« Notice sur les titres et les travaux scientifiques de Louis Lapicque » : différence entre les versions

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* '''Chapitre II: Recherches sur l'évolution quantitative du système nerveux'''
 
(30 pages)
* Relation du poids de l'encéphale au poids du corps entre espèces différentes
 
* 1898
** (66). Sur la relation du poids de l'encéphale au poids du corps, Société de Biologie, 15 janvier.
** (72). Sur le rapport entre la grandeur du corps et le développement de l'encéphale chez le chien (avec Ch. Obéré), Archives de Physiologie, octobre.
* 1905
** (111). Poids de l'encéphale en fonction du poids du corps chez les oiseaux (avec P. Girard), Société de Biologie, 8 avril, Académie des Sciences, 10 avril.
* 1907
** (139). Tableau général des poids somatique et encéphalique dans les espèces animales, Société d'Anthropologie, séance du 2 mai (parue en novembre).
** (144). Tableau général du poids céphalique en fonction du poids du corps, Académie des Sciences, 24 juin.
* 1908
** (158). La relation entre le poids du cerveau et le poids du corps, Revue du Mois, 10 avril.
L'encéphale d'une souris pèse 0 gr. 40; celui d'un hippopotame, 600 grammes. Lequel de ces deux animaux doit être considéré comme le mieux doué en organes nerveux? Lequel possède, relativement, le plus d'encéphale? Relativement, car on ne peut évidemment pas négliger la différence de grandeur des animaux. Mais comment faut-il calculer cette relation? La réponse à cette question doit être donnée avant toute tentative de comparaison entre la grandeur du cerveau et le degré de l'intelligence. Cuvier calculait simplement le rapport entre le poids de l'encéphale et le poids du corps; c'est ce qu'on a appelé jusqu'à ces dernières années le poids relatif de l'encéphale; un tel calcul fait accorder aux petits animaux un poids relatif d'encéphale plus élevé qu'aux grands. On a discuté à perte de vue sur ce résultat; il doit s'interpréter simplement comme une erreur systématique: l'encéphale considéré comme fonction de poids du corps,
e = f(p), croit moins vite que e = k*p (k = constante). Il est impossible, d'autre part, d'accepter pour cette fonction l'expression e = k*p+m (m, nouvelle constante) qui a eu en France une certaine vogue depuis 1885; cette expression conduit en effet à une conséquence absurde (e = m pour p = 0) et à d'autres conséquences non vérifiées par les faits. En 1897, E. Dubois (de la Haye) a fourni pour les mammifères une expression purement empirique, mais numériquement satisfaisante, en écrivant: e = k*(p^(0,56)). La valeur de l'exposant de relation a été obtenue de la manière suivante: soient deux espèces semblables (exemple, chat et tigre) donnant respectivement p et p' comme poids du corps, e et e' comme poids de l'encéphale; on pose e/(e') = (p/(p'))^(x) et on en tire x; dans toutes les familles, on trouve des valeurs de x très voisines de 0,56. Les familles diffèrent entre elles par la valeur k, coefficient céphalique. C'est ce coefficient céphalique qui représente le véritable poids relatif de l'encéphale. Dans l'exemple schématique sur lequel j'ai posé la question, il vient, pour la souris (avec un poids du corps de 20 grammes), 0,08; pour l'hippopotame (pesant 1.800 kilogrammes), 0,18. Le poids relatif de Cuvier donnerait un cinquantième pour la souris, un trois millième pour l'hippopotame; soit une valeur 60 fois plus petite pour le second que pour la première. Le coefficient céphalique de Dubois ne montre aucune erreur importante des plus petits aux plus grands animaux (158).
 
 
* Loi chez les oiseaux (111).
 
