Traité populaire d’agriculture/De l’assolement
ARTICLE DEUXIÈME.
De l’assolement.
L’assolement n’est rien autre chose que la division des champs d’une exploitation en parties égales entre elles et, en même temps, égales au nombre des années qu’exige la rotation que l’on a adoptée.
En d’autres termes, c’est la division du territoire d’une exploitation en un nombre déterminé de soles et il y a juste autant de soles que la rotation met d’années à s’accomplir.
Chacune de ces soles est affectée à l’une des cultures qui font partie de la rotation, et les différentes plantes qui forment la rotation se succèdent les unes aux autres sur la même sole, chaque année.
En définitive, ainsi combinée avec l’assolement, la rotation se perpétue et présente toujours la même étendue pour la culture de chacune des plantes qui la composent.
Précisons par un exemple.
Supposons que les différentes circonstances qui influent sur le choix des plantes que nous voulons cultiver nous aient conduits à adopter les quatre suivantes :
Pommes de terre, trèfle, blé et avoine.
Nous nous arrêterons alors à la rotation suivante :
Première année |
Pommes de terre. |
Deuxième année |
Avoine. |
Troisième année |
Trèfle. |
Quatrième année |
Blé. |
Il s’agit maintenant d’adopter un assolement conforme à cette rotation.
Il faut tout d’abord diviser l’exploitation en quatre soles égales, dont chacune sera affectée à l’une des cultures qui font partie de la rotation.
On aura ainsi pour la première année :
1ère sole |
Pommes de terre. |
2me sole |
Avoine. |
3me sole |
Trèfle. |
4me sole |
Blé. |
La deuxième année la première sole recevra la deuxième plante de la rotation ; un semblable changement aura lieu pour chaque sole.
On aura donc pour la deuxième année :
1ère sole |
Avoine. |
2me sole |
Trèfle. |
3me sole |
Blé. |
4me sole |
Pommes de terre. |
C’est-à-dire que chaque année nous donnera toutes les récoltes qui forment la rotation, toute la différence c’est que chaque récolte en particulier change de sole tous les ans.
En résumé, le cours de culture ci-dessus suppose le tableau suivant de la rotation combinée avec l’assolement.
SOLES. | ||||
No 1. | No 2. | No 3. | No 4. | |
1ère année |
Pom. de terre. | Avoine. | Trèfle. | Blé. |
2me année |
Avoine. | Trèfle. | Blé. | Pom. de terre. |
3me année |
Trèfle. | Blé. | Pom. de terre. | Avoine. |
4me année |
Blé. | Pom. de terre. | Avoine. | Trèfle. |
Après l’expiration des quatre années que dure la rotation, chaque sole, on peut s’en convaincre aisément, a donné les quatre cultures différentes : pommes de terre, avoine, trèfle, blé, et l’on a terminé la rotation. On reprend pour les cinquième, sixième, septième et huitième années, l’ordre suivi pour les quatre premières : on a alors une seconde rotation qui se succède de la même manière sur chaque sole de l’exploitation.
C’est ainsi que l’assolement exprime dans l’étendue ce que la rotation exprime dans le temps.
Nous avions donc raison de définir le cours de culture l’accomplissement, dans le temps et dans l’étendue, de la rotation de culture sur toutes les terres (soles), l’assolement.
En général, on confond l’assolement avec le cours de culture, ou plutôt on donne à la première expression toute la signification attachée à la dernière.
On a alors l’assolement en général qui n’est autre chose que le cours de culture, et l’assolement en particulier qui est l’assolement proprement dit.
Ce qui a fait prévaloir l’expression d’assolement, c’est, dit Gasparin, que c’est un mot simple, tandis qu’il en faut trois dans notre langue pour exprimer l’idée de succession de cultures.
Nous nous permettons cette observation afin que nos lecteurs sachent à quoi s’en tenir sur l’emploi de ces diverses expressions.