Traité populaire d’agriculture/Choix des plantes

SECTION PREMIÈRE.

Du choix des plantes.

Le choix des plantes est soumis à plusieurs conditions, que l’on divise en conditions naturelles et en conditions accidentelles.

Les premières sont stables, en ce sens, qu’étant donnée une localité ou une terre en particulier, elles n’y changent pas, du moins sensiblement. Tels sont le sol, le climat et les autres circonstances physiques.

Les secondes, l’engrais, le travail, etc., peuvent changer d’une année à l’autre.

I
CONDITIONS NATURELLES.

1oParlons d’abord du sol.

Chaque plante a un sol de prédilection.

De là, il faut conclure qu’elle exige d’autant moins d’engrais que le sol lui convient plus, ou que son produit net est d’autant moins considérable qu’elle se trouve placée dans un sol ne lui convenant pas.

ROTATION. Choix des plantes. Conditions naturelles.
Conditions accidentelles.
Succession des récoltes. Ameublissement du sol. Préparation directe.
Préparation indirecte.
Aménagement
des engrais.
Nature du sol.
Nature des plantes. Plantes enrichissantes.
Pl. améliorantes.
Pl. ménageantes.
Pl. appauvrissantes.
Pl. épuisantes.
Successibilité des plantes. Plantes sympathiques.
Plantes antipathiques.

Voici quelques données relatives à ce sujet. Nous mentionnons à la suite de la désignation de l’espèce du sol, les plantes qui lui conviennent le mieux.

Dans un sable aride : seigle, sarrasin, pommes de terre fumées.

Gravier humide : prairie.

Sable mélangé d’une autre terre et non aride : seigle, sarrasin, pommes de terre, navets et orge, et dans les endroits bas et humides, graminées.

Sable plus mélangé, de bonne qualité : avoine, orge, trèfle, lin, pois, carottes, tabac, gramens.

Sable le plus fertile : chanvre, tabac, maïs, blé, féveroles.

Dans la glaise : pâturages.

Glaise mélangée de sable, de chaux et d’humus : blé, avoine, orge, fèves, vesces, trèfle, chou, navets, pommes de terre.

Dans l’argile on peut, avec de l’engrais, cultiver presque toutes les plantes.

Dans un sol d’alluvion de nature compacte : blé, orge, avoine, trèfle, fèves, gramens.

Sol d’alluvion de nature légère : pois, fèves, orge, avoine.

Sol tourbeux : sarrasin, avoine, seigle, navets et pommes de terre, et si ce sol est chaulé ou marné, orge et blé.

Sol calcaire : blé, orge, pois, navets, pâturage.

2oRelativement au climat, voici à peu près quelles sont les exigences des plantes :

Le maïs, le tabac, le sarrasin, l'orge, le chanvre, les betteraves sont les plantes qui ont le plus besoin de chaleur ; la plupart des céréales, les pommes de terre, le lin, les navets, le trèfle, les légumineuses, les choux, les gramens se contentent d’une chaleur moins forte. Le seigle craint les gelées tardives du printemps ; le tabac, les premières gelées de l’automne.

Dans un climat sec, le seigle, le maïs, l’orge, les betteraves, les pois, le sarrasin conviennent. Sous un ciel humide, on doit préférer le blé, l’avoine, le trèfle, les pommes de terre, les navets, les vesces, le lin et les herbages.

3oLa pente du terrain influe aussi sur le choix des plantes, ainsi que son exposition.

Une pente douce est favorable à l’égouttement, une pente rapide est nuisible et empêche les cultures profondes parce qu’elle expose la terre végétale à être entraînée. Les pâturages sont alors ce qui convient le mieux.

L’exposition sud et sud-est est la plus chaude ; celle nord et nord-est la plus froide. Le sud-ouest est plus exposé aux ouragans et l’ouest est plus sec que l’est.

II
CONDITIONS ACCIDENTELLES.

1oLa première de ces conditions est la surabondance ou le manque d’engrais.

Avec beaucoup d’engrais, on peut se livrer à la culture des plantes épuisantes, ou bien encore à la culture des plantes uniquement destinées à la vente, telles que le chanvre, le lin, le tabac, les racines qui ne sont pas consommées sur la ferme. Ces produits, en général, rapportent plus d’argent, mais d’un autre côté, ils ne rendent rien au sol ; ils consomment une grande quantité d’engrais et n’en produisent point.

Il faut donc, si l’on veut se livrer avec succès à la culture des plantes industrielles, compter sur une production plus abondante de fumier, ce que l’on peut obtenir si l’on a à sa disposition une grande étendue de prairies, ou la facilité d’obtenir des engrais du dehors.

2oBras disponibles. « La culture des plantes même les plus utiles, mais qui exigent un travail extraordinaire, ne peut, dit un agronome, être pratiquée là où les bras manquent ou sont à un prix si élevé que le salaire absorberait d’avance tout le profit que l’on peut espérer. » Cependant on peut, au moyen des instruments d’agriculture perfectionnés, remplacer pour la plupart des cultures les bras d’hommes par le travail des animaux.

3oUne troisième considération dans le choix des plantes, c’est la distance de la ferme aux champs. À ce point de vue, d’une importance réelle en pratique, on ne doit pas cultiver sur des terres éloignées des plantes qui exigent des visites fréquentes, ou qui, donnant un produit considérable en poids, nécessitent des transports nombreux et coûteux.

4oLes besoins de l’exploitation et le placement des produits doivent être consultés dans le choix des plantes.

« Semez des navets, nous dira l’Anglais. Plantez des pommes de terre, nous dira l’Allemand. Cultivez le trèfle et les plantes fourragères, nous crieront-ils tous deux à la fois. Faites-les venir dans votre assolement tous les quatre ans.

— Très bien ; mais qu’en ferons-nous ?

— Faites manger les navets à vos moutons.

— Nous n’en avons point.

— Convertissez vos pommes de terre en esprit, vos betteraves en sucre.

— Nous manquons des fabriques nécessaires.

— Faites consommer vos fourrages à vos vaches.

— Nous sommes déjà si abondamment pourvus de prairies et de pâturages qu’ils suffisent à tous nos besoins.

— Vendez donc vos produits.

— Nous n’avons point de débouchés. »

« Qui doutera, continue Schwerz, que l’on ne puisse parvenir à faire croître en plein champ des asperges et des choux-fleurs, du froment dans du sable ? Mais là où les hommes se contentent de pommes de terre et de pain de seigle, c’est à les produire que le cultivateur trouvera le plus d’avantage et les objets dont le débit est le plus prompt et le plus sûr lui seront, en règle générale, les plus profitables. »