Tableau de Paris/475
CHAPITRE CCCCLXXV.
Saints défigurés.
Le portail des églises offre nombre de figures gothiques ; mais à présent si noires & si hideuses, qu’on les prendroit plutôt pour des objets de réprobation, que pour des élus ayant en paradis la couronne de gloire.
Il manque à ces saints antiques un nez, une oreille, un bras. Les anges & les chérubins ont perdu leurs ailes, l’archange du jugement dernier souffle encore & n’a plus de trompette. Ces visages célestes, criblés par les injures du tems, font des mines affreuses.
Pourquoi donc ajouter encore à leur noirceur, en couvrant ces statues enfumées d’une couronne de fleurs fraîchement cueillies ? Ce contraste afflige l’œil. Le saint prend la physionomie d’un démon sous ces roses éclatantes. L’on ne sauroit pardonner à la piété son extrême mauvais goût ; il fait tort à l’image qu’on se propose d’honorer.
Le portrait de Notre-Dame offre un ensemble si bizarre, que chacun y trouve ce qu’il veut y trouver en théologie, en cabale, en chymie. Un adepte m’a assuré que le secret de la pierre philosophale étoit écrit dans toutes ces grossieres figures ; mais le tout, selon lui, seroit de savoir déchiffrer ces emblêmes énigmatiques.