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à Honduras, dans la Guyane anglaise ; mais, en ces différens emplois, il ne s’était jamais trouvé en face d’un parlement, puisque ces colonies sont toutes ce qu’on appelle des dépendances de la couronne, c’est-à-dire qu’elles sont régies par le souverain sans intervention d’assemblées élues. En outre, à mesure que l’Afrique australe se peuplait davantage d’immigrans européens, le conflit s’accentuait d’autant plus entre les fonctions diverses remplies par le gouverneur. Celui-ci était, on l’a dit, tout à la fois administrateur des vieilles provinces du Cap, chef omnipotent de la Cafrerie britannique, commissaire royal pour le règlement des affaires indigènes. Au premier titre, il avait à tenir compte des avis d’un parlement; pour le reste, il ne relevait que du cabinet de Londres. La situation de la Cafrerie britannique était surtout un sujet d’embarras. Cette région, occupée depuis la dernière révolte sous le prétexte de protéger la frontière contre les incursions des natifs, ne produisait presque rien parce que la population européenne y était clair-semée; elle coûtait beaucoup parce qu’il fallait pour la défendre y entretenir un nombreux état-major d’officiers civils ou militaires. Or la chambre des communes d’Angleterre, en veine d’économie, prétendait que les possessions d’outre-mer n’ont de valeur qu’autant qu’elles se suffisent à elles-mêmes. Que faire de cette province dont le budget des recettes ne dépassait pas 25,000 livres sterling tandis que celui des dépenses atteignait 40,000 ? Sir Philip Wodehouse proposa aux députés du Cap de se l’annexer. Cette proposition n’eut aucun succès, non pas que le fardeau fût bien lourd pour le moment, mais surtout en prévision des conséquences qui devaient s’ensuivre. Il était à craindre en effet que le parlement fût désormais responsable de la défense de cette frontière, ce qui eût exigé un état militaire onéreux. On se souvient que sir G. Grey avait été blâmé pour y avoir employé quelques années auparavant, dans un moment de crise, les troupes de police entretenues aux frais des habitans. Valait-il mieux y attirer l’immigration européenne? Au bout d’un certain temps, la Cafrerie se serait trouvée en état de se défendre elle-même, les indigènes s’en seraient éloignés ou se seraient soumis, comme il est arrivé dans les provinces récemment peuplées de l’Australie ou des États-Unis. Mais le commandant militaire objecta que cette tentative de peuplement exigerait d’abord un accroissement d’effectif ; la métropole voulait au contraire restreindre les garnisons de l’Afrique australe. Sir Philip finit par y établir des tribus paisibles, depuis longtemps soumises à l’influence anglaise et qui devaient se comporter, il l’espérait avec raison, comme des alliés en cas de lutte contre leurs compatriotes plus turbulens. La discussion s’éteignit sur ce sujet, au moins pour un certain temps ; elle allait renaître avec plus de gravité à propos des affaires intérieures.
à Honduras, dans la Guyane anglaise ; mais, en ces différens emplois, il ne s’était jamais trouvé en face d’un parlement, puisque ces colonies sont toutes ce qu’on appelle des dépendances de la couronne, c’est-à-dire qu’elles sont régies par le souverain sans intervention d’assemblées élues. En outre, à mesure que l’Afrique australe se peuplait davantage d’immigrans européens, le conflit s’accentuait d’autant plus entre les fonctions diverses remplies par le gouverneur. Celui-ci était, on l’a dit, tout à la fois administrateur des vieilles provinces du Cap, chef omnipotent de la Cafrerie britannique, commissaire royal pour le règlement des affaires indigènes. Au premier titre, il avait à tenir compte des avis d’un parlement ; pour le reste, il ne relevait que du cabinet de Londres. La situation de la Cafrerie britannique était surtout un sujet d’embarras. Cette région, occupée depuis la dernière révolte sous le prétexte de protéger la frontière contre les incursions des natifs, ne produisait presque rien parce que la population européenne y était clair-semée ; elle coûtait beaucoup parce qu’il fallait pour la défendre y entretenir un nombreux état-major d’officiers civils ou militaires. Or la chambre des communes d’Angleterre, en veine d’économie, prétendait que les possessions d’outre-mer n’ont de valeur qu’autant qu’elles se suffisent à elles-mêmes. Que faire de cette province dont le budget des recettes ne dépassait pas 25,000 livres sterling tandis que celui des dépenses atteignait 40,000 ? Sir Philip Wodehouse proposa aux députés du Cap de se l’annexer. Cette proposition n’eut aucun succès, non pas que le fardeau fût bien lourd pour le moment, mais surtout en prévision des conséquences qui devaient s’ensuivre. Il était à craindre en effet que le parlement fût désormais responsable de la défense de cette frontière, ce qui eût exigé un état militaire onéreux. On se souvient que sir G. Grey avait été blâmé pour y avoir employé quelques années auparavant, dans un moment de crise, les troupes de police entretenues aux frais des habitans. Valait-il mieux y attirer l’immigration européenne ? Au bout d’un certain temps, la Cafrerie se serait trouvée en état de se défendre elle-même, les indigènes s’en seraient éloignés ou se seraient soumis, comme il est arrivé dans les provinces récemment peuplées de l’Australie ou des États-Unis. Mais le commandant militaire objecta que cette tentative de peuplement exigerait d’abord un accroissement d’effectif ; la métropole voulait au contraire restreindre les garnisons de l’Afrique australe. Sir Philip finit par y établir des tribus paisibles, depuis longtemps soumises à l’influence anglaise et qui devaient se comporter, il l’espérait avec raison, comme des alliés en cas de lutte contre leurs compatriotes plus turbulens. La discussion s’éteignit sur ce sujet, au moins pour un certain temps ; elle allait renaître avec plus de gravité à propos des affaires intérieures.