« Opinion publique » : différence entre les versions
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▲[[Category:Contes et Nouvelles de Maupassant]]
Comme onze heures venaient de sonner, MM. les employés, redoutant l'arrivée du chef, s'empressaient de gagner leurs bureaux.
Chacun jetait un coup d'
Ils furent bientôt cinq dans le compartiment où travaillait M. Bonnenfant, commis principal, et la conversation de chaque jour commença suivant l'usage. M. Perdrix, le commis d'ordre, cherchait des pièces égarées, pendant que l'aspirant sous-chef, M. Piston, officier d'Académie, fumait sa cigarette en se chauffant les cuisses. Le vieil expéditionnaire, le père Grappe, offrait à la ronde la prise traditionnelle, et M. Rade, bureaucrate journaliste, sceptique railleur et révolte, avec une voix de criquet, un
- Ma foi, rien du tout, répondit M. Piston ; les journaux sont toujours pleins de détails sur la Russie et sur l'assassinat du Tzar.
Le commis d'ordre, M. Perdrix, releva la tête, et il articula d'un ton convaincu :
M. Rade se mit à rire :
Le père Grappe prit la parole, et demanda d'un ton lamentable :
M. Rade l'interrompit :
Alors M. Bonnenfant s'interposa :
M. Rade haussa les épaules.
Le père Grappe, qui oubliait chaque jour ce qui s'était passé la veille, s'écria :
L'aspirant sous-chef, M. Piston, répondit :
Mais le père Grappe avait oublié.
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Mais M. Rade secouait la tête.
"Vous croyez ? Ah ! vous croyez ! Eh bien vous vous trompez, Monsieur ; on ne changera rien. En France on ne change pas les systèmes. Le système américain consiste à avoir de l'eau, beaucoup d'eau, des fleuves ; fi ! donc, la belle malice d'arrêter les incendies avec l'Océan sous la main. En France, au contraire, tout est laissé à l'initiative, à l'intelligence, à l'invention ; pas d'eau, pas de pompes, rien, rien que des pompiers, et le système français consiste à griller les pompiers. Ces pauvres diables, des héros, éteignent les incendies à coups de hache ! Quelle supériorité sur l'Amérique, songez donc !
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Non pas adieu, sapeurs, mais au
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Heureusement que j'ai des amis. Il y en a un qui m'a prêté dix centimes pour acheter un cigare (dans des cas pareils on ne fume pas des londrès) ; un autre a mis à ma disposition un franc soixante-quinze pour prendre un fiacre ; un troisième, plus riche, m'a avancé vingt-cinq francs pour me procurer une jaquette à la Belle Jardinière.
"0ui, moi, directeur du Printemps, j'ai été à la Belle Jardinière ! J'ai obtenu quinze centimes d'un autre pour autre chose ; et comme je n'avais plus même de parapluie, j'ai acheté un en-tout-cas en alpaga de cinq francs vingt-cinq, au moyen d'un cinquième emprunt. Puis, mon chapeau lui-même étant brûlé, et comme je ne voulais pas emprunter davantage, j'ai ramassé le casque d'un pompier. . . tenez le voilà ! Suivez mon exemple, si vous avez des amis, adressez-vous à leur
"0r un de ses employés n'aurait-il pas pu lui répondre :
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Cette fois, tout le monde dans le bureau fut d'accord. M. Bonnenfant ajouta, d'un air farceur :
M. Rade continua :
Alors M. Perdrix, le commis d'ordre, prononça tout à coup :
"C'est égal nous vivons dans un drôle de siècle, dans une époque bien troublée - ainsi, cette affaire de la rue
Mais le garçon de bureau entrouvrit brusquement la porte :
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21 mars 1881
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