Sphinxiana/Portrait du Sphinx

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PORTRAIT DU SPHINX.

Né parmi les rochers, au pied du Cythéron,
Ce monstre à voix humaine, aigle, femme et lion,
De la nature entière exécrable assemblage,
Unissait contre tout l’artifice à la rage.


Ce monstre proposait une énigme à chaque personne qu’il rencontrait, et dévorait impitoyablement toutes celles qui n’en donnaient point le mot. Thèbes offrit d’une voix commune, l’empire à l’heureux interprète qui découvrirait le sens mystérieux de cette énigme. Les sages, les vieillards, séduits par l’espérance et fiers de la supériorité que leur donnaient et leurs talens et leur âge, osèrent affronter le courroux du monstre impénétrable : ils expirèrent tous. Mais Œdipe, guidé par la fortune, délivra la terre de ce monstre terrible, et parvint au trône en expliquant l’énigme.

Le Sphinx demanda quel était l’animal qui marche le matin à quatre pieds, à deux sur le milieu du jour, et le soir à trois ?


Œdipe répondit que c’était l’homme qui, dans son enfance, se traîne sur ses pieds et ses mains ; dans le midi de l’âge marche sur ses deux pieds ; et sur le déclin de sa vie, soutient sa vieillesse d’un bâton qui lui sert comme d’un troisième pied.


À peine cette explication fut-elle donnée, que, suivant la loi du destin, le Sphinx se précipita du haut d’un rocher et expira.