« Continuation des Amours (1555) » : différence entre les versions

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{{titre||[[Pierre de Ronsard|Pierre de Ronsard]]|1555}}
<p><br>
 
Sonnets en vers héroïques&nbsp;<br>
 
I&nbsp;<br>
<div class=text>
Thiard, chacun disoit à mon commencement&nbsp;<br>
 
Que j'estoi trop obscur au simple populaire:&nbsp;<br>
 
Aujourd'hui, chacun dit que je suis au contraire,&nbsp;<br>
Et que je me dements parlant trop bassement.&nbsp;<br>
==Sonnets en vers héroïques ==
Toi, qui as enduré presqu'un pareil torment,&nbsp;<br>
 
Di moi, je te suppli, di moi que doi-je faire?&nbsp;<br>
===I Thiard, chacun disoit à mon commencement ===
Di moi, si tu le sçais, comme doi-je complaire&nbsp;<br>
<poem>Thiard, chacun disoit à mon commencement
A ce monstre testu, divers en jugement?&nbsp;<br>
Que j'estoi trop obscur au simple populaire:
Quand j'escri haultement, il ne veult pas me lire,&nbsp;<br>
Aujourd'hui, chacun dit que je suis au contraire,
Quand j'escri bassement, il ne fait qu'en médire:&nbsp;<br>
Et que je me dements parlant trop bassement.
De quel estroit lien tiendrai-je, ou de quels clous,&nbsp;<br>
Toi, qui as enduré presqu'un pareil torment,
Ce monstrueux Prothé, qui se change à tous cous?&nbsp;<br>
Di moi, je te suppli, di moi que doi-je faire?
Paix, paix, je t'enten bien: il le faut laisser dire,&nbsp;<br>
EtDi nousmoi, riresi detu luile sçais, comme il se ritdoi-je decomplaire nous.&nbsp;<br>
A ce monstre testu, divers en jugement?
II&nbsp;<br>
Quand j'escri haultement, il ne veult pas me lire,
Jodelle, l'autre jour, l'enfant de Cytherée&nbsp;<br>
Quand j'escri bassement, il ne fait qu'en médire:
Au combat m'apela, courbant son arc Turquois,&nbsp;<br>
De quel estroit lien tiendrai-je, ou de quels clous,
Et lors comme hardi, je vesti le harnois,&nbsp;<br>
Ce monstrueux Prothé, qui se change à tous cous?
Pour avoir contre luy ma peau mieus asseurée.&nbsp;<br>
=Paix, paix, je t'enten bien: il le faut laisser dire,
Il me tira premier une fleche acerée&nbsp;<br>
Et nous rire de lui, comme il se rit de nous.</poem>
Droict au coeur, puis une autre, et puis tout à la fois&nbsp;<br>
 
Il decocha sur moi les traicts de son carquois,&nbsp;<br>
===II Jodelle, l'autre jour, l'enfant de Cytherée ===
Sans qu'il eust d'un seul coup ma poictrine enferrée.&nbsp;<br>
<poem>Jodelle, l'autre jour, l'enfant de Cytherée
Mais quand il vit son arc de fleches desarmé,&nbsp;<br>
Au combat m'apela, courbant son arc Turquois,
Tout dépit s'est lui-mesme en fleche transformé,&nbsp;<br>
Et lors comme hardi, je vesti le harnois,
Puis se rua dans moi d'une puissance extreme:&nbsp;<br>
Pour avoir contre luy ma peau mieus asseurée.
Quand je me vi vaincu, je me désarmé lors:&nbsp;<br>
Il me tira premier une fleche acerée
Car, las! que m'eust servi de m'armer par dehors,&nbsp;<br>
Droict au coeur, puis une autre, et puis tout à la fois
Ayant mon ennemi caché dedans moimesme.&nbsp;<br>
Il decocha sur moi les traicts de son carquois,
III&nbsp;<br>
Sans qu'il eust d'un seul coup ma poictrine enferrée.
Ce pendant que tu vois le superbe rivage&nbsp;<br>
Mais quand il vit son arc de fleches desarmé,
De la riviere Tusque, et le mont Palatin,&nbsp;<br>
Tout dépit s'est lui-mesme en fleche transformé,
Et que l'air des Latins te fait parler latin,&nbsp;<br>
Puis se rua dans moi d'une puissance extreme:
Changeant à l'étranger ton naturel langage,&nbsp;<br>
Quand je me vi vaincu, je me désarmé lors:
Une fille d'Anjou me detient en servage,&nbsp;<br>
Car, las! que m'eust servi de m'armer par dehors,
A laquelle baisant maintenant le tetin,&nbsp;<br>
Ayant mon ennemi caché dedans moimesme.</poem>
Et maintenant les yeux endormis au matin,&nbsp;<br>
 
