« Le Cousin Pons » : différence entre les versions
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== I. Un glorieux débris de l’empire ==
Vers trois heures de l’après-midi, dans le mois d’octobre de l’année 1844, un homme âgé d’une soixantaine d’années, mais à qui tout le monde eût donné plus que cet âge, allait le long du boulevard des Italiens, le nez à la piste, les lèvres papelardes, comme un négociant qui vient de conclure une excellente affaire, ou comme un garçon content de lui-même au sortir d’un boudoir. C’est à Paris la plus grande expression connue de la satisfaction personnelle chez l’homme. En apercevant de loin ce vieillard, les personnes qui sont là tous les jours assises sur des chaises, livrées au plaisir d’analyser les passants, laissaient toutes poindre dans leurs physionomies ce sourire particulier aux gens de Paris, et qui dit tant de choses ironiques, moqueuses ou compatissantes, mais qui, pour animer le visage d’un Parisien, blasé sur tous les spectacles possibles, exigent de hautes curiosités vivantes. Un mot fera comprendre et la valeur archéologique de ce bonhomme et la raison du sourire qui se répétait comme un écho dans tous les yeux. On demandait à Hyacinthe, un acteur célèbre par ses saillies, où il faisait faire les chapeaux à la vue desquels la salle pouffe de rire : "
En conservant dans quelques détails de sa mise une fidélité quand même aux modes de l’an 1806, ce passant rappelait l’Empire sans être par trop caricature. Pour les observateurs, cette finesse rend ces sortes d’évocations extrêmement précieuses. Mais cet ensemble de petites choses voulait l’attention analytique dont sont doués les connaisseurs en flânerie ; et, pour exciter le rire à distance, le passant devait offrir une de ces énormités à crever les yeux, comme on dit, et que les
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Feu Dusommerard avait bien essayé de se lier avec le musicien ; mais le prince du Bric-à-Brac mourut sans avoir pu pénétrer dans le musée Pons, le seul qui pût être comparé à la célèbre collection Sauvageot. Entre Pons et monsieur Sauvageot, il se rencontrait quelques ressemblances. Monsieur Sauvageot, musicien comme Pons, sans grande fortune aussi, a procédé de la même manière, par les mêmes moyens, avec le même amour de l’art, avec la même haine contre ces illustres riches qui se font des cabinets pour faire une habile concurrence aux marchands. De même que son rival, son émule, son antagoniste pour toutes ces œuvres de la Main, pour ces prodiges du travail, Pons se sentait au cœur une avarice insatiable, l’amour de l’amant pour une belle maîtresse, et la revente, dans les salles de la rue des Jeûneurs, aux coups de marteau des commissaires-priseurs, lui semblait un crime de lèse Bric-à-Brac. Il possédait son musée pour en jouir à toute heure, car les âmes créées pour admirer les grandes œuvres, ont la faculté sublime des vrais amants ; ils éprouvent autant de plaisir aujourd’hui qu’hier, ils ne se lassent jamais, et les chefs-d’œuvre sont, heureusement, toujours jeunes. Aussi l’objet tenu si paternellement devait-il être une de ces trouvailles que l’on emporte, avec quel amour ! amateurs, vous le savez !
Aux premiers contours de cette esquisse biographique, tout le monde va s’écrier : "
Cet homme, plein de délicatesse, dont l’âme vivait par une admiration infatigable pour la magnificence du Travail humain, cette belle lutte avec les travaux de la nature, était l’esclave de celui des sept péchés capitaux que Dieu doit punir le moins sévèrement : Pons était gourmand. Son peu de fortune et sa passion pour le Bric-à-Brac lui commandaient un régime diététique tellement en horreur avec sa gueule fine, que le célibataire avait tout d’abord tranché la question en allant dîner tous les jours en ville. Or, sous l’Empire, on eut bien plus que de nos jours un culte pour les gens célèbres, peut-être à cause de leur petit nombre et de leur peu de prétentions politiques. On devenait poète, écrivain, musicien à si peu de frais ! Pons, regardé comme le rival probable des Nicolo, des Paër et des Berton, reçut alors tant d’invitations, qu’il fut obligé de les écrire sur un agenda, comme les avocats écrivent leurs causes. Se comportant d’ailleurs en artiste, il offrait des exemplaires de ses romances à tous ses amphitryons, il touchait le forté chez eux, il leur apportait des loges à Feydeau, théâtre pour lequel il travaillait ; il y organisait des concerts ; il jouait même quelquefois du violon chez ses parents en improvisant un petit bal.
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De 1836 à 1843, Pons se vit invité rarement. Loin de rechercher le parasite, chaque famille l’acceptait comme on accepte un impôt ; on ne lui tenait plus compte de rien, pas même de ses services réels. Les familles où le bonhomme accomplissait ses évolutions, toutes sans respect pour les arts, en adoration devant les résultats, ne prisaient que ce qu’elles avaient conquis depuis 1830 : des fortunes ou des positions sociales éminentes. Or, Pons n’ayant pas assez de hauteur dans l’esprit ni dans les manières pour imprimer la crainte que l’esprit ou le génie cause au bourgeois, avait naturellement fini par devenir moins que rien, sans être néanmoins tout à fait méprisé. Quoiqu’il éprouvât dans ce monde de vives souffrances, comme tous les gens timides, il les taisait. Puis, il s’était habitué par degrés à comprimer ses sentiments, à se faire de son cœur un sanctuaire où il se retirait. Ce phénomène, beaucoup de gens superficiels le traduisent par le mot égoïsme. La ressemblance est assez grande entre le solitaire et l’égoïste pour que les médisants paraissent avoir raison contre l’homme de cœur, surtout à Paris, où personne dans le monde n’observe, où tout est rapide comme le flot, où tout passe comme un ministère !
Le cousin Pons succomba donc sous un acte d’accusation d’égoïsme porté en arrière contre lui, car le monde finit toujours par condamner ceux qu’il accuse. Sait-on combien une défaveur imméritée accable les gens timides ? Qui peindra jamais les malheurs de la Timidité ! Cette situation, qui s’aggravait de jour en jour davantage, explique la tristesse empreinte sur le visage de ce pauvre musicien, qui vivait de capitulations infâmes. Mais les lâchetés que toute passion exige sont autant de liens ; plus la passion en demande, plus elle vous attache ; elle fait de tous les sacrifices comme un idéal trésor négatif où l’homme voit d’immenses richesses Après avoir reçu le regard insolemment protecteur d’un bourgeois roide de bêtise, Pons dégustait comme une vengeance le verre de vin de Porto, la caille au gratin qu’il avait commencé de savourer, se disant à lui-même :
Aux yeux du moraliste, il se rencontrait cependant en cette vie des circonstances atténuantes. En effet, l’homme n’existe que par une satisfaction quelconque. Un homme sans passion, le juste parfait, est un monstre, un demi-ange qui n’a pas encore ses ailes. Les anges n’ont que des têtes dans la mythologie catholique. Sur terre, le juste, c’est l’ennuyeux Grandisson, pour qui la Vénus des carrefours elle-même se trouverait sans sexe. Or, excepté les rares et vulgaires aventures de son voyage en Italie, où le climat fut sans doute la raison de ses succès, Pons n’avait jamais vu de femmes lui sourire. Beaucoup d’hommes ont cette fatale destinée. Pons était monstre-né ; son père et sa mère l’avaient obtenu dans leur vieillesse, et il portait les stigmates de cette naissance hors de saison sur son teint cadavéreux qui semblait avoir été contracté dans le bocal d’esprit-de-vin où la science conserve certains fœtus extraordinaires. Cet artiste, doué d’une âme tendre, rêveuse, délicate, forcé d’accepter le caractère que lui imposait sa figure, désespéra d’être jamais aimé. Le célibat fut donc chez lui moins un goût qu’une nécessité. La gourmandise, le péché des moines vertueux, lui tendit les bras ; il s’y précipita comme il s’était précipité dans l’adoration des œuvres d’art et dans son culte pour la musique. La bonne chère et le Bric-à-Brac furent pour lui la monnaie d’une femme ; car la musique était son état, et trouvez un homme qui aime l’état dont il vit ? À la longue, il en est d’une profession comme du mariage, on n’en sent plus que les inconvénients.
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l’objet d’une conversation au foyer. Il s’agissait de douze cents
francs ! Le pauvre honnête homme voulut rendre ce cadeau ! Gaudissard eut
mille peines à le lui faire accepter. "
son associé, trouver des acteurs de cet échantillon-là !" Cette double
vie, si calme en apparence, était troublée uniquement par le vice
auquel sacrifiait Pons, ce besoin féroce de dîner en ville. Aussi
toutes les fois que Schmucke se trouvait au logis quand Pons
s’habillait, le bon Allemand déplorait-il cette funeste habitude. "
Engore si ça l’encraissait !" s’écriait-il souvent. Et Schmucke rêvait
au moyen de guérir son ami de ce vice dégradant, car les amis
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d’antichambre, qui voulait devenir la cousine de ses maîtres,
jouait-elle les plus méchants tours au pauvre musicien. Madeleine
s’écriait très bien : "
bonhomme dans l’escalier et en tâchant d’être entendue par lui. Si elle
servait à table, en l’absence du valet de chambre, elle versait peu de
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cousine de monsieur, devait cacher une de ces haines sourdes, engendrée
par un de ces graviers qui font les avalanches.</p><p>
Madeleine à la présidente, il devrait bien me dire par quel procédé il
le conserve depuis vingt-cinq ans !</p><p>
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son grand salon et sa chambre à coucher, madame Camusot regarda sa
fille et haussa les épaules.</p><p>
n’ai plus le temps de prendre un parti, dit la présidente.</p><p>
ai ouvert la porte, et, comme il est presque de la maison, je ne
pouvais pas l’empêcher de me suivre ; il est là qui se débarrasse de son
spencer.</p><p>
Le petit salon retentit de la fausse tousserie d’un homme qui voulait dire ainsi : Je vous entends.</p><p>
prenant un petit air câlin, que vous nous avez surprises au moment où
ma mère allait s’habiller.</p><p>
Le cousin Pons, à qui le mouvement d’épaules de la présidente n’avait
pas échappé, fut si cruellement atteint, qu’il ne trouva pas un
compliment à dire, et il se contenta de ce mot profond :
toujours charmante, ma petite cousine ! Puis, se tournant vers la mère
et la saluant :
de venir un peu plus tôt que de coutume, je vous apporte ce que vous
m’avez fait le plaisir de me demander…</p><p>
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poche de côté de son habit une ravissante petite boîte oblongue en bois
de Sainte-Lucie, divinement sculptée.</p><p>
Cette exclamation n’était-elle pas atroce ? n’ôtait-elle pas tout mérite
au soin du parent, dont le seul tort était d’être un parent pauvre ?</p><p>
Cette demande causa comme un tressaillement intérieur au cousin, il
avait la prétention de solder tous ses dîners par l’offrande de ce
bijou.</p><p>
cérémonies, nous nous connaissons assez pour laver notre linge
ensemble. Je sais que vous n’êtes pas assez riche pour faire la guerre
à vos dépens. N’est-ce pas déjà beaucoup que vous ayez pris la peine de
perdre votre temps à courir chez les marchands ?…</p><p>
deviez en donner la valeur, répliqua le pauvre homme offensé, car c’est
un chef-d’œuvre de Watteau qui l’a peint des deux côtés ; mais soyez
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partant d’un misérable musicien vis-à-vis de qui elle se posait en
bienfaitrice.</p><p>
Watteau, Greuze ; mais j’avais surtout le désir de plaire à votre chère
maman.</p><p>
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qui ne parle que par férules. La présidente ne s’expliquait donc pas la
subite audace de son cousin, elle ignorait la valeur du cadeau.</p><p>
château qu’on a dépecé près de Dreux. Aulnay, un château que madame de
Pompadour habitait quelquefois, avant de bâtir Ménars ; on en a sauvé
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je collectionne depuis vingt ans, deux fois plus cher que la pâte
tendre de Sèvres.</p><p>
elle est plus ancienne que notre manufacture de Sèvres, comme les
fameux jardins de Heidelberg, ruinés par Turenne, ont eu le malheur
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et exclusifs ; ils ne savent que ce qu’on leur apprend, quand ils
veulent l’apprendre.</p><p>
chefs-d’œuvre sont signés. Le Frankenthal porte un C. et un T
(Charles-Théodore) entrelacés et surmontés d’une couronne de prince. Le
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aujourd’hui, Dresde les répète et les recopie.) Alors on a fabriqué des
choses admirables et qu’on ne refera plus…</p><p>
porcelaines, comme on ne refera plus des Raphaël, des Titien, ni des
Rembrandt, ni des Van Eyck, ni des Cranach !… Tenez ! les Chinois sont
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vases de Grand-Mandarin ancien, du plus grand format, valent six, huit,
dix mille francs, et on a la copie moderne pour deux cents francs !</p><p>
service complet pour un dîner de douze personnes en pâte tendre de
Sèvres, qui n’est pas de la porcelaine, vaut cent mille francs, mais
c’est le prix de facture. Un pareil service se payait cinquante mille
livres, à Sèvres, en 1750. J’ai vu des factures originales.</p><p>
maman m’a fait l’honneur de me demander un éventail, reprit Pons. J’ai
vu tous les marchands de Paris sans y rien trouver de beau ; car, pour
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appellent, ils leur font : Chit ! chit !…</p><p>
La présidente haussa les épaules en regardant sa fille, sans que Pons pût voir cette mimique rapide.</p><p>
Monistrol ? Avez-vous des dessus de porte ?" ai-je demandé à ce marchand,
qui me permet de jeter les yeux sur ses acquisitions avant les grands
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civile, avait sauvé à la vente d’Aulnay les boiseries sculptées des
mains des marchands de Paris, occupés de porcelaines et de meubles
incrustés. "
gagner mon voyage avec cela." Et il me montra le bonheur-du-jour, une
merveille ! C’est des dessins de Boucher exécutés en marqueterie avec un
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modèle digne du pinceau hollandais, tout fut perdu pour la présidente
et pour sa fille qui se dirent, en échangeant des regards froids et
dédaigneux :
Pons, glacé par cette question, éprouva l’envie de battre la présidente.</p><p>
chefs-d’œuvre ! Et on se trouve face à face avec des adversaires qui
défendent le gibier ! c’est ruse contre ruse ! Un chef-d’œuvre doublé
d’un Normand, d’un juif ou d’un Auvergnat ; mais c’est comme dans les
contes de fées, une princesse gardée par des enchanteurs !</p><p>
dix-huitième siècle ! Tenez, ne voyez-vous pas la signature ? dit-il en
montrant une des bergeries qui représentait une ronde dansée par de
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or, et elle est terminée de chaque côté par un tout petit rubis que
j’ai décrassé !</p><p>
un objet d’un si grand prix. Il vaut mieux vous en faire des rentes,
dit la présidente qui ne demandait cependant pas mieux que de garder ce
magnifique éventail.</p><p>
dit le bonhomme en retrouvant de l’assurance. Il aura fallu cent ans
pour opérer ce miracle. Soyez sûre qu’à la cour aucune princesse n’aura
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dans la nature humaine de faire plus pour une Pompadour que pour une
vertueuse reine !…</p><p>
ange, va donc voir avec Madeleine à ce que le dîner soit digne de notre
cousin…</p><p>
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<p>
employant toujours l’abréviation enfantine donnée jadis au nom de
Cécile.</p><p>
À quoi cela sert-il donc d’avoir pour père un président à la Cour
royale de Paris, et commandeur de la Légion-d’Honneur, pour grand-père
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à l’amitié qui l’unissait à Popinot. Ce ministre, malgré sa modestie,
s’était, comme on l’a vu, laissé faire comte.</p><p>
l’effet du partage égal des biens ; mais, soyez tranquille, ma belle
cousine, Cécile finira bien par se marier. Je ne vois nulle part de
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chez lui, mais que l’habitude de s’effacer avait alors presque abolie,
et qu’on rembarrait, comme tout à l’heure, quand elle reparaissait.</p><p>
femme de tête, une jeune fille protégée par le roi Louis XVIII !</p><p>
pleine de cœur, elle a cent mille francs en mariage, sans compter les
plus belles espérances, et elle nous reste sur les bras…</p><p>
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homme de quarante-huit ans, pourvu qu’il eût vingt mille francs de
rente.</p><p>
qu’elle atteignît vingt-cinq ou vingt-six ans, il serait excessivement
difficile de la marier. Le monde se demande alors pourquoi une jeune
personne est restée si longtemps sur pied. On cause déjà beaucoup trop
dans notre société de cette situation. Nous avons épuisé les raisons
vulgaires : "Elle est bien jeune.
quitter.
veut un beau nom !" Nous devenons ridicules, je le sens bien.
D’ailleurs, Cécile est lasse d’attendre, elle souffre, pauvre petite…</p><p>
j’ai eu le plaisir de dîner ici, pour que vous songiez à des gens de
quarante-huit ans ? dit humblement le pauvre musicien.</p><p>
chez un conseiller à la cour, dont le fils a trente ans, dont la
fortune est considérable, et pour qui monsieur de Marville aurait
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ami pour renouer l’affaire de mon mariage, le cousin s’en irait, et
nous pourrions donner suite à nos projets chez les Popinot."</p><p>
Par cette réponse, la vieille soubrette indiquait à sa maîtresse
qu’elle avait ourdi ce complot, de concert avec Cécile impatientée.</p><p>
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cette fausse aménité qui fait sur une âme délicate l’effet que du
vinaigre et du lait mélangés produisent sur la langue d’un friand.</p><p>
car mon mari m’écrit de l’audience pour me prévenir que le projet de
mariage se reprend avec le conseiller, et nous allons y dîner… Vous
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pour qui je n’ai pas de secret… Vous ne voudriez pas faire manquer le
mariage de ce petit ange ?</p><p>
Ainsi, vous restez ? Cécile vous tiendra compagnie pendant que je
m’habillerai.</p><p>
Quoique cruellement affecté de la manière dont s’y prenait la
présidente pour lui reprocher son indigence, il était encore plus
effrayé par la perspective de se trouver seul avec les domestiques.</p><p>
En entendant cette horrible phrase, Pons se redressa comme si la
décharge de quelque pile galvanique l’eût atteint, salua froidement sa
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mines qui révélèrent quelque lâche mystification au vieil artiste. Pons
descendit lentement l’escalier en retenant ses larmes : il se voyait
chassé de cette maison, sans savoir pourquoi.
maintenant, se disait-il, le monde a horreur de la vieillesse et de la
pauvreté, deux laides choses. Je ne veux plus aller nulle part sans
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habitué de la maison qui, disait-il, ne donnait jamais qu’un petit écu
aux étrennes !</p><p>
la cuisinière, ce sera toujours trois francs de perdus pour nous autres
au jour de l’an…</p><p>
que cela nous fait ? Il ennuie tellement les maîtres dans les maisons où
il dîne, qu’on le chassera de partout.</p><p>
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portière. Ce cri douloureux fut accueilli par un profond silence à la
cuisine.</p><p>
Le pauvre homme, qui n’avait rien perdu des propos tenus à la cuisine,
entendit encore ce dernier mot. Il revint chez lui par les boulevards
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cents francs en moyenne par an, les époux se faisaient, avec leurs
étrennes, un revenu de seize cents francs, à la lettre mangés par les
Cibot qui vivaient mieux que ne vivent les gens du peuple. "
qu’une fois !" disait la Cibot. Née pendant la révolution, elle
ignorait, comme on le voit, le catéchisme.</p><p>
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vingt-six ans de probité stricte. S’ils ne possédaient rien, ils
n’avaient nune centime à autrui, selon leur expression, car madame
Cibot prodiguait les N dans son langage. Elle disait à son mari : "
n’es n’un amour !" Pourquoi ? Autant vaudrait demander la raison de son
indifférence en matière de religion. Fiers tous les deux de cette vie
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couchée sur un testament pour trois ou quatre cents francs en viager,
c’était des doléances de loge en loge, qui peuvent donner une idée de
la jalousie dont sont dévorées les professions infimes à Paris.
çà ! il ne nous arrivera jamais, à nous autres, d’être mis sur des
testaments ! Nous n’avons pas de chance ! Nous sommes plus utiles que les
domestiques, cependant. Nous sommes des gens de confiance, nous faisons
les recettes, nous veillons au grain ; mais nous sommes traités ni plus
ni moins que des chiens, et voilà !
disait Cibot en rapportant un habit.
loge, et que je me fusse mise cuisinière, nous aurerions trente mille
francs de placés, s’écriait madame Cibot en causant avec sa voisine les
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heures du soir. Non seulement ce fait n’avait jamais eu lieu, mais
encore son monsieur ne la vit pas, ne la salua point.</p><p>
où il faisait ce que, dans l’argot des tailleurs, on appelle un
poignard.</p>
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avait diminué cet ordinaire jusqu’à pouvoir le faire pour la somme de
vingt sous.</p><p>
madame Cibot à son époux, car v’là le dîner de monsieur Schmucke tout
paré.</p><p>
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porcelaine commune ; puis elle arriva, malgré son âge, à l’appartement
des deux amis, au moment où Schmucke ouvrait à Pons.</p><p>
ajouta-t-il en pensant aux habitudes gastrolâtriques de son ami.</p><p>
Le vieil Allemand aperçut alors madame Cibot qui écoutait, selon son
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qui ne brillent que dans le cœur d’un ami véritable, il alla droit à
la portière, et l’emmena sur le palier :</p><p>
Pleu, temandez ein bedid tinner vin : tes angeois, di magaroni ! Anvin
ein rebas de Liquillis !</p><p>
boisson, eine poudeille te fin de Porteaux, dout ce qu’il y aura te
meilleur en vriantise : gomme des groguettes te risse ed ti lard vîmé !
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du matin.) Enfin, les quartiers de ses rentes étaient payés chez des
notaires.</p><p>
bedides saindes Céciles, tes phames jarmantes, montame de Bordentuère,
montame de Fentenesse, montame Ti Dilet. Quante che les fois, c’esd aus
Ligne 1 054 :
restèrent ainsi pendant quelques minutes, comme des amants qui se
revoient après une longue absence.</p><p>
intérieurement la dureté de la présidente. Diens ! nus pricabraquerons
ensemple, et le tiaple ne meddra chamais sa queu tan notre ménache.</p><p>
Ligne 1 083 :
prinporions que son ami n’en prenait lui-même. Il ne faut donc pas
s’étonner que le mot sublime de Schmucke ait eu le pouvoir de calmer le
désespoir de Pons, car le :
dire :
ici.</p><p>
On comprendra facilement la surprise de Pons en voyant et savourant le
dîner dû à l’amitié de Schmucke. Ces sortes de sensations, si rares
Ligne 1 104 :
lorsqu’elle est rapidement éclose dans son cerveau congelé par le
respect dû aux princes souverains.</p><p>
Madame Cibot, à qui Pons donnait de temps en temps des billets pour les
spectacles du boulevard, ce qui le mettait dans son cœur à la même
hauteur que son pensionnaire Schmucke, fit alors la proposition que
voici :
vous faire tous les jours, pour vous deux, n’un dîner n’à licher les
plats, et les rendre nets comme s’ils étaient lavés.</p><p>
guisine montame Zipod que les chens qui mangent le vrigod di Roi…</p><p>
Dans son espérance, le respectueux Allemand alla jusqu’à imiter
l’irrévérence des petits journaux, en calomniant le prix fixe de la
table royale.</p><p>
En entendant cette promesse, Schmucke sauta d’un bout de la table à
l’autre, en entraînant la nappe, les plats, les carafes, et saisit Pons
par une étreinte comparable à celle d’un gaz s’emparant d’un autre gaz
pour lequel il a de l’affinité.</p><p>
Sans connaître l’événement auquel elle devait l’accomplissement de son
rêve, l’excellente madame Cibot descendit à sa loge et y entra comme
Josépha entre en scène dans Guillaume Tell. Elle jeta les plats et les
assiettes, et s’écria :
Café Turc ! et dis au garçon de fourneau que c’est pour moi ! Puis elle
s’assit en se mettant les mains sur ses puissants genoux, et regardant
par la fenêtre le mur qui faisait face à la maison, elle s’écria :
J’irai, ce soir, consulter madame Fontaine !…</p>
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<p>
Madame Fontaine tirait les cartes à toutes les cuisinières, femmes de
chambre, laquais, portiers, etc., du Marais.
messieurs sont venus chez nous, nous avons deux mille francs de placés
à la caisse d’épargne. En huit ans ! quelle chance ! Faut-il ne rien
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excellentes tasses de café que flanquaient deux petits verres de
kirch-wasser.</p><p>
Après quelques lamentations du pique-assiette que combattit Schmucke
par les câlineries que le pigeon sédentaire dut trouver pour son pigeon
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certaines volailles truffées, des amours ! et par-dessus tout les
fameuses carpes du Rhin qui ne se trouvent qu’à Paris et avec quels
condiments ! Par certains jours Pons s’écriait : "
à la cuisinière du comte Popinot. Un passant, en entendant ce soupir,
aurait cru que le bonhomme pensait à une maîtresse, et il s’agissait de
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théâtre. C’était le jour d’une première représentation où donnaient les
instruments dont jouait le vieux maître allemand.</p><p>
mal, l’œil est triste, le mouvement de son bras s’affaiblit, dit
Wilhem Schwab en montrant le bonhomme qui montait à son pupitre d’un
air funèbre.</p><p>
Schmucke, semblable à cette mère des chroniques de la Canongate qui,
pour jouir de son fils vingt-quatre heures de plus, le fait fusiller,
était capable de sacrifier Pons au plaisir de le voir dîner tous les
jours avec lui.</p><p>
Héloïse Brisetout, notre première danseuse, il ne fait presque plus de
bruit en se mouchant.</p><p>
Ligne 1 248 :
son nez long et creux sonnait dans le foulard. Ce tapage était la cause
d’un des plus constants reproches de la présidente au cousin Pons.</p><p>
supérieur à nous autres pauvres diables, que je n’osais pas l’inviter à
ma noce. Je me marie…</p><p>
bizarre de Schmucke une raillerie dont ce parfait chrétien était
incapable.</p><p>
l’orchestre sa petite armée après avoir entendu le coup de sonnette du
directeur.</p><p>
Ligne 1 263 :
Schmucke se virent seuls dans l’orchestre désert. L’atmosphère de la
salle comportait trente-deux degrés Réaumur.</p><p>
rayons de l’opulence ; mais c’est mon ami, Fritz Brunner de
Francfort-sur-Mein…</p><p>
Ce héros de l’histoire promise était un de ces Allemands dont la figure
contient à la fois la raillerie sombre du Méphistophélès de Goethe et
Ligne 1 362 :
de Heidelberg pour entretenir l’ardeur des touristes qui affluent pour
voir cette belle ruine, si bien entretenue. On en causait à Francfort
comme d’une faillite, on s’y montrait Brunner au doigt en se disant :
Voilà où peut nous mener une mauvaise femme de qui l’on n’hérite pas,
et un fils élevé à la française.</p><p>
Ligne 1 416 :
vulgaire, avec des figurantes du théâtre de Strasbourg et des
Alsaciennes qui, de leurs petits balais, n’avaient [rôti] que le
manche. Et ils se disaient tous les matins l’un à l’autre :
cependant nous arrêter, prendre un parti, faire quelque chose avec ce
qui nous reste !
