n’eût trainé en longueur. Enfin, c’est fait !

Que de fois j’ai rêvé la possibilité de vous offrir trente mille francs ; que de fois je me suis faite ambitieuse pour cela ! Et si je les avais eus, je vous les envoyais tout bonnement, car vous ne pouviez me refuser. Moi, je ne suis que votre amie. J’applaudis pourtant à votre résolution de ne devoir tout qu’à vous-même. Je suis heureuse de penser que vous donnerez relâche à cette active fabrication d’idées. Vous irez loin, dites-vous ; cela vous délassera la tête et vous laissera de bons souvenirs. Puis, vous, enfant de Paris, ne passerez pas une année sans y revenir, et nous, vos amis, vous reverrons. Je vais, en arrivant, arranger de suite mon parloir et votre chambre, et vous viendrez dater quelque chose de Frapesle, car à Frapesle, vous travaillerez ; la vie vous y sera facile et douce. Vous ferez une prière à votre bon ange, et s’il est miséricordieux, il viendra embellir votre séjour et vous exempter de toute préoccupation. Lisez-lui mon opinion sur Eugénie Grandet et Gaudissart ; je suis toute heureuse, quand je sais que je me rencontre avec elle pour le fond des choses, car, quant à la partie purement littéraire, je me reconnais indigne et n’y ai aucune prétention. J’ai vécu trop sérieusement, et trop solitairement, pour avoir étudié beaucoup les formes.

Carraud me charge de vous dire qu’il y a un moyen de vous soustraire au pillage belge [14] de vos livres ; c’est de les vendre à Bruxelles, avant la France. Puis, le nombre d’exemplaires vendus épuisés, vous vendriez en France, et vous recueilleriez le prix de vos travaux ; il discutera cela avec vous quand nous vous posséderons. Je compte si bien sur votre amitié et je vous connais si bien que je ne crains pas, toute infime que je suis, de critiquer vos ouvrages, vos actions, sans la moindre appréhension de refroidissement de votre part. Nous sommes d’opinions différentes en tout, parce que nous sommes placés différemment dans le monde, et que nous sommes de complexion différente aussi. Mais cela ne touche en rien le sentiment que ressent un noble cœur pour un autre digne de le comprendre. Toutes vos tendres flatteries me touchent orgueilleusement ; je ne les refuse pas, parce que je vous aime assez pour satisfaire à tout ce qu’elles espèrent de moi ; et il y a quelque mérite à une femme, être incomplet, à aimer d’amitié franche et immuable.

Frapesle s’arrangera lentement, parce que les revenus sont minces, mais quels qu’ils soient, je sais que vous y serez bien, et comme j’y recevrai peu de monde, je tiens peu au luxe. Je n’aurai et ne puis avoir que le confort. Vous étrennerez mon billard ; je n’emporte pas celui d’ici ; j’en ai commandé un autre. Ma libération prochaine me donne une patience merveilleuse pour supporter les voisins. Madame a fait une fausse couche qui a failli lui coûter la vie, je crois vous l’avoir déjà dit ; elle est tout à fait mieux ; seulement, elle ne marche pas encore. — Le triste événement qui a marqué pour moi la fin de l’année a retardé l’achèvement de mon souvenir annuel. Quoique tardif, vous le recevrez avec plaisir, et pensez bien qu’à chaque point j’émettais une pensée pour vous. Ayez la précaution de remonter l’écran de bas en haut, afin que l’endroit de la broderie ne frotte pas le bois extérieur, puis ne le montez que jusqu’à la broderie du bas : il descendrait trop difficilement. Je n’avais pas prévu cette difficulté et ici, l’on n’a pu me faire un autre bois. Auguste vous écrira plus tard ; il est en inspiration, et ne veut pas quitter sa palette : il a fait de merveilleux progrès cet hiver, vous verrez. Ivan est toujours un bon petit garçon, sans beaucoup d’énergie. Hélas ! j’en tirerai parti, mais je ne puis refaire le physique faible et délicat. Carraud vous aime à sa manière, et beaucoup.

Adieu, caro, carissimo.

Balzac a quitté Genève le 8 février pour regagner Paris, il trouva à son arrivée la lettre de Mme Carraud : « Je ne puis rien dire de vos critiques, répond-il, si ce n’est que les faits sont contre vous. A Tours, il y a un épicier en boutique qui a huit millions : M. Eynard, simple colporteur, en a vingt et a eu treize millions en or chez lui ; il les a placés en 1814 sur le grand livre, à cinquante-six francs, et s’en est fait vingt. Néanmoins, dans la prochaine édition je baisserai de six millions la fortune de Grandet [15]. » Puis il promet d’aller à Frapesle, avec Mme de Berny, si l’état de santé de cette pauvre amie le permet. Il tint sa promesse et alla se mettre au vert chez ses bons amis [16]. Il en avait grand besoin, car de nouveaux excès de travail avaient failli le tuer.