Je vy (comme lon dit) trop plus heureus que sage.&nbsp;<br>
===III Ce pendant que tu vois le superbe rivage===
Tu diras à Maigni, lisant ces vers ici,&nbsp;<br>
<poem>Ce pendant que tu vois le superbe rivage
Et, quoi! Ronsard est donq encores amoureus?&nbsp;<br>
De la riviere Tusque, et le mont Palatin,
Mon Bellay, je le suis, et le veus estre aussi,&nbsp;<br>
Et que l'air des Latins te fait parler latin,
Et ne veus confesser qu'Amour soit malheureux,&nbsp;<br>
Changeant à l'étranger ton naturel langage,
Ou si c'est un malheur, baste, je delibere&nbsp;<br>
Une fille d'Anjou me detient en servage,
De vivre malheureus en si belle misere.&nbsp;<br>
A laquelle baisant maintenant le tetin,
IV&nbsp;<br>
Et maintenant les yeux endormis au matin,
Peletier mon ami, le tems leger s'enfuit,&nbsp;<br>
Je vy (comme lon dit) trop plus heureus que sage.
Je change nuit et jour de poil et de jeunesse:&nbsp;<br>
Tu diras à Maigni, lisant ces vers ici,
Mais je ne change pas l'amour d'une maistresse,&nbsp;<br>
Et, quoi! Ronsard est donq encores amoureus?
Qui, dans mon cueur colée, eternelle me suit.&nbsp;<br>
Mon Bellay, je le suis, et le veus estre aussi,
Toi qui es des anfance en tout savoir instruit,&nbsp;<br>
Et ne veus confesser qu'Amour soit malheureux,
(Si de nottre amitié l'antique neud te presse)&nbsp;<br>
Ou si c'est un malheur, baste, je delibere
Comme sage et plus vieil, donne moi quelque adresse&nbsp;<br>
De vivre malheureus en si belle misere.</poem>
Pour eviter ce mal qui ma raison detruit.&nbsp;<br>
 