Oh ! demain… Dans la vie des dissipateurs, Aujourd’hui est un bien
grand fat, mais Demain est un grand lâche qui s’effraie du courage de
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<p>
Wilhem qui raconta longuement cette histoire en allemand au pianiste.
Le père Brunner est mort. Il était, sans que son fils ni monsieur
Ligne 1 471 :
je m’en serais allé depuis quelques jours, mais je n’ai pas voulu faire
manquer ma partie.</p><p>
Rhin. J’aime mademoiselle Émilie depuis sept ans, elle a lu tant de
romans immoraux qu’elle a refusé tous les partis pour moi, sans savoir
Ligne 1 488 :
de son père à Francfort, qui sont estimées un million, et il a déjà
loué le grand hôtel de Hollande à un cousin des Graff.</p><p>
le masque d’un homme satisfait ? J’ai peur de Paris pour lui ; je lui
voudrais voir prendre le parti que je prends. L’ancien démon peut se
Ligne 1 543 :
de cet éventail extraordinaire, en souriant de le voir en de telles
mains, car c’était, il faut l’avouer, un éventail de duchesse.</p><p>
lendemain de cette offre, de se bien connaître à ces petites
bêtises-là…</p><p>
cent mille francs la collection de feu monsieur le conseiller
Dusommerard, et dépenser, avec la ville de Paris par moitié, près d’un
Ligne 1 557 :
les Étrusques étaient des Troyens réfugiés en Italie.</p><p>
Tel était le genre de plaisanterie du gros-petit président, il procédait avec sa femme et sa fille par de lourdes ironies.</p><p>
reprit-il, est une science qui s’appelle l’archéologie. L’archéologie
comprend l’architecture, la sculpture, la peinture, l’orfèvrerie, la
céramique, l’ébénisterie, art tout moderne, les dentelles, les
tapisseries, enfin toutes les créations du travail humain.</p><p>
d’un homme qui ressent une commotion produite par mille observations
oubliées dont la réunion subite fait balle, pour employer une
expression aux chasseurs.</p><p>
n’ai peut-être pas été sensible autant que je le devais au cadeau de
cet éventail. Je suis, vous le savez, assez ignorante…</p><p>
le président avec une humilité qui dénotait toutes les obligations
qu’il avait à sa femme.</p><p>
Ligne 1 590 :
narquois enthousiasme fait renchérir de jour en jour les curiosités,
qui, disent-ils, deviennent si rares qu’on n’en trouve plus.</p><p>
une maison, chez un parent, qu’à mon âge on est de trop dans le monde.
On ne m’a jamais reçu avec beaucoup d’égards, mais du moins on ne
Ligne 1 605 :
la faculté d’y mettre par le geste et par l’accent, frappèrent
tellement le pair de France, qu’il prit le digne musicien à part.</p><p>
confier ce qui vous a blessé ? Vous me permettrez de vous faire observer
que, chez moi, vous devez avoir trouvé des égards…</p><p>
D’ailleurs, vous êtes un grand seigneur, un homme d’État, et vos
préoccupations excuseraient tout, au besoin.</p><p>
Ligne 1 631 :
et tous ceux qui lui faisaient l’honneur de venir chez lui n’étaient
pas traités comme lui-même. Cette parole fit sourire Madeleine.</p><p>
désarmer mon cousin par des excuses. Allez lui dire que votre maintien
ici dépend entièrement de lui, car je vous renvoie tous, s’il ne vous
Ligne 1 645 :
Cibot. Pons, qui recevait cet honneur pour la première fois de sa vie,
pressentit une réparation.</p><p>
fini par savoir la cause de votre retraite. Votre conduite augmente, si
c’est possible, l’estime que j’ai pour vous. Je ne vous dirai qu’un mot
Ligne 1 661 :
musicien de son orchestre, qui jetait la flûte aux orties pour devenir
banquier.</p><p>
monsieur Brunner, rend aux fiancés la politesse qu’il reçoit d’eux
aujourd’hui…</p><p>
de vous recevoir, dit le président. Eh bien ! dimanche prochain ! à
huitaine… comme on dit au Palais.</p><p>
petite fille qui a déjà versé des larmes sur sa faute. Dieu ne demande
que le repentir, serez-vous plus exigeant que le Père Éternel avec
Ligne 1 681 :
pleurèrent ! Madeleine prit à part monsieur Pons, et se jeta résolument
à ses pieds.</p><p>
l’aime, dit-elle en fondant en larmes. C’est à la vengeance, qui me
bouillait dans le sang, que monsieur doit s’en prendre de toute cette
Ligne 1 754 :
et le successeur de Cardot, ancien second premier clerc de l’Étude,
chez qui dînait souvent Pons.</p><p>
nous ? demanda le notaire. Ma femme était inquiète de vous. Nous vous
avons vu à la première représentation de la Fiancée du Diable, et notre
inquiétude est devenue de la curiosité.</p><p>
tort d’être d’un siècle en retard ; mais qu’y faire ?… c’est bien assez
d’en représenter un, ils ne peuvent pas être de celui qui les voit
mourir.</p><p>
pourquoi ne mariez-vous pas ma cousine Cécile de Marville ?…</p><p>
pénétré jusque dans les loges de concierge, les jeunes gens hésitent à
joindre leur sort à celui de la fille d’un président à la Cour royale
Ligne 1 798 :
dessine in petto un programme d’alliance pour satisfaire à
d’ambitieuses pensées, mademoiselle de Marville y répond fort peu…</p><p>
fussent-ils laids comme nous deux, mon cher Pons, ont l’impertinence de
vouloir une dot de six cent mille francs, des filles de grande maison,
très belles, très spirituelles, très bien élevées, sans tare, parfaites.</p><p>
à lui donner Marville en dot ; et, s’ils l’avaient voulu, elle serait
déjà la vicomtesse Popinot… Mais voici monsieur Brunner, nous allons
Ligne 1 837 :
de son désir de marier Fritz, mais avec une force, avec une éloquence
vineuse.</p><p>
l’oreille de Wilhem : une jeune personne charmante, raisonnable,
vingt-quatre ans, appartenant à une famille de la plus haute
Ligne 1 843 :
magistrature, il y a cent mille francs de dot, et des espérances pour
un million.</p><p>
Et les deux musiciens virent Brunner et son ami tournant dans le
jardin, passant et repassant sous leurs yeux, l’un écoutant l’autre
Ligne 1 872 :
Certainement il atteignit au sublime, et tout le monde en conviendra,
car nous sommes dans un siècle où l’on donne le prix Montyon à ceux qui
font leur devoir, en suivant les préceptes de l’Évangile.
auront d’immenses obligations à leur pique-assiette, se disait-il en
tournant la rue de Choiseul.</p><p>
Ligne 1 904 :
lorsqu’elle eut conjecturé que Frédéric avait l’air distingué, elle
admira la générosité de son caractère.</p><p>
Et Cécile devint presque jolie en pensant à la réalisation de toutes
les prétentions de sa mère pour elle, et à l’accomplissement des
espérances dont elle désespérait.</p><p>
Quant à la présidente, elle dit ce seul mot :
Toutes les mères appellent leurs filles qui ont vingt-trois ans, des fillettes !</p><p>
renseignements, jamais je ne donnerai ma fille au premier venu…</p><p>
actes, répondit le vieil artiste. Quant au jeune homme, ma chère
cousine, vous savez ce que vous m’avez dit ! Eh bien, il a quarante ans
Ligne 1 918 :
famille un port contre les orages, je ne l’en ai pas détourné ; tous les
goûts sont dans la nature…</p><p>
président. Je ne veux pas donner ma fille à quelque valétudinaire.</p><p>
jours, si vous voulez ; car, dans vos idées, une entrevue suffirait…</p><p>
Cécile et la présidente firent un geste d’enchantement.</p><p>
voir en détail ma petite collection, reprit le cousin Pons. Vous n’avez
jamais vu mes tableaux, mes curiosités, venez, dit-il à ses deux
Ligne 1 929 :
et vous ferez connaissance avec le futur, sans être compromises.
Frédéric peut parfaitement ignorer qui vous êtes.</p><p>
On peut deviner les égards qui furent prodigués au parasite jadis
dédaigné. Le pauvre homme fut, ce jour-là, le cousin de la présidente.
Ligne 1 939 :
vie de cocagne et une suite merveilleuse de plats couverts ! de
surprises gastronomiques, de vins exquis !</p><p>
président à sa femme quand Pons fut parti, nous devons lui constituer
une rente équivalente à ses appointements de chef d’orchestre.</p><p>
Cécile fut chargée, dans le cas où elle agréerait le jeune homme, de faire accepter cette ignoble munificence au vieux musicien.</p><p>
Le lendemain, le président, désireux d’avoir des preuves authentiques
Ligne 1 952 :
conseillère, madame l’avocate), Schwab fut coulant comme un
collectionneur qui croit fourber un marchand.</p><p>
contrat ma terre de Marville à ma fille, je désirerais la marier sous
le régime dotal. Monsieur Brunner placerait alors un million en terres
Ligne 1 958 :
l’avenir de ma fille et celui de ses enfants à l’abri des chances de la
Banque.</p><p>
Berthier se caressa le menton en pensant :
Schwab, après s’être fait expliquer l’effet du régime dotal, se porta
fort pour son ami. Cette clause accomplissait le vœu qu’il avait
entendu former à Fritz de trouver une combinaison qui l’empêchât jamais
de retomber dans la misère.</p><p>
garantir le compte de notre maison à la Banque, Fritz ne veut pas
mettre plus de deux millions dans les affaires, il fera ce que vous
Ligne 1 971 :
ces nouvelles. Jamais capture si riche ne s’était montrée si
complaisante au filet conjugal.</p><p>
j’obtiendrai pour ton mari la permission de joindre ce nom au sien, et
plus tard il aura des lettres de naturalité. Si je deviens pair de
Ligne 2 038 :
collectionnées pendant quarante ans de patience, s’enthousiasma, les
estima, pour la première fois, à leur valeur, à la grande satisfaction
de Pons.
des millions. Un poète est un homme qui ne compte pas, qui laisse sa
femme maîtresse des capitaux, un homme facile à mener et qu’on occupe
Ligne 2 071 :
Cécile, qui causait toujours beaux-arts, fut étonnée de l’admiration de
son prétendu pour les brimborions de son cousin Pons.</p><p>
collection, j’en donnerais ce soir huit cent mille francs, et je ne
ferais pas une mauvaise affaire. Les soixante tableaux monteraient
seuls à une somme plus forte en vente publique.</p><p>
que cela soit, car c’est ce dont vous vous êtes le plus occupé.</p><p>
reproche, je vais demander à madame votre mère la permission de me
présenter chez elle pour avoir le bonheur de vous revoir.</p><p>
sur les talons de sa fille.
monsieur, ajouta-t-elle à haute voix. J’espère que vous viendrez avec
notre cousin Pons à l’heure du dîner ; monsieur le président sera charmé
de faire votre connaissance…</p><p>
significative, que la phrase sacramentelle : "C’est entre nous à la vie
à la mort !" n’eût pas été si forte. Elle embrassa Pons par l’œillade
Ligne 2 093 :
remise eut disparu dans la rue Charlot, Brunner parla bric-à-brac à
Pons qui parlait mariage.</p><p>
collection de tableaux, j’en donnerais bien cinq à six cent mille
francs…</p><p>
pourrais pas me séparer de ce qui fait mon bonheur… Je ne vendrais ma
collection que livrable après ma mort.</p><p>
Brunner salua Pons et disparut, emporté par son brillant équipage. Pons
regarda fuir le petit coupé sans faire attention à Rémonencq qui fumait
Ligne 2 116 :
une petite vengeance bien naturelle au cœur des mères, quand elles
n’ont pas réussi à capturer un fils de famille, madame de Marville fit
entendre que Cécile faisait un mariage superbe.
épouse-t-elle donc ? fut une demande qui courut sur toutes les lèvres.
Et alors, sans croire trahir ses secrets, la présidente dit tant de
Ligne 2 132 :
ces variations admirables que les mères pourront consulter, comme
autrefois on consultait le parfait secrétaire :</p><p>
on revient de la Mairie et de l’Église, et nous n’en sommes encore qu’à
des entrevues ; aussi compté-je assez sur votre amitié pour ne pas
parler de nos espérances…</p><p>
étions exigeants, c’est ce qui retardait l’établissement de Cécile.
Mais nous trouvons tout : fortune, amabilité, bon caractère, et un joli
Ligne 2 146 :
il connaît la vie, il est fou de Cécile, il l’aime sincèrement ; et,
malgré ses trois ou quatre millions, Cécile l’accepte. Nous n’avions
pas de prétentions si élevées, mais…
qui nous décide, disait la présidente à madame Lebas. Monsieur Brunner
est si pressé, qu’il veut que le mariage se fasse dans les délais
légaux.</p><p>
pas un gendre, c’est un fils que j’aurai. Monsieur Brunner est d’une
délicatesse vraiment séduisante. On n’imagine pas l’empressement qu’il
Ligne 2 182 :
de goût (il aimait la fillette), le futur rival des Nucingen, des
Keller, des du Tillet, etc.</p><p>
à celui qu’elle regardait comme son gendre en lui nommant les convives,
nous n’avons que des intimes. D’abord, le père de mon mari, qui, vous
Ligne 2 191 :
amis… Nous serons obligés de dîner un peu tard, à cause de la Chambre
où la séance ne finit jamais qu’à six heures.</p><p>
Brunner regarda Pons d’une manière significative, et Pons se frotta les mains, en homme qui dit :
La présidente, en femme habile, eut quelque chose de particulier à dire
à son cousin, afin de laisser Cécile un instant en tête à tête avec son
Ligne 2 197 :
Frédéric aperçut un dictionnaire allemand, une grammaire allemande, un
Goethe qu’elle avait cachés.</p><p>
Il n’y a que les Françaises pour inventer ces sortes de trappes.</p><p>
fouiller ainsi dans mes cachettes. Je veux lire Goethe dans l’original,
répondit-elle. Et il y a deux ans que j’apprends l’allemand.</p><p>
Cécile, confuse, se retourna pour ne pas laisser voir sa rougeur. Un
Allemand ne résiste pas à ces sortes de témoignages, il prit Cécile par
Ligne 2 208 :
les fiancés se regardent dans les romans d’Auguste Lafontaine, de
pudique mémoire.</p><p>
Cécile fut un geste mutin qui signifiait :
aimerait ?
revint avec Pons.</p><p>
L’aspect d’une famille pendant une soirée pareille ne se décrit pas.
Ligne 2 232 :
comme une prime, fit sur lui-même un retour israélite, et prit une
attitude qui dénotait la rêverie plus que froide du calculateur.</p><p>
j’en traite avec notre ami Brunner ou que je la garde, disait Pons en
apprenant à la famille étonnée qu’il possédait de si grandes valeurs.</p><p>
Ligne 2 240 :
leur Cécile, idole de la maison, et il se plut alors à exciter les
surprises et les exclamations de ces dignes bourgeois.</p><p>
cette somme pour moi ; mais au prix que les objets d’art uniques ont
acquis, personne ne peut prévoir la valeur à laquelle cette collection
atteindrait en vente publique. Les soixante tableaux monteraient à un
million, j’en ai vu plusieurs de cinquante mille francs.</p><p>
Un mouvement d’admiration se manifesta pour le vieux musicien.</p><p>
On laissa Camusot le père, le président, la présidente, Cécile,
Brunner, Berthier et Pons ensemble ; car on présuma que la demande
Ligne 2 254 :
personnes furent seules, Brunner commença par une demande, qui parut
d’un bon augure aux parents.</p><p>
Brunner devint soucieux, et un fatal silence amena la froideur la plus
étrange. Il semblait que la présidente eût avoué que sa fillette était
Ligne 2 266 :
surgissait quelques difficultés, et il demanda par un geste à son fils,
à sa belle-fille et à Pons de le laisser avec le futur.</p><p>
alliance ne peut être plus flatteuse pour moi que celle-là. Je ne
trouverai jamais une jeune personne plus belle, plus aimable, qui me
convienne mieux que mademoiselle Cécile ; mais…</p><p>
soyons engagés ni les uns ni les autres, car la qualité de fille
unique, si précieuse pour tout le monde, excepté pour moi, qualité que
j’ignorais, croyez-moi, est un empêchement absolu…</p><p>
vous en faites un tort ? Votre conduite est vraiment extraordinaire, et
je voudrais bien en connaître les raisons.</p><p>
avec l’intention de demander, à monsieur le président, la main de sa
fille. Je voulais faire un sort brillant à mademoiselle Cécile en lui
Ligne 2 306 :
sacrifié, s’il est toutefois nécessaire d’expliquer pourquoi je n’ai
fait qu’une visite ici…</p><p>
Brunner en l’interrompant. Si vous connaissez une pauvre fille dans une
famille chargée d’enfants, bien élevée néanmoins, sans fortune, comme
Ligne 2 317 :
Werther, Cécile se montra pâle comme une moribonde, elle avait tout
écouté, cachée dans la garde-robe de sa mère.</p><p>
répondit le vieillard. Et il n’a pas tout à fait tort, ajouta-t-il en
saisissant cette occasion de blâmer sa belle-fille, qui l’ennuyait fort
depuis vingt ans.</p><p>
retenant sa fille qui trouva joli de justifier ces paroles en se
laissant aller dans les bras de sa mère.</p><p>
Ligne 2 332 :
<p>
Pons se dressa comme s’il avait entendu retentir à ses oreilles la trompette du jugement dernier.</p><p>
fontaines de bile verte, monsieur a voulu répondre à une innocente
plaisanterie par une injure. À qui fera-t-on croire que cet Allemand
Ligne 2 342 :
une maison où vous avez essayé de porter la honte et le déshonneur.</p><p>
Pons, devenu statue, tenait les yeux sur une rosace du tapis et tournait ses pouces.</p><p>
présidente en se retournant. Nous n’y serons jamais, monsieur ni moi,
si jamais monsieur se présentait ! dit-elle aux domestiques en leur
Ligne 2 397 :
qui chacun craignait de parler, alla bravement au-devant des
explications.</p><p>
précautions quand il s’agit de mariage, et surtout quand on a affaire à
des étrangers.</p><p>
l’audace d’aspirer à la main de Cécile ?… C’est le fils d’un
cabaretier allemand, le neveu d’un marchand de peaux de lapins.</p><p>
Cet Allemand a pour ami un pauvre diable qui joue de la flûte ! Il est
lié avec un homme qui tient un garni, rue du Mail, avec des
Ligne 2 412 :
et aucune fortune ne peut suffire à un drôle qui a déjà mangé celle de
sa mère…</p><p>
monsieur-là pour nous livrer au ridicule… Ce Brunner, ça veut dire
Fontaine (on nous le donnait pour un grand seigneur), est d’une assez
triste santé, chauve, les dents gâtées ; aussi m’a-t-il suffi de le voir
une fois pour me défier de lui.</p><p>
le maître d’hôtel et lui, tous ont gratté leurs caisses pour faire une
maison de Banque… Aujourd’hui, qu’est-ce que la Banque, quand on la
Ligne 2 468 :
plus respectueuse, l’ancien ministre étant un des hommes que Pons
estimait et vénérait le plus.</p><p>
pas que vous ayez assez peu de tact pour saluer une personne alliée à
la famille où vous avez tenté d’imprimer la honte et le ridicule par
Ligne 2 481 :
pressé par l’intérêt de famille d’écraser Pons, ne s’aperçut point de
la faiblesse physique de ce redoutable ennemi.</p><p>
répondit le bonhomme en s’appuyant sur le bras de Schmucke. Je crois
qu’il n’y a que le bon Dieu qui ait le droit de faire le bien, voilà
Ligne 2 489 :
Ce sarcasme d’artiste fut un suprême effort de cette excellente
créature qui voulut dissiper l’effroi peint sur la figure de son ami.</p><p>
Ce fut inexplicable pour Pons, à qui ni les Camusot ni les Popinot
n’avaient envoyé de billet de faire part du mariage de Cécile. Sur le
Ligne 2 497 :
quinze jours, il se contenta de le saluer ; mais le maire, le député de
Paris, regarda Pons d’un air indigné, sans lui rendre son salut.</p><p>
Schmucke qui connaissait dans tous ses détails la catastrophe survenue
à Pons.</p><p>
encore, c’est que, comme dit le proverbe : La mauvaise herbe croît en
dépit de tout. Le monde a bien raison de se défier des artistes, ils
Ligne 2 513 :
personnes de ma famille, de la sienne, et des gens qui faisaient au
sieur Pons l’honneur de le recevoir…</p><p>
répliqua Cardot ; mais n’allez pas plus avant, car je crois devoir vous
prévenir que j’envelopperai dans la même réprobation ceux qui
tenteraient de l’excuser, de le défendre.</p><p>
Sur ce bon mot, le député de la Seine continua son chemin sans vouloir entendre une syllabe de plus.</p><p>
pauvre Pons quand Schmucke eut fini de lui redire ces sauvages
imprécations.</p><p>
C’était la première fois de sa vie, vraiment ovine, que Schmucke
proférait de telles paroles. Jamais sa mansuétude quasi divine n’avait
Ligne 2 551 :
traité de cousin ; mais, ne pouvant l’éviter, Félicie Berthier s’arrêta
devant le moribond.</p><p>
j’entends dire de vous, le quart seulement est vrai, vous êtes un homme
bien faux… Oh ! ne vous justifiez pas ! ajouta-t-elle vivement en
Ligne 2 563 :
vous ai parlé pour la dernière fois, il me gronderait. Tout le monde
est contre vous.</p><p>
Et il reprit péniblement le chemin de la rue de Normandie en s’appuyant
sur le bras de Schmucke avec une pesanteur qui trahit au vieil Allemand
Ligne 2 598 :
la nuit, s’était gratté la peau devenue tout à fait insensible. L’état
des yeux, cerclés de jaune, s’accordait avec ce symptôme.</p><p>
Schmucke, la jaunisse ; mais ce ne sera rien, ajouta le docteur Poulain
en écrivant une ordonnance.</p><p>
Ligne 2 610 :
à l’accent de la phrase médicale ni à la physionomie hypocrite du
docteur Poulain, et elle le suivit à sa sortie.</p><p>
suite de l’invasion de la bile dans le sang, mais à cause de sa
faiblesse morale. Avec beaucoup de soins, cependant, votre malade peut
encore s’en tirer ; il faudrait le sortir d’ici, l’emmener voyager…</p><p>
et son ami vit de quelques petites rentes que lui font de grandes dames
auxquelles il aurait, à l’entendre, rendu des services, des dames très
charitables. C’est deux enfants que je soigne depuis neuf ans.</p><p>
maladies, mais de cette grande et incurable blessure, le manque
d’argent. Dans combien de mansardes ne suis-je pas obligé, loin de
faire payer ma visite, de laisser cent sous sur la cheminée !…</p><p>
les cent mille livres de rente que possèdent certains grigous du
quartier, qui sont de vrais décharnés des enfers (déchaînés), vous
Ligne 2 631 :
ses besoins, leva les yeux au ciel et remercia madame Cibot par une
moue digne de Tartuffe.</p><p>
n’a son pareil sur terre que dans son ami, monsieur Schmucke !… Je
vais savoir de quoi n’il retourne ! Et c’est moi qui me charge de
savonner ceux qui m’ont sangé mon monsieur…</p><p>
sur le pas de la porte cochère, un des principaux caractères de la
maladie de votre monsieur, c’est une impatience constante à propos de
rien, et, comme il n’est pas vraisemblable qu’il puisse prendre une
garde, c’est vous qui le soignerez. Ainsi…</p><p>
Et il se leva de dessus la borne de la porte pour se mêler à la conversation de la portière et du concierge.</p><p>
cheigneurs de la curiochité… Cheu me connaîche achez dedans l’artique
pour vous direu que le cher homme a deche trégeors !</p><p>
vous ai montré toutes ces antiquailles-là pendant que mes messieurs
étaient sortis, dit madame Cibot à Rémonencq.</p><p>
Ligne 2 674 :
le coiffeur, les médecins, en se disant adieu sur le pas de la porte
cochère, parlaient, la science et la vérité sur la main, comme ils se
parlent entre eux quand la farce de la consultation est jouée.