De Frapesle, il écrivait le 10 avril à Mme Hanska : « Mes travaux de nuit, mes excès, tout cela s’est payé. Je suis tombé dans un anéantissement qui ne m’a permis ni de lire, ni d’écrire, ni d’écouter même un raisonnement suivi. Ma faiblesse corporelle équivalait à la faiblesse intellectuelle... Cette fois, elle a été voisine de la mort et voici dix jours que je suis en convalescence. Le docteur a ordonné le changement d’air, le repos absolu, nulle occupation et une nourriture abondante. Me voici donc, pour une dizaine de jours, en Berry, à Issoudun (Frapesle), chez Mme Carraud [17]. »

Le 21 avril, il était de retour à Paris. Cependant, Mme Carraud, fatiguée par une prochaine maternité, donnait de vives craintes à ses amis. Le 9 juin, elle écrivait à Balzac :

J’ai la joie de vous annoncer, mon cher Honoré, qu’une partie du projet que vous m’aviez suggéré sera exécutée l’année prochaine. Carraud vient de passer un bail qui lui permet de se débarrasser des bâtiments qui masquent la cour, vis-à-vis la maison du fermier. Quant à éloigner cette dernière, et bâtir deux avant-corps, nous n’y pensons pas, quelque agrément qu’il pût en résulter.

N’eussions-nous pas en perspective un accroissement de famille qui nous force à restreindre nos dépenses, nous n’aurions pas eu la possibilité de mettre quelques mille francs à cette bâtisse, car nous ne les avons pas en économie, et prendre sur le capital serait improbe : nous ne nous reconnaissons pas le droit de grever l’avenir de nos enfants. Compter sur les épargnes à venir serait folie ; quand on n’a juste que ce qu’il faut pour soutenir le genre de vie que l’on a adopté, il ne faut pas compter se restreindre, sans grande nécessité. Ce sera bien assez d’entamer le fonds pour l’expatriation en Suisse ; mais alors, ce sera sans scrupules, car là tout sera bénéfice pour les enfants. — J’aurais bien pu vous écrire plus tôt ; il y a plus d’un mois que j’ai recouvré la santé et la faculté de jeter quelques pensées à mes amis, mais l’arrangement de la maison m’avait faite matière et je n’avais plus le loisir de songer à autre chose. Tout cela ne va pas vite, car on ne trouve pas tous les jours des décorateurs comme vous, qui font tout magnifiquement. On met pourtant la dernière main au billard en ce moment et, sauf la salle à manger, tout le haut est prêt vraiment. Vous êtes venu trop tôt ; nos millions de roses étaient enivrantes il y a quinze jours. Et, à ce propos, n’aurais-je pas dû commencer par m’excuser de l’irrégularité de la réception que je vous ai faite ? La conscience de ma tant bonne amitié suffisait-elle, aurait-elle dû suffire à me tranquilliser là-dessus ? J’ai bien peur de vous avoir victimé dans cette circonstance, et cela par une sotte crainte. Je me figurais que vous dire la pénurie dans laquelle nous nous trouvions de tout ce qui rend la vie coulante était vous faire injure. Je ne sais pas si vous comptiez assez sur moi pour ne voir purement là-dedans que ce qui y était réellement, le désir de vous bien recevoir. Enfin, si vous avez un peu souffert, j’espère que vous ne m’en voulez pas, et qu’au travers de tout cela, vous aurez encore reconnu ma sincère affection. Je ne sais plus rien de vous ; vous êtes trop précieusement occupé pour que je désire que vous me mettiez au courant de vos agitations. Je n’espère donc qu’en les journaux ; faites vite paraître quelque chose, afin qu’ils me parlent longuement de vous. Auguste nous quitte dans quinze jours, tout affriandé pour son voyage d’Italie, et vous aussi, vous allez quitter la France pour courir après des émotions nouvelles ! Ah ! comme je me sens envie de vous dire que vous prodiguez votre vie, que vous la jetez à tout venant, que vous dépensez des trésors sans résultat ! Moi, je n’ai pas le droit d’en pleurer, mais comme cela me gonfle le cœur ! Au surplus, pourquoi vous dirais-je cela, quand un ange sublime gémit à vos côtés et que ses larmes, si tendrement dissimulées, ne sont pas comprises ! Puis, je vous entends dire : « Ils s’entendent tous pour me désoler. » C’est qu’au fait nous sommes un trio d’affections, bien différentes, mais toutes fortes et désintéressées. Oh ! ne vous fâchez pas, si moi, indigne, je me place près d’elle ; je n’ai point été épurée par les souffrances qu’elle a endurées, mais je sens, heure par heure, tout ce qui la fait vibrer. Vous ne me reconnaîtriez pas ; je suis devenue presque gaie, allante, parlante, prenant intérêt à tout, m’occupant de tout régler, avant le grand jour qui me verra me coucher pour longtemps. Je suis même assez colorée pour faire oublier ma pâleur native. Je me soigne et me respecte comme une princesse ; je dois à ce petit être qui pendant quatre mois a pris si peu d’accroissement des soins infinis, afin qu’il soit doué d’une vitalité rassurante. Pauvre petit ! Vous ne comprendrez jamais ce que c’est que d’être mère ; ce privilège de maternité nous console de tous ceux que la nature vous a donnés, sans doute comme dédommagement, et aussi de ceux, bien plus nombreux, que vous vous êtes arrogés. J’ai vraiment eu longtemps le désir de vous voir vous marier ; maintenant je n’y pense plus ; le doute m’a envahie ; si vous vous mariez je me réjouirai avec vous, mais je ne hâterai pas d’un seul souhait cette perturbation apportée à vos habitudes, et ce bonheur incertain et inconnu mis à la place d’une existence que des jouissances de tête suffisent à remplir.

Adieu, cher, j’ai peine encore à écrire, bien qu’il n’en résulte aucun mal réel pour moi ; mais j’éprouve une immense difficulté nerveuse à faire agir ma plume. Dites à Laure que je la félicite de s’être conservée belle ; dites à Mme de Berny que je la vénère profondément. Tâchez, vous, Honoré, de venir avec nous, mais pour un temps plus long, qui vous permette de vous reposer d’abord et ensuite de vous distraire.

