« Le Blason d’après les sceaux du Moyen-Âge » : différence entre les versions

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On a d’abord séparé les emblèmes, les symboles de la fantaisie qui décorèrent de tout temps les boucliers, des armoiries féodales, signes héréditaires, distinctifs et représentatifs de la seigneurie. Cette démarcation une fois établie, il ne restait plus qu’à prendre pour point de départ des armoiries reconnues et à les suivre en remontant le cours des siècles jusqu’au moment où elles cessent d’être représentées sur l’écu.<br />
C’est ainsi qu’en étudiant d’âge en âge les sceaux des comtes de Flandre, on rencontre le ''lion'' pour la première fois dans le type de Philippe d’Alsace, en 1170. Le sceau de 1164 du même compte n’en fait pas mention. On le chercherait en vain sur les sceaux des prédécesseurs de Philippe.<br />
On constate par la même méthode que le plus ancien blason des Montmorency, la ''croix cantonnée de quatre alérions'', date de 1177 et se trouve sur l’écu de Mathieu II, tandis que le sceau de Mathieu I{{er}}, avant 1160, n’offre aucun emblème héraldique. — L’écu de Conon, comte de Soissons, porte, de 1178 à 1180, le ''lion passant'' ; on ne voit pas d’armes apparentes sur le type de ce même Conon en 1172. ― Dès 1189, Mathieu III, comte de Beaumont-sur-Oise, tient un bouclier chargé d’un ''lion rampant'', le sceau du même comte ne possède pas d’armoiries en 1177 ; celui de Mathieu II, son prédécesseur, n’en possède pas davantage en 1173. ― Les Coucy présentent en 1190 leur ''fascé de vair et de gueules de six pièces'' ; ce blason n’existe pas sur un sceau de 1150. ― Le ''lion'' des Garlande apparaît en 1192 et ne figure pas sur un sceau de Gui de Garlande en 1170. — Gérard de Saint-Aubert porte en 1194 une bouclier ''chevronné à la bordure'' ; ce seigneur n’a pas encore d’armoiries en 1185. — Les anciennes armes du Hainaut, un ''chevronné de six pièces'', sont reproduites en 1195 sur un sceau de Baudouin le Courageux, tandis que le type de ce même personnage à la date de 1182 en est dépourvu. — Avant 1197, Henri II, comte de Champagne, porte la ''bande coticée'' ; mais dans un type précédent de l’année 1180, on n’aperçoit sur le bouclier qu’un umbo accompagné de son armature de fer; le bouclier de Henri I{{er}}, en 1168, se trouve dans la même condition. — À la date de 1197, Geoffroi, comte du Perche, porte ''trois chevrons'' ; l’écu de son père Rotrou III ne contient pas d’armoiries en 1190. — Gautier d'Avesnes, 1199, se couvre d’un écu ''bandé de six pièces'' ; Jacques d’Avesnesd'Avesnes, en 1186, n’a pas d’armes distinctes. — On remarque sur le sceau de Guillaume, comte de Clermont en Auvergne, 1199, un écu à ''deux lions passant'' que ne donnent pas les types de ses devanciers. — Enguerran de Picquigny, vidame d’Amiens, porte, en 1199, un ''échiqueté sous un chef de vair'' qui ne se trouve pas chez Gérard de Picquigny, en 1190.<br />
D’après les exemples que je viens de citer, le blason fait son apparition dans les dernières années du XII{{e}} siècle, brusquement, sans transition. mais il est d’autres types plus anciens où les pièces des armoiries existent, s’annonçant pour ainsi dire avant de passer dans l’écu. Le sceau d’Enguerran, comte de Saint-Pol, antérieur à l’année 1150, est de ce nombre. Il offre déjà plusieurs ''gerbes'' dispersées dans le champ.
 