un homme mort, dit le docteur Haudry.
répondit Desplein, à moins d’un miracle. Le coiffeur entendit ces
paroles. Comme tous les coiffeurs, il entretenait des intelligences
Ligne 2 702 :
monter, ce qui veut dire dans l’argot des marchands une fortune à
voler, et il y songeait depuis cinq à six jours.</p><p>
que nous caugerons de la choge, et que chi ce braveu mocheu veutte une
renteu viachère de chinquante mille francs, che vous paille un pagnier
de vin du paysse chi vous me…</p><p>
rente viagère !… Mais si le bonhomme est si riche, soigné par moi,
gardé par madame Cibot, il peut guérir alors… car les maladies de
foie sont les inconvénients des tempéraments très forts…</p><p>
voustre porte, lui a proupouché chet chent mille francs, et cheulement
des tabelausse, fouchtra !</p><p>
Ligne 2 716 :
docteur Poulain d’un air étrange, le diable allumait un feu sinistre
dans ses yeux couleur orange.</p><p>
assez heureux de savoir que son client pouvait payer toutes les visites
qu’il allait faire.</p><p>
moncheux est au litte, veutte me laicher amenar mon ecchepert, che
chuis chûre de trouver l’archant, en deuche heures, quand il s’achirait
de chet chent milé franques…</p><p>
de ne jamais contrarier le malade ; il faut vous armer de patience, car
tout l’irritera, le fatiguera, même vos attentions pour lui ;
attendez-vous à ce qu’il ne trouve rien de bien…</p><p>
monsieur Pons est entre les mains de ceux qui le soigneront ; aussi
viendrai-je le voir peut-être deux fois, tous les jours. Je commencerai
Ligne 2 736 :
reconnaissant la possibilité de cette fortune, d’après le sérieux du
spéculateur.</p><p>
La portière attendit que le médecin eût tourné la rue Charlot avant de
reprendre la conversation avec Rémonencq. Le ferrailleur achevait sa
Ligne 2 848 :
gratis par Cibot. Comme on le voit, tous les juifs ne sont pas en
Israel.</p><p>
que monsieur Pons peut avoir une pareille fortune et mener la vie qu’il
mène ? Il n’a pas cent francs chez lui !…</p><p>
voulait chinquante mille franques, queu che les trouveraisse quand che
devrais me strangula. Vous chavez bien leje petites cadres en cuivre
Ligne 2 859 :
bien ! ch’esce desche émauche de Petitotte que moncheu le minichtre du
gouvarnemente, uene anchien deroguisse, paille mille escus pièche…</p><p>
Madame Cibot, prise de vertige, fit volte-face. Elle conçut aussitôt
l’idée de se faire coucher sur le testament du bonhomme Pons, à
Ligne 2 890 :
personnel que ceux si péniblement cherchés par les ambassadeurs pour
déterminer la rupture des alliances les mieux cimentées.</p><p>
voyant reprendre sa place sur une chaise dépaillée. Et doncques, che
vais conchulleter le cheul qui s’y connaiche, nostre Chuif, un bon
Ligne 2 919 :
dans les yeux du docteur ; et elle y répondit par un autre signe de
tête, en exprimant une profonde douleur.</p><p>
La portière se posa au pied du lit, les poings sur ses hanches et les
yeux fixés sur le malade amoureusement ; mais quelles paillettes d’or en
jaillissaient ! C’eût été terrible comme un regard de tigre, pour un
observateur.</p><p>
appétit. Ah ! le monde ! le monde ! s’écriait-il en pressant la main de
Schmucke qui tenait, assis au chevet du lit, la main de Pons, et avec
qui sans doute le malade parlait des causes de sa maladie.
bien mieux fait, mon bon Schmucke, de suivre tes conseils ! de dîner ici
tous les jours depuis notre réunion ! de renoncer à cette société qui
roule sur moi, comme un tombereau sur un œuf, et pourquoi ?…</p><p>
Schmucke tira la portière par la robe.</p><p>
Soyez tranquille, vous n’avez près de vous n’un bon ami, et, sans me
vanter, n’une femme qui vous soignera comme n’une mère soigne son
Ligne 2 942 :
moi… je vous n’en tirerai n’a moi seule ! Soyez tranquille, ne vous
n’agitez pas comme ça. Elle ramena la couverture sur les mains du
malade.
passerons les nuits, là, n’à votre chevet… Vous serez mieux gardé
qu’un prince, et… d’ailleurs, vous n’êtes assez riche pour ne vous
Ligne 2 957 :
l’image du bon Dieu sur la terre, je ne me mêle plus de vous… faut
m’obéir…</p><p>
vous n’y pousse assez, sans que vous n’augmentiez votre défaut de
patience. Dieu nous envoie nos maux, mon cher bon monsieur, il nous
punit de nos fautes, vous n’avez bien quelques chères petites fautes
n’à vous reprocher !… Le malade inclina la tête négativement.
n’allez, vous n’aurez aimé dans votre jeunesse, vous n’aurez fait vos
fredaines, vous n’avez peut-être quelque part n’un fruit de vos
n’amours, qui n’est sans pain, ni feu, ni lieu… Monstres d’hommes ! Ça
n’aime n’un jour, et puis :
n’aux mois de nourrice ! Pauvres femmes !…</p><p>
deviez n’être bien joli garçon. À vingt ans… moi, bon comme vous
l’êtes, je vous n’aurais n’aimé…</p><p>
faire accroire que vous n’êtes à votre âge, comme n’une rosière… à
d’autres ! n’un musicien ! un homme de théâtre ! mais ce serait nune femme
qui me dirait cela, que je ne la croirais pas.</p><p>
beau n’être laids, il n’y a si vilain couvercle qui ne trouve son pot !
comme dit le proverbe ! Cibot s’est bien fait n’aimer d’une des plus
Ligne 2 986 :
Vous n’êtes bon ! vous… n’allons, vous n’avez fait vos farces ! Et Dieu
vous punit d’avoir abandonné vos enfants, comme Abraham !… Le malade
abattu trouva la force de faire encore un geste de dénégation.
soyez tranquille, ça ne vous empêchera de vivre n’autant que Mathusalem.</p><p>
c’était que d’être aimé !… je n’ai pas eu d’enfants, je suis seul sur
la terre…</p><p>
les femmes, qui, voyez-vous, n’aiment la bonté, c’est ce qui les
attache… et il me semblait impossible que dans votre bon temps…</p><p>
n’êtes venus tous deux comme des champignons sur cette terre.</p><p>
Le bon Allemand prit héroïquement madame Cibot par la taille, et l’emmena dans le salon, sans tenir compte de ses cris.</p>
Ligne 3 006 :
<p>
parler d’amour n’à des vieillards qui n’ont jamais connu de femmes !
j’ai n’allumé vos feux, monstre, s’écria-t-elle en voyant les yeux de
Schmucke brillant de colère. N’à la garde ! n’à la garde ! on m’enlève !</p><p>
liberté, moi qui me jetterais dans le feu pour vous deux ! Ah bien ! n’on
dit que les hommes se connaissent à l’user… Comme c’est vrai ! C’est
pas mon pauvre Cibot qui me malmènerait ainsi… Moi qui fais de vous
mes enfants ; car je n’ai pas d’enfants, et je disais hier, oui, pas
plus tard qu’hier, à Cibot : "
faisait en nous refusant des enfants, car j’ai deux enfants là-haut !"
Voilà, par la sainte croix de Dieu, sur l’âme de ma mère, ce que je lui
disais…</p><p>
la salle à manger, il n’a dit que notre cher bien-aimé chéri de n’amour
de malade serait en danger de mourir, s’il n’était pas bien soigné ;
Ligne 3 029 :
que je croyais si doux. N’en avez-vous de ce tempérament !… N’ah ! vous
n’abuseriez donc n’encore n’à votre âge d’une femme, gros polisson ?…</p><p>
dit-elle en souriant à Schmucke. Vous ferez bien, car Cibot casserait
les os à quiconque n’attenterait à son noneur !</p><p>
voyez-vous, monsieur, ça coûtera cette maladie ; net comment
ferez-vous ?…</p><p>
inquiétez de rien. Cibot et moi, nous n’avons deux mille francs
d’économies, elles sont à vous, et n’il y a longtemps que je mets du
mien ici, n’allez !…</p><p>
mélodramatiquement la Cibot. Je suis la plus désintéressée de toutes
les créatures, mais n’entrez pas n’avec des larmes n’aux yeux, car
monsieur Pons croirait qu’il est plus malade qu’il n’est.</p><p>
Schmucke, ému de cette délicatesse, prit enfin la main de la Cibot et la lui serra.</p><p>
malade en hochant la tête. Après tous mes malheurs, on ne croit plus à
rien qu’à Dieu et à toi !…</p><p>
mon ami, notre fortune n’est faite ! Mes deux messieurs n’ont pas
d’héritiers, ni d’enfants naturels, ni rien… quoi !… Oh ! j’irai chez
madame Fontaine me faire tirer les cartes, pour savoir ce que nous
n’aurons de rente !…</p><p>
à Cibot. Je sais ce que je sais ! Monsieur Poulain n’a condamné monsieur
Pons ! Et nous serons riches ! Je serai sur le testament… Je m’en
Ligne 3 069 :
Batignolles. N’une belle maison, n’un beau jardin, que tu t’amuseras à
cultiver, et j’aurai n’une servante !…</p><p>
j’ai commencé par me faire dire des choses plus importantes…</p><p>
auriez de quoi reschter bourcheois pour le reschte de vostre vie…</p><p>
valent toutes les choses que le bonhomme a amassées, nous verrons…</p>
Ligne 3 301 :
<p>
La vieille domestique, qui servait de prévôt à la tireuse de cartes, ouvrit la porte du sanctuaire, sans prévenir sa maîtresse.</p><p>
Madame Fontaine, alors âgée de soixante-dix-huit ans, méritait cette qualification pour son extérieur digne d’une Parque.</p><p>
Et elle expliqua la situation dans laquelle elle se trouvait en demandant une prédiction pour son sordide espoir.</p><p>
farce ! cent francs !… Excusez du peu ! N’où que je les n’aurais pris ?
Mais n’aujourd’hui, n’il me le faut !</p><p>
le donne aux riches que dans les grandes occasions, et on me le paye
vingt-cinq louis ; car, voyez-vous, ça me fatigue, ça m’use ! l’Esprit me
tripote, là, dans l’estomac. C’est, comme on disait autrefois, aller au
sabbat !</p><p>
livrer à l’Esprit ! répondit madame Fontaine en laissant voir sur sa
figure décrépite une expression de terreur qui n’était pas jouée.</p><p>
Ligne 3 324 :
extraordinaire, à côté d’une cage ouverte et habitée par une poule
noire aux plumes ébouriffées.</p><p>
longue aiguille à tricoter sur le dos du crapaud, qui la regarda d’un
air intelligent.
reprit-elle en donnant un petit coup sur le bec de la vieille poule.
Madame Fontaine se recueillit, elle demeura pendant quelques instants
immobile ; elle eut l’air d’une morte, ses yeux tournèrent et devinrent
blancs. Puis elle se roidit, et dit :
Après avoir automatiquement éparpillé du millet pour Cléopâtre, elle
prit son grand jeu, le mêla convulsivement, et le fit couper par madame
Ligne 3 344 :
chemin que faisait le crapaud en se retirant, elle déchiffra le sens
des cartes en y dirigeant ses yeux blancs.</p><p>
vous le croyez ! dit-elle. Vous aurez bien des démarches à faire. Mais
vous recueillerez le fruit de vos peines. Vous vous conduirez bien mal,
Ligne 3 366 :
<p>
celle qu’elle avait eue en prophétisant, êtes-vous contente ?…</p><p>
Madame Cibot regarda la sorcière d’un air hébété sans pouvoir lui répondre.</p><p>
la porte de l’avenir, j’ai tiré le cordon, voilà tout, et il est venu !</p><p>
servante en reconduisant la portière jusque sur le palier. Elle
crèverait à la peine, tant ça la lasse. Elle va manger des côtelettes
Ligne 3 401 :
aussi spirituelle sous sa bêtise que le séduisant la Palférine.</p><p>
Quelques jours après, sur les sept heures du matin, en voyant Rémonencq occupé d’ouvrir sa boutique, elle alla chattement à lui.</p><p>
affreux charabia qu’il est inutile de continuer à figurer pour la
clarté du récit. Si vous voulez jouer franc jeu avec moi, je vous
indiquerai un appréciateur, un bien honnête homme, qui saura la valeur
des tableaux à deux sous près…</p><p>
Élie Magus, dont le nom est trop connu dans la Comédie humaine pour
qu’il soit nécessaire de parler de lui, s’était retiré du commerce des
Ligne 3 605 :
de la rue de Normandie, les deux complices du coup à monter y furent en
dix minutes.</p><p>
marchands de la Curiosité, le plus grand connaisseur qu’il y ait à
Paris…</p><p>
Ligne 3 614 :
rez-de-chaussée ; puis, en recevant un regard de ces yeux pleins d’une
malice froide comme ceux des chats, elle trembla.</p><p>
puissiez dire à un pauvre chaudronnier comme moi ce qu’il en peut
donner, quand il n’a pas, comme vous, des mille et des cents !</p><p>
Moret, ce peintre, savait la valeur du Musée-Pons, et il avait levé
brusquement la tête. Cette finesse ne pouvait être hasardée qu’avec
Ligne 3 678 :
situation des deux amis, demandait à Schmucke comment il pouvait
laisser Pons tout seul, il répondait, avec le sublime sourire des
dupes :
berle ! Bons ed zoicné gomme ein brince ! Or, dès que Schmucke trottait
par les rues, la Cibot était la maîtresse de l’appartement et du
Ligne 3 711 :
cœurs, et l’on va voir comment elle exécutait les conseils que lui
sifflait le serpent.</p><p>
prendre et en laisser… Cibot serait à la mort, je ne serais pas si
désolée que vous l’êtes. Allez ! notre chérubin est d’une bonne
Ligne 3 721 :
Soyez tranquille, allez à vos affaires, je vais lui tenir compagnie, et
lui faire boire ses pintes d’eau d’orge.</p><p>
ses mains par un geste de confiance la main de sa bonne ménagère.</p><p>
La Cibot entra dans la chambre de Pons en s’essuyant les yeux.</p><p>
comme si vous étiez mort ! dit-elle. Quoique vous ne soyez pas bien,
vous n’êtes pas encore assez mal pour qu’on vous pleure ; mais cela me
Ligne 3 738 :
mignon, allons, un plein verre ! Voulez-vous boire, monsieur ! D’abord,
monsieur Poulain a dit :</p><p>
dans sa journée autant de voies d’eau qu’un Auvergnant en vend. Ainsi,
buvez ! allons !…</p><p>
en sauverez comme ça ! Monsieur Poulain avait un malade comme vous, qui
n’avait aucun soin, que ses enfants abandonnaient et il est mort de
Ligne 3 768 :
Mettez une garde ici pour aujourd’hui, mais demain nous trouvererions
un tableau, quelque objet de moins…</p><p>
là… soyez tranquille ! Monsieur Poulain, qui peut-être a des vues sur
votre trésor, ne voulait-il pas vous donner n’une garde !… Comme je
vous l’ai remouché ! "
veuille monsieur, il a mes habitudes comme j’ai les siennes." Et il
s’est tu. Mais une garde, c’est tout voleuses ! J’haï-t-il ces
femmes-là… Vous allez voir comme elles sont intrigantes. Pour lors,
un vieux monsieur…</p><p>
marchande de mules au Palais,
marchande qu’on a démolie au Palais…</p><p>
Pons fit un signe affirmatif.</p><p>
buvait tout et qu’est mort d’une imbustion spontanée, mais elle a été
belle femme, faut tout dire, mais ça ne lui a pas profité, quoiqu’elle
Ligne 3 816 :
comme vos enfants, vous leur avez épargné mille francs par an…" Car,
à ma place, savez-vous, monsieur, qu’il y a bien des cuisinières qui
auraient déjà mille francs ed’ placés. "
digne monsieur vous laisse un petit viager !…" qu’on me dirait par
supposition. Eh bien ! non ! moi je suis désintéressée… Je ne sais pas
Ligne 3 831 :
devoir, car il est à lui seul, toute votre famille ! il vous n’aime,
celui-là, comme un chien aime son maître.</p><p>
Ligne 3 837 :
<p>
ordinaire, comme si je n’avais pas n’un cœur ! Ah ! mon Dieu !
fendez-vous donc pendant onze ans pour deux vieux garçons ! ne soyez
Ligne 3 855 :
je ne suis qu’une pauvre portière. Ah ! mon Dieu ; vous croyez donc
aussi, vous, que nous sommes des chiens…</p><p>
traités comme ça, nous autres concierges, qu’on ne nous croit pas des
sentiments, qu’on se moque de nous, dans n’un temps où l’on parle
Ligne 3 865 :
connaissez bien ce gringalet de ferrailleur qu’est à la porte, eh bien !
si j’étais veuve, une supposition, il m’épouserait les yeux fermés,
tant il les a ouverts à mon endroit, qu’il me dit toute la journée : "
Oh ! les beaux bras que vous avez !… mame Cibot ! je rêvais, cette nuit,
que c’était du pain et que j’étais du beurre, et que je m’étendais
Ligne 3 873 :
fossettes, et qui, tiré de son fourreau de mérinos commun, comme une
lame est tirée de sa gaine, devait éblouir Pons, qui n’osa pas le
regarder trop longtemps.
cœurs que mon couteau ouvrait d’huîtres ! Eh bien ! c’est à Cibot, et
j’ai eu le tort de négliger ce pauvre cher homme, qui se jetterait
Ligne 3 879 :
qui m’appelez ma chère madame Cibot, quand je ferais l’impossible pour
vous…</p><p>
lui, parce qu’il est pauvre ! C’est la richesse qui rend insensible, et
vous êtes riche ! Eh bien ! n’ayez une garde, vous verrez quelle vie elle
Ligne 3 890 :
d’avoir une madame Cibot !… Allez ! quand monsieur Poulain viendra,
vous lui demanderez une garde !</p><p>
parlais pas des femmes en parlant de mon ami Schmucke !… Je sais bien
que je n’ai pas d’autres cœurs où je suis aimé sincèrement que le
vôtre et celui de Schmucke !…</p><p>
dit-elle en pleurant et essuyant ses pleurs. Eh bien ! oui, vous
m’aimez, comme on aime une domestique, voilà… une domestique à qui
l’on jette une viagère de six cents francs, comme un morceau de pain
dans la niche d’un chien !…</p><p>
Pons ; vous aimerez votre bonne grosse Cibot comme une mère ? Eh bien !
c’est cela ; je suis votre mère, vous êtes tous deux mes enfants !… Ah !
Ligne 3 913 :
vous l’aureriez rendue heureuse… ça se voit, vous étiez taillé pour
cela… Moi, d’abord, en voyant comment vous êtes avec monsieur
Schmucke, je me disais :
fait pour être un bon mari… Allez, vous aimez les femmes !</p><p>
Pons et lui prenant la main. Vous ne savez pas ce que c’est que n’avoir
une maîtresse qui fait les cent coups pour son ami ? C’est-il possible !
Ligne 3 951 :
celui de stoper la langue d’une portière épuisera le génie des
inventeurs.</p><p>
monsieur, de faire son testament quand on est malade ; et, n’à votre
place, moi, crainte d’accident, je ne voudrais pas abandonner ce pauvre
Ligne 3 960 :
donneriez votre bien ! Savez-vous qu’on dit que tout ce qui est ici en
vaut la peine ?</p><p>
qu’il vous ferait bien trente mille francs de rente viagère, pour avoir
vos tableaux après vous… En voilà une affaire ! À votre place, je la
Ligne 3 972 :
vit après vous, toutefois, car il mourra de votre mort ! Mais je suis
là, moi ! je le défendrai envers et contre tous !… moi et Cibot.</p><p>
bavardage où le sentiment paraissait être naïf comme il l’est chez les
gens du peuple ; que serais-je devenu sans vous et Schmucke ?</p><p>
vrai ! Mais deux bons cœurs valent toutes les familles… Ne me parlez
pas de la famille ! C’est comme la langue, disait cet ancien acteur,
c’est tout ce qu’il y a de meilleur et de pire… Où sont-ils donc, vos
parents ? En avez-vous, des parents ?… je ne les ai jamais vus…</p><p>
son fauteuil eût été de fer rougi subitement au feu Ah bien ! ils sont
gentils, vos parents ! Comment, voilà vingt jours, oui, ce matin, il y a
Ligne 3 988 :
votre place, je laisserais plutôt ma fortune à l’hospice des
Enfants-Trouvés que de leur donner un liard !</p><p>
possède à ma petite-cousine, la fille de mon cousin germain, le
président Camusot, vous savez, le magistrat qui est venu un matin, il y
a bientôt deux mois.</p><p>
pardon… de la sottise de sa femme… que la femme de chambre m’a fait
des questions sur vous, une vieille mijaurée à qui j’avais envie
Ligne 4 009 :
Tenez, voulez-vous que je vous dise le fin mot de tout ça ? Eh bien ! la
France est perdue !… Et sous l’Empereur, pas vrai, monsieur ? tout ça
marchait autrement. Aussi j’ai dit à Cibot :
homme, une maison où il y a des femmes de chambre à crispins en
velours, c’est des gens sans entrailles…</p><p>
Et Pons raconta ses déboires et ses chagrins à madame Cibot, qui se
répandit en invectives contre les parents, et témoigna la plus
Ligne 4 043 :
malade. L’art prodigieux de la Cibot consistait, à son insu d’ailleurs,
à exprimer les propres idées de Pons.</p><p>
Et elle laissa Pons tout seul, sachant bien que le Juif et Rémonencq arrivaient.</p><p>
de rien ! car il est comme un crin dès qu’il s’agit de son trésor.</p><p>
Ligne 4 112 :
récemment achevée.</p><p>
Élie Magus eut des larmes dans les yeux en regardant tour à tour ces quatre chefs-d’œuvre.</p><p>
tableaux, si vous me les faites avoir pour quarante mille francs !…
dit-il à l’oreille de la Cibot stupéfaite de cette fortune tombée du
Ligne 4 119 :
produit un tel désarroi dans son intelligence et dans ses habitudes de
cupidité, que le Juif s’y abîma, comme on voit.</p><p>
de l’Auvergnat, prends dix tableaux au hasard et aux mêmes conditions,
ta fortune sera faite !</p><p>
Ligne 4 126 :
la plus vive de toutes, la satisfaction du succès en fait de fortune,
lorsque la voix du malade retentit et vibra comme des coups de cloche…</p><p>
le forçant à se remettre au lit. Ah çà ! voulez-vous vous tuer !… Eh
bien ! ce n’est pas monsieur Poulain, c’est ce brave Rémonencq, qui est
Ligne 4 133 :
si aimé, que toute la maison est en l’air pour vous. De quoi donc
avez-vous peur ?</p><p>
La Cibot alla vivement ouvrir la porte, fit signe à Magus de se retirer et à Rémonencq d’avancer.</p><p>
parlé, je viens savoir de vos nouvelles, car toute la maison est dans
les transes par rapport à vous… Personne n’aime que la mort se mette
Ligne 4 142 :
bien, m’a chargé de vous dire que si vous aviez besoin d’argent, il se
mettait à votre service…</p><p>
Dans les maladies de foie, les sujets contractent presque toujours une
antipathie spéciale, momentanée ; ils concentrent leur mauvaise humeur
Ligne 4 149 :
envoyait, de moments en moments, Schmucke voir si personne ne s’était
glissé dans le sanctuaire.</p><p>
Rémonencq, pour exciter l’attention des chineurs ; je ne me connais pas
en haute curiosité, mais monsieur passe pour être un si grand
Ligne 4 159 :
sans cela… Les médecins sont des fripons qui profitent de notre état
pour…</p><p>
La Cibot ferma la porte de la chambre à coucher, ce qui réveilla la
défiance de Pons. Elle trouva Magus immobile devant les quatre
Ligne 4 173 :
petit camaïeu de Raphaël et son portrait de vieillard, les plus
immenses chefs-d’œuvre de l’art.</p><p>
Le Juif s’en alla lentement et à reculons, regardant les tableaux comme un amant regarde une maîtresse à laquelle il dit adieu.</p>
Ligne 4 181 :
<p>
Quand le Juif fut sur le palier, la Cibot, à qui cette contemplation avait donné des idées, frappa sur le bras sec de Magus.</p><p>
amour-là. Mais si tu ne me promets pas aujourd’hui seize mille francs
devant Rémonencq, demain, ce sera vingt mille.</p><p>
en prenant le bras potelé de la Cibot et tapant dessus avec une force
de marteau. Je ne lui demande pas d’autre mise de fonds que sa beauté !
