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qui vont s’allier ; tes derniers succès ont fait naître la confiance ; à la cour maintenant on croit en toi.
qui vont s’allier ; tes derniers succès ont fait naître la confiance ; à la cour maintenant on croit en toi. »


« J’avais connaissance de ton projet de tragédie en musique, j’en ai parlé à monseigneur ; ton idée lui plaît. A l’œuvre donc, que ton rêve devienne une réalité. Écris ton drame lyrique et ne crains rien pour son exécution ; les plus habiles chanteurs de Rome et de Milan seront mandés à Florence ; les premiers virtuoses en tout genre seront mis à ta disposition ; le prince est magnifique, il ne te refusera rien ; réponds à ce que j’attends de toi, ton triomphe est certain et ta fortune est faite. »
« J’avais connaissance de ton projet de tragédie en musique, j’en ai parlé à monseigneur ; ton idée lui plaît. À l’œuvre donc, que ton rêve devienne une réalité. Écris ton drame lyrique et ne crains rien pour son exécution ; les plus habiles chanteurs de Rome et de Milan seront mandés à Florence ; les premiers virtuoses en tout genre seront mis à ta disposition ; le prince est magnifique, il ne te refusera rien ; réponds à ce que j’attends de toi, ton triomphe est certain et ta fortune est faite. »


Je ne sais ce qui se passa en moi à ce discours inattendu ; mais je demeurai muet et immobile. L’étonnement, la joie me coupèrent la parole, et je pris l’attitude d’un idiot. Galeazzo ne se méprit pas sur la cause de mon trouble, et me serrant la main : « Adieu, Alfonso ; tu consens, n’est-ce pas ? Tu me promets de laisser toute autre composition pour te livrer exclusivement à celle que Son Altesse te demande ? Songe que le mariage aura lieu dans trois mois ! » Et comme je répondais toujours affirmativement par un signe de tête, sans pouvoir parler : « Allons, calme-toi, Vésuve ; adieu. Tu recevras demain ton engagement, il sera signé ce soir. C’est une affaire faite. Bon courage ; nous comptons sur toi. »
Je ne sais ce qui se passa en moi à ce discours inattendu ; mais je demeurai muet et immobile. L’étonnement, la joie me coupèrent la parole, et je pris l’aspect et l’attitude d’un idiot. Galeazzo ne se méprit pas sur la cause de mon trouble, et me serrant la main : « Adieu, Alfonso ; tu consens, n’est-ce pas ? Tu me promets de laisser toute autre composition pour te livrer exclusivement à celle que Son Altesse te demande ? Songe que le mariage aura lieu dans trois mois ! » Et comme je répondais toujours affirmativement par un signe de tête, sans pouvoir parler : « Allons, calme-toi, Vésuve ; adieu. Tu recevras demain ton engagement, il sera signé ce soir. C’est une affaire faite. Bon courage ; nous comptons sur toi. »


Demeuré seul, il me sembla que toutes les cascades de Terni et Tivoli bouillonnaient dans ma tête.
Demeuré seul, il me sembla que toutes les cascades de Terni et Tivoli bouillonnaient dans ma tête.


Ce fut bien pis quand j’eus compris mon bonheur, quand je me fus représenté de nouveau la grandeur et la beauté de ma tâche. Je m’élance sur mon libretto, qui jaunissait abandonné dans un coin depuis si longtemps ; je revois Paulo, Francesca, Dante, Virgile, et les ombres et les damnés ; j’entends cet amour ravissant soupirer et se plaindre ; de tendres et gracieuses mélodies pleines d’abandon, de mélancolie, de chaste passion, se déroulent au dedans de moi ; l’horrible cri de haine de l’époux outragé retentit ; je vois deux cadavres enlacés rouler à ses pieds ; puis je retrouve les âmes toujours unies des deux amants, errantes et battues des vents aux
Ce fut bien pis quand j’eus compris mon bonheur, quand je me fus représenté de nouveau la grandeur et la beauté de ma tâche. Je m’élance sur mon libretto, qui jaunissait abandonné dans un coin depuis si longtemps ; je revois Paulo, Francesca, Dante, Virgile, et les ombres et les damnés ; j’entends cet amour ravissant soupirer et se plaindre ; de tendres et gracieuses mélodies pleines d’abandon, de mélancolie, de chaste passion, se déroulent au dedans de moi ; l’horrible cri de haine de l’époux outragé retentit ; je vois deux cadavres enlacés rouler à ses pieds ; puis je retrouve les âmes toujours unies des deux amants, errantes et battues des vents aux {{tiret|pro|fondeurs}}