Théorie de la musique (Danhauser, 1889)/IV/8

Lemoine et Fils, Éditeurs (p. 91-93).

8e Leçon

DU RHYTHME.

212. Le rhythme est l’ordre plus ou moins symétrique et caractéristique dans lequel se présentent les différentes durées.[1]

Exemple

\relative c'' {
  \time 3/4
  g8 g16 g g8 g g g  
  g g16 g g8 g g g^"etc."
}

Ce rhythme caractéristique du Boléro, est à 3 temps et formé de : une croche et deux doubles croches pour le premier temps, et deux croches pour chacun de deux temps suivants.

213. Le rhythme est une des principales richesses de la musique moderne, et la recherche de rhythmes neufs et originaux est une grande préoccupation pour le compositeur. Ses combinaisons peuvent être variées à l’infini, et les partitions des maîtres abondent en admirables exemples.[2]

214. Parmi les formes rhythmiques, nous en citerons deux fort importantes et qui ont été dénommées, ce sont : la syncope et le contre-temps.

DE LA SYNCOPE.

215. La syncope est un son articulé sur un temps faible ou sur la partie faible d’un temps, et prolongé sur un temps fort ou sur la partie forte d’un temps.

Ex.

\relative c'' {
  r4 c2 b4~
  b a2 d4~
  d g2 r4\bar "|."
}
[3]

Sons articulés sur le 2e et le 4e temps, (temps faibles), et prolongés sur le 1er et le 3e temps, (temps forts).

Ex.

\relative c'' {
  r8 c4 b d g,8~
  g e'4d a b8~
  b^"etc."
}

Sons articulés sur la 2e partie de chaque temps. (partie faible), et prolonges sur la 1re partie. (partie forte).

216. Lorsque les deux parties de la syncope n’ont pas la même durée, on la nomme syncope irrégulière.

Exemples.

\relative c'' {
  \time 3/4
  r4 c2~
  c4 e2~
  e4 a,2~
  a4 c2~
  c4^"etc."
}
[4]


ou bien


\relative c'' {
  \time 3/4
  r4 r c4~
  c2 e4~
  e2 a,4~
  a2 c4~
  c2^"etc."
}
93

217. La Syncope doit toujours être articulée fortement ; elle est donc en réalité le déplacement du temps fort ou de la partie forte du temps.

DU CONTRE-TEMPS.

218. Le contre-temps est un son articulé sur un temps faible ou sur la partie faible d’un temps, mais ne se prolongeant pas sur le temps fort ou sur la partie forte du temps.

Ce temps fort ou cette partie forte du temps est alors occupé par un silence.

Exemple

\relative c'' {
  \override Rest #'style = #'classical
  r4 c r g
  r e' r c
  r e r e^"etc."
}

\relative c'' {
  \time 2/4
  r8 g r g'
  r e r c
  r g r g'
  r f r d^"etc."
}

219. Lorsqu’il y a deux temps faibles contre un temps fort, ou deux parties faibles de temps contre une partie forte, le contre-temps est irrégulier.

Exemple

\relative c'' {
  \time 3/4
  r4 e e
  r g g
  r c, c
  r e e^"etc."
}

\relative c'' {
  \time 6/8
  r8 e e r c c
  r d d r a a
  r g g r f' f
  r dis dis r e e^"etc."
}

Le Contre-temps est une forme rhythmique très employée, surtout dans les accompagnements.

EXERCICES.

Variez de plusieurs manières le rhythme des deux fragments suivants.


\relative c'' {
  c2 b16 c b c d8 e
  d4 g r2
  d cis16 d cis d e8 f
  e4 c' r2\bar "|."
}

\relative c'' {
  \time3/4
  d8. e16 d8. c16 b8 r
  c8. d16 c8. b16 a8 r
  b8. a16 b8. c16 d8. e16
  a,4 d2^"etc."
}
  1. Le son et la durée sont les principaux éléments de la musique mais un chant, une mélodie, ne sont pas plus formés de sons et de durées pris au hasard, qu’une phrase que l’on prononce n’est formée de mots placés à la suite les uns des autres, sans aucun lien grammatical.

    Des règles spéciales enseignent à coordonner les sons et les durées, mais elles sont du ressort de la composition, et en parler dépasserait le but que nous nous sommes proposé.

    Nous dirons seulement que le rhythme est à la durée ce que le dessin, le contour mélodique d’une phrase musicale est au son. Quelques fois même le rhythme est plus caractéristique que le contour mélodique : la simple percussion d’un rhythme, abstraction faite du son, peut souvent faire reconnaître un chant, tandis que l’audition d’un contour mélodique, abstraction faite du rhythme, ne souffrirait que rarement pour faire reconnaître ce même chant.

    Le rhythme est le dessin que les différents sons viennent colorer.

  2. Voyez entre autres, le début de l’ouverture de Moïse, que Rossini citait lui-même, comme étant une de ses heureuses trouvailles rhythmiques.
  3. Dans la musique ancienne, on écrirait, en la coupant par la barre de mesure, la note syncopée dont la deuxième partie appartient à la mesure suivante.
    Exemple.

    Mais pour plus de clarté, elle s’écrit aujourd’hui comme ci-dessus, en employant la liaison.

  4. Anciennement cette syncope irrégulière s’écrivait ainsi :