Ligne 4 202 :
Laissez-moi là votre loge quand vous aurez fait votre pelote ici, et
vous verrez ce que nous deviendrons à nous deux !</p><p>
valeur d’une épingle ! entendez-vous, Rémonencq ? s’écria la portière. Je
suis connue dans le quartier pour une honnête femme, n’à !</p><p>
Les yeux de la Cibot flamboyaient.</p><p>
vous-mêmes de ma situation ici !… Voilà dix ans que je m’extermine le
tempérament pour ces deux vieux garçons-là, sans que jamais ils ne
Ligne 4 225 :
donc vous fier à des héritiers ?… pus souvent ! Tenez, voyez-vous,
paroles ne puent pas, tout le monde est de la canaille !</p><p>
autres, ajouta-t-il en regardant Rémonencq, qui sommes les plus
honnêtes gens…</p><p>
personnes pressantes, comme dit cet ancien acteur, sont toujours
acceptées !… Je vous jure que ces deux messieurs me doivent déjà près
Ligne 4 236 :
n’ose pas leux en parler. Pour lors, vous qu’êtes dans les affaires,
mon cher monsieur, me conseillez-vous de m’adresser à un avocat ?…</p><p>
Le bruit de la chute d’un corps lourd, tombé sur le carreau de la salle à manger, retentit dans le vaste espace de l’escalier.</p><p>
Elle poussa ses deux complices qui dégringolèrent avec agilité, puis
elle se retourna, se précipita dans la salle à manger et y vit Pons
Ligne 4 247 :
elle le ranima. Puis, lorsqu’elle vit les yeux de Pons ouverts, que la
vie fut revenue, elle se posa les poings sur les hanches.</p><p>
vous défiez-vous de moi ?… Si c’est ainsi, adieu, monsieur. Après dix
ans que je vous sers, que je mets du mien dans votre ménage, que mes
Ligne 4 256 :
bras, que je risque d’être blessée pour le reste de mes jours. Ah ! mon
Dieu ! et la porte que j’ai laissée ouverte…</p><p>
ai-je des comptes à vous rendre ? Savez-vous que si vous m’ennuyez
ainsi, je plante tout là ! Vous prendrez n’une garde !</p><p>
Pons, épouvanté de cette menace, donna sans le savoir à la Cibot la
mesure de ce qu’elle pouvait tenter avec cette épée de Damoclès.</p><p>
Elle laissa Pons confus, en proie à des remords, admirant le dévouement
criard de sa garde-malade, se faisant des reproches, et ne sentant pas
Ligne 4 274 :
<p>
La Cibot aperçut Schmucke qui montait l’escalier.</p><p>
devient fou !… Figurez-vous qu’il s’est levé tout nu, qu’il m’a
suivie, non, il s’est étendu là, tout de son long… Demandez-lui
Ligne 4 283 :
mes bras, que ses yeux en brillaient comme des escarboucles…</p><p>
Schmucke écoutait madame Cibot, comme s’il l’entendait parlant hébreu.</p><p>
de mes jours !… ajouta la Cibot en paraissant éprouver de vives
douleurs et pensant à mettre à profit l’idée qu’elle avait eue, par
Ligne 4 303 :
devenir sans elle ?… Schmucke, en voyant le changement produit chez
Pons par son escapade, n’osa pas le gronder.</p><p>
ami !… s’écria-t-il en apprenant de Pons la cause de l’accident. Se
tevier de montam Zibod, qui nous brede ses igonomies ! C’esdre bas pien ;
mais c’est la malatie…</p><p>
Le docteur Poulain fit disparaître en quelques jours l’infirmité dont
se disait menacée madame Cibot, et sa réputation reçut dans le quartier
Ligne 4 321 :
une reconnaissance des deux mille francs qu’elle disait avoir prêtés
aux deux amis.</p><p>
sauvera, mon cher monsieur, car il m’a tirée du cercueil ! Mon pauvre
Cibot me regardait comme morte !… Eh bien ! monsieur Poulain a dû vous
Ligne 4 327 :
Dieu, que je disais, prenez-moi, et laissez vivre mon cher monsieur
Pons…"</p><p>
nous attend tous. Eh bien ! n’au bout du fossé la culbute, comme disait
cet ancien acteur ! Faut de la philosophie. Comment avez-vous fait sans
moi ?…</p><p>
notre clientèle en ont souffert… Je ne sais pas comment il a fait.</p><p>
enfants, s’écria la Cibot. Nos économies sont bien placées chez vous,
allez ! vous êtes plus solides que la Banque. Tant que nous aurons un
morceau de pain, vous en aurez la moitié… ça ne vaut pas la peine
d’en parler…</p><p>
Pons gardait le silence.</p><p>
inquiet, que, dans mon agonie, car j’ai vu la camarde de bien près !…
ce qui me tourmentait le plus, c’était de vous laisser seuls, livrés à
Ligne 4 352 :
laisseront jamais sans pain…</p><p>
Pons ne répondit rien à cette attaque ad testamentum, et la portière garda le silence en attendant un mot.</p><p>
m’en rapporte à vous, à votre cœur… Ne parlons jamais de cela, car
vous m’humiliez, mon cher chérubin ; pensez à vous guérir ! vous vivrez
Ligne 4 571 :
dits les quatre mendiants, où se voyaient beaucoup de râpes de raisin,
et une assiette de mauvaises pommes de bateau.</p><p>
Poulain par le bras, c’est madame Cibot de qui je vous ai parlé.</p><p>
acceptant la chaise que lui présenta le docteur. Ah ! c’est madame votre
mère, elle est bien heureuse d’avoir un fils qui a tant de talent ; car
c’est mon sauveur, madame, il m’a tiré de l’abîme…</p><p>
La veuve Poulain trouva madame Cibot charmante, en l’entendant faire ainsi l’éloge de son fils.</p><p>
le pauvre monsieur Pons va bien mal, et que j’ai à vous parler, rapport
à lui…</p><p>
Une fois au salon, la Cibot expliqua longuement sa position avec les
deux Casse-noisettes, elle répéta l’histoire de son prêt en
Ligne 4 589 :
ange et dit tant et tant de mensonges arrosés de larmes, qu’elle finit
par attendrir la vieille madame Poulain.</p><p>
faudrait bien savoir à quoi s’en tenir sur ce que monsieur Pons compte
faire pour moi, dans le cas où il viendrait à mourir ; c’est ce que je
Ligne 4 605 :
idées en français, et qui d’ailleurs est capable de s’en aller en
Allemagne, tant il sera désespéré de la mort de son ami ?…</p><p>
d’affaires ne concernent point les médecins, et l’exercice de ma
profession me serait interdit si l’on savait que je me suis mêlé des
dispositions testamentaires d’un de mes clients. La loi ne permet pas à
un médecin d’accepter un legs de son malade…</p><p>
de parler à monsieur Pons de sa mort. D’abord, il n’est pas assez en
danger pour cela ; puis, cette conversation de ma part lui causerait un
saisissement qui pourrait lui faire un mal réel, et rendre alors sa
maladie mortelle…</p><p>
dire de mettre ses affaires en ordre, et il ne s’en porte pas plus
mal… Il est fait à cela !… ne craignez rien.</p><p>
sont pas du domaine de la médecine, elles regardent les notaires…</p><p>
lui-même où il en est, et s’il ferait bien de prendre ses précautions,
là, refuseriez-vous de lui dire que c’est une excellente chose pour
recouvrer la santé que d’avoir tout bâclé… Puis vous glisseriez un
petit mot de moi…</p><p>
remercier de vos soins, ajouta-t-elle en glissant dans la main du
docteur une papillote qui contenait trois pièces d’or. C’est tout ce
Ligne 4 638 :
le médecin devait être son complice, puisqu’il acceptait des honoraires
pour une fausse maladie.</p><p>
d’affaire pour mon accident, vous refuseriez de me sauver de la misère
en disant quelques paroles ?</p><p>
Ligne 4 645 :
griffe rouge. Effrayé de perdre son honnêteté pour si peu de chose, il
répondit à cette idée diabolique par une idée non moins diabolique.</p><p>
l’emmenant dans son cabinet, je vais vous payer la dette de
reconnaissance que j’ai contractée envers vous, à qui je dois ma place
de la mairie…</p><p>
Valérius Publicola. Ne parlons plus de cela. J’ai pour ami de collège
un garçon fort intelligent, et nous sommes d’autant plus liés, que nous
Ligne 4 664 :
province comprennent si peu les intelligences parisiennes, que l’on a
fait mille chicanes à mon ami.</p><p>
qu’il a été forcé de revendre son étude pour des faits où l’on a su lui
donner l’apparence d’un tort ; le procureur du Roi s’en est mêlé ; ce
Ligne 4 691 :
je serai votre intermédiaire…</p><p>
Madame Cibot regarda le docteur malignement.</p><p>
rue Vieille-du-Temple, madame Florimond, de la mauvaise passe où elle
était, rapport à cet héritage de son bon ami ?…</p><p>
deux mille francs de rente, elle lui a refusé sa main, qu’il lui
demandait, et qu’elle a cru, dit-on, être quitte en lui donnant douze
chemises de toile de Hollande, vingt-quatre mouchoirs, enfin tout un
trousseau !</p><p>
francs, et Fraisier, qui débutait alors dans le quartier, en avait bien
besoin. Elle a d’ailleurs payé le mémoire de frais sans observation…
Cette affaire-là en a valu d’autres à Fraisier, qui maintenant est très
occupé ; mais, dans mon genre, nos clientèles se valent…</p><p>
Ici commence le drame, ou, si vous voulez, la comédie terrible de la
mort d’un célibataire livré par la force des choses à la rapacité des
Ligne 4 724 :
qualifiant d’homme de loi, vous l’aurez offensé tout autant que vous
offenseriez un négociant en gros de denrées coloniales à qui vous
adresseriez ainsi votre lettre :
grand nombre de gens du monde qui devraient savoir, puisque c’est là
toute leur science, ces délicatesses du savoir vivre, ignorent encore
Ligne 4 782 :
le déjeuner du cordonnier et des deux enfants, madame Cibot amena la
conversation sur les locataires et parla de l’homme de loi.</p><p>
monsieur le docteur Poulain, a dû me recommander à lui. Vous connaissez
monsieur Poulain ?</p><p>
bien difficilement l’argent de ses ports de lettres à la fin du mois.</p><p>
Cette réponse suffit à l’intelligente Cibot.</p><p>
sur l’or ni sur l’argent, pas même sur les sous, mais nous n’avons pas
un liard à qui que ce soit.</p><p>
La Cibot se reconnut dans ce langage.</p><p>
puisqu’elle lui devait sa fortune ? C’est quelque chose pour une petite
mercière, et qui était entretenue par un vieux, que de devenir la femme
d’un avocat…</p><p>
vous montez chez lui, n’est-ce pas, madame ?… eh bien ! quand vous
serez dans son cabinet, vous saurez pourquoi.</p>
Ligne 4 819 :
docteur Poulain ; mais en se réservant de l’employer à ses affaires
d’après ses impressions.</p><p>
service, dit en forme de commentaire la portière qui suivait madame
Cibot. Je vous accompagne, madame, ajouta-t-elle, car je monte le lait
Ligne 4 853 :
dont le lait répandu jetait dans l’escalier une odeur de plus, qui s’y
sentait peu, malgré son âcreté nauséabonde.</p><p>
Et, d’un air menaçant, elle jeta sur la Cibot, qu’elle trouva, sans
doute, trop bien vêtue, un regard d’autant plus meurtrier, que ses yeux
étaient naturellement sanguinolents.</p><p>
aimable et qui prouvait qu’elle était avertie de cette visite matinale.</p><p>
Et, après avoir fait une révérence de théâtre, la domestique à moitié
Ligne 4 880 :
brique et d’une expression sinistre, se leva de dessus un fauteuil de
canne, où il siégeait sur un rond en maroquin vert. Il prit un air
agréable et une voix flûtée pour dire, en avançant une chaise :
Cibot, je pense ?…</p><p>
Madame Cibot fut effrayée par cette voix, qui ressemblait assez à celle
de la sonnette, et par un regard encore plus vert que les yeux
Ligne 4 889 :
Cibot comprit alors pourquoi madame Florimond n’était pas devenue
madame Fraisier.</p><p>
cette voix d’emprunt qu’on appelle vulgairement petite voix, mais qui
restait aigre et clairette comme un vin de pays.</p><p>
Ligne 4 901 :
de roseau, Fraisier réunit d’un coup de pincettes deux tisons qui
s’évitaient depuis fort longtemps, comme deux frères ennemis. Puis,
saisi d’une pensée subite, il se leva :
Fraisier rit du calembour et mit le verrou, pour que sa ménagère ne vînt pas interrompre les confidences de la Cibot.</p><p>
tâchant toujours de draper sa robe de chambre. Une personne qui m’est
recommandée par le seul ami que j’aie au monde peut compter sur moi…
Ligne 4 929 :
future cliente, fut pris d’une toux dite de cercueil, et eut recours à
un bol en faïence à demi plein de jus d’herbes, qu’il vida.</p><p>
Fraisier à des regards maternels que lui jeta la portière ; mais il me
rendra, dit-il, la santé…</p><p>
Il paraissait avoir perdu la mémoire des confidences de sa cliente, qui pensait à quitter un pareil moribond.</p><p>
deux choses, reprit l’ancien avoué de Mantes en devenant grave.
Premièrement, si la succession vaut la peine qu’on se donne, et,
Ligne 4 940 :
La Cibot parla de Rémonencq et d’Élie Magus, et dit que les deux fins
compères évaluaient la collection de tableaux à six cent mille francs…</p><p>
car, voyez-vous, madame, les gens d’affaires ne croient pas aux
tableaux. Un tableau, c’est quarante sous de toile ou cent mille francs
Ligne 4 955 :
lire sur ce front, sur cette atroce physionomie, et trouva ce qu’en
affaires on nomme une tête de bois.</p><p>
propre cousin du président Camusot de Marville, il me rabâche sa
parenté deux fois par jour. La première femme de monsieur Camusot, le
marchand de soieries…</p><p>
Monsieur Camusot de Marville avait été, pendant cinq ans, président du
tribunal de Mantes, avant de venir à Paris. Non seulement il y avait
Ligne 4 969 :
lié pendant son séjour, présidait encore le tribunal et conséquemment
connaissait Fraisier à fond.</p><p>
écluses de sa bouche torrentielle, savez-vous que vous auriez pour
ennemi capital un homme qui peut envoyer les gens à l’échafaud ?</p><p>
La portière exécuta sur sa chaise un bond qui la fit ressembler à la poupée de ce joujou nommé une surprise.</p><p>
qu’est le président de la chambre des mises en accusation de la Cour
royale de Paris, rien de plus naturel, mais vous deviez savoir que
Ligne 4 987 :
d’assises.</p><p>
La Cibot tressaillit encore à ce mot.</p><p>
dame, vous ne savez pas ce qu’est une robe rouge ! C’est déjà bien assez
d’avoir une simple robe noire contre soi ! Si vous me voyez ici ruiné,
Ligne 5 006 :
l’un des plus grands seigneurs de la cour de Charles X. Enfin, elle a
renversé le procureur général, monsieur de Granville…</p><p>
justice, et je ne sais pas si elle n’arrivera point à ses fins… Si
elle se mettait dans l’idée de nous envoyer tous deux en cour d’assises
et au bagne, moi qui suis innocent comme l’enfant qui naît, je
prendrais un
bien la justice. Or, ma chère madame Cibot, pour pouvoir marier sa
fille unique au jeune vicomte Popinot, qui sera, dit-on, héritier de
Ligne 5 021 :
j’aimerais mieux affronter des canons chargés à mitraille que de me
savoir une pareille femme contre moi…</p><p>
de qui l’on se plaint, c’est quelque chose ; mais hériter de lui, c’est
là un plaisir !</p><p>
gens-là, je me rappelle les noms, monsieur Cardot, monsieur Berthier,
etc., l’ont écrasé comme un œuf qui se trouverait sous un tombereau.</p><p>
raison en disant que je rencontrerais des obstacles ; mais elle a dit
que je réussirais…</p><p>
une trentaine de mille francs, c’est possible ; mais la succession, il
n’y faut pas songer.. Nous avons causé de vous et de votre affaire, le
docteur Poulain et moi, hier au soir…</p><p>
Là, madame Cibot fit encore un bond sur [sa] chaise.</p><p>
Là, madame Cibot jeta sur son futur conseil un singulier regard où toute sa défiance éclata et que Fraisier surprit.</p>
Ligne 5 046 :
<p>
en rapport avec le vieux monsieur Pillerault, le grand-oncle de madame
la comtesse, Popinot, et c’est un de vos titres à mon dévouement.
Ligne 5 059 :
qu’une cloche n’a qu’un son… Votre malade se dit innocent, mais le
monde le regarde comme un monstre…</p><p>
Figurez-vous que voilà dix ans passés que j’y mets du mien, il le sait,
il a mes économies, et il ne veut pas me coucher sur son testament…
Ligne 5 067 :
regarde d’un air… Le plus qu’il m’a dit, c’est qu’il me
recommanderait à monsieur Schmucke.</p><p>
opinions arrêtées, pour concevoir un plan, que je connusse monsieur
Schmucke, que je visse les objets dont se compose la succession, que
j’eusse une conférence avec ce Juif de qui vous me parlez ; et, alors,
laissez-moi vous diriger…</p><p>
la Cibot et parlant avec sa voix naturelle. Ah çà ! suis-je ou ne
suis-je pas votre conseil ? entendons-nous bien.</p><p>
La Cibot se sentit devinée, elle eut froid dans le dos.</p><p>
clients. Examinez bien votre position : elle est superbe. Si vous suivez
mes conseils de point en point, vous aurez, je vous le garantis, trente
Ligne 5 091 :
Cibot, qui pensa sur-le-champ que Fraisier se chargerait de la
dénonciation.</p><p>
votre renvoi de la loge, et l’on vous donnera deux heures pour
déménager…</p><p>
Bellone, je resterais chez ces messieurs comme leur femme de confiance.</p><p>
réveilleriez un beau matin dans un cachot, vous et votre mari, sous une
accusation capitale…</p><p>
Elle parla pendant cinq minutes, et Fraisier examina cette grande
artiste exécutant son concerto de louanges sur elle-même. Il était
Ligne 5 105 :
en dedans, sa perruque sèche se remuait. C’était Robespierre au temps
où ce Sylla français faisait des quatrains.</p><p>
La Cibot tomba pâle comme une morte, car cette phrase lui tomba sur le
cou comme le couteau de la loi. Elle regarda Fraisier d’un air égaré.</p><p>
mouvement de satisfaction que lui causa l’effroi de sa cliente.</p><p>
Et elle voulut se lever.</p><p>
lumières, dit impérieusement Fraisier. Vous êtes renvoyée par monsieur
Pillerault, ça ne fait pas de doute, n’est-ce pas ? Vous devenez la
Ligne 5 120 :
vous emparer de cette succession, en tirer pied ou aile…</p><p>
La Cibot fit un geste.</p><p>
répondant au geste de sa cliente. C’est une bataille que cette
entreprise, et vous irez plus loin que vous ne pensez ! On se grise de
son idée, on tape dur…</p><p>
Autre geste de dénégation de la part de madame Cibot, qui se rengorgea.</p><p>
coûté… Ah ! vous êtes ici à confesse, ma belle dame… Ne trompez pas
votre confesseur, surtout quand ce confesseur a le pouvoir de lire dans
Ligne 5 133 :
La Cibot fut effrayée de la perspicacité de cet homme et comprit la
raison de la profonde attention avec laquelle il l’avait écoutée.</p><p>
ne se laissera pas dépasser par vous dans cette course à la
succession… On vous observera, l’on vous espionnera… Vous obtenez
Ligne 5 148 :
fidèle à sa religion, devait regarder l’inquisiteur au moment où elle
s’entendait condamner au feu.</p><p>
faire, vous confiant le soin de mes intérêts, j’aurais quelque chose,
sans rien craindre ?</p><p>
de sa voix la plus pateline, c’est lui qui m’a dit de venir vous
trouver, et le digne homme ne m’envoyait pas ici pour m’entendre dire
Ligne 5 170 :
son ami Fraisier, et leurs esprits alertes avaient sondé toutes les
hypothèses, examiné les ressources et les dangers. Fraisier, dans un
élan d’enthousiasme, s’était écrié :
là-dedans ! Et il avait promis à Poulain une place de médecin en chef
d’hôpital, à Paris, et il s’était promis à lui-même de devenir juge de
Ligne 5 207 :
d’abattre à ses pieds l’audacieuse portière en déployant toutes les
forces de sa nature vénéneuse.</p><p>
Cette main, froide comme la peau d’un serpent, produisit une impression
terrible sur la portière, il en résulta comme une réaction physique qui
Ligne 5 213 :
Fontaine moins dangereux à toucher que ce bocal de poisons couvert
d’une perruque rougeâtre et qui parlait comme les portes crient.</p><p>
noté ce nouveau mouvement de répulsion de la Cibot. Les affaires qui
font la terrible réputation de madame la présidente sont tellement
Ligne 5 235 :
danger… Je suis déjà ruiné par la Justice, moi, pauvre petit avoué
obscur. Mon expérience me coûte cher, elle est toute à votre service.</p><p>
un ingrat. Je ne veux que mon dû ! J’ai trente ans de probité, monsieur.
Mon monsieur Pons dit qu’il me recommandera sur son testament à son ami
Ligne 5 241 :
Allemand…</p><p>
Fraisier dépassait le but, il avait découragé la Cibot, et il fut obligé d’effacer les tristes impressions qu’elle avait reçues.</p><p>
Cibot. Eh ! mais, c’est précisément pour ce résultat que les gens
d’affaires sont inventés. On ne peut rien avoir dans ces cas-là sans se
Ligne 5 250 :
posséderez en paix vis-à-vis des hommes, car la conscience, c’est votre
affaire.</p><p>
me suis occupé que des obstacles. D’abord, il faut, voyez-vous, pousser
au testament, et vous ne ferez pas fausse route ; mais avant tout,
sachons en faveur de qui Pons disposera de sa fortune, car si vous
étiez son héritière…</p><p>
biblots, et si j’avais su ce qu’il m’a dit de ses amours, je serais
sans inquiétude aujourd’hui…</p><p>
singulières fantaisies, ma chère madame Cibot, ils trompent bien des
espérances. Qu’il teste, et nous verrons après. Mais, avant tout, il
Ligne 5 267 :
suis l’ami de mon client, à pendre et à dépendre, quand il est le mien.
Ami ou ennemi, tel est mon caractère.</p><p>
chevet du malade ; le docteur est un des cœurs les plus honnêtes, les
plus purs que je connaisse, et il nous faut là, voyez-vous, un homme
sûr… Poulain vaut mieux que moi, je suis devenu méchant.</p><p>
Fraisier reconduisit la cliente jusqu’à la porte, et là, comme elle la veille avec le docteur, il lui dit son dernier mot.</p><p>
dans son cabinet, je connais beaucoup monsieur Trognon, notaire, c’est
le notaire du quartier. Si monsieur Pons n’a pas de notaire, parlez-lui
de celui-là… faites-lui prendre.</p><p>
En se retirant, la portière entendit le frôlement d’une robe et le
bruit d’un pas pesant qui voulait se rendre léger. Une fois seule et
Ligne 5 291 :
naturelle et qui l’allait mettre en lutte sourde avec son terrible
conseiller.</p><p>
ma pelote, et après je prendrai tout ce qu’ils m’offriront pour servir
leurs intérêts…</p><p>
Ligne 5 300 :
<p>
la gondission de ne rien vendre… Et il pleurait ! Paufre homme ! Ça m’a
vait pien ti mâle !</p><p>
attendre votre déjeuner, vu qu’il s’en va de neuf heures, mais ne me
grondez pas… Voyez-vous, j’ai eu bien des affaires… rapport à vous.
V’là que nous n’avons plus rien, et je me suis procuré de l’argent !…</p><p>
un archevêque d’innocence, un homme à empailler, comme disait cet
ancien acteur. Comment ! vous êtes à Paris depuis vingt-neuf ans, vous
Ligne 5 326 :
il est. Sauvons-le avant tout, et nous verrons après. Eh bien ! dans le
temps comme dans le temps. À la guerre comme à la guerre, pas vrai !…</p><p>
de la Cibot et la mettant sur son cœur, avec une expression
d’attendrissement.</p><p>
Cet ange leva les yeux au ciel, les montra pleins de larmes.</p><p>
chose de fort ! Je suis n’une vieille fille du peuple, j’ai le cœur sur
la main. J’ai de ça, voyez-vous, dit-elle en se frappant le sein,
autant que vous deux, qui êtes des âmes d’or…</p><p>
t’y bleurer tes larmes de sang, et te monder tans le ciel, ça me prise !
che ne sirfifrai pas à Bons…</p><p>
continuez ainsi, voyez-vous, j’aurai deux malades sur les bras… Selon
ma petite entendement, il faut nous partager la besogne ici. Vous ne
Ligne 5 360 :
vous êtes, pour avoir veillé monsieur cette nuit…</p><p>
Elle amena Schmucke devant la glace, et Schmucke se trouva fort changé.</p><p>
déjeuner. Puis vous garderez encore notre amour jusqu’à deux heures.
Mais vous allez me donner la liste de vos pratiques, et j’aurai bientôt
Ligne 5 366 :
arrivée, et vous vous reposerez jusqu’à ce soir.</p><p>
Cette proposition était si sage, que Schmucke y adhéra sur-le-champ.</p><p>
nous lui disions comme ça qu’il va suspendre ses fonctions au théâtre
et ses leçons. Le pauvre monsieur s’imaginerait qu’il ne retrouvera
plus ses écolières… des bêtises… Monsieur Poulain dit que nous ne
sauverons notre Benjamin qu’en le laissant dans le plus grand calme.</p><p>
Une heure après, la Cibot s’endimancha, partit en milord au grand
étonnement de Rémonencq, et se promit de représenter dignement la femme
Ligne 5 390 :
entre eux, comme tous les gens de même profession. Chaque état a ses
Shiholeth, comme il a son injure et ses stigmates.</p><p>
Moi, je ne suis qu’une pauvre concierge d’une maison de la rue de
Normandie où loge monsieur Pons, votre chef d’orchestre. Oh ! comme je
Ligne 5 396 :
danseuses, les auteurs ! C’est, comme disait cet ancien acteur, le bâton
de maréchal de notre métier.</p><p>
lit, et il quittera la maison les pieds en avant, c’est sûr.</p><p>
Ce fut ainsi que le garçon de théâtre, attaché au service du cabinet,
annonça madame Cibot, que la concierge du théâtre lui recommanda.