Adieu encore.


Et Borget ajoute en post-scriptum :

Je vais partir bientôt, Honoré ; veuillez penser au marquis de Salvo [18], si toutefois le marquis veut donner des lettres de recommandation à qui ne l’est pas.

Adieu ; portez-vous bien. Je vous serre la main, et vous prie d’offrir à Mme de Berny l’expression de ma sainte gratitude.


Balzac est toujours surmené ; au mois d’août il écrit : « Je ne vous oublie pas, moi ! mais je travaille nuit et jour et n’ai pas une minute pour écrire. Je vous en prie, faites-moi savoir par un mot comment vous vous portez ; quelques détails sur votre santé. J’ai ici une lettre pour Borget ; je vous l’envoie, faites-la-lui passer ; je ne sais où il est [19]. »

Puis il lui conte des histoires de libraires, Gosselin, Werdet. Mme veuve Béchet. La santé de Mme de Berny contribue à l’inquiéter : « Elle est à la campagne, et moi je suis forcé d’être à Paris. » Le 15 août, Mme Carraud lui répond :


Vous oublier, mon cher Honoré, et cela parce que je ne puis vous écrire ! Mais vous ne savez pas que je n’écris qu’avec douleur, que je ne puis marcher sans douleur, que tout mouvement m’est infiniment douloureux ? Je me lève, plus lasse que je ne me suis couchée, ce qui semble d’abord assez singulier, mais qui s’explique par la difficulté que j’ai à conserver une position supportable ; en somme, je ne vaux pas grand chose. J’ai eu un mois de bon, et j’en ai bientôt vu la fin. Non, en vérité, je ne vous oublie pas ; je n’avais pas oublié que vous deviez aller en Italie, et j’ai cru longtemps que vous y étiez réellement. J’espérais que vos charges littéraires s’allégeraient plus vite, et vous rendraient cette liberté après laquelle nous soupirons tous. Votre lettre, qui m’a fait tant de bien, m’a été particulièrement précieuse sous ce rapport que vous apercevez enfin cette oasis, comme vous dites, où vous devez respirer un air plus léger, et trouver la vie plus coulante.

Alors vos amis réclameront leurs vieux privilèges et vous solliciteront de venir les voir, moi entre autres. J’aurais bien désiré quelques jours de votre temps, car je ne sais s’il est bien raisonnable à moi de compter sur un avenir quelconque. Je suis assez bien casée maintenant pour ne pas craindre de vous recevoir. Mais, outre que je n’oserais solliciter un sacrifice dont tout l’avantage serait pour moi seule, ce que vous me dites de l’état de Mme de Berny m’affecte vivement et me fait sentir que je ne puis rien demander pour moi. Pauvre dame ! Il est impossible d’être plus attaché à quelqu’un que l’on ne connaît qu’intuitivement, que je ne le suis à Mme de Berny. Elle et vous se confondent en moi, et s’il faut vous le dire, il m’arrive souvent de vous la préférer. — Vous allez bien la voir quelquefois ?

Quels détails de ma vie uniforme pourraient être pour vous de quelque intérêt ? Je suis seule maintenant : Mme Desgrey est à Paris pour deux mois et m’a laissé sa fille ; elle demeure rue de l’Université, 26. Auguste doit être à Milan, à présent, avec son compagnon de voyage, de fortune, et de succès peut-être. Son ravissement l’a pris au Jura et ne semble pas devoir le quitter. Je ne puis plus parcourir mes jardins ; le soir au clair de lune, je puis encore faire quelques tours dans l’allée qui, maintenant, tient au jardin ; c’est mon meilleur instant, et j’ai encore deux grands mois à languir ainsi ! Pourtant je ne désire point voir arriver le terme de cette demi-existence ; qui sait ce qui m’attend ?

Adieu, j’ai fait plus que mes forces ne me permettaient. Si vous aviez le temps d’écrire, je vous demanderais ce que devient Laure. J’ai eu le Médecin de campagne un peu plus tard que vous ne l’aviez annoncé à Auguste ; il y a donc eu avantage à le publier en quatre volumes ? — Nous commençons à être un peu débarrassés de nos ouvriers, ce qui laissera à M. Carraud le loisir de vous écrire, si moi je ne pouvais le faire. — Ivan va bien, sans avoir une santé remarquable. Mille bonnes choses d’amitié pour vous ; je crains si fort de penser ou de lire que je m’abrutis le plus que je peux dans des occupations matérielles. Pourtant, je conserve assez de l’être moral pour influencer de toute façon l’avenir de mon fils, si je dois lui manquer. Amitiés encore.


En octobre, Balzac est à Saché chez M. de Margonne, c’est là qu’il va composer son admirable Père Goriot. Au début d’octobre, une lettre de Mme Carraud vient l’y trouver.


A Frapesle, le 4 octobre 1834.

