« Notre Jeunesse » : différence entre les versions

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La seule valeur, la seule force du royalisme, mon cher Variot, la seule force d'une monarchie traditionnelle, c'est que le roi est plus ou moins aimé. La seule force de la République, c'est que la République est plus ou moins aimée. La seule force, la seule valeur, la seule dignité de tout, c'est d'être aimé. Que tant d'hommes aient tant vécu et tant souffert pour la République, qu'ils aient tant cru en elle, qu'ils soient tant morts pour elle, que pour elle ils aient supporté tant d, épreuves, souvent extrêmes, voilà ce qui compte, voilà ce qui m'intéresse, voilà ce qui existe. Voilà ce qui fonde, voilà ce qui fait la légitimité d'un régime. Quand je trouve dans ''l'Action'' ''française'' tant de dérisions et tant de sarcasmes, souvent tant d'injures, j'en suis peiné, car il s'agit d'hommes qui veulent restaurer, restituer les plus anciennes dignités de notre race et on ne fonde, on ne refonde aucune culture sur la dérision et la dérision et le sarcasme et l'injure sont des barbaries. Ils sont même des barbarismes. On ne fonde, on ne refonde, on ne restaure, on ne restitue rien sur la dérision. Des calembours ne font pas une restitution de culture. J'avoue que je n'arrive point à comprendre tout ce que l'on met, tout ce qu'ils y a évidemment d'esprit dans cette graphie des ''Respubliquains'' que l'on nous répète à satiété. Cela me paraît un peu du même ordre que les sots de l'autre côté qui écrivent toujours ''le'' ''roy''. Avec un ''y''. Cet ''s'' et ce ''qu'' me paraissent du même alphabet que cet ''y''. J'ai peur qu'ils ne soit presque également sot de se moquer de l'un et de l'autre. Le roi a pour lui toute la majesté de la tradition française. La République a pour elle toute la grandeur de la tradition républicaine. Si on met cet ''s'' à ''Respubliquains'' on ne fait rien, on ne peut rien faire que de lui conférer un peu de la majesté romaine. Je suis plongé en ce moment-ci, pour des raisons particulières, dans le ''de'' ''Viris''. J'avoue que ''respublica'' y est un mot d'une grandeur extraordinaire. D'une amplitude, d'une voûte romaine. Quant au changement de ''c'' en ''qu'' au féminin de ''public'' en ''publique'', il ne me paraît pas plus déshonorant que le féminin de ''Turc'' en ''Turque'', et de ''Grec'' en ''Grecque'', et de ''sec'' en ''sèche'' comme la grammaire (française) nous l'enseigne. On a le féminin qu'on peut. Quand je trouve dans ''l'Action'' ''française'', dans Maurras des raisonnements, des logiques d'une rigueur implacable, des explications impeccables, invincibles comme quoi la royauté vaut mieux que la république, et la monarchie que la république, et surtout le royalisme mieux que le républicanisme et le monarchisme mieux que le républicanisme, j'avoue que si je voulais parler grossièrement je dirais que ça ne prend pas. On pense ce que je veux dire. Ça ne prend pas comme un mordant prend ou ne prend pas sur un vernis. Ça n'entre pas. Des explications, toute notre éducation, toute notre formation intellectuelle, universitaire, scolaire nous a tellement appris à en donner, à en faire, des explications et des explications, que nous en sommes saturés. Au besoin nous ferions les siennes. Nous allons au-devant des siennes, et c'est précisément ce qui les émousse pour nous. Nous sortons d'en prendre. Nous savons y faire. Dans le besoin nous les ferions. Mais qu'au courant de la plume, et peut-être, sans doute sans qu'il y ait pensé dans un article de Maurras je trouve, comme il arrive, non point comme un argument, présentée comme un argument, mais comme oubliée au contraire cette simple phrase : ''Nous'' ''serions'' ''prêts'' ''à'' ''mourir'' ''pour'' ''le'' ''roi'', ''pour'' ''le'' ''rétablissement'' ''de'' ''notre'' ''roi'', oh alors on me dit quelque chose, alors on commence à causer. Sachant, d'un tel homme, que c'est vrai comme il le dit, alors j'écoute, alors j'entends, alors je m'arrête, alors je suis saisi, alors on me dit quelque chose. Et l'autre jour aux cahiers, cet autre jeudi, quand on eut discuté bien abondamment, quand on eut commis bien abondamment ce péché de l'explication, quand tout à coup Michel Arnauld, un peu comme exaspéré, un peu comme à bout, de cette voix grave et sereine, douce et profonde, blonde, légèrement voilée, sérieuse, soucieuse comme tout le monde, à peine railleuse et prête au combat que nous lui connaissons, que nous aimons en lui depuis dix-huit ans, interrompit, conclut presque brusquement : julien''Tout'' je''cela'' t'aime'c'est'' plus''très'' que''bien'' ''parce'' ''qu'ils'' ''ne'' ''sont'' ''qu'une'' ''menace'' ''imprécise'' ''et'' ''théorique''. ''Mais'' ''le'' ''jour'' ''où'' ''ils'' ''deviendraient'' ''une'' ''menace'' ''réelle'' tout''ils'' ''verraient'' ''ce'' ''que'' ''nous'' ''sommes'' ''encore'' ''capables'' ''de'' ''faire'' ''pour'' ''la'' ''République'', tout le monde comprit qu'enfin on venait de dire quelque chose.