Ligne 5 417 :
avait-il pris un développement financier qui réagissait sur sa
personne. Devenu fort et gros, coloré par la bonne chère et la
prospérité, Gaudissard s’était métamorphosé franchement en Mondor.
Nous tournons au Beaujon ! disait-il en essayant de rire le premier de
lui-même. - Tu n’en es encore qu’à Turcaret, lui répondit Bixiou qui le
Ligne 5 442 :
d’intérêt, à monsieur Matifat, au général Gouraud, gendre de Matifat, à
Crevel, s’ils étaient contents de Gaudissard, Gouraud, devenu pair de
France, répondit :
spirituel, si bon enfant, que nous sommes contents…
comme dans le conte de La Fontaine, dit l’ancien ministre en souriant.
Gaudissard faisait valoir ses capitaux dans des affaires en dehors du
Ligne 5 467 :
Paris, mademoiselle Minard. Il espérait être nommé député sur sa ligne
et arriver, par la protection de Popinot, au Conseil d’État.</p><p>
dit Gaudissard. Pauvre Pons !… ma parole d’honneur, on devrait avoir
de la graine pour entretenir cette espèce-là… c’est un homme modèle,
Ligne 5 481 :
heures… et nous aurons beau nous apitoyer, ça ne ferait pas de bonne
musique… Voyons, où en est-il ?</p><p>
le mettant sur les yeux, c’est bien terrible à dire ; mais je crois que
nous aurons le malheur de le perdre, quoique nous le soignions comme la
Ligne 5 489 :
comme s’il y avait de l’espoir, et d’essayer d’arracher ce digne et
cher homme à la mort… Le médecin n’a plus d’espoir.</p><p>
Gaudissard éclata de rire.</p><p>
Aux éclats de rire de Gaudissard, une femme s’écria :
Et le premier sujet de la danse fit irruption dans le cabinet en se
jetant sur le seul canapé qui s’y trouvât. C’était Héloïse Brisetout,
enveloppée d’une magnifique écharpe dite algérienne.</p><p>
vient-elle ?… dit la danseuse en jetant un de ces regards d’artiste à
artiste qui devrait faire le sujet d’un tableau.</p><p>
Ligne 5 508 :
que n’en ont ordinairement les premiers sujets de la danse ; en faisant
sa question, elle respira dans une cassolette des parfums pénétrants.</p><p>
ne renifle pas la peste en flacon, et si je ne me mets pas de brique
pilée sur les joues…</p><p>
pléonasme, mon enfant ! dit Héloïse en jetant une œillade à son
directeur.</p><p>
faire votre tête, dit la Cibot, vous n’aurez jamais tant de
déclarations que j’en ai reçu, médème ! Et vous ne vaudrez jamais la
Ligne 5 523 :
revers de sa main droite à son front, comme un soldat qui salue son
général.</p><p>
La danseuse se posa dramatiquement et déclama ce vers :</p><p>
Soyons amis, Cinna !…</p><p>
grises, trouvez-en un autre, la vieille… ou prenez une cigarette.</p><p>
continuer à vous répondre, j’ai mes deux messieurs bien malades… et
j’ai engagé pour les nourrir et leur éviter des chagrins jusqu’aux
habits de mon mari, ce matin, qu’en voilà la reconnaissance…</p><p>
Héloïse, madame est la femme de confiance de notre pauvre chef
d’orchestre qui se meurt ; elle vient me dire de ne plus compter sur
lui ; je suis dans l’embarras.</p><p>
cents francs aux hospices qui ne reconnaissent pas d’autres malheureux
à Paris que les leurs. Non, tenez, ma bonne femme, puisque vous courez
pour le prix Montyon… Gaudissard sonna, le garçon de théâtre se
présenta soudain.
francs. Asseyez-vous, madame.</p><p>
bête… Allons, ma mère, nous irons le voir, consolez-vous.
toi, Chinois, dit-elle au directeur en l’attirant dans un coin, tu veux
me faire jouer le premier rôle du ballet d’Ariane. Tu te maries, et tu
sais comme je puis te rendre malheureux !…</p><p>
qu’il n’était plus dans son bon sens, il a le délire. C’est
malheureusement bientôt fini.</p><p>
En ce moment, le caissier entra, tenant à la main deux billets de cinq cents francs.</p><p>
bien ce cher homme, et dites-lui que j’irai le voir, demain ou après…
dès que je le pourrai.</p><p>
Avant de sortir, la Cibot fit une belle révérence à la danseuse et put
entendre cette question que fit Gaudissard à son ancienne maîtresse :</p><p>
des Mohicans en douze jours ? S’il me tire d’affaire, il aura la
succession de Pons !</p>
Ligne 5 625 :
au moment où il arrangeait les bagatelles de son étalage, et voulut
savoir jusqu’où pourrait aller son amour.</p><p>
compromettez, ajouta-t-elle, les voisins finiront par apercevoir vos
yeux en manches de veste.</p><p>
Elle quitta la porte et s’enfonça dans les profondeurs de la boutique de l’Auvergnat.</p><p>
vont se remuer, et ils sont capables de nous faire bien de la peine.
Dieu sait ce qui nous arriverait s’ils envoyaient des gens d’affaires
Ligne 5 642 :
soixante-sept, personne n’en saura le compte ! D’ailleurs, si monsieur
Pons en a vendu de son vivant, on n’a rien à dire.</p><p>
moi qui vous écrirai cela !… Ce sera monsieur Schmucke ! mais vous
direz à votre Juif, reprit la portière, qu’il soit aussi discret que
vous.</p><p>
sais lire, mais je ne sais pas écrire, voilà pourquoi j’ai besoin d’une
femme instruite et capable comme vous !… Moi qui n’ai jamais pensé
qu’à gagner du pain pour mes vieux jours, je voudrais des petits
Rémonencq… Laissez-moi là votre Cibot.</p><p>
jours de très grand matin savoir quand il pourrait acheter ses
tableaux. Où en sommes-nous ?</p><p>
c’est un drôle qui me paraît être un petit coureur d’affaires, et que
je me défie de ces gens-là, je n’ai rien répondu. Au bout de trois
jours, il est venu me voir, et il a laissé une carte, j’ai dit à mon
concierge que je serais toujours absent quand il viendrait…</p><p>
Magus était peu connue. Eh bien ! mes fistons, d’ici à quelques jours,
j’amènerai monsieur Schmucke à vous vendre sept ou huit tableaux, dix
Ligne 5 670 :
acquéreur. Enfin, quoi qu’il en soit, je n’y serai pour rien. Vous
donnez quarante-six mille francs des quatre tableaux ?</p><p>
m’en remettrez quarante-trois mille, et que vous ne les achèterez que
trois mille à monsieur Schmucke ; Rémonencq en achètera quatre pour deux
Ligne 5 682 :
une certitude de la valeur de la succession. Seulement il ne faut pas
qu’il vienne avant notre vente, entendez-vous ?…</p><p>
mes enfants, entre vous ; pour lors, après-demain, l’affaire se fera. Je
vais chez ce Fraisier lui parler, car il sait tout ce qui se passe ici
Ligne 5 691 :
trouva Fraisier qui venait chez elle, tant il était impatient d’avoir,
selon son expression, les éléments de l’affaire.</p><p>
Fraisier se plaignit de n’avoir pas été reçu par Élie Magus ; mais la
portière éteignit l’éclair de défiance qui pointait dans les yeux de
Ligne 5 697 :
plus tard le surlendemain elle lui procurerait une entrevue avec lui
dans l’appartement de Pons, pour fixer la valeur de la collection.</p><p>
probable que je serai chargé des intérêts des héritiers de monsieur
Pons. Dans cette position, je serai bien plus à même de vous servir.</p><p>
Ligne 5 756 :
suprêmes de la magistrature, qui ne seraient plus accordés qu’à une
forte position parlementaire, et son mari saurait la prendre et se
faire craindre des ministres.
qui leur tordent la cravate au cou jusqu’à ce qu’ils tirent la langue,
dit-elle. Ils sont ingrats !… Que ne doivent-ils pas à Camusot !
Ligne 5 769 :
de la Chambre, car il lui fallait la possession annale.</p><p>
Fraisier parvint sans peine jusqu’à Madeleine Vivet. Ces deux natures de vipère se reconnurent pour être sorties du même œuf.</p><p>
moment d’audience de madame la présidente pour une affaire qui lui est
personnelle et qui concerne sa fortune ; il s’agit, dites-le-lui bien,
Ligne 5 786 :
qu’il fût, n’avait pu produire encore sur cette peau réfractaire et
bouchée par d’affreuses maladies, il se sentit une légère sueur dans le
dos et au front.
sauvé, car Poulain m’a promis la santé le jour où la transpiration se
rétablirait.
négligé. Et Fraisier s’arrêta pour saluer, avec cette condescendance
qui, chez les officiers ministériels, est la reconnaissance de la
qualité supérieure de ceux à qui ils s’adressent.</p><p>
pour une affaire d’intérêt qui concerne monsieur le président, c’est
que j’ai la certitude que monsieur de Marville, dans la haute position
Ligne 5 800 :
s’entendent, selon moi, beaucoup mieux aux affaires privées que les
meilleurs magistrats, ne dédaignent point…</p><p>
Amélie, éblouie par la somme et voulant cacher son étonnement, son
bonheur, imitait les lecteurs impatients qui courent au dénouement du
roman.</p><p>
perdue, mais que je puis, que je saurai vous faire avoir…</p><p>
Monsieur Lebœuf, le président du tribunal, l’ami de monsieur de
Marville, pourra lui donner des renseignements sur moi…</p><p>
Ligne 5 813 :
Fraisier fut forcé d’ouvrir et de fermer rapidement une parenthèse dans
son discours.</p><p>
pourquoi je lui parle d’abord de moi. C’est le chemin le plus court
pour arriver à la succession.</p><p>
La présidente répondit sans parler, à cette fine observation, par un geste.</p><p>
histoire, j’étais avoué à Mantes, ma charge devait être toute ma
fortune, car j’ai traité de l’étude de monsieur Levroux, que vous avez
sans doute connu…</p><p>
La présidente inclina la tête.</p><p>
moi, je sortais de chez Desroches, l’un des plus capables avoués de
Paris, et j’y étais premier clerc depuis six ans. J’ai eu le malheur de
déplaire au procureur du roi de Mantes, monsieur…</p><p>
actif, je voulais rembourser mes amis et me marier ; il me fallait des
affaires, je les cherchais ; j’en brassai bientôt à moi seul plus que
Ligne 5 883 :
La présidente qui depuis un moment s’était croisé les bras, comme une
personne forcée de subir un sermon, les décroisa, regarda Fraisier et
lui dit :
vous regarde, mais pour moi vous êtes d’une obscurité…</p><p>
le président est le seul et unique héritier au troisième degré de
monsieur Pons. Monsieur Pons est très malade, il va tester, s’il ne l’a
Ligne 5 892 :
Dans trois jours, j’espère avoir des renseignements de la dernière
exactitude sur le chiffre…</p><p>
possibilité de ce chiffre, j’ai fait une grande faute en me brouillant
avec lui, en l’accablant…</p><p>
vivrait plus longtemps que vous, que monsieur le président et que
moi… La Providence a ses voies, ne les sondons pas ! ajouta-t-il pour
Ligne 5 933 :
président Camusot. Fraisier ignorait et devait ignorer cette
circonstance.</p><p>
renseignements à monsieur de Marville, à monsieur le comte Popinot ?</p><p>
car, entre nous, ce petit magistrat seco faisait peur au bon monsieur
Lebœuf. D’ailleurs, madame la présidente, si vous me le permettez,
Ligne 5 945 :
les ressorts de cette affaire ; mais le prix que j’attends de mon entier
dévouement n’est-il pas pour elle un gage de réussite ?</p><p>
succession a l’importance, ce dont je doute, que vous accusez, je vous
promets les deux places, en cas de succès, bien entendu…</p><p>
ici votre notaire, votre avoué, lorsque j’aurai besoin d’eux, de me
donner une procuration pour agir au nom de monsieur le président, et de
dire à ces messieurs de suivre mes instructions, de ne rien
entreprendre de leur chef.</p><p>
devez avoir l’omnipotence. Mais monsieur Pons est-il bien malade ?
demanda-t-elle en souriant.</p><p>
consciencieux que le docteur Poulain, car, mon ami, madame, n’est qu’un
innocent espion dirigé par moi dans vos intérêts, il est capable de
Ligne 5 973 :
opération qu’il ne supportera pas… Le docteur, une belle âme !… est
dans une affreuse situation. Il devrait faire renvoyer cette femme…</p><p>
Cette similitude entre la terrible présidente et lui, fit sourire
intérieurement Fraisier, qui savait à quoi s’en tenir sur ces douces
Ligne 5 986 :
de sa femme. En ce moment, madame de Marville remerciait Dieu d’avoir
placé près de Pons une femme qui l’en débarrasserait honnêtement.</p><p>
indélicatesse… Votre ami doit éclairer monsieur Pons, et faire
renvoyer cette portière.</p><p>
est un ange, et renverraient mon ami. Puis cette atroce écaillère est
la bienfaitrice du docteur, elle l’a introduit chez monsieur
Ligne 5 995 :
malade, mais ses recommandations indiquent à cette créature les moyens
d’empirer la maladie.</p><p>
Fraisier fit trembler madame de Marville, par la justesse de sa
réponse, et par la lucidité avec laquelle il pénétra dans ce cœur
aussi avide que celui de la Cibot.</p><p>
La présidente baissa les yeux.</p><p>
besoin de le voir pour nous concerter, afin de réparer l’injustice dont
vous avez été la victime.</p><p>
Ligne 6 031 :
instrument qui nous appartient autrement qu’on ne regarde celui du
voisin.</p><p>
Fraisier fit un geste éloquent.</p><p>
à cette question :
compromis par suite de vos démarches ?…</p><p>
reprocher d’avoir jeté de la boue sur vous, n’y en eût-il que gros
comme la tête d’une épingle, car alors la tache paraît grande comme la
Ligne 6 045 :
démarches, quand il s’agira de vous, vous seront préalablement
soumises…</p><p>
donc riche ! Camusot sera député, car en lâchant ce Fraisier dans
l’arrondissement de Bolbec, il nous obtiendra la majorité. Quel
instrument !</p><p>
quelle commère que madame Camusot ! Il me faudrait une femme dans ces
conditions-là ! Maintenant à l’œuvre.</p><p>
Ligne 6 089 :
une bonne omelette ou du chocolat à la vanille, il ne fallait rien
moins que cette parole absolue du docteur Poulain :</p><p>
L’entêtement des classes populaires est si grand à cet égard, que la
répugnance des malades pour aller à l’hôpital vient de ce que le peuple
Ligne 6 100 :
immédiats, raconta sa visite au directeur du théâtre, sans oublier sa
prise de bec avec mademoiselle Héloïse, la danseuse.</p><p>
malade qui ne pouvait arrêter la Cibot une fois qu’elle était lancée en
paroles.</p><p>
vu ce que j’étais, a mis les pouces, et nous avons été les meilleures
amies du monde.
dit-elle en répétant la question de Pons.</p><p>
Certains bavards, et ceux-là sont des bavards de génie, ramassent ainsi
Ligne 6 111 :
provision, pour alimenter leurs discours ; comme si la source en pouvait
jamais tarir.</p><p>
il a besoin d’une musique pour un ballet, et vous n’êtes guère en état,
mon chéri, de gribouiller du papier et de remplir votre devoir… J’ai
donc entendu, comme ça, qu’on appellerait un monsieur Garangeot pour
arranger les Mohicans en musique…</p><p>
talent, je n’ai pas voulu de lui pour premier violon ! C’est un homme de
beaucoup d’esprit, qui fait très bien des feuilletons sur la musique ;
mais pour composer un air, je l’en défie !… Et où diable avez-vous
pris l’idée d’aller au théâtre ?</p><p>
emportons pas comme une soupe au lait… Pouvez-vous écrire de la
musique dans l’état où vous êtes ? Mais vous ne vous êtes donc pas
Ligne 6 135 :
celui-là !… Donc, fallait lui dire où vous en étiez… dame ! vous
n’êtes pas bien, et il vous a momentanément remplacé…</p><p>
En général les malades, surtout ceux qui sont dans l’envergure de la
faux de la Mort, s’accrochent à leurs places avec la fureur que
déploient les débutants pour les obtenir. Aussi son remplacement
parut-il être au pauvre moribond une première mort.</p><p>
je reprendrai bientôt ma vie ordinaire. Vous m’avez tué, ruiné,
assassiné !…</p><p>
votre bourreau, vous dites ces douceurs-là, toujours, parbleu, à
monsieur Schmucke, quand j’ai le dos tourné. J’entends bien ce que vous
dites, allez !… vous êtes un monstre d’ingratitude.</p><p>
convalescence, on me dira, quand je reviendrai, que je suis une
perruque, un vieux, que mon temps est fini, que je suis Empire, rococo !
Ligne 6 157 :
celle-là, madame Cibot, on sait trouver des poux à la tête d’un chauve !
Quel démon vous a poussée là ?…</p><p>
huit jours. Que voulez-vous ? vous ne voyez rien que vous ! vous êtes un
égoïste à tuer les gens pour vous guérir !.. Mais ce pauvre monsieur
Ligne 6 168 :
au ménage et au grain ?… Et que voulez-vous, la maladie est la
maladie !… et voilà !…</p><p>
mon bonnet ! Et croyez-vous que nous sommes de fer ? Mais si monsieur
Schmucke avait continué son métier, d’aller donner sept ou huit leçons
Ligne 6 186 :
malade, le prit par la tête, le força de se coucher, ramena sur lui la
couverture.</p><p>
votre maladie ! C’est ce que dit le bon monsieur Poulain. Voyons,
calmez-vous. Soyez gentil, mon bon petit fiston. Vous êtes l’idole de
Ligne 6 198 :
moi, qui vous aime comme mes petits boyaux, nous avons cru bien faire !
Eh bien ! mon chérubin, c’est bien allez.</p><p>
résolution, je suis peut-être plus mal que je ne le crois, dit Pons en
jetant un regard plein d’une horrible mélancolie sur les objets d’art
qui décoraient sa chambre. Il faudra dire adieu à mes chers tableaux, à
toutes ces choses dont je m’étais fait des amis. Et mon divin Schmucke !
La Cibot, cette atroce comédienne, se mit son mouchoir sur les yeux.
Cette muette réponse fit tomber le malade dans une sombre rêverie.
Ligne 6 212 :
il s’affaissa tant, qu’il n’eut plus la force de se mettre en colère.
Et il resta morne comme un poitrinaire après son agonie.</p><p>
voyant sa victime tout à fait matée, vous feriez bien d’envoyez
chercher le notaire du quartier, monsieur Trognon, un bien brave homme.</p><p>
Et elle hocha la tête en signe de mépris des richesses. Le silence se rétablit.</p>
Ligne 6 222 :
== LV. La Cibot se pose en victime ==
<p>
En ce moment, Schmucke, qui dormait depuis plus de six heures, réveillé
par la faim, se leva, vint dans la chambre de Pons, et le contempla
pendant quelques instants sans mot dire, car madame Cibot s’était mis
un doigt sur les lèvres en faisant :
Puis elle se leva, s’approcha de l’Allemand pour lui parler à
l’oreille, et lui dit :
méchant comme un âne rouge !… Que voulez-vous ! il se défend contre la
maladie…</p><p>
ton dolent qui accusait un effroyable abattement ; mais, mon cher
Schmucke, elle est allée au théâtre me faire renvoyer…</p><p>
Ligne 6 236 ⟶ 6 237 :
cet intervalle pour peindre par un signe à Schmucke l’état d’une tête
où la raison déménage, et dit :</p><p>
laisse-nus de saufer !… C’esde tes bêdises que te d’ébuiser à
drafailler quand du as ein drèssor… Rédablis-doi, nus fentrons
quelque pric-à-prac ed nus vinirons nos churs dranquillement dans ein
goin, afec cede ponne montam Zibod…</p><p>
Le malade, ne voyant plus madame Cibot, qui s’était mise en arrière du
lit pour pouvoir dérober à Pons les signes qu’elle faisait à Schmucke,
la crut partie.</p><p>
enflammé, ses poings sur les hanches. Voilà donc la récompense d’un
dévouement de chien caniche… Dieu de Dieu ! Elle fondit en larmes, se
laissa tomber sur un fauteuil, et ce mouvement tragique causa la plus
funeste révolution à Pons.
montrant aux deux amis ces regards de femme haineuse qui lancent à la
fois des coups de pistolet et du venin, je suis lasse de ne rien faire
de bien ici en m’exterminant le tempérament. Vous prendrez une garde !
Les deux amis se regardèrent effrayés.
comme des acteurs ! C’est dit ! Je vas prier le docteur Poulain de vous
chercher une garde ! Et nous allons faire nos comptes. Vous me rendrez
Ligne 6 262 ⟶ 6 263 :
redemandé… Moi qui suis allée chez monsieur Pillerault lui emprunter
encore cinq cents francs…</p><p>
dit-elle. Mais monsieur Pons ne m’a jamais aimée, il m’a toujours
z’haïe !… D’ailleurs, il peut croire que je veux être mise sur son
testament…</p><p>
regard. Pour le mal que je vous veux, portez-vous bien. Quand vous
serez aimable pour moi, quand vous croirez que ce que je fais est bien
Ligne 6 284 ⟶ 6 285 :
son dîner l’attendait dans la salle à manger. Le pauvre Allemand y vint
le visage blême et couvert de larmes.</p><p>
scélérade. C’édre sa malatie, dit-il pour attendrir la Cibot sans
accuser Pons.</p><p>
mon mari, ni mon frère, ni mon enfant. Il m’a prise en grippe, eh bien !
en voilà assez ! Vous, voyez-vous, je vous suivrais au bout du monde ;
Ligne 6 293 ⟶ 6 294 :
néglige son mari, que v’là Cibot malade, et qu’on s’entend traiter de
scélérate… c’est un peu trop fort de café comme ça…</p><p>
lors, vous me devez trois mois à cent quatre-vingt-dix francs, ça fait
cinq cent soixante-dix ; plus le loyer que j’ai payé deux fois, que
Ligne 6 306 ⟶ 6 307 :
mille francs donné par Gaudissard.</p><p>
Schmucke écoutait ce compte dans une stupéfaction très concevable, car il était financier, comme les chats sont musiciens.</p><p>
carter, resdez nodre Profidence… che fus le temante à chenux.</p><p>
Et l’Allemand se prosterna devant la Cibot en baisant les mains de ce bourreau.</p><p>
sur le front, voilà Cibot malade, il est au lit, je viens d’envoyer
chercher le docteur Poulain. Dans ces circonstances-là je dois mettre
Ligne 6 325 ⟶ 6 326 :
par la tête. Je souffrirai ce martyre-là pour l’amour de vous, qui êtes
un ange.</p><p>
ne me donneriez rien, qu’il faut trouver trois mille francs pour vos
besoins ! Ma foi, savez-vous ce que je ferais à votre place. Je n’en
Ligne 6 333 ⟶ 6 334 :
retournés contre le mur, faute de place ! car un tableau ou un autre,
qu’est-ce que ça fait ?</p><p>
Il est capable de se lever, de fureter ; et, si par hasard il venait
dans le salon, quoiqu’il soit si faible qu’il ne pourra plus passer le
seuil de sa porte, il trouverait toujours son nombre !…</p><p>
voulez lui avouer cette vente, vous rejetterez tout sur moi, sur la
nécessité de me payer. Allez, j’ai bon dos…</p><p>
Le jour même, à sept heures, madame Cibot, qui était allée consulter un
huissier, appela Schmucke. L’Allemand se vit en présence de monsieur
Ligne 6 354 ⟶ 6 355 :
papier timbré griffonné produisirent un tel effet sur Schmucke, qu’il
ne résista plus.</p><p>
Le lendemain, à six heures du matin, Élie Magus et Rémonencq
décrochèrent chacun leurs tableaux. Deux quittances de deux mille cinq
Ligne 6 370 ⟶ 6 371 :
déguisés sous les noms de tableaux de l’École française et de l’École
flamande.</p><p>
L’Auvergnat, prié de rendre ce petit service, remplaça les huit
tableaux par des tableaux de même dimension, dans les mêmes cadres, en
Ligne 6 395 ⟶ 6 396 :
pria le Juif de lui dire comment placer cette somme de manière que
personne ne pût la voir en sa possession.</p><p>
francs au-dessous du pair, vous doublerez vos fonds en trois ans, et
vous aurez des chiffons de papier qui tiendront dans un portefeuille.</p><p>
famille de monsieur Pons, il veut savoir à quel prix vous prendriez
tout le bataclan de là-haut… je vais vous l’aller chercher…</p><p>
ans ce sera doublé. J’y ai placé mes pauvres petites économies, dit le
Juif, c’est la dot de ma fille… Allons faire un petit tour sur le
boulevard en attendant l’avocat…</p><p>
reprit Rémonencq, j’aurais une fière femme pour tenir un magasin, et je
pourrais entreprendre le commerce en grand…</p><p>
entrant dans le cabinet de son conseil. Eh bien ! que me dit donc votre
portier, que vous vous en allez d’ici !…</p><p>
Poulain, l’appartement du premier étage, au-dessus du sien. Je cherche
à emprunter deux à trois mille francs pour meubler convenablement cet
Ligne 6 423 ⟶ 6 424 :
suis docteur en droit, j’ai fait mon stage, et j’ai déjà des
protecteurs puissants… Eh bien ! où en sommes-nous ?</p><p>
d’épargne, lui dit la Cibot ; je n’ai pas grand’chose, trois mille
francs, le fruit de vingt-cinq ans d’épargnes et de privations… vous
me feriez une lettre de change, comme dit Rémonencq, car je suis
ignorante, je ne sais que ce qu’on m’apprend…</p><p>
lettres de change, je vous en ferai un reçu portant intérêt à cinq pour
cent, et vous me le rendrez si je vous trouve douze cents francs de
rente viagère dans la succession du bonhomme Pons.</p><p>
La Cibot, prise au piège ; garda le silence.</p><p>
affirmatif. J’ai vu Poulain hier au soir, il paraît que vous menez
votre malade grand train… Encore un assaut comme celui d’hier, et il
Ligne 6 441 ⟶ 6 442 :
lui, voyez-vous, ma chère madame Cibot, il ne faut pas se créer des
remords. On ne vit pas vieux.</p><p>
encore me parler de la guillotine ? monsieur Pons c’est un vieil ostiné !
vous ne le connaissez pas ! c’est lui qui me fait endêver ! Il n’y a pas
Ligne 6 447 ⟶ 6 448 :
sournois, vindicatif et ostiné… Monsieur Magus est à la maison, comme
je vous l’ai dit, et il vous attend.</p><p>
cette collection que dépend le chiffre de votre rente, s’il y a huit
cent mille francs, vous aurez quinze cents francs viagers… c’est une
fortune !</p><p>
Une heure après, pendant que Pons dormait profondément, après avoir
pris des mains de Schmucke une potion calmante, ordonnée par le
Ligne 6 459 ⟶ 6 460 :
se composait la collection du vieux musicien. Schmucke s’étant couché,
ces corbeaux flairant leur cadavre furent maîtres du terrain.</p><p>
s’extasiait et discutait avec Rémonencq en l’instruisant de la valeur
d’une belle œuvre.</p><p>
Ligne 6 466 ⟶ 6 467 :
celui dont la mort était le sujet de leurs convoitises. L’estimation
des valeurs contenues dans le salon dura trois heures.</p><p>
Je ne donnerais pas plus de huit cent mille francs ; car on ne sait pas
combien de temps on gardera ça dans un magasin… Il y a des
Ligne 6 474 ⟶ 6 475 :
d’acquisition est doublé par les intérêts composés ; mais je payerais la
somme comptant.</p><p>
Et, sur un signe de la portière, les trois oiseaux de proie entrèrent.</p><p>
barbe blanche frétillait par tous ses poils, mais ici sont les
richesses ! Et quelles richesses ! les souverains n’ont rien de plus beau
Ligne 6 491 ⟶ 6 492 :
cauchemar. Tout à coup, sous le jet de ces trois rayons diaboliques, le
malade ouvrit les yeux et jeta des cris perçants.</p><p>
continuait son rêve tout éveillé, car il s’était dressé sur son séant,
les yeux agrandis, blancs, fixes, sans pouvoir bouger. Élie Magus et
Rémonencq gagnèrent la porte ; mais ils y furent cloués par ce mot :
Magus ici… je suis trahi… Le malade était réveillé par l’instinct
de la conservation de son trésor, sentiment au moins égal à celui de la
conservation personnelle.
en frissonnant à l’aspect de Fraisier qui restait immobile.</p><p>
clignant de l’œil et faisant signe à Fraisier… Monsieur s’est
présenté tout à l’heure au nom de votre famille.</p><p>
Fraisier laissa échapper un mouvement d’admiration pour la Cibot.</p><p>
Marville ; de son mari, de sa fille, vous témoigner leurs regrets ; ils
ont appris fortuitement votre maladie, et ils voudraient vous soigner
Ligne 6 510 ⟶ 6 511 :
vous aimez tant, sera votre garde-malade… elle a pris votre défense
auprès de sa mère, elle l’a fait revenir de l’erreur où elle était.</p><p>
donnant pour guide le plus habile connaisseur, le plus fin expert de
Paris ?… Ah ! la charge est bonne, reprit-il en riant d’un rire de fou.