C’est avec plus de plaisir que jamais, cher Honoré, que je vous recevrai. Si proche d’une crise importante, sinon décisive, j’ai besoin de presser la main de mes amis, et la vôtre le sera chaleureusement. Je savais que vous deviez aller en Touraine, mais je ne croyais pas que ce fût aussi tôt. En quittant Loches, vous arriverez à Châtillon-sur-Indre ; toute cette route offre peu d’appas aux curieux. Le château de Palluau, qui a eu sa célébrité sous la Révolution, et qui se trouve entre Châtillon et Buzançais, méritera peut-être que vous vous écartiez de votre route pour le visiter. A Buzançais sont en ce moment Mme Desgrey et sa fille, lesquelles seront charmées de vous voir. Elles vous enseigneront la route la plus courte pour arriver à Issoudun. Moi, je n’en sais pas d’autre que celle qui passe à Châteauroux. Ne tardez pas trop, et venez jouir de mes dernières roses. Mon pauvre jardin, naguère si riche de fleurs, se ressent de ma désespérance de l’avenir : plus rien ne me sourit. Si vous arrivez à temps, j’aurai donc encore une émotion douce ! le courage ne me manque pourtant pas.

Adieu, bon voyage, et prompte arrivée. J’ai une jolie petite chambre pour vous, où rien ne troublera votre repos. Carraud se réjouit de votre arrivée ; il va controverser à son aise.

ZULMA.


Honoré viendra t-il à Frapesle avant de retourner de Saché à Paris ? Une fois de plus Mme Carraud est déçue.


A Frapesle, le 14 novembre 1S34.

Je vous ai attendu bien longtemps, cher Honoré ; quand Mme Desgrey est arrivée de Villedieu, où elle était chez sa cousine, j’ai bien cru vous voir derrière elle ; mais non. Ce chagrin vint s’ajouter à bien d’autres qui m’avaient envahie ; je croyais ne plus vous revoir, et je regrettais de ne pas vous avoir mieux dit adieu. J’étais si malade, si découragée, que le peu de forces de toute nature qui me restaient suffisaient à peine pour recevoir des hôtes, qui m’avaient accordé quelques semaines ; je ne pouvais plus écrire ; je dépassais de quelques jours, dans mes prévisions, le terme de ma grossesse, et comme d’ordinaire je le devançai ; le temps qui s’écoula entre celui que j’avais fixé pour ma délivrance et cette crise, me fut un supplice insupportable, et qui me demanda des efforts inouïs pour me maintenir dans un état qui ne laissât aucune inquiétude à mon mari, auquel je devais cacher les miennes.

Tout cela vous explique pourquoi je ne vous ai pas répondu, et vous ne m’en voudrez pas. Nous parlions de vous chaque jour ; quelque bruit soudain se faisait-il entendre, de suite nous vous voyions entrer, et pendant quelques minutes chacun restait en suspens. Enfin, vous avez écrit qu’il ne fallait plus vous attendre. Le printemps ! C’est bien loin, quand surtout l’Autriche se place entre nous[20]. Pourtant, puisque l’hiver est arrivé, je ne vous veux qu’avec les fleurs. Je ne suis bonne à voir qu’en ce temps de fleurs et de soleil ; puis, mon petit Yorick[21] vous ennuierait ; dans quatre ou cinq mois, il vivra de sa propre vie. J’ai eu du chagrin pendant deux jours de me voir un autre garçon ; puis je me suis relevée de cela, et je me renferme dans la pensée que je suis appelée à accomplir une tâche difficile, mais grande, celle de faire deux hommes. Je ne faiblirai pas devant d’aussi graves obligations et aucun sacrifice ne me coûtera. Je fais maintenant l’abandon de ce que j’avais conservé de ma vie si doucement et si tristement rêveuse ; mon moi s’efface complètement dans l’existence de ce nouvel enfant. Je me serais reproduite avec perfection dans une fille ; mes fils demandent beaucoup plus et je leur donnerai tout. Vous, mon cher Honoré, vous avez travail et devoirs, et il vous reste encore assez de vide pour accueillir le caprice et la fantaisie ; c’est là sans doute le propre d’une organisation exubérante ; moi, je m’abîme tout entière en mes enfants, et il ne me reste que la vie extérieure, sans goûts, sans passions, presque sans pensées autres que celles qui peuvent leur être appliquées, soit immédiatement, soit dans l’avenir. Mme Desgrey retourne à Paris : je vais être seule, et cet hiver passé ainsi m’offre un plaisir que j’enviais depuis longtemps. Vous ne concevez pas cela, vous, Honoré, quatre mois sans distractions, sans l’abord d’un visage nouveau ! Eh bien ! je me délecte en pensant à ce bon hiver. Moi qui n’ai désir ni d’argent, ni d’ambition, ni de luxe, il me faut une épine dans ma vie matérielle : Frapesle touche la ville de trop près ; il y aurait moyen de l’éloigner en rompant le pont, mais le Maître ne le veut pas !

J’ai eu votre troisième livraison, peu de temps après que vous me l’eûtes annoncée. La Maison Claës[22] m’a beaucoup plu. On vous reprochera de tenir trop peu de compte des difficultés matérielles de la vie, et l’on aura raison ; mais pour moi, cela importe peu à la grande pensée que vous avez faite envahissante, puis dévorante, puis consumant tout. Madame Claës est admirable ; pas assez mère pourtant, mais elle aimait ! Il n’y a plus d’objections à faire contre la passion, quelle qu’elle soit. Le ciel nous en garantisse !

Que faites-vous maintenant ? Et les Drôlatiques, si spirituels, et qui survivront à tout ? Vous n’y pensez donc plus ? Je me rouille ici. Quand ma tête sera un peu plus forte, je me jette dans des études grammaticales, pour être claire avec Ivan ; je ne veux pas lui laisser de livres d’ici à quatre ans ; de livres à apprendre par cœur, bien entendu. Je ne vis que de votre littérature, et du souvenir de mes amis.