Aide-moi, Peletier, si par philosophie&nbsp;<br>
===IV Peletier mon ami, le tems leger s'enfuit===
Ou par le cours des cieus tu as jamais apris&nbsp;<br>
<poem>Peletier mon ami, le tems leger s'enfuit,
Un remede d'amour, di-le moi je te prie,&nbsp;<br>
Je change nuit et jour de poil et de jeunesse:
Car, bien qu'ores au ciel ton cueur soit elevé,&nbsp;<br>
Mais je ne change pas l'amour d'une maistresse,
Si as-tu quelquefois d'une dame esté pris.&nbsp;<br>
Qui, dans mon cueur colée, eternelle me suit.
Et pour dieu! conte-moi comme tu t'es sauvé.&nbsp;<br>
Toi qui es des anfance en tout savoir instruit,
V&nbsp;<br>
(Si de nottre amitié l'antique neud te presse)
Aurat, apres ta mort, la terre n'est pas digne&nbsp;<br>
Comme sage et plus vieil, donne moi quelque adresse
Pourrir si docte cors, comme est vraiment le tien.&nbsp;<br>
Pour eviter ce mal qui ma raison detruit.
Les Dieux le changeront en quelque vois: ou bien,&nbsp;<br>
Aide-moi, Peletier, si par philosophie
Si Echon ne sufist, le changeront en cigne,&nbsp;<br>
Ou par le cours des cieus tu as jamais apris
Ou, en ce corps qui vit de rosée divine,&nbsp;<br>
Un remede d'amour, di-le moi je te prie,
Ou, en mouche qui fait le miel hymettien,&nbsp;<br>
Car, bien qu'ores au ciel ton cueur soit elevé,
Ou, en l'oiseau qui chante et le crime ancien&nbsp;<br>
Si as-tu quelquefois d'une dame esté pris.
De Terrée au printemps redit sus une épine.&nbsp;<br>
Et pour dieu! conte-moi comme tu t'es sauvé.</poem>
Ou, si tu n'es changé tout entier en quelqu'un,&nbsp;<br>
 
Tu vétiras un cors qui te sera commun&nbsp;<br>
===V Aurat, apres ta mort, la terre n'est pas digne===
Avecques tous ceus-cy, participant ensemble&nbsp;<br>
<poem>Aurat, apres ta mort, la terre n'est pas digne
De tous (car un pour toi sufisant ne me semble)&nbsp;<br>
Pourrir si docte cors, comme est vraiment le tien.
Et d'homme seras fait un beau monstre nouveau&nbsp;<br>
Les Dieux le changeront en quelque vois: ou bien,
De voix, cigne, cigalle, et de mouche, et d'oyseau.&nbsp;<br>
Si Echon ne sufist, le changeront en cigne,
VI&nbsp;<br>
Ou, en ce corps qui vit de rosée divine,
E, n'esse, mon Paquier, é n'esse pas grand cas,&nbsp;<br>
Ou, en mouche qui fait le miel hymettien,
Bien que le corps party de tant de membres j'aye,&nbsp;<br>
Ou, en l'oiseau qui chante et le crime ancien
De muscles, nerfs, tendons, de pommons, et de faye,&nbsp;<br>
De Terrée au printemps redit sus une épine.
De mains, de pieds, de flancs, de jambes et de bras,&nbsp;<br>
Ou, si tu n'es changé tout entier en quelqu'un,
Qu'Amour les laisse en paix, et ne les navre pas,&nbsp;<br>
Tu vétiras un cors qui te sera commun
Et que luy pour son but, opiniatre, essaye&nbsp;<br>
Avecques tous ceus-cy, participant ensemble
De faire dans mon coeur toujours toujours la playe,&nbsp;<br>
De tous (car un pour toi sufisant ne me semble)
Sans que jamais il vise ou plus hault, ou plus bas!&nbsp;<br>
Et d'homme seras fait un beau monstre nouveau
S'il estoit un enfant (comme on dit) aveuglé,&nbsp;<br>
De voix, cigne, cigalle, et de mouche, et d'oyseau.</poem>
Son coup ne seroit point si seur ne si reiglé,&nbsp;<br>
 