Ligne 6 522 ⟶ 6 523 :
dors !… Sortez tous…</p><p>
Et le malheureux, surexcité par la double action de la colère et de la peur, se leva décharné.</p><p>
pour l’empêcher de tomber. Calmez-vous donc, ces messieurs sont sortis.</p><p>
La Cibot fit signe aux trois corbeaux de s’envoler ; puis, elle saisit
Pons, l’enleva comme une plume, et le recoucha, malgré ses cris. En
Ligne 6 530 ⟶ 6 531 :
fermer la porte de l’appartement. Les trois bourreaux de Pons étaient
encore sur le palier, et lorsque la Cibot les vit, elle leur dit de
l’attendre, en entendant cette parole de Fraisier à Magus :
Écrivez-moi une lettre signée de vous deux, par laquelle vous vous
engageriez à payer neuf cent mille francs comptant la collection de
Ligne 6 541 ⟶ 6 542 :
<p>
venez d’avoir un coup de fièvre chaude, que sans moi vous alliez passer
par la fenêtre, et vous me parlez encore d’hommes… Allez-vous rester
toujours comme ça ?…</p><p>
devrait vous mettre ? à Chalenton !… Vous voyez des hommes…</p><p>
que mon pauvre Cibot va si mal, que je vais vous planter là pour
reverdir. Mon Cibot avant tout, voyez-vous ! Quand mon homme est malade,
Ligne 6 558 ⟶ 6 559 :
dormir une couple d’heures, car j’ai dit d’envoyer chercher monsieur
Poulain, et je reviendrai avec lui… Buvez et soyez sage.</p><p>
Quand Pons entendit fermer la porte de l’appartement, il rassembla ses dernières forces pour se lever, car il se dit :</p><p>
Et le malade, animé par le désir d’éclaircir la scène affreuse qui lui
semblait trop réelle pour être une vision, put gagner la porte de sa
Ligne 6 602 ⟶ 6 603 :
comprit alors à quel saint dévouement, à quelle puissance d’amitié
cette résurrection était due.</p><p>
par les larmes du bon Allemand, qui riait et qui pleurait tout à la
fois.</p><p>
Ligne 6 619 ⟶ 6 620 :
l’exacte observation de leurs ordonnances ; mais beaucoup de mères
connaissent la vertu de ces ardentes projections d’un constant désir.</p><p>
qui m’ait aimé !… dit Pons par interjections, en trouvant dans sa voix
des modulations inconnues.</p><p>
L’âme, près de s’envoler, était toute dans ces paroles qui donnèrent à
Schmucke des jouissances presque égales à celles de l’amour.</p><p>
temps me presse, car je suis mort, je ne reviendrai pas de ces crises
répétées.</p><p>
Schmucke pleura comme un enfant.</p><p>
soumettre. On m’a volé, et c’est la Cibot… Avant de te quitter je
dois t’éclairer sur les choses de la vie, tu ne les sais pas… On a
pris huit tableaux qui valaient des sommes considérables.</p><p>
Schmucke alla chercher le papier timbré laissé par l’huissier et l’apporta.</p><p>
Pons lut attentivement ce grimoire. Après lecture il laissa tomber le
Ligne 6 647 ⟶ 6 648 :
d’élève de l’Académie de Rome, toute sa jeunesse lui revint pour
quelques instants</p><p>
et dis à cette affreuse femme que je voudrais revoir la personne qui
m’est envoyée par mon cousin le président, et que, si elle ne vient
Ligne 6 653 ⟶ 6 654 :
faire mon testament.</p><p>
Schmucke s’acquitta de la commission ; mais, au premier mot, la Cibot répondit par un sourire.</p><p>
fièvre chaude, et il a cru voir du monde dans sa chambre. Je vous donne
ma parole d’honnête femme que personne n’est venu de la part de la
famille de notre cher malade…</p><p>
Schmucke revint avec cette réponse, qu’il répéta textuellement à Pons.</p><p>
que je ne le croyais, dit Pons en souriant, elle ment jusque dans sa
loge ! Figure-toi qu’elle a, ce matin, amené ici un Juif, nommé Élie
Ligne 6 675 ⟶ 6 676 :
femme qui nous avait servis fidèlement pendant quelques années. Ce
doute m’a perdu… Combien t’a-t-on donné des huit tableaux ?…</p><p>
fleur de ma collection Je n’ai pas le temps d’intenter un procès,
d’ailleurs ce serait te mettre en cause comme la dupe de ces coquins…
Ligne 6 696 ⟶ 6 697 :
existât une nature aussi perverse que devait être celle de la Cibot, si
Pons avait raison, c’était pour lui la négation de la Providence.</p><p>
la loge et s’adressant à madame Cibot, qu’ile feud vaire son desdamend,
alez chercher ein nodaire…</p><p>
Ligne 6 704 ⟶ 6 705 :
le locataire du premier étage sur le devant de la rue stationnaient
sous la porte cochère.</p><p>
Cibot les larmes aux yeux, et faire faire votre testament par qui vous
voudrez… Ce n’est pas quand mon pauvre Cibot est à la mort que je
Ligne 6 711 ⟶ 6 712 :
pendant trente ans de ménage !…</p><p>
Et elle rentra, laissant Schmucke tout interdit.</p><p>
Ce locataire, nommé Jolivard, était un employé de l’enregistrement, au bureau du Palais.</p><p>
bas carter mon ami, che ne fitrais bas le guidder tans l’édat ù il
esd…</p><p>
Toutes les personnes qui composaient l’attroupement écoutaient cette
conversation avec une curiosité bien naturelle, et qui la grava dans
Ligne 6 734 ⟶ 6 735 :
piège en la priant de rappeler l’envoyé de la famille. Rémonencq, qui
vit venir le docteur Poulain, ne demandait pas mieux que de
disparaître. Et voici pourquoi…</p>
== LVIII. Un crime punissable ==
<p>
Rémonencq, depuis dix jours, remplissait le rôle de la Providence, ce
qui déplaît singulièrement à la Justice dont la prétention est de la
Ligne 6 787 ⟶ 6 789 :
naturellement maladif depuis fort longtemps. La bonne santé de la femme
et la maladie de l’homme semblèrent au docteur un fait naturel.</p><p>
des portiers… son étiolement général annonce une incurable viciation
du sang.</p><p>
Ligne 6 819 ⟶ 6 821 :
commères, les voisins se comportaient aussi de manière à innocenter
Rémonencq en justifiant cette mort subite.</p><p>
de se promener le dimanche, de faire le lundi, car ce n’est pas trop de
deux jours par semaine pour se divertir.</p><p>
Ligne 6 831 ⟶ 6 833 :
empressement à Schmucke pour aller chercher ce monsieur Trognon que
connaissait Fraisier.</p><p>
à l’oreille de la Cibot, et, malgré votre douleur, il faut veiller au
grain.</p><p>
Le petit avoué, qui disparut avec la légèreté d’une ombre, rencontra son ami le médecin.</p><p>
dirai ce soir comment ! Cherche quelle est la place qui te convient ! tu
l’auras ! Et moi ! je suis juge de paix. Tabareau ne me refusera plus sa
Ligne 6 856 ⟶ 6 858 :
présidente lança sur l’homme d’affaires un regard d’où jaillissait la
somme. Ce fut une nappe de convoitise qui roula jusqu’à l’avoué.</p><p>
dîner demain, nous serons en famille, vous aurez pour convives monsieur
Godeschal, le successeur de maître Desroches mon avoué ; puis Berthier,
Ligne 6 865 ⟶ 6 867 :
que tout cela se passe bien. Vous aurez la procuration de monsieur de
Marville dès qu’elle vous sera nécessaire…</p><p>
votre avoué ne paraisse pas, c’est bien moins dans mon intérêt que dans
le vôtre.. Quand je me donne, moi ! je me donne tout entier. Aussi,
Ligne 6 879 ⟶ 6 881 :
d’un méchant petit homme d’affaires…</p><p>
La présidente regarda Fraisier avec admiration.</p><p>
au lieu d’ambitionner cette retraite de juge de paix, je voudrais être
procureur du roi… à Mantes ! et faire un grand chemin.</p><p>
La présidente fut amenée ainsi à sa dernière confidence avec Fraisier.</p><p>
que je vais vous initier aux difficultés de notre position et à nos
espérances. Le président, lors du mariage projeté pour sa fille et un
Ligne 6 905 ⟶ 6 907 :
si, comme cela se fait en matière rurale, on ne compte l’habitation
pour rien…</p><p>
comme à vous, que je m’offre à jouer le rôle d’acquéreur à votre
profit, et je me charge de vous avoir la terre au meilleur marché
Ligne 6 912 ⟶ 6 914 :
ces affaires-là, c’était à Mantes ma spécialité. Vatinelle avait doublé
la valeur de son Étude, car je travaillais sous son nom…</p><p>
reconnaissance… Adieu, mon cher monsieur Fraisier. À demain…</p><p>
Fraisier sortit en saluant la présidente avec moins de servilité que la dernière fois.</p><p>
Allons, je tiens ces gens-là. Seulement, pour être maître absolu de
l’affaire, il faudrait que je fusse le conseil de cet Allemand, dans la
Ligne 6 936 ⟶ 6 938 :
boulevards paraissent courts, lorsqu’en s’y promenant on promène ainsi
son ambition à cheval sur la fantaisie.</p>
== LIX. Les ruses d’un testateur== ▼
<p>
Ligne 6 947 ⟶ 6 951 :
formé par lui pour se jouer de la Cibot et la dévoiler tout entière au
crédule Schmucke.</p><p>
tant de nouvelles et d’événements, il doit régner une grande confusion
dans la maison, si le portier est à la mort, nous sommes à peu près
Ligne 7 022 ⟶ 7 026 :
Josépha ; mais bonne camarade et ne redoutant aucun pouvoir humain, à
force de les voir tous faibles, et habituée qu’elle était à lutter avec
les sergents de ville au bal peu champêtre de Mabille et au carnaval.
Si elle a fait donner ma place à son protégé Garangeot, elle se croira
d’autant plus obligée de me servir, se dit Pons. Schmucke put sortir
Ligne 7 036 ⟶ 7 040 :
entendre, mais voir tout ce qui se dirait et ce qui se passerait dans
ce moment suprême pour elle.</p><p>
sens que je vais mourir ; et, par la volonté de Dieu, sans doute, aucune
des souffrances de la mort ne m’est épargnée !… Voici monsieur
Schmucke…</p><p>
Le notaire salua Schmucke.</p><p>
l’instituer mon légataire universel ; dites-moi quelle forme doit avoir
mon testament, pour que mon ami, qui est Allemand, qui ne sait rien de
nos lois, puisse recueillir ma succession sans aucune contestation.</p><p>
l’inconvénient de la justice humaine. Mais en matière de testament, il
en est d’inattaquables…</p><p>
certifient que le testateur jouit de toutes ses facultés, et si le
testateur n’a ni femme, ni enfants, ni père, ni frère…</p><p>
Schmucke pleurait.</p><p>
laissant la libre disposition de vos meubles et immeubles, si vous ne
les léguez pas à des conditions que la morale réprouve, car vous avez
Ligne 7 063 ⟶ 7 067 :
discussion… Néanmoins, un testament olographe, en bonne forme et
clair, est aussi peu discutable.</p><p>
dictée un testament olographe, et à le confier à mon ami que voici…
Cela se peut-il ?…</p><p>
Au bout de dix minutes, la Cibot, que Pons entrevoyait dans une glace,
vit cacheter le testament, après que le notaire l’eut examiné pendant
Ligne 7 078 ⟶ 7 082 :
prix, une de ces choses que la loi permet de donner à un notaire,
sortit et trouva madame Cibot dans le salon.</p><p>
secrets qui lui sont confiés, répondit monsieur Trognon. Tout ce que je
puis vous dire, c’est qu’il y aura bien des cupidités déjouées et bien
Ligne 7 087 ⟶ 7 091 :
par de telles paroles. Elle descendit et passa la nuit près de Cibot,
en se promettant de se faire remplacer par mademoiselle Rémonencq, et
d’aller lire le testament entre deux et trois heures du matin.</p>
== LX. Le testament postiche ==
<p>
La visite de mademoiselle Héloïse Brisetout, à dix heures et demie du
soir, parut assez naturelle à la Cibot ; mais elle eut si peur que la
Ligne 7 097 ⟶ 7 102 :
accompagna le premier sujet en lui prodiguant des politesses et des
flatteries comme à une souveraine.</p><p>
dit Héloïse en montant l’escalier. Je vous engage à rester dans votre
emploi !</p><p>
Ligne 7 107 ⟶ 7 112 :
comme sa femme, en rencontrant pareille toilette et une si jolie
créature dans leur escalier.</p><p>
tous les soirs pour quarante sous… répondit la portière à l’oreille
de l’ancienne passementière.</p><p>
Ce cri de mère épouvantée fut compris d’Héloïse, qui se retourna :</p><p>
Héloïse regarda monsieur Chapoulot d’un air agréable en souriant.</p><p>
Madame Chapoulot pinça son mari à le faire crier, et le poussa dans l’appartement.</p><p>
vit le pauvre musicien étendu, pâle et la face appauvrie, ça ne va donc
pas bien ? Tout le monde au théâtre s’inquiète de vous ; mais vous savez !
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jours, et tous les matins il est pris par les ennuis de
l’administration. Néanmoins nous vous aimons tous…</p><p>
avec mademoiselle, nous avons à causer théâtre et de ma place de chef
d’orchestre… Schmucke reconduira bien madame.</p><p>
Schmucke, sur un signe de Pons, mit la Cibot à la porte et tira les verrous.</p><p>
la Cibot en entendant ce bruit significatif, c’est monsieur Pons qui
lui apprend ces horreurs-là… Mais vous me payerez cela, mes petits
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dans l’estomac, car Rémonencq venait de lui donner à boire en l’absence
de sa femme.</p><p>
renvoyait la Cibot, je ne me fie qu’à vous pour me choisir un notaire
honnête homme, qui vienne recevoir demain matin, à neuf heures et demie
Ligne 7 149 ⟶ 7 154 :
légataire doit trouver un appui en lui. Je me défie de Berthier,
successeur de Cardot, et vous qui connaissez tant de monde…</p><p>
comtesse du Bruel, Léopold Hannequin, un homme vertueux qui ne sait pas
ce qu’est une lorette ! C’est comme un père de hasard, un brave homme
Ligne 7 172 ⟶ 7 177 :
ça ! dit-elle en se frappant le cœur, c’est un temps à mourir… Adieu,
vieux !</p><p>
bête que feu Crevel ; car tu sais, Crevel, un des anciens commanditaires
de Gaudissard, il est mort il y a quelques jours, et il ne m’a rien
laissé, pas même un pot de pommade ! C’est ce qui me fait te dire que
notre siècle est dégoûtant.</p><p>
mon bon vieux ! je te parle de crevaison ; parce que je te vois dans
quinze jours d’ici te promenant sur le boulevard et flairant de jolies
Ligne 7 199 ⟶ 7 204 :
Naturellement l’homme de loi regarda la danseuse et se promit de tirer
parti de cette visite in extremis.</p><p>
enfin si vous êtes sur le testament ou si vous êtes oubliée, dit
Fraisier en continuant. Je représente les héritiers naturels, et vous
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il est, par conséquent, très vulnérable… Savez-vous où notre homme
l’a mis ?…</p><p>
répondit-elle, il l’a nouée au coin de son mouchoir, et il a serré le
mouchoir sous son oreiller… J’ai tout vu.</p><p>
mais ce n’est qu’un délit de le regarder ; et, dans tous les cas,
qu’est-ce que c’est ? des peccadilles qui n’ont pas de témoins ! A-t-il
le sommeil dur, notre homme ?…</p><p>
devait dormir comme un sabot, et il s’est réveillé… Cependant, je
vais voir ! Ce matin, j’irai relever monsieur Schmucke sur les quatre
heures du matin, et, si vous voulez venir, vous aurez le testament à
vous pendant dix minutes…</p><p>
prévenue, et tirera le cordon ; mais frappez à la fenêtre pour
n’éveiller personne.</p><p>
À minuit, le pauvre Allemand, assis dans un fauteuil, navré de douleur,
contemplait Pons, dont la figure crispée, comme l’est celle d’un
moribond, s’affaissait, après tant de fatigues, à faire croire qu’il
allait expirer.</p><p>
soir, dit Pons avec philosophie. Mon agonie viendra, sans doute, mon
pauvre Schmucke, dans la nuit de demain. Dès que le notaire et tes deux
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malade, et je veux recevoir les saints sacrements demain à midi…</p><p>
Il se fit une longue pause.</p><p>
Pons. J’aurais tant aimé une femme, des enfants, une famille !… Être
chéri de quelques êtres, dans un coin, était toute mon ambition ! La vie
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et je n’y aurais pas reçu des blessures mortelles. Enfin, je ne veux
m’occuper que de toi !…</p><p>
candeur d’un enfant de six ans qui n’aurait jamais quitté sa mère,
c’est bien respectable ; il me semble que Dieu doit prendre soin
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endormi. Écoute-moi bien, et suis mes instructions à la lettre…
M’entends-tu ? demanda le malade.</p>
== LXI. Profond désappointement== ▼
<p>
Schmucke, accablé de douleur, saisi par une affreuse palpitation, avait
laissé aller sa tête sur le dos du fauteuil, et paraissait évanoui.</p><p>
me zemple que che m’envonce dans la dombe afec toi !… dit l’Allemand
que la douleur écrasait.</p><p>
Il se rapprocha de Pons et il lui prit une main qu’il mit entre ses deux mains. Et il fit ainsi mentalement une fervente prière.</p><p>
Pons se pencha péniblement, car il souffrait au foie des douleurs
intolérables. Il put se baisser jusqu’à Schmucke, et il le baisa sur le
front, en épanchant son âme comme une bénédiction sur cet être
comparable à l’agneau qui repose aux pieds de Dieu.</p><p>
tu laisseras la tienne entrebâillée. Quand la Cibot viendra te
remplacer près de moi (elle est capable d’arriver ce matin une heure
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entrouvrant le petit rideau de mousseline de cette porte vitrée, et
regarde bien ce qui se passera… Tu comprends ?</p><p>
prendras plus pour un ange, après. Maintenant, fais-moi de la musique,
réjouis-moi par quelqu’une de tes improvisations… Ça t’occupera, tu
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douleur et l’irritation qu’elle lui causait, emporta le bon Allemand,
selon son habitude, au delà des mondes. Il trouva des thèmes sublimes
sur lesquels il broda des caprices exécutés
la perfection raphaëlesques de Chopin, tantôt avec la fougue et le
grandiose dantesque de Liszt, les deux organisations musicales qui se
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prévisions de Pons, qui semblait avoir entendu la conférence de
Fraisier et de la Cibot, la portière se montra. Le malade jeta sur
Schmucke un regard d’intelligence qui signifiait :
deviné ? Et il se mit dans la position d’un homme qui dort profondément.</p><p>
L’innocence de Schmucke était une croyance si forte chez la Cibot, et
c’est là l’un des grands moyens et la raison du succès de toutes les
ruses de l’enfance, qu’elle ne put le soupçonner de mensonge quand elle
le vit venir à elle, et lui dire d’un air à la fois dolent et joyeux :
Ile hâ ei eine nouitte derriple ! t’ine achidadion tiapolique ! Chai êdé
opliché te vaire te la misicque bir le galmer, ed les loguadaires ti
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il s’achissait te la fie te mon hami. Che suis si vadiqué t’affoir
choué dudde la nouitte, que che zugombe ce madin.</p><p>
d’hier, il n’y aura plus de ressources !… Que voulez-vous ? à la
volonté de Dieu !</p><p>
Quand les gens simples et droits se mettent à dissimuler, ils sont
terribles, absolument comme les enfants, dont les pièges sont dressés
avec la perfection que déploient les Sauvages</p><p>
si fatigués, qu’ils sont gros comme le poing. Allez ! ce qui pourrait me
consoler de la perte de Cibot, ce serait de penser que je finirais mes
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degré. Quant à Schmucke, il tremblait de la tête aux pieds, comme s’il
avait commis un crime.</p><p>
Cibot, car, s’il s’éveillait, il faut qu’il vous trouve là.</p><p>
Après avoir décacheté l’enveloppe avec une habileté qui prouvait qu’il
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Duplanty, à qui je dois de pouvoir mourir en chrétien et en
catholique", etc.</p><p>
Ah ! je commence à croire tout ce que la présidente m’a dit de la malice
de ce vieux artiste !…</p><p>
on ne peut plaider contre l’État !… Le testament est inattaquable Nous
sommes volés, ruinés, dépouillés, assassinés !…</p><p>
== LXII. Première catastrophe== ▼
<p>
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la palpa, la sentit pleine, et soupira profondément. Elle avait espéré
que Fraisier aurait brûlé lui-même cette fatale pièce.</p><p>
les moindres droits à cela, dit-il en montrant la collection, je sais
bien comment je ferais…</p><p>
tient les choses, qu’il s’agit de payer, on vous carotte comme…</p><p>
Elle s’arrêta bien à temps, car elle allait parler d’Élie Magus à Fraisier…</p><p>
l’on m’ait vu dans l’appartement ; mais nous nous retrouverons en bas, à
votre loge.</p><p>
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qui s’étaient l’un et l’autre adossés à la cloison, de chaque côté de
la porte.</p><p>
Elle tomba la face en avant dans des convulsions affreuses, réelles ou
feintes, on ne sut jamais la vérité. Ce spectacle produisit une telle
Ligne 7 465 ⟶ 7 474 :
fondait en larmes, et tendait les mains aux deux amis en les suppliant
par une pantomime très expressive.</p><p>
des deux amis, mon bon monsieur Pons ! c’est le défaut des femmes, vous
savez ! Mais je n’ai su comment faire pour lire votre testament, et je
le rapportais !…</p><p>
grandissant de toute la grandeur de son indignation. Fus êdes eine
monsdre ! fus afez essayé te duer mon pon Bons. Il a raison ! fis êdes
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leva fière comme Tartufe, jeta sur Schmucke un regard qui le fit
trembler et sortit en emportant sous sa robe un sublime petit tableau
de Metzu qu’Élie Magus avait beaucoup admiré et dont il avait dit :
C’est un diamant ! La Cibot trouva dans sa loge Fraisier qui
l’attendait, en espérant qu’elle aurait brûlé l’enveloppe et le papier
blanc par lequel il avait remplacé le testament ; il fut bien étonné de
voir sa cliente effrayée et le visage renversé.</p><p>
donner de bons conseils et de me diriger, vous m’avez fait perdre à
jamais mes rentes et la confiance de ces messieurs…</p><p>
Et elle se lança dans une de ces trombes de paroles auxquelles elle excellait.</p><p>
Elle raconta la scène telle qu’elle venait de se passer.</p><p>
doutaient de votre probité, puisqu’ils vous ont tendu ce piège ; ils
vous attendaient, ils vous épiaient !… Vous ne me dites pas tout…
ajouta l’homme d’affaires en jetant un regard de tigre sur la portière.</p><p>
manifestant ainsi l’intention de nier sa visite nocturne chez Pons.</p><p>
La Cibot sentit ses cheveux lui brûler le crâne, et un froid glacial l’enveloppa.</p><p>
de soustraction de testament, répondit froidement Fraisier.</p><p>
La Cibot fit un mouvement d’horreur.</p><p>
vous prouver combien il est facile, d’une manière ou d’une autre, de
réaliser ce que je vous disais. Voyons ! qu’avez-vous fait pour que cet
Allemand si naïf se soit caché dans la chambre à votre insu ?…</p><p>
Pons qu’il avait eu la berlue. Depuis ce jour-là, ces deux messieurs
ont changé du tout au tout à mon égard. Ainsi vous êtes la cause de
Ligne 7 512 ⟶ 7 521 :
me prendre avec lui, c’est tout un !</p><p>
Cette raison était si plausible, que Fraisier fut obligé de s’en contenter.</p><p>
ma parole. Jusqu’à présent, tout, dans cette affaire, était
hypothétique ; maintenant, elle vaut des billets de Banque… Vous
Ligne 7 518 ⟶ 7 527 :
faudra, ma chère dame Cibot, obéir à mes ordres, et les exécuter avec
intelligence.</p><p>
Il revint chez lui tout joyeux, car ce testament était une arme terrible.</p><p>
la présidente de Marville. Si elle s’avisait de ne pas tenir sa parole,
elle perdrait la succession.</p>
== LXIII. Propositions fallacieuses== ▼
<p>
Ligne 7 532 ⟶ 7 543 :
la portière qui contemplait le tableau de Metzu en se demandant comment
une petite planche peinte pouvait valoir tant d’argent.</p><p>
Cibot, que monsieur Magus regrettait de ne pas avoir, il dit qu’avec
cette petite chose-là, il ne manquerait rien à son bonheur.</p><p>
répondit Rémonencq, je me charge d’avoir vingt mille francs d’Élie
Magus, et si vous ne m’épousez pas, vous ne pourrez jamais vendre ce
tableau plus de mille francs.</p><p>
et vous auriez alors un procès avec les héritiers. Si vous êtes ma
femme, c’est moi qui le vendrai à monsieur Magus, et on ne demande rien
Ligne 7 553 ⟶ 7 564 :
souscrivit à cette proposition, qui la liait pour toujours au
brocanteur.</p><p>
pas de la porte, je vois bien que nous ne sauverons pas notre pauvre
ami Cibot ; le docteur Poulain désespérait de lui hier soir, et disait
Ligne 7 565 ⟶ 7 576 :
servie par ma sœur qui ferait le ménage, et…</p><p>
Le séducteur fut interrompu par les plaintes déchirantes du petit tailleur dont l’agonie commençait.</p><p>