J'ai entrepris d'examiner (avec M. P. Girard d'abord, puis seul ensuite) la relation du poids de l'encéphale au poids du corps chez les oiseaux. On ne possédait presque aucun document de ce genre sur cette classe, si ce n'est des chiffres datant du commencement du XIXème siècle, et publiés sous une forme telle qu'ils étaient inutilisables. On n'avait jamais essayé de préciser la façon dont s'ordonneraient les oiseaux suivant leur développement cérébral, ni l'étendue des variations de ce développement de la classe. En examinant les chiffres après cent et quelques déterminations, nous avons remarqué d'abord qu'il fallait mettre à part les oiseaux de basse-cour (voir page 44). Puis nous avons calculé sur divers couples l'exposant de relation de Dubois,
x = (log(e) - log(e'))/(log(p) — log(p')). En ajoutant aux chiffres déterminés avec M. Girard des pesées que j'ai exécutées postérieurement, puis quelques chiffres empruntés à un travail américain paru dans l'intervalle, j'ai obtenu les valeurs suivantes (158):
 
* Geai à Corbeau: 0,546
* Sarcelle à Cygne: 0,596
* Mouette à Goéland: 0,544
* Emouchet à Aigle: 0,516
* Perruche à Perroquet: 0,590
 
La moyenne de ces nombres est 0,558; elle concorde remarquablement avec la valeur 0,56 donnée par M. E. Dubois pour les mammifères.
 
Si maintenant, pour diverses espèces d'oiseaux, formant des séries naturelles bien nettes et présentant une échelle de grandeur suffisante, on calcule le quotient du poids de l'encéphale par la puissance 0,56 du poids du corps, on trouve que ce rapport classe les oiseaux en respectant les familles naturelles; en outre, il met en tête et en queue du tableau ceux que tout le monde s'accorde à considérer comme les plus intelligents et les moins intelligents.
 
* Oiseau
* Poids du corps
* Poids de l'encéphale
* K
 
* Perruche, Palœornis docilis L.: 90; 3,58; 0,29;
* Perroquet, Chrysotis amazonica L.: 340; 7,83; 0,30;
* Geai, Garrulus glandarius (L.): 177; 4,79; 0,27;
* Chouca, Colœus monedula (L.): 230; 5,55; 0,26;
* Corneille, Corvus cornix L.: 524; 8,69; 0,26;
* Emouchet, Falco tinnunculus L.: 232; 3,74; 0,17;
* Buse, Buteo vulgaris L.: 1010; 7,92; 0,16;
* Aigle, Aquila chrysœtos L.: 5273; 18,6; 0,15;
* Mouette, Sterna hirundo L.: 275; 3,10; 0,13;
* Goéland, Larus argentatus Brunn: 1000; 6,33; 0,13;
* Sarcelle, Anas querquedula L.: 307; 2,83; 0,12;
* Canard sauvage, Anas boschas L.: 1072; 6,30; 0,13;
* Cygne, Cygnus olor L.: 5300; 15,5; 0,12;
* Faisan, Phasianus colchicus L.: 1220; 3,95; 0,07;
* Paon, Pavo cristatus L.: 2220; 5,71; 0,07.
 
Ainsi, la formule de Dubois s'applique convenablement aux oiseaux, bien que la constitution de l'encéphale diffère sensiblement de celle des mammifères.
 
 
* Tableau général du poids encéphalique en fonction du poids du corps.
 
J'ai eu l'idée de construire un graphique, en représentant chaque espèce animale par un point dont l'ordonnée est le logarithme de son poids cérébral, et l'abscisse, le logarithme de son poids corporel. J'ai obtenu ainsi un tableau qui permet d'avoir une vue d'ensemble assez claire sur des relations qui ont généralement paru embrouillées. L'avantage ordinaire des coordonnées logarithmiques, qui donnent des distances égales pour des rapports égaux et non pour des différences égales, est ici très appréciable; on peut, sur un seul tableau de dimension restreinte, comparer le rat et la souris, aussi facilement que l'éléphant et la baleine.
 
En outre, la formule de Dubois, e = k*(p^(0,56)), prend la forme de la courbe la plus facile à tracer, à suivre et à extrapoler; elle doit s'écrire, en effet:
 
log(e) = (0,56)*(log(p)) + log(k)
 
qui revient ici à:
 
y = ax + b.
 