Vrayment il ne l'est pas, car ses traits à tout-heure&nbsp;<br>
===VI E, n'esse, mon Paquier, é n'esse pas grand cas===
Ne se viendroient ficher au coeur en mesme lieu.&nbsp;<br>
<poem>E, n'esse, mon Paquier, é n'esse pas grand cas,
Armerai-je le mien? non, car des traits d'un Dieu&nbsp;<br>
Bien que le corps party de tant de membres j'aye,
Il me plaist bien mourir, puis qu'il fault que je meure.&nbsp;<br>
De muscles, nerfs, tendons, de pommons, et de faye,
VII&nbsp;<br>
De mains, de pieds, de flancs, de jambes et de bras,
Marie, qui voudroit vostre beau nom tourner,&nbsp;<br>
Qu'Amour les laisse en paix, et ne les navre pas,
Il trouveroit Aimer: aimez-moi donq, Marie,&nbsp;<br>
Et que luy pour son but, opiniatre, essaye
Faites cela vers moi dont vostre nom vous prie,&nbsp;<br>
De faire dans mon coeur toujours toujours la playe,
Vostre amour ne se peut en meilleur lieu donner:&nbsp;<br>
Sans que jamais il vise ou plus hault, ou plus bas!
S'il vous plaist pour jamais un plaisir demener,&nbsp;<br>
S'il estoit un enfant (comme on dit) aveuglé,
Aimez-moi, nous prendrons les plaisirs de la vie,&nbsp;<br>
Son coup ne seroit point si seur ne si reiglé,
Penduz l'un l'autre au col, et jamais nulle envie&nbsp;<br>
Vrayment il ne l'est pas, car ses traits à tout-heure
D'aimer en autre lieu ne nous pourra mener.&nbsp;<br>
Ne se viendroient ficher au coeur en mesme lieu.
Si faut il bien aimer au monde quelque chose:&nbsp;<br>
Armerai-je le mien? non, car des traits d'un Dieu
Cellui qui n'aime point, cellui-là se propose&nbsp;<br>
Il me plaist bien mourir, puis qu'il fault que je meure. </poem>
Une vie d'un Scyte; et ses jours veut passer&nbsp;<br>
 
Sans gouster la douceur des douceurs la meilleure.&nbsp;<br>
===VII Marie, qui voudroit vostre beau nom tourner===
E, qu'est-il rien de doux sans Venus? las! à l'heure&nbsp;<br>
<poem>Marie, qui voudroit vostre beau nom tourner,
Que je n'aimeray point puissai-je trépasser!&nbsp;<br>
Il trouveroit Aimer: aimez-moi donq, Marie,
VIII&nbsp;<br>
Faites cela vers moi dont vostre nom vous prie,
Marie, vous passez en taille, et en visage,&nbsp;<br>
Vostre amour ne se peut en meilleur lieu donner:
En grace, en ris, en yeus, en sein, et en teton,&nbsp;<br>
S'il vous plaist pour jamais un plaisir demener,
Votre moienne seur, d'autant que le bouton&nbsp;<br>
Aimez-moi, nous prendrons les plaisirs de la vie,
D'un rosier franc surpasse une rose sauvage.&nbsp;<br>
Penduz l'un l'autre au col, et jamais nulle envie
Je ne dy pas pourtant qu'un rosier de bocage&nbsp;<br>
D'aimer en autre lieu ne nous pourra mener.
Ne soit plaisant à l'oeil, et qu'il ne sente bon:&nbsp;<br>
Si faut il bien aimer au monde quelque chose:
Aussi je ne dy pas que vostre seur Thoinon&nbsp;<br>
Cellui qui n'aime point, cellui-là se propose
Ne soit belle, mais quoy? vous l'estes davantage.&nbsp;<br>
Une vie d'un Scyte; et ses jours veut passer
Je scay bien qu'apres vous elle a le premier pris&nbsp;<br>
Sans gouster la douceur des douceurs la meilleure.
De ce bourg, en beauté, et qu'on seroit espris&nbsp;<br>
E, qu'est-il rien de doux sans Venus? las! à l'heure
D'elle facilement, si vous estiez absente:&nbsp;<br>
Que je n'aimeray point puissai-je trépasser!</poem>
Mais quand vous aprochez, lors sa beauté s'enfuit,&nbsp;<br>
 
