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qui s’étaient décidés à suivre leur fortune dans les îles américaines. On comptait sur les avantages d’un commerce interlope lucratif avec la terre ferme possédée par les Espagnols ; mais cette ressource était incertaine. Il fallut donc s’adresser à l’agriculture, et lui demander, par la culture, les choses nécessaires à l’existence, puis ensuite produire des objets susceptibles de servir à des échanges pour tout ce qu’on ne pouvait attendre que de l’industrie européenne. Les produits furent d’abord fort misérables. Le tabac, dont le goût commençait à se répandre, et dont la culture est facile, fut l’un des premiers articles dont on s’occupa. L’impôt au profit du chef de la colonie se prélevait, par tête d’habitans, dans plusieurs des Antilles, au moyen d’une redevance de vingt-cinq à trente livres de cette substance. Le cacao, croissant presque spontanément, un peu de coton, des bois de teinture et de marqueterie, étaient tout ce que les colons pouvaient livrer au commerce. Aussi les rapports de navigation des colons français et anglais avec leur mère-patrie étaient-ils irréguliers et peu suivis. L’attention, en France, était absorbée par la Fronde et les troubles de la minorité de Louis XIV. En Angleterre, Charles Ier luttait contre le parlement, et accomplissait sa malheureuse destinée dans la défense du pouvoir absolu. Rien ne contrariait donc une autre nation persévérante et laborieuse, qui, attentive à ne pas laisser échapper la moindre occasion de bénéfice, trouvait les colons fort disposés à trafiquer avec elle de l’échange de leurs produits. Malgré les efforts des concessionnaires français qui s’étaient réservé le monopole des approvisionnemens, malgré la jalousie du commerce anglais, les Hollandais, favorisés par le voisinage de leurs propres établissemens, ne pouvaient être écartés que par des mesures rigoureuses. Les autres gouvernemens se décidèrent d’autant plus aisément à réprimer cette atteinte à leurs droits, que l’introduction de la canne à sucre venait donner une importance nouvelle aux colonies qui se formaient. Cette culture, qui a opéré une si grande révolution commerciale, nous paraît mériter que nous en retracions l’origine.
qui s’étaient décidés à suivre leur fortune dans les îles américaines. On comptait sur les avantages d’un commerce interlope lucratif avec la terre ferme possédée par les Espagnols ; mais cette ressource était incertaine. Il fallut donc s’adresser à l’agriculture, et lui demander, par la culture, les choses nécessaires à l’existence, puis ensuite produire des objets susceptibles de servir à des échanges pour tout ce qu’on ne pouvait attendre que de l’industrie européenne. Les produits furent d’abord fort misérables. Le tabac, dont le goût commençait à se répandre, et dont la culture est facile, fut l’un des premiers articles dont on s’occupa. L’impôt au profit du chef de la colonie se prélevait, par tête d’habitans, dans plusieurs des Antilles, au moyen d’une redevance de vingt-cinq à trente livres de cette substance. Le cacao, croissant presque spontanément, un peu de coton, des bois de teinture et de marqueterie, étaient tout ce que les colons pouvaient livrer au commerce. Aussi les rapports de navigation des colons français et anglais avec leur mère-patrie étaient-ils irréguliers et peu suivis. L’attention, en France, était absorbée par la Fronde et les troubles de la minorité de Louis XIV. En Angleterre, Charles I{{er}} luttait contre le parlement, et accomplissait sa malheureuse destinée dans la défense du pouvoir absolu. Rien ne contrariait donc une autre nation persévérante et laborieuse, qui, attentive à ne pas laisser échapper la moindre occasion de bénéfice, trouvait les colons fort disposés à trafiquer avec elle de l’échange de leurs produits. Malgré les efforts des concessionnaires français qui s’étaient réservé le monopole des approvisionnemens, malgré la jalousie du commerce anglais, les Hollandais, favorisés par le voisinage de leurs propres établissemens, ne pouvaient être écartés que par des mesures rigoureuses. Les autres gouvernemens se décidèrent d’autant plus aisément à réprimer cette atteinte à leurs droits, que l’introduction de la canne à sucre venait donner une importance nouvelle aux colonies qui se formaient. Cette culture, qui a opéré une si grande révolution commerciale, nous paraît mériter que nous en retracions l’origine.


Le sucre n’a été connu que fort tard en Europe. Les anciens écrivains
Le sucre n’a été connu que fort tard en Europe. Les anciens écrivains
n’en font aucune mention, et il est à peine indiqué par un court passage
n’en font aucune mention, et il est à peine indiqué par un court passage
de Théophrastes, qui a terminé sa carrière trois siècles avant Jésus-Christ. Pline et Dioscorides, qui écrivaient dans le premier siècle de notre ère, le décrivent avec des caractères d’après lesquels il est facile de juger que la substance dont ils parlent devait être du sucre candi. Selon Paul d’Egine, au VIIe siècle, le sucre était encore peu répandu ; et de longues années se sont depuis écoulées avant que l’usage en soit devenu général.
de Théophrastes, qui a terminé sa carrière trois siècles avant Jésus-Christ. Pline et Dioscorides, qui écrivaient dans le premier siècle de notre ère, le décrivent avec des caractères d’après lesquels il est facile de juger que la substance dont ils parlent devait être du sucre candi. Selon Paul d’Egine, au VII{{e}} siècle, le sucre était encore peu répandu ; et de longues années se sont depuis écoulées avant que l’usage en soit devenu général.
La canne à sucre est originaire de l’Asie orientale ; elle croît dans le sud de la Chine, dans l’archipel indien et dans les royaumes de Siam et
La canne à sucre est originaire de l’Asie orientale ; elle croît dans le sud de la Chine, dans l’archipel indien et dans les royaumes de Siam et