choses-là, quand mon pauvre homme se meurt dans de pareils états…</p><p>
Et Rémonencq rentra chez lui, sûr d’épouser la Cibot.</p><p>
Sur les dix heures, il y eut à la porte de la maison une sorte
Ligne 7 651 ⟶ 7 662 :
Sauvage ; et la bonne de Fraisier, une fois là, vaudrait Fraisier
lui-même.</p>
== LXIV. Où la femme sauvage reparaît== ▼
<p>
Ligne 7 658 ⟶ 7 671 :
marques d’intérêt au plus ancien et au plus estimé des concierges du
quartier.</p><p>
Le docteur Poulain salua l’abbé Duplanty, le prit à part, et lui dit :
Je vais aller voir ce pauvre monsieur Pons ; il pourrait encore se tirer
d’affaire ; il s’agirait de le décider à subir l’opération de
Ligne 7 667 ⟶ 7 680 :
cette opération ; je réponds de sa vie, si pendant qu’on la pratiquera
nul accident fâcheux ne se déclare.</p><p>
dit l’abbé Duplanty, car monsieur Schmucke est dans un état qui réclame
quelques secours religieux.</p><p>
Allemand a eu ce matin une petite altercation avec madame Cibot, qui
fait depuis dix ans le ménage de ces messieurs, et ils se sont
Ligne 7 681 ⟶ 7 694 :
cette brouille, aurait toujours eu besoin de se faire remplacer. C’est
une honnête femme, dit le docteur à l’abbé Duplanty.</p><p>
confiance de la fabrique pour la perception de la location des chaises.</p><p>
Quelques moments après, le docteur Poulain suivait au chevet du lit les
Ligne 7 688 ⟶ 7 701 :
Allemand désespéré que par des signes de tête négatifs, entremêlés de
mouvements d’impatience. Enfin, le moribond rassembla ses forces, lança
sur Schmucke un regard affreux et lui dit :
tranquillement !…</p><p>
Schmucke faillit mourir de douleur ; mais il prit la main de Pons, la
Ligne 7 695 ⟶ 7 708 :
docteur Poulain entendit sonner et alla ouvrir la porte à l’abbé
Duplanty.</p><p>
l’étreinte de la mort. Il aura expiré dans quelques heures ; vous
enverrez sans doute un prêtre pour le veiller cette nuit. Mais il est
Ligne 7 715 ⟶ 7 728 :
autour de son corps par un horrible et significatif mouvement d’avarice
et de hâte.</p><p>
l’Allemand, qui vint alors l’écouter, vous êtes sans madame Cibot…</p><p>
il faut dépouiller le corps, l’ensevelir en le cousant dans un linceul,
il faut aller commander le convoi aux pompes funèbres, il faut nourrir
Ligne 7 729 ⟶ 7 742 :
monde civilisé !</p><p>
Schmucke ouvrit des yeux effrayés, et fut saisi d’un court accès de folie.</p><p>
alors qui vous remplacera ? car il faut s’occuper de monsieur Pons, lui
donner à boire, faire des remèdes…</p><p>
Le détail de ses devoirs sociaux envers son ami mort, hébéta tellement Schmucke, qu’il aurait voulu mourir avec Pons.</p><p>
La Mort est comme un assassin invisible contre lequel lutte le mourant ;
dans l’agonie il reçoit les derniers coups, il essaie de les rendre et
Ligne 7 749 ⟶ 7 762 :
suit l’agonie, il revint à lui, la sérénité de la mort sur le visage et
regarda ceux qui l’entouraient d’un air presque riant.</p><p>
mieux… Merci, mon bon abbé, je me demandais où était Schmucke !…</p><p>
vous n’avez plus personne auprès de vous, et il serait dangereux de
rappeler madame Cibot…</p><p>
au nom de la Cibot. C’est vrai, Schmucke a besoin de quelqu’un de bien
honnête.</p><p>
Schmucke avait repris la main de Pons et la tenait avec joie, en croyant la santé revenue.</p><p>
promptement madame Cantinet ; je m’y connais : elle ne trouvera peut-être
pas monsieur Pons vivant.</p>
== LXV. La mort comme elle est== ▼
<p>
Ligne 7 794 ⟶ 7 809 :
Sauvage le surprit tellement par sa tournure, qu’il laissa échapper un
mouvement de frayeur, à laquelle cette femme mâle était habituée.</p><p>
Duplanty ; elle a été cuisinière chez un évêque, elle est la probité
même, elle fera la cuisine.</p><p>
Sauvage, le pauvre monsieur est mort !… il vient de passer. Schmucke
jeta un cri perçant, il sentit la main de Pons glacée qui se
Ligne 7 806 ⟶ 7 821 :
respiration ne vint ternir la glace, elle sépara vivement la main de
Schmucke de la main du mort.</p><p>
savez pas comme les os vont se durcir ! Ça va vite le refroidissement
des morts. Si l’on n’apprête pas un mort pendant qu’il est encore
Ligne 7 815 ⟶ 7 830 :
colla les mains de chaque côté du corps, et lui ramena la couverture
sur le nez, absolument comme un commis fait un paquet dans un magasin.</p><p>
Après avoir vu la Religion procédant avec son profond respect de la
créature destinée à un si grand avenir dans le ciel, ce fut une douleur
à dissoudre les éléments de la pensée, que cette espèce d’emballage où
son ami était traité comme une chose.</p><p>
Cette innocente créature voyait mourir un homme pour la première fois.
Et cet homme était Pons, le seul ami, le seul être qui l’eût compris et
aimé !…</p><p>
Schmucke fit un signe de tête et fondit en larmes. Madame Cantinet
laissa ce malheureux tranquille ; mais, au bout d’une heure, elle revint
et lui dit :</p><p>
Schmucke tourna sur madame Cantinet un regard à désarmer les haines les
plus féroces ; il montra le visage blanc, sec et pointu du mort, comme
une raison qui répondait à tout.</p><p>
Madame Sauvage était allée annoncer la mort de Pons à Fraisier, qui
courut en cabriolet chez la présidente lui demander, pour le lendemain,
la procuration qui lui donnait le droit de représenter les héritiers.</p><p>
question, je suis allée trouver madame Cibot, qui est donc au fait de
votre ménage, afin qu’elle me dise où sont les choses ; mais, comme elle
Ligne 7 845 ⟶ 7 860 :
les gens du peuple sont habitués à subir passivement les plus grandes
douleurs morales.</p><p>
un lit de sangle, afin de coucher cette dame ; il en faut pour acheter
de la batterie de cuisine, des plats, des assiettes, des verres, car il
va venir un prêtre pour passer la nuit, et cette dame ne trouve
absolument rien dans la cuisine.</p><p>
charbon, pour apprêter le dîner, et je ne vois rien ! Ce n’est
d’ailleurs pas bien étonnant, puisque la Cibot vous fournissait tout…</p><p>
gisait aux pieds du mort dans un état d’insensibilité complète, vous ne
voulez pas me croire, il ne répond à rien.</p><p>
La Sauvage jeta sur la chambre un regard comme en jettent les voleurs
pour deviner les cachettes où doit se trouver l’argent. Elle alla droit
Ligne 7 863 ⟶ 7 878 :
tableaux, et vint le montrer à Schmucke, qui fit un signe de
consentement machinal.</p><p>
vas le compter, en prendre pour acheter ce qu’il faut, du vin, des
vivres, des bougies, enfin tout, car ils n’ont rien… Cherchez-moi
Ligne 7 875 ⟶ 7 890 :
absolu de la mort. Il espérait mourir, et tout lui était indifférent.
La chambre eût été dévorée par un incendie, il n’aurait pas bougé.</p><p>
Schmucke haussa les épaules. Lorsque la Sauvage voulut procéder à
l’ensevelissement de Pons, et mesurer le drap sur le corps, afin de
Ligne 7 883 ⟶ 7 898 :
impatientée saisit l’Allemand, le plaça sur un fauteuil et l’y maintint
avec une force herculéenne.</p><p>
Une fois l’opération terminée, la Sauvage remit Schmucke à sa place, au pied du lit, et lui dit :</p><p>
Schmucke se mit à pleurer ; les deux femmes le laissèrent et allèrent
prendre possession de la cuisine, où elles apportèrent à elles deux en
peu d’instants toutes les choses nécessaires à la vie.</p>
== LXVI. Sensibilité d’une garde-malade== ▼
<p>
Ligne 7 912 ⟶ 7 929 :
Cantinet vint voir si Schmucke voulait manger un morceau. L’Allemand
fit signe qu’on le laissât tranquille.</p><p>
Schmucke, resté seul, sourit comme un fou qui se voit libre d’accomplir
un désir comparable à celui des femmes grosses. Il se jeta sur Pons et
Ligne 7 920 ⟶ 7 937 :
Poulain vint voir Schmucke affectueusement et voulut l’obliger à
manger ; mais l’Allemand s’y refusa.</p><p>
retour, lui dit le docteur, car il faut que vous alliez à la mairie
avec un témoin pour y déclarer le décès de monsieur Pons, et faire
dresser l’acte…</p><p>
constaté le décès. Demandez quelqu’un de la maison pour vous
accompagner. Ces deux dames garderont l’appartement en votre absence</p><p>
Ligne 7 942 ⟶ 7 959 :
peuple, les prolétaires sans aide, souffrent tout le poids de la
douleur.</p><p>
plainte échappée au pauvre martyr, car c’était un bien brave homme, un
bien honnête homme, qui laisse une belle collection ; mais savez-vous,
Ligne 7 950 ⟶ 7 967 :
Schmucke n’écoutait pas ; il était plongé dans une telle douleur,
qu’elle avoisinait la folie. L’âme a son tétanos comme le corps.</p><p>
place, moi, je prendrais un homme d’expérience, un homme connu dans le
quartier, un homme de confiance… Moi, dans toutes mes petites
Ligne 7 963 ⟶ 7 980 :
Schmucke écoutait Rémonencq, en le regardant d’un œil si complètement
dénué d’intelligence, que le brocanteur ne lui dit plus rien.</p><p>
acheter tout le bataclan de là-haut pour cent mille francs, si c’est à
lui…
Rémonencq fut forcé de sortir Schmucke du fiacre et de le prendre sous
le bras pour le faire arriver jusqu’au bureau des actes de l’État
Ligne 7 972 ⟶ 7 989 :
cinq ou six actes de décès à dresser. Là, ce pauvre Allemand devait
être en proie à une passion égale à celle de Jésus.</p><p>
s’adressant à l’Allemand stupéfait de s’entendre appeler par son nom.</p><p>
Schmucke regarda cet homme de l’air hébété qu’il avait eu en répondant à Rémonencq.</p><p>
donc cet homme tranquille, vous voyez bien qu’il est dans la peine.</p><p>
d’honorer dignement sa mémoire, car il est son héritier, dit l’inconnu :
Monsieur ne lésinera sans doute pas… il achètera un terrain à
Ligne 7 985 ⟶ 8 002 :
Rémonencq fit un geste d’Auvergnat pour éloigner cet homme, et l’homme
répondit par un autre geste, pour ainsi dire commercial, qui
signifiait : "
brocanteur.</p><p>
entrepreneurs de monuments funéraires, reprit le courtier, que Walter
Scott eût surnommé le jeune homme des tombeaux. Si monsieur voulait
Ligne 7 994 ⟶ 8 011 :
Arts ont perdu..</p><p>
Rémonencq hocha la tête en signe d’assentiment et poussa le coude à Schmucke.</p><p>
accomplir toutes les formalités, disait toujours le courtier, encouragé
par ce geste de l’Auvergnat. Dans le premier moment de sa douleur, il
Ligne 8 008 ⟶ 8 025 :
ajouta-t-il en voyant venir un autre homme vêtu de noir qui se
proposait de parler pour une autre maison de marbrerie et de sculpture.</p>
== LXVII. Où l’on voit qu’il n’y a que les morts qu’on ne tourmente pas== ▼
<p>
Ligne 8 032 ⟶ 8 051 :
abords des Mairies. Enfin, les courtiers pénètrent souvent dans la
maison mortuaire, un plan de tombe à la main</p><p>
Rémonencq pria le courtier de soulever Schmucke, qui restait sur son
banc comme une masse inerte ; ils le menèrent à la balustrade derrière
Ligne 8 047 ⟶ 8 066 :
sur le pas de la porte cochère, monta Schmucke presque évanoui dans ses
bras, aidée par Rémonencq et par le courtier de la maison Sonet.</p><p>
vingt-quatre heures, et il n’a rien voulu prendre. Rien ne creuse
l’estomac comme le chagrin.</p><p>
donc un bouillon. Vous avez tant de choses à faire : il faut aller à
l’Hôtel de Ville, acheter le terrain nécessaire pour le monument que
vous voulez élever à la mémoire de cet ami des Arts, et qui doit
témoigner de votre reconnaissance.</p><p>
Rémonencq, songez à vous faire représenter par quelqu’un, car vous avez
bien des affaires sur les bras : il faut commander le convoi ! vous ne
voulez pas qu’on enterre votre ami comme un pauvre.</p><p>
moment où Schmucke avait la tête inclinée sur le dos du fauteuil.</p><p>
Elle entonna dans la bouche de Schmucke une cuillerée de potage, et lui donna presque malgré lui à manger comme à un enfant.</p><p>
livrer tranquillement à votre douleur, vous prendriez quelqu’un pour
vous représenter…</p><p>
magnifique monument à la mémoire de son ami, il n’a qu’à me charger de
toutes les démarches, je les ferai…</p><p>
entrepreneurs de monuments funéraires… dit-il en tirant une carte et
la présentant à la puissante Sauvage.</p><p>
convenable ; mais ne faut pas abuser de l’état dans lequel se trouve
monsieur. Vous voyez bien que monsieur n’a pas sa tête…</p><p>
le courtier de la maison Sonet à l’oreille de madame Sauvage en
l’amenant sur le palier, j’ai pouvoir de vous offrir quarante francs…</p><p>
Schmucke, en se voyant seul et se trouvant mieux par cette ingestion
d’un potage au pain, retourna promptement dans la chambre de Pons, où
il se mit en prières. Il était perdu dans les abîmes de la douleur,
lorsqu’il fut tiré de son profond anéantissement par un jeune homme
vêtu de noir qui lui dit pour la onzième fois un :
pauvre martyr entendit d’autant mieux, qu’il se sentit secoué par la
manche de son habit.</p><p>
ne contestons pas sa gloire, il a renouvelé les miracles de l’Égypte ;
mais il y a eu des perfectionnements, et nous avons obtenu des
résultats surprenants. Donc, si vous voulez revoir votre ami, tel qu’il
était de son vivant…</p><p>
courtier d’embaumement ; mais il restera pour l’éternité comme
l’embaumement vous le montrera. L’opération exige peu d’instants. Une
Ligne 8 101 ⟶ 8 120 :
temps… Si vous attendiez encore un quart d’heure, vous ne pourriez
plus avoir la douce satisfaction d’avoir conservé le corps…</p><p>
des rivaux du célèbre Gannal en passant sous la porte cochère ; il
refuse de faire embaumer son ami !</p><p>
son chéri. C’est un héritier, un légataire. Une fois leur affaire
faite, le défunt n’est plus rien pour eux.</p>
== LXVIII. Où l’on apprendra comment l’on meurt à Paris== ▼
<p>
Une heure après, Schmucke vit venir dans la chambre madame Sauvage
suivie d’un homme vêtu de noir et qui paraissait être un ouvrier.</p><p>
Le fournisseur des bières s’inclina d’un air de commisération et de
condoléance, mais, en homme sûr de son fait et qui se sait
indispensable, il regarda le mort en connaisseur.</p><p>
en bois de chêne doublé de plomb ? Le bois de chêne doublé de plomb est
ce qu’il y a de plus comme il faut. Le corps, dit-il, a la mesure
ordinaire…</p><p>
Il tâta les pieds pour toiser le corps.</p><p>
Schmucke jeta sur cet homme des regards comme en ont les fous avant de faire un mauvais coup.</p><p>
allez avoir bien des affaires sur les bras ? Monsieur Tabareau,
voyez-vous, c’est le plus honnête homme du quartier.</p><p>
Vers deux heures, le premier clerc de monsieur Tabareau, jeune homme
qui se destinait à la carrière d’huissier, se présenta modestement. La
Ligne 8 136 ⟶ 8 157 :
appelé Villemot, s’assit auprès de Schmucke, et attendit le moment de
lui parler. Cette réserve toucha beaucoup Schmucke.</p><p>
qui m’a confié le soin de veiller ici à vos intérêts, et de me charger
de tous les détails de l’enterrement de votre ami… Etes-vous dans
cette intention ?</p><p>
Schmucke ne prêta pas la moindre attention à la lecture de cette
procuration générale, et il la signa. Le jeune homme prit les ordres de
Ligne 8 152 ⟶ 8 173 :
avoir sa tombe, et pour le service de l’église, en lui disant qu’il
n’éprouverait plus aucun trouble, ni aucune demande d’argent.</p><p>
l’infortuné qui de nouveau s’agenouilla devant le corps de son ami.</p><p>
Fraisier triomphait, le légataire ne pouvait pas faire un mouvement
Ligne 8 173 ⟶ 8 194 :
Pons, comme le dîner, à sa plus simple expression, à deux pantalons et
deux redingotes !…</p><p>
une monstruosité à vous faire honnir par tout le quartier !…</p><p>
le pauvre homme arrivé au dernier degré d’exaspération où la douleur
puisse porter une âme d’enfant.</p><p>
vers un monsieur qui se montra soudain dans l’appartement, et qui fit
frémir Schmucke.</p><p>
Ligne 8 192 ⟶ 8 213 :
baguette en ébène, insigne de ses fonctions, et sous le bras gauche un
tricorne à cocarde tricolore.</p><p>
Habitué par ses fonctions à diriger tous les jours des convois et à
traverser toutes les familles plongées dans une même affliction, réelle
Ligne 8 199 ⟶ 8 220 :
représentant le génie de la mort. Cette déclaration causa un
tremblement nerveux à Schmucke, comme s’il eût vu le bourreau.</p><p>
Et Schmucke reprit l’attitude que lui donnait sa douleur morne.</p><p>
curiosités. Chamais ceux-là n’ond vaid zouvrir mon pon Bons !… Foilà
doud ce qu’il aimaid afec moi !</p><p>
Schmucke s’était assis et avait repris sa contenance d’idiot, en
essuyant machinalement ses larmes. En ce moment, Villemot, le premier
clerc de maître Tabareau, parut ; et le maître des cérémonies,
reconnaissant celui qui était venu commander le convoi, lui dit :
bien ! monsieur, il est temps de partir… le char est arrivé ; mais j’ai
rarement vu de convoi pareil à celui-là. Où sont les parents, les
amis ?…</p><p>
monsieur est plongé dans une telle douleur qu’il ne pensait à rien ;
mais il n’y a qu’un parent…</p><p>
Ligne 8 222 ⟶ 8 243 :
expert en douleur distinguait bien le vrai du faux, et il vint près de
Schmucke.</p><p>
le soin d’envoyer un exprès à monsieur le président de Marville, le
seul parent de qui je vous parlais… Il n’y a pas d’amis… Je ne
crois pas que les gens du théâtre où le défunt était chef d’orchestre,
viennent… Mais monsieur est, je crois, légataire universel.</p><p>
voix déchirante, et si pien en noir, que che sens la mord en moi…
Dieu me vera la craze de m’inir à mon ami tans la dompe, ed che l’en
remercie !…</p><p>
Et il joignit les mains.</p><p>
perfectionnements, reprit le maître des cérémonies en s’adressant à
Villemot ; elle devrait avoir un vestiaire, et louer des costumes
Ligne 8 242 ⟶ 8 263 :
de deuil, et celui que j’ai apporté l’enveloppera tout entier, si bien
qu’on ne s’apercevra pas de l’inconvenance de son costume…</p><p>
Schmucke se leva, mais il vacilla sur ses jambes.</p><p>
Villemot soutint Schmucke en le prenant sous les bras, et alors le
maître des cérémonies saisit cet ample et horrible manteau noir que
Ligne 8 250 ⟶ 8 271 :
mortuaire à l’église, en le lui attachant par des cordons de soie noire
sous le menton.</p><p>
Et Schmucke fut paré en héritier.</p>
== LXIX. Un convoi de vieux garçon ==
<p>
cérémonies. Nous avons les quatre glands du poêle à garnir… S’il n’y
a personne, qui les tiendra ?… Voici deux heures et demie, dit-il en
consultant sa montre, on nous attend à l’église.</p><p>
Mais personne ne pouvait recueillir cet aveu de complicité.</p><p>
aurons au moins deux glands de tenus, l’un par vous et l’autre par lui.</p><p>
Le maître des cérémonies, heureux d’avoir deux glands garnis, alla
prendre deux magnifiques paires de gants de daim blancs, et les
présenta tour à tour à Fraisier et à Villemot d’un air poli.</p><p>
Fraisier, tout en noir, mis avec prétention, cravate blanche, l’air
officiel, faisait frémir, il contenait cent dossiers de procédure.</p><p>
En ce moment arriva l’infatigable courtier de la maison Sonet, suivi du
seul homme qui se souvînt de Pons, qui pensât à lui rendre les derniers
Ligne 8 281 ⟶ 8 303 :
donnait tous les mois une pièce de cinq francs, en le sachant père de
famille.</p><p>
mal ! J’avais beau dire que j’étais du théâtre et que je venais savoir
des nouvelles de monsieur Pons, on me disait qu’on connaissait ces
couleurs-là. Je demandais à voir ce pauvre cher malade ; mais on ne m’a
jamais laissé monter.</p><p>
Tous les mois, il me donnait cent sous… Il savait que j’ai trois enfants et une femme. Ma femme est à l’église.</p><p>
Le maître des cérémonies avait facilement décidé le courtier de la
maison Sonet à prendre un des glands, surtout en lui montrant la belle
paire de gants qui, selon les usages, devait lui rester.</p><p>
Et ces six personnes se mirent en marche à travers les escaliers.</p><p>
femmes qui restaient sur le palier, surtout si vous voulez être
gardienne, madame Cantinet. Ah ! ah ! c’est quarante sous par jour !…</p><p>
Ligne 8 322 ⟶ 8 344 :
badauds, n’entendait rien et ne voyait ce concours de personnes qu’à
travers le voile de ses larmes.</p><p>
Rémonencq était derrière le char de sa victime, et recevait des compliments de condoléance sur la perte de son voisin.</p>
== LXX. La mort est un abreuvoir pour bien des gens à Paris== ▼
<p>
Ligne 8 379 ⟶ 8 403 :
monuments somptueux. Les indifférents commencent la conversation, et
les gens les plus tristes finissent par les écouter et se distraire.</p><p>
Fraisier à Villemot, et je n’ai pas trouvé nécessaire d’aller
l’arracher à ses occupations au Palais, il serait toujours venu trop
Ligne 8 386 ⟶ 8 410 :
son fondé de pouvoir d’être ici…</p><p>
Topinard prêta l’oreille.</p><p>
voudrait obtenir la commande d’une tombe où il se propose de sculpter
trois figures en marbre, la Musique, la Peinture et la Sculpture
versant des pleurs sur le défunt.</p><p>
succession, car on pourrait absorber une succession par de pareils
frais…</p><p>
à faire à ces entrepreneurs… dit Fraisier à l’oreille de Villemot,
car si le testament est cassé, ce dont je réponds… ou s’il n’y avait
Ligne 8 417 ⟶ 8 441 :
Pons sur laquelle le clergé disait sa dernière prière, l’Allemand fut
pris d’un tel serrement de cœur, qu’il s’évanouit.</p>
== LXXI. Pour ouvrir une succession, on ferme toutes les portes== ▼
<p>
Ligne 8 434 ⟶ 8 460 :
Schmucke à boire un bon bouillon gras, car on avait mis le pot-au-feu
chez les marbriers.</p><p>
sentent aussi vivement que cela ; mais ça se voit encore tous les deux
ans…</p><p>
Enfin Schmucke parla de regagner la rue de Normandie.</p><p>
pour vous, il a passé la nuit !… Mais il a été bien inspiré ! ça sera
beau…</p><p>
Sonet. Mais vous devez honorer la mémoire d’un ami qui vous a laissé
toute sa fortune…</p><p>
Ligne 8 455 ⟶ 8 481 :
le calquant, Vitelot avait transformé les trois figures en celles des
génies de la Musique, de la Sculpture et de la Peinture.</p><p>
six mois nous arriverons… dit Vitelot. Monsieur, voici le devis et la
commande… sept mille francs, non compris les praticiens.</p><p>
sera douze mille francs, et Monsieur s’immortalisera avec son ami…</p><p>
l’oreille de Vitelot, et que les héritiers rentreront dans leur
héritage ; allez voir monsieur le président Camusot, car ce pauvre
innocent n’aura pas un liard…</p><p>
Topinard reconduisit Schmucke à pied, rue de Normandie, car les voitures de deuil s’y étaient dirigées :</p><p>
Topinard voulait s’en aller, après avoir remis le pauvre musicien entre les mains de la dame Sauvage.</p><p>
j’aille dîner… ma femme, qui est ouvreuse, ne comprendrait pas ce que
je suis devenu. Vous savez… le théâtre ouvre à cinq heures trois
quarts…</p><p>
ein ami. Fous qui afez bleuré. Bons, églairez-moi, che zuis tans eine
nouitte brovonte, ed Bons m’a tit que j’édais enduré te goguins…</p><p>
qu’un pauvre garçon de théâtre, mais je tiens aux artistes, et apprenez
que je n’ai jamais rien demandé à personne ! Vous a-t-on demandé quelque
chose ? Vous doit-on ?… eh ! la vieille ?…</p><p>
médème, si môsieur est marié… C’est tout ce que je voulais savoir.</p><p>
La Sauvage dégringola par les escaliers avec une telle rapidité, que les marches tremblaient sous ses pieds.</p><p>
Et elle désigna Topinard au moment où le garçon de théâtre passait fier
d’avoir déjà payé sa dette à son bienfaiteur, en empêchant par une ruse
Ligne 8 501 ⟶ 8 527 :
promettait-il de protéger le musicien de son orchestre contre les
pièges qu’on tendrait à sa bonne foi.</p><p>
qui veut fourrer son nez dans les affaires de monsieur Schmucke…</p><p>
Et Fraisier reprit la conversation avec madame Cibot.</p><p>
avec nous, et que nous ne sommes tenus à rien avec un associé qui nous
trompe !</p><p>
sur ses hanches. Croyez-vous que vous me ferez trembler avec vos
regards de verjus et vos airs de givre !… Vous cherchez de mauvaises
Ligne 8 518 ⟶ 8 544 :
honnête homme. Savez-vous ce que vous êtes ? Vous êtes une canaille.