Auguste est à Naples. Rome n’a pas eu de charmes pour lui ; il était ravi à Venise, et si son compagnon y eût consenti, il y serait encore. Il m’assure de son zèle sans relâche, et au fait il doit travailler, car, à travailler ainsi, il sacrifie une partie de son avoir.

Adieu, que toutes les joies de la terre pleuvent sur vous ; vous êtes trop vieux ou trop jeune pour celles du ciel. Nous irons, à dater de l’année prochaine peut-être, passer les hivers à Paris. Là, je vous verrai, je pense. Adieu ; amitié bien tendre.


L’année 1834 se termina comme les précédentes par des travaux surhumains : le 14 décembre, Balzac commence, dans la Revue de Paris, la publication du Père Goriot et prépare les Mémoires de deux jeunes mariées [23]. Au début de janvier 1835, Borget rentre en France, passe à Frapesle et emmène à Paris le jeune Ivan muni d’une lettre pour Balzac.


Mon cher Honoré,

C’est mon petit Ivan qui vous remettra cette lettre. Auguste l’emmène à Paris, pour jouir de ses ébahissements à la vue de tant de merveilles. Je ne doute pas qu’il ne me rapporte quelques-uns des bons sourires d’amitié que vous lui prodiguerez. — Vous êtes triste, m’a dit Auguste, votre vie ne vous satisfait pas ; votre ange gardien est malade ! Cette dame est un des cultes d’Auguste, et il est très affecté de la savoir souffrante. Ne vous verrai-je donc jamais l’âme en paix ? Comment se fait-il qu’avec tant d’éléments de bonheur, vous ne puissiez réussir à le caser définitivement chez vous ? Vos ennuis perpétuels m’ont désenchantée de la vie de Paris ; je ne m’y livrerais qu’ avec répugnance et forcée seulement par une nécessité quelconque. Tout doit se dissoudre dans cette fournaise plus ardente que celle de l’enfer ! Ne vous verrai-je donc jamais fixé à la Grenadière, puisque c’est là votre éden ? J’ai grande foi dans l’influence de la vie simple et peu accidentée sur un talent comme le vôtre. Aucune organisation ne saurait fournir à cette constante ébullition, et la vôtre, tout exceptionnelle qu’elle soit, y périra, et je ne vous reconnais pas le droit d’en hâter la destruction. Vous m’avez écrit que vous deviendriez propriétaire de votre ermitage [24] cette année. Courez donc vite vous y établir, et ne pensez aux embellissements que dans quelques années. D’ailleurs, vous avez rendu ce lieu si célèbre que je doute qu’il vous soit permis de porter une main profane sur son ensemble. Les élus que vous admettrez dans ce sanctuaire exigeront qu’il reste tel que l’aimait l’inconnue. Que je serai donc heureuse quand je recevrai une lettre de vous datée de Tours ! Ne vous tourmentez point de l’impossibilité où vous êtes de m’écrire et ne m’en veuillez pas de mes silences : la venue d’Yorick a singulièrement compliqué ma vie. Puis mon état maladif m’a forcée de laisser bien des choses en souffrance l’année dernière, et je ne suis pas assez haut placée pour me dispenser d’une foule de soins. Puis mon mari marche difficilement, et je dois le suppléer souvent. Je n’ose plus vous demander de me venir voir ; j’ai la conscience du mauvais accueil que je vous fis involontairement, et j’aurais mauvaise grâce peut-être à vous engager à tenter de nouveau mon hospitalité. Je sens aussi que, devenus étrangers comme nous le sommes à tout ce qui vous occupe, notre rapprochement aurait peu de charmes pour vous, et nous en aurions tout le bénéfice. J’ai pourtant une petite chambre bien solitaire.

Si vous avez jamais eu envie de voir l’Italie, Auguste vous la fera bien passer. Il est par trop désenchantant. Selon lui, vous auriez bien fait de ne pas aller à Rome exprès pour y voir Saint-Pierre. Je croirais presque que c’est un bien d’être aussi calme et aussi positif. La vie ne perd pas autant à se dérouler. Si vous aviez du temps à perdre, je vous prierais de me dire ce que vous pensez d’Ivan. Il a un dégoût du travail vraiment affligeant. En sera-t-il toujours ainsi [25] ? Je m’en tourmente beaucoup. J’ai peur qu’il ne soit du nombre de ces enfants intelligents qui ne font rien du tout, et rien ne me ferait plus de peine que de voir le premier des dons du Ciel ainsi négligé. Mais vous êtes si occupé que vous ne pourrez observer cette jeune tête. Mon petit dernier a l’œil prodigieusement intelligent ; mais, du reste, il n’est pas beau. Dieu fait bien ce qu’il fait, car si Yorick eût été une fille, son immense bouche m’eût paru désolante, et son beau front ne m’eût pas suffi pour me tranquilliser, car une femme laide, qu’est-ce ?... moins que rien.

Mon pauvre Honoré, je ne sais trop ce que je vous dis ; j’ai la gorge et la tête malades et je n’ai pas l’esprit libre. Excusez-moi, j’aurais voulu vous dire une foule de choses, et vraiment je ne le puis ; je ne sais même pas quelles lettres je forme. Adieu. Si vous souffrez, réfugiez-vous dans des cœurs amis qui vous sont toujours ouverts.


