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fusils ; dans les déroutes, ils criaient tranquillement : Vive le Roi, quand même !] Puis connaissant bien les chemins, qui sont fort couverts, ils s’échappaient facilement, tandis que les Bleus, dans leurs défaites, se trouvaient perdus dans des labyrinthes impénétrables. Ces détails feront mieux concevoir les étonnants succès de la Vendée, mais on ne pourra jamais comprendre la valeur inouïe que l’enthousiasme a su inspirer à des paysans naturellement doux ; conservant à la guerre cette bonté caractéristique, ils n’ont jamais fait de cruautés, ni le moindre mal dans les villes prises d’assaut : ils semblaient les frères de ceux qu’ils venaient de combattre. C’est la religion qui produisait ce miracle ; je reviendrai avec détail, par la suite, sur cet article. Je reprends ce qui me concerne.

Le lendemain de la bataille des Aubiers se passa en agitation et en inquiétude à Bressuire ; il y arriva quatre cents Marseillais de renfort ; le jour suivant ils se mirent à crier qu’il fallait tuer les prisonniers, persuadèrent les autres troupes[1] ; tous ensemble coururent aux prisons et en tirèrent onze paysans qui y étaient renfermés ; la plupart n’étaient point des révoltés, mais simplement soupçonnés de l’être : gens qu’on avait pris dans leur lit ; il y avait aussi quelques femmes qu’on laissa ; les hommes passèrent sous nos fenêtres, aux cris d’une soldatesque furieuse. Nous crûmes que nous allions subir le même sort, mais heureusement les Marseillais ignoraient qu’il y eût des nobles en arrestation. Les habitants, quoique patriotes, n’étaient pas assez scélérats pour vouloir notre mort, d’autant que nous étions en général très aimés. On ne pensa donc pas à nous ; il est sûrement inutile de parler

  1. On rangea l’année sur la place de la Bâthe, hors la porte du chemin qui conduit à Thouars ; et lorsque l’année fut en bataille, on amena onze malheureux paysans. Les commandantes des Marseillais se promenèrent dans les rangs et demandèrent des personnes de bonne volonté pour massacrer ces infortunés. Personne de Thouars ne se réunit à ces hommes atroces, mais seulement quelques-uns de Saint-Jean-d’Angély ; on les massacra à coups de sabre, les paysans recevaient la mort à genoux, en priant Dieu. (Note du manuscrit.)