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Germanie, — ce qui a dû avoir lieu avant Charlemagne, car dans les Capitulaires il apparaît comme parfaitement établi, — on distingua le champ d’hiver, ''winterfeld'', le champ d’été, ''sommerfeld'', et le champ de la jachère, ''brachfeld'' ou ''campus apertus''. Chacun de ces champs était alternativement emblavé de seigle, puis d’avoine, et en dernier lieu laissé en repos pendant un an. Il était divisé en longues bandes aboutissant toutes d’un côté au chemin d’exploitation. Ces parcelles s’appelaient dans le nord ''deel'', en Angleterre ''oxgang'', ailleurs ''loos, luz'', lot. Les traces de ce système sont encore partout visibles en Allemagne. Il suffit de parcourir le pays pour voir ces longues bandes de terrain cultivé s’étendant parallèlement les unes à côté des autres, souvent suivant une ligne arrondie. Les parcelles dans chaque champ devaient être cultivées en même temps, consacrées au même produit et abandonnées à la vaine pâture vers la même époque, d’après la règle du ''Flurzwang'' ou de la culture obligée. Les habitans se réunissaient pour délibérer sur tout ce qui concernait la culture, pour régler l’ordre et le temps des différentes opérations agricoles. Cette coutume, qui est générale dans les provinces russes où il existe des communautés de village, était encore naguère en usage dans certains cantons de la Westphalie, du Hanovre et de la Néerlande.
Germanie, — ce qui a dû avoir lieu avant Charlemagne, car dans les Capitulaires il apparaît comme parfaitement établi, — on distingua le champ d’hiver, ''winterfeld'', le champ d’été, ''sommerfeld'', et le champ de la jachère, ''brachfeld'' ou ''campus apertus''. Chacun de ces champs était alternativement emblavé de seigle, puis d’avoine, et en dernier lieu laissé en repos pendant un an. Il était divisé en longues bandes aboutissant toutes d’un côté au chemin d’exploitation. Ces parcelles s’appelaient dans le nord ''deel'', en Angleterre ''oxgang'', ailleurs ''loos, luz'', lot. Les traces de ce système sont encore partout visibles en Allemagne. Il suffit de parcourir le pays pour voir ces longues bandes de terrain cultivé s’étendant parallèlement les unes à côté des autres, souvent suivant une ligne arrondie. Les parcelles dans chaque champ devaient être cultivées en même temps, consacrées au même produit et abandonnées à la vaine pâture vers la même époque, d’après la règle du ''Flurzwang'' ou de la culture obligée. Les habitans se réunissaient pour délibérer sur tout ce qui concernait la culture, pour régler l’ordre et le temps des différentes opérations agricoles. Cette coutume, qui est générale dans les provinces russes où il existe des communautés de village, était encore naguère en usage dans certains cantons de la Westphalie, du Hanovre et de la Néerlande.


Quelques auteurs ont refusé d’admettre qu’il y eût tirage au sort des parts à distribuer <ref> M. Fustel de Coulanges écrivait récemment ici même (15 mai 1872) : « Le mot ''sors'' s’appliquait à toute terre possédée héréditairement. L’idée du tirage au sort n’y était pas contenue. » Sans doute plus tard le mot sors, sortes ne prouvait pas un tirage au sort, pas plus que le mot ''lot de terrain'' employé aujourd’hui; mais ces termes ont manifestement pour origine le tirage au sort, primitivement en usage. Sans doute toutes les terres de la Gaule n’ont pas été confisquées et tirées au sort. En cela, M. Fustel de Coulanges a raison; mais il ne s’ensuit pas que le partage périodique des terres n’ait pas eu lieu en Gaule comme en Germanie. </ref>; mais les preuves de ce fait abondent. D’abord les parts s’appelaient en allemand ''loosgut'', ce qui fut traduit en latin par le mot sors. Dans la loi burgonde, les mots sors et terra sont employés comme synonymes. Ceux qui possédaient des lots dans la même communauté de village s’appelaient ''consortes'' ; c’est de cet usage du tirage au sort que vient notre mot ''lot'', qui désigne aujourd’hui simplement une parcelle de terrain.
Quelques auteurs ont refusé d’admettre qu’il y eût tirage au sort des parts à distribuer <ref> M. Fustel de Coulanges écrivait récemment ici même (15 mai 1872) : « Le mot ''sors'' s’appliquait à toute terre possédée héréditairement. L’idée du tirage au sort n’y était pas contenue. » Sans doute plus tard le mot sors, sortes ne prouvait pas un tirage au sort, pas plus que le mot ''lot de terrain'' employé aujourd’hui ; mais ces termes ont manifestement pour origine le tirage au sort, primitivement en usage. Sans doute toutes les terres de la Gaule n’ont pas été confisquées et tirées au sort. En cela, M. Fustel de Coulanges a raison ; mais il ne s’ensuit pas que le partage périodique des terres n’ait pas eu lieu en Gaule comme en Germanie.</ref> ; mais les preuves de ce fait abondent. D’abord les parts s’appelaient en allemand ''loosgut'', ce qui fut traduit en latin par le mot sors. Dans la loi burgonde, les mots sors et terra sont employés comme synonymes. Ceux qui possédaient des lots dans la même communauté de village s’appelaient ''consortes'' ; c’est de cet usage du tirage au sort que vient notre mot ''lot'', qui désigne aujourd’hui simplement une parcelle de terrain.


Ce qui ne laisse aucun doute, semble-t-il, c’est que le partage périodique par la voie du sort est resté en usage, depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, dans certains villages allemands et dans quelques localités d’Ecosse. Dans les villages de Saarholzbach, Wadern, Beschweiler, Zerf, Kell, Paschel, Lampaden, Franzenheim, Pluwig et d’autres, du gouvernement de Trêves, les maisons, avec les jardins y attenant, étaient seules propriétés
Ce qui ne laisse aucun doute, semble-t-il, c’est que le partage périodique par la voie du sort est resté en usage, depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, dans certains villages allemands et dans quelques localités d’Ecosse. Dans les villages de Saarholzbach, Wadern, Beschweiler, Zerf, Kell, Paschel, Lampaden, Franzenheim, Pluwig et d’autres, du gouvernement de Trêves, les maisons, avec les jardins y attenant, étaient seules propriétés