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tranchées ont pris sous le vernis des teintes chaudes et profondes qui rendent l’ensemble harmonieux, lui retirant cette allure d’objets frais et luisans, sentant la pacotille, le bazar, qui nuit tant aux poupées neuves des mouchys. Dans les objets anciens les proportions sont meilleures ; les jambes ne sont pas ridiculement écourtées ; les pagnes, toujours talaires, tombent naturellement, et leurs plis ont du mouvement.

Je fais la même remarque en visitant l’habitation d’Apapoullé, autre Hindou de marque au temps de Dupleix. Pour être d’une qualité de bois plus médiocre, les chapiteaux des piliers valent par la beauté des sculptures. Des petits cavaliers s’enlèvent sur leurs chevaux cabrés, les éléphans rappellent, par leur modelé hardi, les types classiques des temples de Sriringam. C’est dans cette vieille maison, aussi vide que celle d’Ananda, — car les Hindous, aujourd’hui comme jadis, n’usent guère de nos meubles, — que j’ai vu les meilleures entre toutes ces peintures sur verre que l’on exécute encore à Pondichéry, et qui sont des images de piété. Je croirais volontiers que les mouchys du XVIIIe siècle ne firent que copier le procédé de ces verres « églomisés » alors si fort à la mode en France. Vous savez que le terme « églomisé » est moins ancien que la chose ; il date du commencement du XIXe siècle, au moins dans le langage courant. On s’en servit pour définir ces verres peints et dorés à l’envers dont, au temps de Louis XV, l’encadreur et expert Glomy s’était constitué spécialiste. Les mouchys — c’est à dire les peintres sculpteurs hindous — en ont exécuté de magnifiques. Par la complexité des sujets, le nombre des personnages, la variété des couleurs, la naïveté subtile des perspectives, ces compositions rappellent les panneaux des primitifs italiens. C’est le même parti décoratif, la même façon d’étager les figures sur un seul plan, en graduant les grandeurs, surtout d’après l’importance des personnes. Les divinités pouraniques y sont toujours représentées avec leurs satellites, leurs troupes d’animaux sacrés, singes, éléphans, chevaux, bœufs, leurs adorateurs.

La maison d’Apapoullé possède une collection de ces peintures, et certaines sont de dimensions telles qu’on n’en a, je crois, jamais vu. Mesurant près d’un mètre carré, ces vitres, ainsi décorées, contiennent plusieurs centaines de personnages, tous fidèlement et élégamment traités. Au paon de Soubramanyé, il ne manque pas un ocelle ; on compterait les perles du collier de Latchmi, les