Balzac reste sans écrire jusqu’au vendredi-saint, 17 avril. L’achèvement de Séraphita l’a contraint à de nouveaux excès de travail. Il a besoin de repos. Dès qu’il aura publié Séraphita, il ira prendre une dizaine de jours de liberté dans le Frapeslois. Puis il continue : « Il y a en moi plusieurs hommes : le financier, l’artiste, luttant contre les journaux et le public ; puis l’artiste luttant avec ses travaux et ses sujets ; enfin il y a l’homme de passion qui s’étale sur un tapis aux pieds d’une fleur, qui en admire les couleurs et en aspire les parfums. Ici vous direz : « ce coquin d’Honoré ! » Non, non, je ne mérite pas cette épithète ; vous me trouveriez bien bon de me refuser à toutes les joies qui se présentent et de m’enfermer pour continuer l’œuvre [26]. » Et il termine ainsi :


...Aussi me verrez-vous bientôt. C’est une escapade caressée avec bonheur depuis quelques jours. Mais aussi depuis quelques jours, je suis tombé sous la domination d’une personne fort envahissante [27], et je ne sais comment m’y soustraire, car je suis comme les pauvres filles, sans force contre ce qui me plaît.

Allons, à bientôt. J’irai prendre possession de cette petite chambre que je grille d’habiter, car, foi d’honnête homme, j’aspire après une semaine ou deux de repos absolu, et je ne l’ai jamais goûté que près de vous. Il va y avoir bien de l’égoïsme dans ma visite. Mon Dieu, je ne sais plus rien de vous, vous me délaissez ! Laure est sous le coup d’une terrible maladie de femme ; elle a besoin pour s’en tirer de six mois de traitement et de patience. Pauvre Laure ! J’ai de bien cuisants chagrins. Henri [28] est pour nous tous une cause de larmes et de désespoirs. Gardez cette confidence entre nous deux. Prenez bien soin de vous. Soutenez bien Borget dans sa carrière d’études et de travaux. Mille gentillesses à vos enfants. Baisez-les tous deux au front ; je voudrais leur porter ainsi bonheur. Mille tendresses que vous savez par cœur, j’espère, et mille amitiés à M. Carraud. Dites-moi donc si M. Périolas est encore pour quelque temps à Bourges. Il faudra que je séjourne huit jours là, pour étudier la ville.


Sans retard, Mme Carraud répond :


A Frapesle, le 19 avril 1835.

Je ne vous écris plus, c’est vrai ; pourquoi ? Je pense à vous, j’en parle, j’ai le désir de me mettre en rapport avec vous ; je saurai bien en trouver le temps, quoique j’aie peu d’instants de liberté.

Pourquoi donc ne vous ai-je pas soumis une seule pensée, à vous que j’aime bien ? J’ai commencé souvent des lettres restées sans fin ; je ne savais pas les finir. Je me suis sérieusement examinée sur les causes de ce phénomène anti-amical, et j’ai vu avec douleur que nous suivions deux lignes essentiellement divergentes, et que le temps nous amènerait à ne plus être vus l’un par l’autre qu’en perspective, à moins que vous ne veniez quelquefois chez moi. Mon pauvre Honoré, je sens que je me matérialise invinciblement ; je subis l’influence de mon entourage. Le vulgarisme s’étend sur moi, comme la tache d’huile, et je ne puis y porter remède. Tout ce qui est commun dans les manières et dans l’expression me révolte encore et m’irrite à un haut degré ; mais j’entrevois avec effroi le temps trop prochain où je le souffrirai patiemment et avec philosophie, afin de retrouver un peu de liberté d’esprit, dont j’ai bien grand besoin et que ce supplice de tous les instants m’enlève. J’espère sauver mes sentiments du naufrage et, pour cela, je les émets rarement. J’ai perdu l’habitude de la bonne conversation. J’abhorre ne m’entretenir que des faits, et quels faits, bon Dieu, que ceux qui occupent la ville d’Issoudun ! Ajoutez à cela le manque de lecture et vous arriverez à mon inévitable crétinisation. Le long supplice qui chaque jour amène un pli de plus à mes paupières serait une étude digne du peintre de la Femme de trente ans, mais comment révéler tous ces mystères de cœur ? Il y a là chose sacrée. Tout cela s’effacerait presque à l’énoncer.

J’accueille l’espoir que vous me donnez de venir comme une sainte promesse. J’ai besoin de vous voir ; ce sera presque une régénération d’esprit pour moi ; les huit ou dix jours que vous me consacrerez donneront un aliment au besoin de penser qui n’est pas encore éteint en moi. Pauvre cher ! si ce n’était qu’un vague projet, réalisez-le par charité, car on doit produire le plus de bien possible en ce monde. Je n’ose solliciter l’artiste ; j’aime mieux m’adresser à « l’homme de passion ; » il aura pitié de moi, puisqu’il savoure une fleur ! J’en ai une sous les yeux qui me fait rêver souvent ; c’est un dodécathéon, fleur modeste, qui semble une promesse d’une autre vie. Placez donc un dodécathéon sous vos yeux, pendant que vous travaillez, son parfum vous calmera. Je n’ai plus que cela de poétique dans ma vie, les fleurs ; mais aussi toutes les influences du monde ne m’y feront pas renoncer, d’autant plus que la fleur sauvage me plaît autant que celle qu’on obtient le plus difficilement.

Hé bien ! oui, je dis quelquefois : « ce coquin d’Honoré ! » et je bénis les travaux qui vous empêchent de vous gorger de joies ; car, cher, je trouve que vous en prenez assez comme cela. Non que je prétende établir une balance entre elles et les peines qui vous assiègent ; pour moi, un plaisir ne compense rien, et le chagrin fait toujours une plaie dont la cicatrice est indélébile.

