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{{sc|Le culte des héros et ses fanatiques}}. — Le
{{sc|Le culte des héros et ses fanatiques}}. - Le fanatique d’un idéal fait de chair et de sang a généralement raison tant qu’il ''nie'' - et, dans sa négation, il est terrible : il connaît ce qu’il nie aussi bien que lui-même, par la raison bien simple qu’il en vient, qu’il y est chez lui et qu’il craint toujours secrètement d’être forcé d’y retourner, il veut se rendre le retour impossible par la façon dont il nie. Mais dès qu’il affirme, il ferme à moitié les yeux et se met à idéaliser (ce n’est souvent que pour faire mal à ceux qui sont restés dans la maison qu’il a quittée); on appellera peut-être artistique la forme de son affirmation, - fort bien, mais elle a aussi quelque chose de déloyal. L’idéaliste d’une personne place cette personne tellement loin de lui qu’il ne peut plus la voir distinctement, et maintenant il interprète en « beau » ce qu’il peut encore apercevoir, c’est-à-dire qu’il en considère la symétrie, les lignes indécises, le manque de précision. Puisque, dès lors, il voudra adorer cet idéal qui flotte dans le lointain et dans les hauteurs, il lui faut construire, pour le protéger contre le profanum vulgus, un temple à son adoration. Il y apporte tous les objets vénérables et sanctifiés qu’il possède encore, pour que l’idéal bénéficie de leur magie et que cette nourriture le fasse grandir et devenir toujours plus divin. En fin de compte, il a véritablement réussi à imrachever son dieu, mais
fanatique d’un idéal qui possède chair et sang a
généralement raison tant qu’il ''nie'' — et, dans sa
négation, il est terrible : il connaît ce qu’il nie aussi
bien que lui-même, par la raison bien simple qu’il
en vient, qu’il y est chez lui et qu’il craint toujours
secrètement d’être forcé d’y revenir, il veut se
rendre le retour impossible par la façon dont il nie.
Mais dès qu’il affirme, il ferme à moitié les yeux
et se met à idéaliser (ce n’est souvent que pour
faire mal à ceux qui sont restés dans la maison
qu’il a quittée). On appellera peut-être artistique
la forme de son affirmation, — fort bien, mais elle
a aussi quelque chose de déloyal. L’idéaliste d’une
personne place cette personne tellement loin de
lui qu’il ne peut plus la voir distinctement, et
maintenant il interprète en « beau » ce qu’il peut encore
apercevoir, c’est-à-dire qu’il en considère la
symétrie, les lignes indécises, le manque de précision.
Puisque, dès lors, il voudra adorer cet idéal
qui flotte dans le lointain et dans les hauteurs, il
lui faut construire, pour le protéger contre le
<i>{{lang|la|profanum vulgus}}</i>, un temple à son adoration. Il y
apporte tous les objets vénérables et sanctifiés qu’il
possède encore, pour que l’idéal bénéficie de leur
charme et que cette ''nourriture'' le fasse grandir et
devenir toujours plus divin. En fin de compte, il a
véritablement réussi à parachever son dieu, mais