Oui, oui, grattez-vous le bras !… mais empochez ça !…</p><p>
avez fait votre pelote… Ce matin, pendant les préparatifs du convoi,
j’ai trouvé ce catalogue, en double, écrit tout entier de la main de
Ligne 8 532 ⟶ 8 558 :
ce chevalier de Malte est d’une fraîcheur due à la conservation de la
peinture sur la Lavagna (ardoise)."</p><p>
portrait de dame signé Chardin, sans n° 7 !… Pendant que le maître des
cérémonies complétait son nombre de personnes pour tenir les cordons du
Ligne 8 540 ⟶ 8 566 :
il manque un petit tableau sur bois, de Metzu, désigné comme un
chef-d’œuvre…</p><p>
Schmucke, d’après les ordres de monsieur Pons, pour subvenir à ses
besoins.</p><p>
dodue !… reprit Fraisier. J’aurai l’œil sur vous, je vous tiens…
Servez-moi, je me tairai ! Dans tous les cas, vous comprenez que vous ne
devez compter sur rien de la part de monsieur le président Camusot, du
moment où vous avez jugé convenable de le dépouiller.</p><p>
de boudin pour moi… répondit la Cibot adoucie par les mots : "Je me
tairai !"</p>
== LXXII. Du danger de se mêler des affaires de la justice== ▼
<p>
Madame ; ça n’est pas bien ! La vente des tableaux a été faite de gré à
gré avec monsieur Pons entre monsieur Magus et moi, que nous sommes
Ligne 8 576 ⟶ 8 604 :
Au lieu de sept à huit cent mille francs, vous ne ferez seulement pas
deux cent mille francs !</p><p>
On se sépara sur des menaces dont la portée était bien appréciée de part et d’autre.</p><p>
Le soir, vers dix heures, au théâtre, Gaudissard manda dans son cabinet
le garçon de théâtre de l’orchestre. Gaudissard, debout devant la
Ligne 8 591 ⟶ 8 619 :
bretelle gauche, et il se mettait la tête de trois quarts en jetant son
regard dans le vide.</p><p>
en elle mon prédécesseur déchu… Je t’ai donné l’emploi de nettoyer
les quinquets des coulisses pendant le jour ; enfin, tu es attaché aux
Ligne 8 602 ⟶ 8 630 :
une position enviée par tous les gagistes, et tu es jalousé, mon ami,
au théâtre, où tu as des ennemis.</p><p>
successions !… Mais, malheureux, tu serais écrasé comme un œuf ! J’ai
pour protecteur Son Excellence Monseigneur le comte Popinot, homme
Ligne 8 626 ⟶ 8 654 :
un Dieu particulier pour les Allemands, et tu serais très mal en
sous-Dieu ! vois-tu, reste gagiste !… tu ne peux pas mieux faire !</p><p>
Schmucke qui s’attendait à voir le lendemain ce pauvre garçon de
théâtre, le seul être qui eût pleuré Pons, perdit ainsi le protecteur
Ligne 8 640 ⟶ 8 668 :
salle à manger où madame Sauvage servait le déjeuner. Schmucke s’assit
et ne put rien manger.</p>
== LXXIII. Apparition de trois hommes noirs== ▼
<p>
Ligne 8 649 ⟶ 8 679 :
que jamais, en ayant subi le désappointement d’un testament en règle
qui annulait l’arme puissante, si audacieusement volée par lui.</p><p>
Schmucke, pour qui ces paroles étaient du grec, regarda d’un air effaré les trois hommes.</p><p>
monsieur Camusot de Marville, héritier de son cousin, le feu sieur
Pons… ajouta le greffier.</p><p>
L’invasion de ces trois hommes noirs avait glacé le pauvre Allemand de terreur.</p><p>
venimeux qui magnétisaient ses victimes comme une araignée magnétise
une mouche, monsieur, qui a su faire faire à son profit un testament
Ligne 8 667 ⟶ 8 697 :
seront mis, et je veux veiller à ce que cet acte conservatoire soit
exercé avec la dernière rigueur, et il le sera.</p><p>
pendant que vous dormiez un petit jeune homme, habillé tout en noir, un
freluquet, le premier clerc de monsieur Hannequin, et il voulait vous
Ligne 8 674 ⟶ 8 704 :
fatigué de la cérémonie d’hier, je lui ai dit que vous aviez signé un
pouvoir à monsieur Villemot, le premier clerc de Tabareau, et qu’il
eût, si c’était pour affaires, à l’aller voir. "
dit le petit jeune homme, je m’entendrai bien avec lui. Nous allons
déposer le testament au tribunal, après l’avoir présenté au président."
Ligne 8 689 ⟶ 8 719 :
lui ai dit, et vous irez au tribunal pour tout ce que vous avez volé à
vos messieurs…" Et elle a tu sa gueule.</p><p>
présent à l’apposition des scellés dans la chambre mortuaire !</p><p>
là notre plus forte affaire que les successions. Mais j’ai rarement vu
des légataires universels suivre les testateurs dans la tombe.</p><p>
testament est tout à fait en règle, et sera certainement homologué par
le tribunal qui vous enverra en possession… Vous aurez une belle
fortune.</p><p>
paix avec ses bougies et ses petites bandes de ruban de fil ?</p><p>
lui ? dit la Sauvage en faisant du droit à la manière des femmes, qui
toutes exécutent le Code à leur fantaisie.</p><p>
lui appartiendra sans doute, mais quand on est légataire, on ne peut
prendre les choses dont se compose la succession que par ce que nous
Ligne 8 733 ⟶ 8 763 :
vantaux, ou à sceller l’ouverture des armoires ou des portes simples en
cachetant les deux lèvres de la paroi.</p><p>
trouvé dans les papiers, et il n’est pas au nom de messieurs Pons et
Schmucke, il est au nom seul de monsieur Pons. Cet appartement tout
Ligne 8 741 ⟶ 8 771 :
la porte de la chambre de Schmucke, tenez, monsieur le juge de paix,
elle est pleine de tableaux.</p><p>
== LXXIV. Les fruits du fraisier== ▼
<p>
à la porte le légataire universel, dont jusqu’à présent la qualité
n’est pas contestée ?</p><p>
nous ne nous opposons pas à ce que le légataire retire ce qu’il
déclarera être à lui dans cette chambre ; mais elle sera mise sous les
scellés. Et Monsieur ira se loger où bon lui semblera.</p><p>
nous sommes locataires par moitié de cet appartement, et vous ne nous
en chasserez pas… Otez les tableaux, distinguez ce qui est au défunt,
ce qui est à mon client, mais mon client y restera… mon petit !…</p><p>
témoins… Allez-vous vous jeter dans des expertises, des
vérifications… des jugements interlocutoires et une procédure ?</p><p>
La vie de Schmucke était celle d’un philosophe, cynique sans le savoir,
tant elle était réduite au simple. Il ne possédait que deux paires de
Ligne 8 774 ⟶ 8 806 :
entra dans la chambre, surexcité par la fièvre de l’indignation, il y
prit toutes ses hardes, et les mit sur une chaise.</p><p>
de paix est maître d’ordonner ce qu’il veut, il est souverain dans
cette matière.</p><p>
fizaches de digre… Ch’enferrai gerger mes baufres avvaires, dit-il.</p><p>
Madame Cantinet fut constituée gardienne des scellés, et sur les fonds trouvés on lui alloua une provision de cinquante francs.</p><p>
Si vous voulez donner votre démission en ma faveur, allez voir madame
la présidente de Marville, vous vous entendrez avec elle.</p><p>
Schmucke qui regardait dans la cour une dernière fois les fenêtres de
l’appartement.</p><p>
marier sans crainte votre petite-fille à Poulain, il sera médecin en
chef des Quinze-Vingts.</p><p>
Il était alors onze heures, le vieil Allemand prit machinalement le
chemin qu’il faisait avec Pons en pensant à Pons ; il le voyait sans
Ligne 8 805 ⟶ 8 837 :
sortait son ami Topinard, qui venait de nettoyer les quinquets de tous
les portants, en pensant à la tyrannie de son directeur.</p><p>
cende vrancs de randes… ed che n’ai bas pien londems à fifre… Che
ne te chénerai boint… che manche de doud !… Mon seil pessoin est te
vîmer ma bibe… Ed gomme ti ès le seil qui ait bleuré Bons afec moi,
che d’aime !</p><p>
discret, si vous veniez chez moi ! mais je doute que vous y restiez, car
vous ne savez pas ce qu’est le ménage d’un pauvre diable comme moi…</p><p>
que les Duileries afec des hômes à face de digres ! Ché sors de foir des
digres chez Bons qui font mancher dut !…</p><p>
Schmucke suivit comme un mouton Topinard, qui le conduisit dans une de
ces affreuses localités qu’on pourrait appeler les cancers de Paris. La
Ligne 8 869 ⟶ 8 901 :
chacun peut-il entrevoir les égratignures profondes que faisaient les
trois enfants à la hauteur où leurs bras pouvaient atteindre.</p>
== LXXV. Un intérieur peu confortable== ▼
<p>
Ligne 8 902 ⟶ 8 936 :
Topinard cousait pour le magasin du théâtre. Ces courageux gagistes
réalisaient par des travaux gigantesques neuf cents francs par an.</p><p>
ne savait seulement pas s’il descendait ou s’il montait, tant il était
abîmé dans la douleur.</p><p>
Au moment où le gagiste vêtu de toile blanche comme tous les gens de
service, ouvrit la porte de la chambre, on entendit la voix de madame
Topinard criant :
Et comme sans doute les enfants faisaient ce qu’ils voulaient de papa,
l’aîné continua de commander une charge en souvenir du
Ligne 8 913 ⟶ 8 947 :
dans un fifre de fer-blanc, et le troisième à suivre de son mieux le
gros de l’armée. La mère cousait un costume de théâtre.</p><p>
toujours leur dire cela, ajouta-t-il tout bas à Schmucke.
petite, dit le gagiste à l’ouvreuse, voici monsieur Schmucke, l’ami de
ce pauvre monsieur Pons, il ne sait pas où aller, et il voudrait venir
Ligne 8 927 ⟶ 8 961 :
où se trouvait une petite fille, âgée de cinq ans, celle qui soufflait
dans la trompette et qui avait de si magnifiques cheveux blonds.</p><p>
obligée d’avoir mes enfants près de moi, je proposerais bien notre
chambre.</p><p>
Ligne 8 941 ⟶ 8 975 :
lieu réservé était défendue essayèrent-ils d’y jeter des regards
curieux.</p><p>
La porte de la chambre fermée, on monta dans la mansarde, et dès que
Schmucke y fut, il s’écria :
Bons, che n’édais chamais mieux loché gue zela.</p><p>
traversin, un oreiller, deux chaises et une table. Ce n’est pas la mort
d’un homme… ça peut coûter cinquante écus, avec la cuvette, le pot,
Ligne 8 958 ⟶ 8 992 :
Schmucke d’un mois d’appointements. Néanmoins, vérification faite, la
réclamation se trouva juste.</p><p>
toujours bien compter, même dans les larmes… Je croyais que vous
auriez été sensible à la gratification de mille francs ! une dernière
année d’appointements que je vous ai donnée, et que cela valait
quittance !</p><p>
c’esde que che zuis tans la rie et sans eine liart… À qui afez-fus
remis la cradivigation ?</p><p>
elle l’a fenti… Ele fouleid prîler son desdamand… C’esde eine
goguine ! eine monsdre.</p><p>
asile, avec votre position de légataire universel ? Ça n’est pas
logique, comme nous disons.</p><p>
d’une lutte inégale.
à faire ?</p><p>
une somme et une rente viagère, et vous vivrez tranquille…</p><p>
Ligne 8 990 ⟶ 9 024 :
vicomtesse Popinot et de sa mère de la conclusion de cette sale
affaire, et il serait au moins Conseiller-d’État un jour, se disait-il.</p><p>
boulevard, voici cent écus… Il prit dans sa bourse quinze louis et
les tendit au musicien.
que vous aurez ; et puis, si vous quittez le théâtre, vous me les
rendrez. Comptons ! que dépensez-vous par an ? Que vous faut-il pour être
heureux ? Allez ! allez ! faites-vous une vie de Sardanapale !…</p><p>
quarante-huit : nous disons soixante-douze. Nous sommes à quatre cent
soixante-huit, mettons cinq cents avec les cravates et les mouchoirs,
et cent francs de blanchissage… six cents livres ! Après, que vous
faut-il pour vivre ?.. trois francs par jour ?…</p><p>
et cinq cents francs de loyer, deux mille. Voulez-vous que je vous
obtienne deux mille francs de rente viagère.. bien garanties…</p><p>
le tabac ?… Eh bien ! on vous flanquera du tabac. C’est donc deux mille
quatre cents francs de rente viagère…</p><p>
Robert Macaire !… pensa Gaudissard. Que voulez-vous ? répéta-t-il. Mais
plus rien après.</p><p>
famille ! il va inventer des lettres de change ! Il faut finir roide ! ce
Fraisier ne voit pas en grand ! Quelle dette, mon brave ? dites !…</p><p>
chentille bedide fille qui a tes geveux maniviques, chai gru foir dud à
l’heire le chénie de ma baufre Allemagne que che n’aurais chamais tû
Ligne 9 031 ⟶ 9 065 :
dit-il en faisant le petit geste de tête d’un homme qui croit voir
clair dans les choses de ce bas monde.</p><p>
Et, pris de pitié pour cet innocent, le directeur eut une larme à l’œil.</p><p>
bedide file est Dobinard, qui serd l’orguestre et allime les lambes ;
Bons l’aimait et le segourait, c’esde le seil qui aid aggombagné mon
inique ami au gonfoi, à l’éclise, au zimedière… Ché feux drois mille
vrancs bir lui, et drois mille vrancs bir la bedide file…</p><p>
Ce féroce parvenu fut touché de cette noblesse et de cette
reconnaissance pour une chose de rien aux yeux du monde, et qui, aux
Ligne 9 046 ⟶ 9 080 :
Popinot, un bon cœur, une bonne nature. Donc, il effaça ses jugements
téméraires sur Schmucke, et passa de son côté.</p><p>
monsieur Berthier, notaire, tout sera prêt, et vous serez à l’abri du
besoin pour le reste de vos jours… Vous toucherez vos six mille
francs, et vous serez aux mêmes appointements, avec Garangeot, ce que
vous faisiez avec Pons.</p><p>
retirait. On vit de côtelettes après tout. Et comme dit le sublime
Béranger :</p><p>
Pauvres moutons, toujours on vous tondra !</p><p>
Et il chanta cette opinion politique pour chasser son émotion.</p><p>
Il descendit et cria au cocher :
== LXXVII. Manière de rattraper une succession== ▼
<p>
Schmucke achetait en ce moment des fleurs, et il les apporta presque joyeux avec des gâteaux pour les enfants de Topinard.</p><p>
Ce sourire était le premier qui vînt sur ses lèvres depuis trois mois, et qui l’eût vu, en eût frémi.</p><p>
Mais vous afez une chantile femme, fus l’épiserez, n’est-ce bas ? Che
fus donne mille écus… La bedide file aura eine tode te mile écus que
fus blacerez en son nom. Ed fus ne serez plis cachisde… fus allez
êdre le gaissier du théâdre…</p><p>
bisquer au théâtre !… Mais ce n’est pas possible, reprit-il.</p><p>
pon ! Atieu ! che fais au zimedière… foir ce qu’on a vaid te Bons… ed
gommander tes fleurs pir sa dompe !</p><p>
Ligne 9 107 ⟶ 9 143 :
et qui avaient voulu donner leur opinion à madame de Marville, sans que
Fraisier les écoutât.</p><p>
Et il lut la pièce suivante :</p><p>
"À la requête de, etc…, je passe le verbiage.</p><p>
Ligne 9 146 ⟶ 9 182 :
possession demandée par ledit sieur Schmucke, et je lui ai laissé copie
du présent, dont le coût est de…" etc.</p><p>
poulet, il transigera. Il consultera Tabareau, Tabareau lui dira
d’accepter nos propositions ! Donnez-vous les mille écus de rente
viagère ?</p><p>
le premier étourdissement de sa douleur, car il regrette Pons, ce
pauvre bonhomme. Il a pris cette perte très au sérieux.</p><p>
Oui, l’acquisition que vous m’avez ménagée en vaut la peine ! J’ai
d’ailleurs arrangé l’affaire de la démission de Vitel, mais vous
payerez les soixante mille francs à ce Vitel sur les valeurs de la
succession Pons… Ainsi, voyez, il faut réussir…</p><p>
que je calculais devoir être donnés à cette ignoble portière, cette
madame Cibot. Mais je tiens toujours à avoir le débit de tabac pour la
femme Sauvage, et la nomination de mon ami Poulain à la place vacante
de médecin en chef des Quinze-Vingts.</p><p>
affaire, jusqu’à Gaudissard, le directeur du théâtre, que je suis allé
trouver hier, et qui m’a promis d’aplatir le gagiste qui pourrait
déranger nos projets.</p><p>
Fraisier sortit. Malheureusement il ne rencontra pas Gaudissard, et la fatale assignation fut lancée aussitôt.</p><p>
Tous les gens cupides comprendront, autant que les gens honnêtes
Ligne 9 181 ⟶ 9 217 :
directeur du théâtre de lui enlever tous ses scrupules par des
observations qu’elle trouva pleines de justesse.</p><p>
pauvre diable ne saurait que faire de sa fortune ! C’est une nature
d’une simplicité de patriarche ! C’est naïf, c’est Allemand, c’est à
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C’est-à-dire que, selon moi, il est déjà fort embarrassé de ses deux
mille cinq cents francs de rente, et vous le provoquez à la débauche…</p><p>
qui regrette notre cousin. Mais moi je déplore la petite bisbille qui
nous a brouillés, monsieur Pons et moi ; s’il était revenu, tout lui
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service, au convoi, à l’enterrement, et moi-même, je serais allée à la
messe…</p><p>
à quatre heures, je vous amènerai l’Allemand… Recommandez-moi,
madame, à la bienveillance de votre charmante fille, la vicomtesse
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votre fille la haute considération qui s’attache aux gens puissants et
bien posés. Je veux quitter le théâtre, devenir un homme sérieux.</p><p>
Conclusion</p><p>
À quatre heures, se trouvaient réunis dans le cabinet de monsieur
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Pons, qu’il n’entendit pas un mot de cette transaction sur procès. Au
milieu de l’acte, un clerc entra dans le cabinet.</p><p>
Le notaire, sur un geste de Fraisier, haussa les épaules significativement.</p><p>
le nom de ce… Est-ce un homme ou un monsieur ? est-ce un créancier…</p><p>
Le clerc revint et dit :
Gaudissard avait compris Fraisier, et chacun d’eux flairait un danger.</p><p>
pas être caissier ? Le premier mérite d’un caissier… c’est la
discrétion.</p><p>
resteraient dans la gorge !…
Schmucke, qui avait signé, qui tenait son argent à la main, vint à la voix de Topinard.</p><p>
gens qui veulent vous ravir l’honneur. J’ai porté cela chez un brave
homme, un avoué qui connaît ce Fraisier, et il dit que vous devez punir
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suffira d’assister à une conversation tenue chez le comte Popinot, qui
montrait, il y a peu de jours, sa magnifique collection à des étrangers.</p><p>
personne, je ne dirai pas à Paris, mais en Europe, ne peut se flatter
de rivaliser avec un inconnu, un Juif nommé Élie Magus, vieillard
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acquérir cette galerie à la mort de ce richard… Quant aux curiosités,
ma collection est assez belle pour qu’on en parle…</p><p>
collection, il aimait les arts, les belles œuvres ; mais la plus grande
partie de ses richesses vient de moi !</p><p>
Les Russes sont tellement imitateurs, que toutes les maladies de la
civilisation se répercutent chez eux. La bricabracomanie fait rage à
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renchérissement de prix qui rendra les collections impossibles. Et ce
prince était à Paris uniquement pour collectionner.</p><p>
cousin qui m’aimait beaucoup et qui avait passé quarante et quelques
années, depuis 1805, à ramasser dans tous les pays, et principalement
en Italie, tous ces chefs-d’œuvre…</p><p>
flûtée, plein d’esprit, original, et avec cela beaucoup de cœur. Cet
éventail que vous admirez, milord, et qui est celui de madame de
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vous me permettrez de ne pas répéter…</p><p>
Et elle regarda sa fille.</p><p>
stéréotypé. Il a dit à ma mère qu’il était bien temps que ce qui avait
été dans les mains du vice restât dans les mains de la vertu.</p><p>
Le milord regarda madame Camusot de Marville d’un air de doute extrêmement flatteur pour une femme si sèche</p><p>
nous aimait tant ! nous savions l’apprécier, les artistes se plaisent
avec ceux qui goûtent leur esprit. Mon mari était d’ailleurs son seul
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dénouements de drames qui en abusent.</p><p>
Excusez les fautes du copiste !</p><p>
Paris, juillet 1846
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