Mais le trop de joies polit l’âme, et si les surfaces polies réfléchissent tout, elles sont glaciales au toucher. Je fais une oraison mentale à cette envahissante créature qui sait si bien vous absorber. Dites-lui la parabole du mauvais riche, et qu’elle permette de glaner les miettes qui échappent à son avidité. J’ai fait faire votre lit ce matin, comme arrhes sur votre arrivée. Vous serez en Béotie, et votre esprit sommeillera tant qu’il le voudra. J’attends M. Périolas demain ; il faut vous trouver avec lui, et vous retournerez à Bourges ensemble. Je m’engage à vous éviter tous les pistonnages de Carraud. Auguste travaille avec acharnement et dans une solitude complète ; il n’est des nôtres qu’aux repas. Vous verrez mon Yorick, et vous lui soufflerez sur le front, afin de fluidifier son intelligence. Rien de bon comme cet enfant, qui n’a encore été mécontent de personne au monde !

Ce que vous me dites de Laure m’affecte beaucoup. Une maladie de femme, à son âge ! C’est effrayant ! Qu’elle soit donc bien patiente et bien docile au traitement qu’elle va entreprendre, car la moindre infraction aurait des conséquences graves et irréparables. Dites-lui que je l’aime toujours bien. J’avais espéré que votre frère, ayant mis la moitié du globe entre lui et sa famille, ne lui donnerait plus de soucis. Quelle fatalité l’a ramené en France ? Votre pauvre mère ! Comme elle doit pleurer ses caresses folles à ce fils-Ià ! Qu’est donc la vie, Honoré, pour qu’on se tourmente tant à la rendre brillante et ornée ? N’a-t-elle pas, même pour ses favoris, une épine cruelle qui fait soupirer après quelque chose de mieux ? Je me soigne, en ne pensant jamais à moi. Oh ! cher, le jour où le moi se sera fait sentir, j’appellerai la mort avec ferveur ! J’espère n’être jamais dégradée à ce point. J’ai l’âme de mon digne père ; il est mort à quatre-vingt-deux ans, sans avoir jamais senti les exigences du moi ; aussi, nous l’adorions.

Adieu, à bientôt, pour Dieu ! Vous ne me retrouverez plus l’année prochaine ; tout sera effacé, détruit !


Encore une déception : Balzac ne vient pas, ne répond pas. Le 17 mai, Mme Carraud reprend la plume.


Eh bien, cher ! vous avez donc laissé nos lilas se faner ? Les roses s’épanouissent, les laisserez-vous passer aussi sans les voir ? Le repos est ici, dans nos allées. Si vous êtes épuisé par vos excessifs travaux, venez à Frapesle ; dès le lendemain vous serez rendu à vos forces premières. Il y a quelque chose dans l’air d’éminemment calme et rafraichissant, et comme ce ne sont pas des inspirations que vous viendrez chercher auprès de moi, rien ne vous manquera. J’ai ici un de mes frères, dont l’esprit original vous plaira [29]. Venez donc, ne fût-ce que pour une semaine. Je vous l’ai déjà dit : « Si vous mettez des années d’intervalle entre vos visites, vous ne trouverez plus rien. J’ai vos volumes ; j’ai retrouvé la Transaction [30], mes amours ; c’est là une des fleurs de votre couronne dont le parfum est le plus goûté par moi. Je ne conçois pas beaucoup la Fille aux yeux d’or [31] ; je suis sans doute déjà trop provinciale pour cela ; puis, toujours occupée d’une seule idée comme je le suis, il me faut quelque chose de bien pénétrant pour agir sur moi. J’ai peur que les œuvres purement d’esprit soient sur moi sans action. Il y a vraiment décadence, et pourtant, mon cher Honoré, je n’envie rien à cette vie exorbitante, comme vous l’appelez, qu’on trouve à Paris ; je ne me surprends pas une seule fois à rêver ce séjour si plein de luxe et de jouissance d’esprit. La solitude à moi toute seule m’irait très bien. Vous êtes bien heureux, vous, la nourriture intellectuelle ne vous manque pas, abstraction faite de celle que vous tirez de votre propre fonds. Si, à cela, vous pouvez joindre quelque bonne amitié nouvelle et qu’il ne faille pas aller chercher à cent lieues, votre sort est beau, et vous seul pouvez le gâter.

Je ne sais plus rien de Laure ; après avoir tenté bien des fois de renouer avec moi, elle ne s’est pas senti la force de continuer ; je n’en ai pas moins pour elle de doux souvenirs. Vous ne parlez plus de mariage ? Vous sentiriez-vous donc la force de vieillir seul ? N’avez-vous jamais désiré le contact journalier d’un enfant ?... Si, au milieu de vos succès et de vos enivrements, le vide s’était fait sentir, hâtez-vous, et n’attendez pas que vous ayez quarante ans ; il n’y a pas de femme pour un homme de cet âge.