Ou morne elle devient par la vostre presente,&nbsp;<br>
===VIII Marie, vous passez en taille, et en visage===
Comme les astres font quand la Lune reluit.&nbsp;<br>
<poem>Marie, vous passez en taille, et en visage,
IX&nbsp;<br>
En grace, en ris, en yeus, en sein, et en teton,
Marie, à tous les coups vous me venez reprendre&nbsp;<br>
Votre moienne seur, d'autant que le bouton
Que je suis trop leger, et me dites tousjours.&nbsp;<br>
D'un rosier franc surpasse une rose sauvage.
Quand je vous veus baiser que j'aille à ma Cassandre,&nbsp;<br>
Je ne dy pas pourtant qu'un rosier de bocage
Et tousjours m'apellez inconstant en amours.&nbsp;<br>
Ne soit plaisant à l'oeil, et qu'il ne sente bon:
Je le veus estre aussi, les hommes sont bien lours&nbsp;<br>
Aussi je ne dy pas que vostre seur Thoinon
Qui n'osent en cent lieux neuve amour entreprendre.&nbsp;<br>
Ne soit belle, mais quoy? vous l'estes davantage.
Cétui-là qui ne veut qu'à une seule entendre,&nbsp;<br>
Je scay bien qu'apres vous elle a le premier pris
N'est pas digne qu'Amour lui face de bons tours.&nbsp;<br>
De ce bourg, en beauté, et qu'on seroit espris
Celui qui n'ose faire une amitié nouvelle,&nbsp;<br>
D'elle facilement, si vous estiez absente:
A faute de courage, ou faute de cervelle,&nbsp;<br>
Mais quand vous aprochez, lors sa beauté s'enfuit,
Se defiant de soi, qui ne peut avoir mieus.&nbsp;<br>
Ou morne elle devient par la vostre presente,
Les hommes maladis, ou mattés de vieillesse,&nbsp;<br>
Comme les astres font quand la Lune reluit. </poem>
Doivent estre constans: mais sotte est la jeunesse&nbsp;<br>
 
Qui n'est point eveillée, et qui n'aime en cent lieus.&nbsp;<br>
===IX Marie, à tous les coups vous me venez reprendre ===
X&nbsp;<br>
<poem>Marie, à tous les coups vous me venez reprendre
Marie, vous avés la joue aussi vermeille&nbsp;<br>
Que je suis trop leger, et me dites tousjours.
Qu'une rose de Mai, vous avés les cheveus&nbsp;<br>
Quand je vous veus baiser que j'aille à ma Cassandre,
De couleur de chastaigne, entrefrisés de neus,&nbsp;<br>
Et tousjours m'apellez inconstant en amours.
Gentement tortillés tout-au-tour de l'oreille.&nbsp;<br>
Je le veus estre aussi, les hommes sont bien lours
Quand vous estiés petite, une mignarde abeille&nbsp;<br>
Qui n'osent en cent lieux neuve amour entreprendre.
Dans vos levres forma son dous miel savoureus,&nbsp;<br>
Cétui-là qui ne veut qu'à une seule entendre,
Amour laissa ses traits dans vos yeus rigoreus,&nbsp;<br>
N'est pas digne qu'Amour lui face de bons tours.
Pithon vous feit la vois à nulle autre pareille.&nbsp;<br>
Celui qui n'ose faire une amitié nouvelle,
Vous avés les tetins comme deus mons de lait,&nbsp;<br>
A faute de courage, ou faute de cervelle,
Caillé bien blanchement sus du jonc nouvelet&nbsp;<br>
Se defiant de soi, qui ne peut avoir mieus.
Qu'une jeune pucelle au mois de Juin façonne:&nbsp;<br>
Les hommes maladis, ou mattés de vieillesse,
De Junon sont vos bras, des Graces vostre sein,&nbsp;<br>
Doivent estre constans: mais sotte est la jeunesse
Vous avés de l'Aurore et le front, et la main,&nbsp;<br>
Qui n'est point eveillée, et qui n'aime en cent lieus.</poem>
Mais vous avés le coeur d'une fiere lionne.&nbsp;<br>
 
