Traité élémentaire de chimie/Partie 2/Tableau 1

Tableau des Substances simples


Tableau des Substances simples.



  Noms nouveaux.     Noms anciens
    correspondans.

Substances simples que appartiennent aux trois règnes & qu’on peut regarder comme les élémens des corps. Lumière Lumière.
Calorique Chaleur.
Principe de la chaleur.
Fluide igné.
Feu.
Matière du feu & de la chaleur.
Oxygène Air déphlogistiqué.
Air empiréal.
Air vital.
Base de l’air vital.
Azote Gaz phlogistiqué.
Mofete
Base de la mofete
Hydrogène Gaz inflammable.
Base du gaz inflammable.

Substances simples non métalliques oxidables & acidifiables. Soufre Soufre.
Phosphore Phosphore.
Carbone Charbon pur.
Radical muriatique Inconnu.
Radical fluorique Inconnu.
Radical boracique Inconnu.

Substances simples métalliques oxidables & acidifiables. Antimoine Antimoine.
Argent Argent.
Arsenic Arsenic.
Bismuth Bismuth.
Cobolt Cobolt.
Cuivre Cuivre.
Étain Étain.
Fer Fer.
Manganèse Manganèse.
Mercure Mercure.
Molybdène Molybdène.
Nickel Nickel.
Or Or.
Platine Platine.
Plomb Plomb.
Tungstène Tungstène.
Zinc Zinc.

Substances simples salifiables terreuses. Chaux Terre calcaire, chaux.
Magnésie Magnésie, base du sel d’Epsem.
Baryte Barote, terre pesante.
Alumine Argile, terre de l’alun, base de l’alun.
Silice Terre siliceuse, terre vitrifiable.



OBSERVATIONS


Sur le Tableau des Substances simples, ou du moins de celles que l’état actuel de nos connoissances nous oblige à considérer comme telles.


La Chimie en soumettant à des expériences les différens corps de la nature, a pour objet de les décomposer & de se mettre en état d’examiner séparément les différentes substances qui entrent dans leur combinaisons. Cette science a fait de nos jours des progrès très-rapides. Il sera facile de s’en convaincre si l’on consulte les différens auteurs qui ont écrit sur l’ensemble de la Chimie : on verra que dans les premiers temps on regardoit l’huile & le sel comme les principes des corps ; que l’expérience & l’observation ayant amené de nouvelles connoissances, on s’aperçut ensuite que les sels n’étoient point des corps simples, qu’ils étoient composés d’un acide & d’une base, & que c’étoit de cette réunion que résultoit leur état de neutralité. Les découvertes modernes ont encore reculé de plusieurs degrés les bornes de l’analyse,[1] elles nous ont éclairés sur la for-mation des acides, & nous ont fait voir qu’ils étoient formés par la combinaison d’un principe acidifiant commun à tous, l’oxygène, & d’un radical particulier pour chacun, qui les différencie & qui les constitue plutôt tel acide ou tel autre. J’ai été encore plus loin dans cet ouvrage, puisque j’ai fait voir, comme M. Hassenfratz, au surplus l’avoit déjà annoncé, que les radicaux des acides eux-mêmes ne sont pas toujours des substances simples, même dans le sens que nous attachons à ce mot ; qu’ils sont ainsi que le principe huileux, un composé d’hydrogène & de carbone. Enfin M Berthollet a prouvé que les bases des sels n’étoient pas plus simples que les acides eux-mêmes, & que l’ammoniaque étoit un composé d’azote & d’hydrogène.

La Chimie marche donc vers son but & vers sa perfection, en divisant, subdivisant, & resubdivisant encore, & nous ignorons quel sera le terme de ses succès. Nous ne pouvons donc pas assurer que ce que nous regardons comme simple aujourd’hui le soit en effet : tout ce que nous pouvons dire, c’est que telle substance est le terme actuel auquel arrive l’analyse chimique, & qu’elle ne peut plus se subdiviser au delà dans l’état actuel de nos connoissances.

Il est à présumer que les terres cesseront bientôt d’être comptées au nombre des substances simples ; elles sont les seules de toute cette classe qui n’aient point de tendance à s’unir à l’oxygène, & je suis bien porté à croire que cette indifférence pour l’oxygène, s’il m’est permis de me servir de cette expression, tient à ce qu’elles en sont déjà saturées. Les terres, dans cette manière de voir, seroient des substances simples, peut-être des oxides métalliques oxygénées jusqu’à un certain point. Ce n’est au surplus qu’une simple conjecture que je présente ici. J’espère que le lecteur voudra bien ne pas confondre ce que je donne pour des vérités de fait & d’expérience avec ce qui n’est encore qu’hypothétique.

Je n’ai point fait entrer dans ce tableau les alkalis fixes, tels que la potasse & la soude, parce que ces substances sont évidemment composées, quoiqu’on ignore cependant encore la nature des principes qui entrent dans leur combinaison.


  1. Voyez Mémoires de l’Académie, année 1776, page 671, & 1778, page 535.