« Notice sur l’Album de Villard de Honnecourt architecte du XIIIe siècle » : différence entre les versions
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<big>NOTICE<br /><br />SUR<br /><br />L’ALBUM DE VILLARD DE HONNECOURT<br /><br />ARCHITECTE DU XIII<sup>e</sup> SIÈCLE<
L’incertitude qui règne sur les procédés manuels des artistes du moyen âge, l’ignorance absolue où l’on est de la manière dont se faisait leur instruction, donneront quelque intérêt à la description d’un manuscrit unique en son genre, qui paraît avoir été le livre de croquis d’un architecte du XIII<sup>e</sup> siècle. J’appellerai ''Album'' ce singulier ouvrage qui fait partie des manuscrits de Saint-Germain conservés à la Bibliothèque nationale (S. G. latin, 1104)<
Comme les feuillets ne sont pas égalisés entre eux, leurs dimensions varient de 15 à 16 cent. en largeur sur 23 à 24 de haut. Chacun d’eux est couvert sur les deux côtés de dessins à la plume, qu’on voit avoir été esquissés à la mine de plomb. Des notes explicatives, conçues dans le dialecte picard du XIII<sup>e</sup> siècle et écrites en belle minuscule de la même époque, accompagnent plusieurs de ses dessins.
L’album fut connu de Willemin qui y prit de quoi composer une planche de costumes pour ses ''Antiquités inédites''<
Les notes manuscrites que je signalais tout à l’heur fournissent, sur l’auteur de l’album, sur ’époque à laquelle il vivait, sur ses travaux, quelques notions que je commencerai par mettre en évidence.
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De même que tous les hommes de son temps qui savaient quelque chose, notre architecte avait beaucoup voyagé. « ''J’ay esté en moult de terres,'' » dit-il en un endroit, et à l’appui de son dire, il invoque les monuments de tous pays réunis dans son album. En effet, c’est presque un itinéraire que ce manuscrit. On l’y voit traverser la France du nord à l’ouest, puis parcourir l’empire d’Alllemagne jusque par de là ses limites les plus reculées. S’arrêtant une fois à Laon, il y prend le croquis de l’une des tours de la cathédrale, « ''la plus belle tour qu’il y ait au monde,'' » à son avis. Ses études minutieuses sur la cathédrale de Reims prouvent qu’il séjourna longtemps dans cette ville. Son passage à Meaux est constaté par un plan de Saint-Étienne, son passage à Chartres par un dessin de la grande rose occidentale de Notre-Dame. Plus loin, on le trouve installé devant le portail méridional de la cathédrale de Lausanne dont il copie la rose existante encore aujourd’hui. Enfin, l’album atteste un long séjour de l’auteur en Hongrie.
Il est à regretter que le manuscrit de Villard de Honnecourt fournisse moins de renseignements sur ses travaux comme architecte que sur ses pérégrinations. On n’y voit qu’une composition signée de lui ; encore en partage-t-il le mérite avec un confrère. Cet ouvrage consiste en un plan de sanctuaire pour une église de premier ordre. Le chœur est enveloppé d’une double galerie et de neuf chapelles, les unes de forme carrée, les autres en hémicycle. Elles alternent sur ce double patron à droite et à gauche de l’abside qui est carrée. Dans l’intérieur, on lit cette légende :''Istud presbiterium<
A défaut de preuve directes qui permettent de placer notre maître Cambraisien parmi les grands constructeurs du XIII<sup>e</sup> siècle, il y a lieu de recourir à l’induction.
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Maintenant, qu’on se reporte à l’état des lieux constaté tant par le dessin que par les annotations du manuscrit. Le nouveau chevet est fondé sur tout le développement de sa ligne de ceinture ; néanmoins, l’achèvement des travaux est assez éloigné pour que l’architecte en parle comme d’une chose problématique : « Les chapelles, dit-il, auront telle figure si jamais on les termine, ''s’on lor fait droit''. » Et il n’y a pas que les chapelles qui demeurent inachevées, mais encore les arcs-boutants, pièce essentielles de la construction du chœur, pour le dessin desquelles on renvoie aux analogues de l’église de Reims. Cela concorde donc parfaitement avec la suspension des travaux qui résulte du silence de l’histoire entre 1243 et 1251 ; par conséquent, c’est dans l’intervalle de ces deux années que Villard de Honnecourt écrivit la légende rapportée ci-dessus.
Les dates connues de l’ œuvre de Reims ne contrarient en rien ce résultat. L’édifice, commencé en 1211 par Robert de Couci, était achevé jusqu’au transept lorsque ce maître mourut en 1241 ; le chevet avec sa ceinture de chapelles était monté certainement dès 1215<
Par une série d’autres rapprochements, il est possible de réduire encore ce terme, et subséquemment de placer à la date qui lui convient, le point le plus marquant de la biographie de Villard de Honnecourt.
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Interrogeons maintenant l’histoire de Hongrie.
En 1242, les Tartares ayant envahi les provinces danubiennes, la nation hongroise presque tout entière fut forcée d’émigrer. Elle revint l’année suivante, expulsa ses vainqueurs, mais ne trouva plus que des ruines à la place où ses villes avaient existé. Strigonie surtout, Strigonie, la capitale et l’ornement de l’empire, avait été comme effacée du sol. C’est à la restauration de cette grande cité que Bela, qui régnait alors sur les Hongrois, commença par appliquer toutes ses ressources. Il tâcha de lui rendre sa splendeur, son animation, sa physionomie toute européenne, car au moment de l’invasion, elle était peuplée presque exclusivement de Français et d’Italiens<
Ignorant l’année précise de la construction de Notre-Dame de Strigonie, je ne me hasarderai point à y faire intervenir Villard de Honnecourt ; mais il est impossible de ne pas voir de relation entre son voyage et tant de travaux entrepris pour réparer les ravages des Tartares. Je suppose, en conséquence, qu’il partit pour la Hongrie en 1244, après délivrance complète du pays. De son aveu, il y fit un assez long séjour :''la u je mes maint jor''. Deux ou trois ans justifieraient l’expression qu’il emploie. Donc, de retour en france vers 1247, il aurait annoté son album lorsqu’il n’était pas encore question de reprendre, à la cathédrale de Cambrai, les travaux qui furent terminés en 1251. Probablement qu’il était alors sur le déclin de sa vie ou à la veille de se retirer du monde, puisqu’il se séparait de ses instruments de travail.
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1° Mécanique ; 2° géométrie et trigonométrie pratique ; 3° coupe des pierre et maçonnerie ; 4° charpente ; 5° dessin de l’architecture ; 6° dessin de l’ornement ; 7° dessin de la figure ; 8° objets d’ameublement ; 9° matières étrangères aux connaissances spéciales de l’architecte et du dessinateur.
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