XI&nbsp;<br>
===X Marie, vous avés la joue aussi vermeille ===
Je ne suis seulement amoureus de Marie,&nbsp;<br>
<poem>Marie, vous avés la joue aussi vermeille
Janne me tient aussy dans les liens d'Amour,&nbsp;<br>
Qu'une rose de Mai, vous avés les cheveus
Ore l'une me plaist, ore l'autre à son tour:&nbsp;<br>
De couleur de chastaigne, entrefrisés de neus,
Ainsi Tibulle aimoit Nemesis, et Delie.&nbsp;<br>
Gentement tortillés tout-au-tour de l'oreille.
On me dira tantost que c'est une folie&nbsp;<br>
Quand vous estiés petite, une mignarde abeille
D'en aimer, inconstant, deux ou trois en un jour,&nbsp;<br>
Dans vos levres forma son dous miel savoureus,
Voire, et qu'il faudroit bien un homme de sejour,&nbsp;<br>
Amour laissa ses traits dans vos yeus rigoreus,
Pour, gaillard, satisfaire à une seule amie.&nbsp;<br>
Pithon vous feit la vois à nulle autre pareille.
Je repons à cela, que je suis amoureus,&nbsp;<br>
Vous avés les tetins comme deus mons de lait,
Et non pas jouissant de ce bien doucereus,&nbsp;<br>
Caillé bien blanchement sus du jonc nouvelet
Que tout amant souhaite avoir à sa commande.&nbsp;<br>
Qu'une jeune pucelle au mois de Juin façonne:
Quant à moi, seulement je leur baise la main,&nbsp;<br>
JeDe devise,Junon jesont ryvos bras, jedes leurGraces taste levostre sein,&nbsp;<br>
Vous avés de l'Aurore et le front, et la main,
Et rien que ces biens là d'elles je ne demande.&nbsp;<br>
Mais vous avés le coeur d'une fiere lionne.</poem>
XII&nbsp;<br>
 
Amour estant marri qu'il avoit ses saigettes&nbsp;<br>
===XI Je ne suis seulement amoureus de Marie===
Tiré contre Marie, et ne l'avoit blessée,&nbsp;<br>
<poem>Je ne suis seulement amoureus de Marie,
Par depit dans un bois sa trousse avoit laissée,&nbsp;<br>
Janne me tient aussy dans les liens d'Amour,
Tant que plene elle fust d'un bel essaim d'avettes.&nbsp;<br>
Ore l'une me plaist, ore l'autre à son tour:
Ja de leurs piquerons ces captives mouchettes&nbsp;<br>
Ainsi Tibulle aimoit Nemesis, et Delie.
Pour avoir liberté la trousse avoient persée:&nbsp;<br>
On me dira tantost que c'est une folie
Et s'enfuyoient alors qu'Amour l'a renversée&nbsp;<br>
D'en aimer, inconstant, deux ou trois en un jour,
Sur la face à Marie, et sus ses mammelettes.&nbsp;<br>
Voire, et qu'il faudroit bien un homme de sejour,
Soudain, apres qu'il eut son carquois dechargé,&nbsp;<br>
Pour, gaillard, satisfaire à une seule amie.
Tout riant sautela, pensant estre vangé&nbsp;<br>
Je repons à cela, que je suis amoureus,
De celle, à qui son arc n'avoit sceu faire outrage,&nbsp;<br>
Et non pas jouissant de ce bien doucereus,
Mais il rioit en vain: car ces filles du ciel&nbsp;<br>
Que tout amant souhaite avoir à sa commande.
En lieu de la piquer, baisans son beau visage,&nbsp;<br>
Quant à moi, seulement je leur baise la main,
En amassoyent les fleurs, et en faisoyent du miel.&nbsp;<br>
Je devise, je ry, je leur taste le sein,
XIII&nbsp;<br>
Et rien que ces biens là d'elles je ne demande.</poem>
Je veuls, me souvenant de ma gentille amie,&nbsp;<br>
 
