« Mademoiselle Fifi (recueil, Ollendorff 1898)/Nuit de Noël » : différence entre les versions

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Vous vous rappelez comme il faisait froid, voici deux ans, à cette époque ; un froid à tuer les pauvres dans la rue. La Seine gelait, les trottoirs glaçaient les pieds à travers les semelles des bottines ; le monde semblait sur le point de crever.
 
J'avais alors un gros travail en train et je refusai toute invitation pour le réveillon, préférant passer la nuit devant une table. Je dînai seul ; puis je me mis à l'oeuvreœuvre. Mais voilà que, vers dix heures, la pensée de la gaieté courant Paris, le bruit des rues qui me parvenait malgré tout, les préparatifs de souper de mes voisins, entendus à travers les cloisons, m'agitèrent. Je ne savais plus ce que je faisais ; j'écrivais des bêtises ; et je compris qu'il fallait renoncer à l'espoir de produire quelque chose de bon cette nuit-là.
 
Je marchai un peu à travers ma chambre. Je m'assis, je me relevai. Je subissais, certes, la mystérieuse influence de la joie du dehors, et je me résignai.
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Elle dit en entrant : "Ah ! on est bien ici."
 
Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale. Elle était superbe, tellement jolie qu'elle m'étonnait, et grosse à ravir mon coeurcœur pour toujours.
 
Elle ôta son manteau, son chapeau, s'assit et se mit à manger ; mais elle ne paraissait pas en train, et parfois sa figure un peu pâle tressaillait comme si elle eût souffert d'un chagrin caché.
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Je repris : "Est-ce que tu te trouves indisposée ?" Et soudain elle jeta un cri, un cri déchirant. Je me précipitai, une bougie à la main.
 
Son visage était décomposé par la douleur, et elle se tordait les mains, haletante, envoyant du fond de sa gorge ces sortes de gémissements sourds qui semblent des râles et qui font défaillir le coeurcœur.
 
Je demandai, éperdu : "Mais qu'as-tu ? dis-moi, qu'as-tu ?"