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en sorte que nous en faisons, par exemple, « un homme dangereux ». Triple erreur ! Triple méprise, vieille comme le monde ! Peut-être cet héritage nous vient-il des animaux et de leur faculté de jugement. Ne faut-il pas chercher l’origine de toute morale dans ces horribles petites conclusions : « Ce qui me nuit est quelque chose de mauvais (qui porte préjudice par soi-même) ; ce qui m’est utile est bon (bienfaisant et profitable en soi) ; ce qui me nuit une ou plusieurs fois m’est hostile en soi et foncièrement ; ce qui m’est utile une ou plusieurs fois m’est favorable en soi et foncièrement. » O pudenda origo ! Cela ne veut-il pas dire : interpréter les relations pitoyables, occasionnelles et accidentelles qu’un autre peut avoir avec nous comme si ces relations étaient l’essence et le fond de son être, et prétendre qu’envers tout le monde et envers soi-même il n’est capable que de rapports semblables aux rapports que nous avons eus avec lui une ou plusieurs fois ? Et derrière cette véritable folie n’y a-t-il pas la plus immodeste de toutes les arrière-pensées : croire qu’il faut que nous soyons nous-mêmes le principe du bien puisque le bien et le mal se déterminent d’après nous ?
en sorte que nous en faisons, par exemple, « un homme dangereux ». Triple erreur ! Triple méprise, vieille comme le monde ! Peut-être cet héritage nous vient-il des animaux et de leur faculté de jugement. Ne faut-il pas chercher l’origine de toute morale dans ces horribles petites conclusions : « Ce qui me nuit est quelque chose de mauvais (qui porte préjudice par soi-même) ; ce qui m’est utile est bon (bienfaisant et profitable en soi) ; ce qui me nuit une ou plusieurs fois m’est hostile en soi et foncièrement ; ce qui m’est utile une ou plusieurs fois m’est favorable en soi et foncièrement. » O pudenda origo ! Cela ne veut-il pas dire : interpréter les relations pitoyables, occasionnelles et accidentelles qu’un autre peut avoir avec nous comme si ces relations étaient l’essence et le fond de son être, et prétendre qu’envers tout le monde et envers soi-même il n’est capable que de rapports semblables aux rapports que nous avons eus avec lui une ou plusieurs fois ? Et derrière cette véritable folie n’y a-t-il pas la plus immodeste de toutes les arrière-pensées : croire qu’il faut que nous soyons nous-mêmes le principe du bien puisque le bien et le mal se déterminent d’après nous ?


== 103. ==
== 103. Il y a deux façons de nier la moralité ==


''Il y a deux façons de nier la moralité''. « Nier la moralité » – cela peut vouloir dire d’abord : nier que les motifs éthiques invoqués par les hommes les aient vraiment poussés à leurs actes, – cela équivaut donc à dire que la moralité
{{sc|Il y a deux espèces de négateurs la moralité}}. « Nier la moralité » – cela peut vouloir dire d’abord : nier que les motifs éthiques invoqués par les hommes les aient vraiment poussés à leurs actes, – cela équivaut donc à dire que la moralité