L'encéphale en fonction du poids du corps chez les mammifères et les oiseaux, dans une famille où k est constant, est exprimé par une droite. Les droites des diverses familles sont toutes parallèles entre elles (pente constante de 0,56) et placées les unes au-dessus des autres, suivant la différence présentée par le logarithme de k. Ces droites qui représentent des niveaux d'égalité dans l'organisation nerveuse, abstraction faite de la masse du corps, j'ai proposé de les appeler isoneurales. Les lignes qui représenteraient une proportion constante au poids du corps, un vingtième, un centième, sont ici des droites inclinées à 45°; elles coupent les isoneurales, de façon à bien montrer l'erreur systématique du poids relatif de Cuvier. Une espèce isolée, portée au tableau sous forme d'un point suivant ses coordonnées, est alors immédiatement repérée quant au degré de son évolution nerveuse. Pour les animaux à sang chaud, on peut saisir d'un coup d'oeil le sens de cette évolution; il est en gros conforme à ce que nous savons des animaux, au point de vue psychique comme au point de vue phylogénique. Par exemple, l'homme dont la supériorité cérébrale, incontestable, a été longtemps d'une expression si difficile, apparaît nettement au-dessus de toute la série; assez loin au-dessous, la première isoneurale est celle des singes anthropoïdes; et la baleine, malgré son encéphale de 7 kilogrammes, est facilement ramenée dans le gros des mammifères, l'oeil étant guidé par la série des parallèles. Seul, l'éléphant occupe une position un peu choquante dont l'explication est encore à chercher. A titre simplement de première indication (car la relation du poids de l'encéphale au poids du corps semble ici très différente), j'ai posé les points de quelques vertébrés à sang froid, et même de deux invertébrés, le poulpe et le homard, en prenant la somme des ganglions sus et sous-oesophagiens comme l'équivalent de l'encéphale. Un tableau graphique a l'avantage de faire apparaître aux yeux des relations qui peuvent échapper sous la forme abstraite de la formule algébrique.
 
* 1° Je remarque que, vers la gauche, la rencontre des lignes isoneurales avec la ligne de proportion 1/20 parait marquer la limite inférieure du poids du corps dans une famille donnée. Il n'y a pas de très petits animaux à fort coefficient céphalique, et l'on comprend facilement qu'il ne peut y en avoir (1).
 
* 2° Du côté droit, les lignes sont d'autant plus courtes qu'elles sont situées plus bas. Il n'existe pas, au-dessous du tapir ou de l'hippopotame, des animaux correspondant aux lignes isoneurales des mammifères inférieurs.
 
De tels animaux ont probablement existé ; et, sans avoir mesuré leur capacité crânienne, on peut supposer que les grands édentés fossiles, le Scelidotherium et le Megatherium, seraient venus se placer, à peu près en ces valeurs d'abscisses, sur une isoneurale voisine de celle où se trouve aujourd'hui le Pangolin. De tels animaux n'existent plus ; il n'a pas pu subsister d'animal
à grand corps et à petit cerveau. Aucune raison interne, géométrique ou trophique, ne s'oppose à leur existence en elle-même ; mais, dans la concurrence vitale, au point de vue de la survivance de l'espèce, l'infériorité de cette combinaison est évidente.
 
* (1) Des recherches non terminées me portent à admettre que ce sont des raisons d'équilibre mécanique (poids de la tête), et non des raisons d'équilibre trophique, qui s'opposent à l'apparition d'espèces ayant une trop forte proportion d'encéphale.
 
 
* Loi intérieure à l'espèce
 
* 1898
** (66). Sur la relation du poids de l'encéphale au poids du corps, Société de Biologie, 15 janvier.
* 1907
** (142). Sur le poids de l'encéphale chez les animaux domestiques (avec P. Girard), Société de Biologie, juin.
** (148). Le poids encéphalique en fonction du poids corporel entre individus d'une même espèce, Société d'Anthropologie, 6 juin.
 
Il fallait se demander si la formule de Dubois, fort bien vérifiée entre espèces, parmi tous les animaux à sang chaud, est valable aussi entre individus d'une même espèce.