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Dans les pages qui précèdent, j’ai montré les vraies armoiries, les armoiries héréditaires prenant naissance au dernier quart du XII{{e}} siècle dans plusieurs familles et plusieurs États à la fois. Je vais indiquer à présent comment elles sont figurées sur les sceaux.<br />
Les blasons commencent à se produire dans les types équestres. Ils se posent d’abord sur le bouclier que le personnage tient à la main, en langage de chevalerie, sur l’écu. Sans attendre que l’umbo ait disparu, les pièces héraldiques se rangent comme elles peuvent dans son voisinage. Je citerai comme exemples les sceaux de Philippe d’Alsased’Alsace, 1170, — d’Eudes de Ham, 1177, — de Richard de Vernon et de Richard Cœur-de-Lion, 1195. Les armoiries occupent ensuite le bouclier en cœur de la fin du XII{{e}} siècle. Les divers écus qui succèdent à ce dernier continuent à les recevoir et finissent même, au XIV{{e}} siècle, par ne plus avoir d’autre destination.<br />
Mais l’écu du chevalier ne jouit pas longtemps seul du privilège des emblèmes féodaux. Le blason, en vogue depuis peu d’années, envahit bientôt la selle, se posant sur le poitrail en 1215 (sc. de Robert de Braine), sur l’arçonnière de derrière en 1224 (sceau de Mathieu II de Montmorency). À peine la cotte d’armes est-elle entrée dans le vêtement chevaleresque, la housse dans la défense du cheval, 1225, qu’elles se couvrent d’armoiries (voy. le type de Savari de Mauléon). Avant 1230, la lance quitte le gonfanon à banderoles pour prendre une bannière rectangulaire, aux armes. L’ailette, la pièce qui défendait l’épaule, devient dès son origine, 1294, une des pièces honorables portant les armoiries du personnage (sc. de Pierre de Chambly). Le heaume de Philippe d’Alsace est marqué du ''lion de Flandre'' ; celui d’Amauri, sénéchal d’Anjou, 1223, présente sur son pourtour le ''losangé des Craon'' ; un Flamand, Jean d’Axel, coiffe, en 1336, un heaume armorié d’''un chevron''.<br />
Avant d’aller plus loin, je placera une observation. Elle découle de ce qui a été exposé jusqu’à présent. L’armature du bouclier engendra, dit-on, les premières pièces de blason. Il suffira, pour réduire à sa juste valeur cette opinion trop généralisée, de citer le lion de Flandre, 1170, — les croissants de la maison de Ham, 1177, — les tourteaux des comptes de Boulogne, 1181, — et ceux des Courtenai, 1184, — les merlettes des Mello, 1185, — les gerbes des Bouteiller de Senlis, 1186, — le dextrochère des Mortagne, 1191, — le lion des Montfort, 1195, etc. Tous ces emblèmes empruntés aux plus anciennes armoiries n’offrent rien de commun avec la ferrure symétrique d’un écu.<br />
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Les écus dont il a été parlé jusqu’à présent sont droits, debout sur la pointe dans le champ du sceau. Vers le milieu du {{s|XIV}}, la mode vint de les placer de biais, de les pencher et de poser sur leur angle le plus élevé un heaume surmonté d’un cimier, en termes de blason de les timbrer. On leur donna des supports, comme il vient d’être dit pour les sceaux droits, d’ordinaire au nombre de deux, l’un à droite, l’autre à gauche. D’autres fois la disposition n’en comporte qu’un seul, tandis que dans certains cas on a eu recours à des supports multiples.
 
Dès le déclin du {{s|XIII}}, on a songé à soutenir l’écu, mais les vrais suportssupports héraldiques commencent, ainsi que je l’ai déjà dit, vers 1344. On a demandé, pour remplir cet objet, des mofidsmotifs à tous les règnes de la nature, au ciel, à la mythologie. Le ciel a donné les anges qui tiennent l’écu de France et ceux de beaucoup de dames. La fable a prêté les centaures, les cerfs ailés, les licornes, le phénix, les griffons, les sirènes et les tritons.
 
À la terre on a pris l’homme dans ses différents états, depuis l’homme d’armes jusqu’à l’homme sauvage, et parmi les animaux : le bélier, la biche, le cheval, les chiens de diverses espèces, le léopard, le lion que l’on a quelquefois coiffé d’un heaume ou recouvert d’un manteau armorié, des loups, des ours, des rats, des sangliers. Les arbres même ont fourni leurs branches, ou estocs. Dans le domaine des oiseaux, on a choisi l’aigle, le cygne, le héron ; les aigles portent aussi quelquefois le manteau armorié, et les cygnes le heaume. On ne pouvait manquer d’emprunter à la mer le dauphin.
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<div style="text-align:center;">''Support unique.''</div>
 
Une ''aigle'' porte à son cou l’écu de Louis I{{er}}, duc d’anjoud’Anjou, 1370.<br />
L’écu de Marie, fille de Charles le Téméraire, 1477, est soutenu par un ''ange''. L’archange saint Michel porte l’écu de Jean IV, duc de Bretagne, 1391.<br />
Jean, duc de Berri, 1393, fait tenir son écu par un ''cygne'' coiffé d’un heaume.<br />
Sur le sceau de Guillaume Cousinot, chambellan du roi, 1473, une ''dame'' soutient d’une main l’écu et de l’autre le heaume. — Certaines dames, dans les types les plus anciens, semblent supporter elles-mêmes leur blason : Marguerite de Courcelles, 1284, — Alix de VerduVerdun, 1311, — Hélissent des Barres, femme de Guillaume de Thianges, 1316, appuient une main sur leur écu, et l’autre sur l’écu de leur mari.<br />
Charles, dauphin de Viennois, vers 1355, fait soutenir son écu par un ''dauphin''.<br />
Sur le sceau de Jean, fils d’Humbert I{{er}}, 1294, un ''griffon'' porte à son cou l’écu au dauphin.<br />
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On a pris les cimiers aux mêmes sources que les supports. Mais comme les cimiers sont bien plus nombreux, force a été de subdiviser les sujets qu'ils doivent représenter, soit en les fractionnant, soit en variant leur posture. Dans le type humain on a employé des bustes, des têtes, des bras. Les animaux sont devenus passants, rampants, assis, à mi-corps ou issants ; on s'est servi des têtes, des cornes, des pieds.
 
