Traité élémentaire de chimie/Partie 2/Tableau 17

Tableau des combinaisons du radical carbonique oxygéné


Tableau des combinaisons du Radical carbonique oxygéné, ou Acide carbonique avec les bases salifiables, dans l’ordre de leur affinité avec cet acide.[1]



[TABLEAU]



OBSERVATIONS


Sur l’acide carbonique & sur le Tableau de ses combinaisons.


De tous les acides que nous connoissons, l’acide carbonique est peut-être celui qui est le plus abondamment répandu dans la nature. Il est tout formé dans les craies, dans les marbres, dans toutes les pierres calcaires, & il est neutralisé principalement par une terre particulière connue sous le nom de chaux. Pour le dégager de ces substances, il ne faut que verser dessus de l’acide sulfurique, ou tout autre acide qui ait plus d’affinité avec la chaux que n’en a l’acide carbonique : il se fait une vive effervescence, laquelle n’est produite que par le dégagement de cet acide, qui prend la forme de gaz dès qu’il est libre. Ce gaz n’est susceptible de se condenser par aucun des degrés de refroidissement & de pression auxquels il a été exposé jusqu’ici : il ne s’unit avec l’eau qu’à peu prés à volume égal, & il en résulte un acide extrêmement foible.

On peut encore obtenir l’acide carbonique assez pur, en le dégageant de la matière sucrée en fermentation ; mais alors il tient une petite portion d’alkool en dissolution.

Le carbone est le radical de l’acide carbonique. On peut, en conséquence, former artificiel- lement cet acide, en brûlant du charbon dans du gaz oxygène, ou bien en combinant de la poudre de charbon avec un oxide métallique dans de justes proportions. L’oxygène de l’oxide se combine avec le charbon, forme du gaz acide carbonique, & le métal devenu libre reparoît sous sa forme métallique.

C’est à M. Black que nous devons les premières connoissances qu’on ait eues sur cet acide. La propriété qu’il a de n’exister que sous forme de gaz au degré de température & de pression dans lequel nous vivons, l’avoit soustrait aux recherches des anciens Chimistes.

Si on pouvoit parvenir à décomposer cet acide par des moyens peu dispendieux, on auroit fait une découverte bien précieuse pour l’humanité, puisqu’on pourroit obtenir libres les masses immenses de carbone que contiennent les terres calcaires, les marbres, &c. On ne le peut pas par des affinités simples, puisque le corps qu’il faudroit employer pour décomposer l’acide carbonique, devroit être au moins aussi combustible que le charbon même, & qu’alors on ne feroit que changer un combustible contre un autre : mais il n’est pas impossible d’y parvenir par des affinités doubles ; & ce qui porte à le croire, c’est que la nature résout complètement ce problème, & avec des matériaux qui ne lui coûtent rien dans l’acte de la végétation.


  1. Ces sels n’étant connus & définis que depuis quelques années, il n’existe pas, à proprement parler, pour eux de nomenclature ancienne. On a cru cependant devoir les désigner ici sous les noms que M. de Morveau leur a donnés dans son premier volume de l’Encyclopédie. M. Bergman désignoit les bases saturées de cet aide par l’épithète aérée ; ainsi, la terre calcaire aérée exprimoit la terre calcaire saturée d’acide carbonique. M. de Fourcroy avoit donné le nom d’acide crayeux à l’acide carbonique, & le nom de craie à tous les sels qui résultent de la combinaison de cet acide avec les bases salifiables.