Allons, décidez-vous à venir vous bêtifier un peu avec nous. Nous vivons bien seuls, et vous n’aurez à subir aucune espèce d’importunité ; nous vous aimons bien tous, cela doit vous aider à faire le sacrifice des délices de Chaillot [32]. A ce propos, j’aurais bien des choses à vous dire, si je vous exprimais une partie seulement des idées qui me sont venues sur ce sujet. Mais je veux savoir d’abord quelle distance cette année a mise entre nous ; car, mon affection étant à l’abri de toute influence, je ne voudrais pas vous blesser dans vos habitudes et, fussiez-vous féminisé au plus haut degré, je saurais bien trouver, derrière toute cette mousseline, derrière tous les cachemires et les bronzes, le Balzac nativement bon et cordial. — Adieu, l’électricité de cette journée me presse de toutes parts et ne me laisse que des idées sans suite, tant la vibration qu’elle me communique est active. Bonne santé, et surtout bonne amitié de vous à vos amis. Faites qu’elle ne passe pas au rang de ces honorables traditions que l’on se transmet religieusement dans les familles. Ivan ne conçoit pas que vous pensiez à lui ; Carraud me dit de vous parler de lui. Adieu.


La lettre de Mme Carraud fit un long parcours avant de parvenir aux mains de son destinataire, car, depuis le 12 mai, le marquis de Balzac était installé à Vienne, à l’Hôtel de la Poire, avec son laquais et ses bagages timbrés aux armes des Entraigues.


MARCEL BOUTERON.

  1. Copyright by Marcel Bouteron, 1922.
  2. Voyez la Revue des 15 décembre 1922, 15 janvier, 15 février et 1er mars 1923.
  3. Le séjour de Balzac à Genève a été raconté par le vicomte de Lovenjoul dans Un roman d’amour, Paris, C. Lévy, 1896, in-12, p. 96.
  4. Thérèse, la fiancée manquée du relieur Spachmann.
  5. A Frapesle.
  6. Scènes de la vie de province, t. Il (Études de mœurs au XIXe siècle, t. VI) ; Paris, Veuve Ch. Béchet, 1833 (daté de 1834), in-8 (Éd. L. Conard, t. IV).
  7. Ibid. (Éd. L. Conard, t. IV.)
  8. Correspondance, I, 266 (Genève, 30 janvier 1834).
  9. Parue dans le premier volume des Scènes de la vie de province (Études de mœurs au XIXe siècle, t. V) ; Paris, Veuve Ch. Béchet, 1834, in-8 (Édition L. Conard, t. VIII).
  10. Et non une véritable union : « Jurez, dit Eugénie Grandet à son mari, de ne me rappeler aucun des droits que le mariage vous donne sur moi... » Éd. L. Conard, t. VIII, p, 479.)
  11. Et que Balzac ne dédaignait pas. (Les Cahiers Balzaciens, n° 1, 1923, p. 8.)
  12. Scènes de la vie de province, t. Il (Études de mœurs au XIXe siècle, t. VI) ; Paris, Veuve Ch. Bcchet, in-8 (Éd. L. Conard, t. X).
  13. Dans les Contes drolatiques.
  14. En 1839, Balzac déclarait que « la contrefaçon belge lui avait enlevé douze cent mille francs. » (Les Cahiers Balzaciens, n* 1, p. 19.)
  15. Balzac ne réduisit que de trois millions la fortune du père Grandet (Éd. Fume, 1843, t. V, p. 344 : dix-sept millions ; l’édition originale, 1834, p. 333 : vingt millions. Laure Surville lui avait fait la même critique et Balzac avait riposté : « Ah ! il y a trop de millions dans Eugénie Grandet ? Mais, bête, puisque l’histoire est vraie, veux-tu que je fasse mieux que la vérité ? » (Correspondance, I, 261.) Balzac avait, en effet, connu, près de Saumur, un fameux avare, dont nous reparlerons quelque jour.
  16. Correspondance, I, 264 (lettre inexactement datée de fin décembre 1833 et qui fut écrite après le 8 février 1834).
  17. Lettres à l’Etrangère, I, 148.
  18. Ami napolitain de Balzac.
  19. Correspondance, I, 282.
  20. Un projet de voyage à Vienne où séjournait Mme Hanska, projet réalisé en mai-juin 1835.
  21. Yorick, né le 29 octobre 1834.
  22. Parue en 1834 dans le tome III des Scènes de la Vie privée (Études de mœurs au XIXe siècle, t. III) ; Paris, Veuve Béchet, in-8.
  23. Correspondance, I, 321.
  24. La Grenadière, à Saint-Cyr, près de Tours. « La Grenadière m’a échappé, » écrivait Balzac en 1836 (Lettres à l’étrangère, I, 365). Béranger y habita en 1838.
  25. M. Ivan Carraud mourut le 11 septembre 1881, inspecteur général des Eaux et Forêts, officier de la Légion d’honneur.
  26. Correspondance, I, 297. Le début de cette lettre a été seul publié ; la fin que nous donnons ici, est inédite.
  27. S’agirait-il de Mme Hanska ? ou, peut-être, de Mme Marbouty (Claire Brunne, en littérature), qui, déguisée en homme, accompagna Balzac à Turin en 1836 ? C’est à elle que la Grenadière fut primitivement dédiée. (Éd. L. Conard, t. IV, p. 416.)
  28. Frère cadet de Balzac, mort aux colonies.
  29. Sans doute, Silas Tourangin, né en 1790, officier, de six ans plus âgé que sa sœur Zulma.
  30. Le colonel Chabert.
  31. Épisode de l’Histoire des Treize.
  32. 13, rue des Batailles, où Balzac habita de 1835 à 1838, sous le nom de Mme veuve Durand. La rue des Batailles n’existe plus ; elle a été remplacée par la partie de l’avenue d’Iéna, située entre la place d’Iéna et les jardins du Trocadéro.