De plus l'on a eu recours à des pièces artificielles représentant des objets fabriqués par la main de l'homme : des annelets, des boules, des buires, des chapeaux, des châteaux, des couteaux, des croissants, des globes, des haches d'armes, des lettres de l'alphabet, des plumails de diverses formes et de diverses matières, — plumails en aigrette, en crête, en éventail, en houppe, en touffe de plumes de aponpaon ou de feuillage, — des roues, des tonneaux, etc.
 
Voici quelques exemples de cimier tirés de la collection des Archives nationales.
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''Pot''. — Alain de Montbourcher, 1381, cime d'un pot ; il en a trois dans l'écu.<br />
''Quintefeuille''. — Jean des Hayes, 1381, cime d'une quintefeuille ; son écu en porte trois.<br />
''Rose''. — RolaondRoland de Ploiz, 1381, cime d'une rose ; il y a trois roses dans l'écu.<br />
''Roue''. — Jean de Vendégies, 1428, cime d'une roue.<br />
''Sagittaire''. — Charles, comte de la Marche, qui devint Charles de Bel, cime en 1317 d'un sagittaire.<br />
''Sanglier''. — Jean d'AunoiyAunoy, 1394, chambellan du roi, cime d'une hure.<br />
''Singe''. — François de l'Hôpital, 1408, Baudri de Roisin, 1427, portent en cimier un singe assis.<br />
''Sirène''. — Jean Rasoir, 1463, cime d'une sirène.<br />
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L'étude du type héraldique a porté jusqu'à présent sur l'écu le plus usité, l'écu triangulaire. Il me reste à mentionner d'autres formes d'un usage plus restreint.
 
''Écu à pointe arrondie''. — Dans elsles contrées méridionales, l'habitude était d'arrondir la pointe de l'écu de façon à lui donner l'aspect d'un U moderne. Tel est l'écu de Sicard Allemand, en 1248, de Gaston VII, vicomte de Béarn, 1266, 1276, des comtes de Comminges, de Foix, de Toulouse, etc.
 
[[Image:Demay p43.jpg|thumb|Sicard Allemand.|200px|center]]
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Catherine de Bourbon, femme de Jean VI, comte d'Harcourt, 1376, montre, au centre d'un quadriloblequadrilobe, son initiale K, entourée de quatre écus en losange. On pourrait citer encore : Jeanne, femme de Charles de Blois, duc de Bretagne, 1369 ; Marguerite de Flandre, femme de Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, 1403 ; Jeanne de Bourbon, comptessecomtesse d'Auvergne, 1502. Et parmi les hommes qui ont adopté l'écu en losange : Pierre de la Fauche, 1270 ; Jean I{{er}}, comte d'Armagnac, 1369.
 
''Écu en bannière''. — Les dames, au XV{{e}} siècle, ont souvent fait usage de l'écu en bannière, écu de forme carrée ou rectangulaire, qui figure aussi parfois sur les sceaux de chevaliers. Jeanne, dame de Planes, offre, dans son type de 1376, un écu carré enfermé dans un quadriloblequadrilobe.
 
[[Image:Demay p45a.jpg|thumb|Jeanne, dame de Planes.|200px|center]]
 
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L'écu de Marguerite de Bavière, femme de Jean-Sans-Peur, appartient à cette catégorie. Deux sceaux d'Alfonse d'Espagne, 1324, 1325, portent chacun, dans un quadrilobe, un céuécu en bannière supporté par deux hommes sauvages et soutenu par deux anges.
 
Ce sera peut-être le lieu de citer ici quelques types du XIII{{e}} siècle dans lesquels une vraie bannière avec le manche et le fer remplace elle-même l'écu. Voyez le contre-sceau d'Amauri VI, comte de Montfort, 1234, d'Archambaud X, sire de Bourbon, 1247, et de Roger de Mortagne, 1275 ; chez ce dernier, un bras, couvert de mailles, tient le fût de la bannière.
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Les premiers accessoires décoratifs de l'écu datent de 1271.
 
On voit déjà des sortes de supports au déclin du XIII{{e}} siècle ; les vrais supoprtssupports héraldiques paraissent seulement vers 1344 au moment où la mode vint de pencher les écus.
 
On trouve des cimiers sur quelques sceaux de la fin du XII{{e}} siècle, toutefois leur usage ne devient général que cent ans après. Alors, qu'ils soient simples ou composés, ils répètent quelquefois les armoiries héréditaires.
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Un des plus anciens volets date de 1322. Il est des types où le volet reproduit les armes du personnage.
 
Il s'est produit, indépendamment de la forme triangulaire, diverses autrseautres formes d'écu, y compris certaines exceptions qui ne relèvent que de la fantaisie.
 
Enfin l'existence de brisures à l'origine des armoiries a été constatée avec cette remarque que les fils aînés de la maison de France, au XIII{{e}} siècle, n'étaient pas soumis à cette règle.