« Les Sciences et les Humanités » : différence entre les versions

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Cette habitude de l'analyse, ce n'est pas dans l'étude des mathématiques que le biologiste pourra l'acquérir si cette étude lui paraît presque aussi fastidieuse qu'au littérateur le plus réfractaire aux sciences. Et peut-être n'est-il pas nécessaire pour lui de pousser jusqu'à cette analyse subtile qui est celle du géomètre. Il en est une moins raffinée qui est pour nous le fruit de l'étude grammaticale et comparée des langues, et qui lui suffira amplement, comme gymnastique, en même temps qu'elle choquera moins ses goûts parce qu'elle lui présentera des objets non encore vidés de toute couleur et de toute vie.
Giard a été un biologiste de premier ordre et il avait reçu une éducation littéraire très soignée ; sa mémoire était prodigieuse et sa tête était restée meublée d'une foule de textes latins et grecs appris par cœur. C'est là encore entre parenthèses un service que les études littéraires peuvent rendre au biologiste ; elles l'aident à cultiver sa mémoire, et l'on sait combien dans ce genre de sciences, une bonne mémoire, voire une bonne mémoire verbale, est un auxiliaire précieux.
Quoi qu'il en soit, Giard a écrit un intéressant article sur l'Education du morphologiste. Il demande avant tout, bien entendu, que 1l'on développe chez l'enfant l'esprit d'observation ou plutôt qu'on ne l'entrave pas, car il soutient que cet esprit existe naturellement chez la plupart des adolescents, et que les méthodes universitaires actuelles ont pour résultat de le faire avorter et de le détruire. Il critique donc vivement nos nouveaux programmes, et la part, excessive d'après lui, qu'on y fait aux mathématiques, et il ajoute la phrase suivante que je crois devoir citer en entier :
 
« Pendant longtemps, il y avait au moins une compensation à ce triste état de choses. Au sortir des humanités, le jeune homme possédait une certaine connaissance des langues anciennes, et cela, en dehors d'une utilité morale supérieure, n'était pas sans de sérieux avantages pour le futur naturaliste. Habilement conduites, ces études littéraires pouvaient même fournir à l'esprit de l'apprenti morphologiste une excellente préparation pour ses futurs travaux. L'analyse linguistique révèle bientôt, à une intelligence avertie, des lois de structure et d'évolution des formes du langage, tout à fait comparables à celles qu'on peut déduire de l'observation des êtres vivants ».