Boire ce soir d'autant: et pource Corydon&nbsp;<br>
===XII Amour estant marri qu'il avoit ses saigettes===
Fay remplir mes flacons, et verse à l'abandon&nbsp;<br>
<poem>Amour estant marri qu'il avoit ses saigettes
Du vin, pour resjouir toute la compagnie.&nbsp;<br>
Tiré contre Marie, et ne l'avoit blessée,
Soit que m'amie ait nom, ou Cassandre, ou Marie,&nbsp;<br>
Par depit dans un bois sa trousse avoit laissée,
Je m'en vois boire autant que de lettre a son nom.&nbsp;<br>
Tant que plene elle fust d'un bel essaim d'avettes.
Et toi, si de ta belle et jeune Madelon,&nbsp;<br>
Ja de leurs piquerons ces captives mouchettes
Belleau, l'amour te point, je te pry ne l'oublie.&nbsp;<br>
Pour avoir liberté la trousse avoient persée:
Qu'on m'ombrage le chef de vigne, et de l'hierre,&nbsp;<br>
Et s'enfuyoient alors qu'Amour l'a renversée
Les bras, et tout le col, qu'on enfleure la terre&nbsp;<br>
Sur la face à Marie, et sus ses mammelettes.
De roses, et de lis, et que dessus le jonc&nbsp;<br>
Soudain, apres qu'il eut son carquois dechargé,
On me caille du lait rougi de mainte fraise:&nbsp;<br>
Tout riant sautela, pensant estre vangé
E n'esse pas bien fait? or sus, commençon donq,&nbsp;<br>
De celle, à qui son arc n'avoit sceu faire outrage,
Et chasson loin de nous tout soing et tout malaise.&nbsp;<br>
Mais il rioit en vain: car ces filles du ciel
XIV&nbsp;<br>
En lieu de la piquer, baisans son beau visage,
Que me servent mes vers, et les sons de ma lyre,&nbsp;<br>
En amassoyent les fleurs, et en faisoyent du miel.</poem>
Quand nuit et jour je change et de meurs et de peau,&nbsp;<br>
 
Pour en aimer trop une? hé, que l'homme est bien veau&nbsp;<br>
===XIII Je veuls, me souvenant de ma gentille amie===
Qui aux dames se fie, et pour elles souspire!&nbsp;<br>
<poem>Je veuls, me souvenant de ma gentille amie,
Je pleure, je me deux, je cry, je me martire,&nbsp;<br>
Boire ce soir d'autant: et pource Corydon
Je fais mile sonnetz, je me romps le cerveau,&nbsp;<br>
Fay remplir mes flacons, et verse à l'abandon
Et si je suy haï: un amoureus nouveau&nbsp;<br>
Du vin, pour resjouir toute la compagnie.
Gaigne tousjours ma place, et je ne l'ose dire.&nbsp;<br>
Soit que m'amie ait nom, ou Cassandre, ou Marie,
Ah! que ma Dame est fine: el' me tient à mépris,&nbsp;<br>
Je m'en vois boire autant que de lettre a son nom.
Pource qu'elle voit bien que d'elle suis espris;&nbsp;<br>
Et toi, si de ta belle et jeune Madelon,
Et que je l'aime trop: avant que je l'aimasse,&nbsp;<br>
Belleau, l'amour te point, je te pry ne l'oublie.
Elle n'aimoit que moi: mais or que j'ai empris&nbsp;<br>
Qu'on m'ombrage le chef de vigne, et de l'hierre,
De l'aimer, el' me laisse, et s'en court à la chasse&nbsp;<br>
Les bras, et tout le col, qu'on enfleure la terre
Pour en reprendre un autre ainsi qu'elle m'a pris.&nbsp;<br>
De roses, et de lis, et que dessus le jonc
XV&nbsp;<br>
On me caille du lait rougi de mainte fraise:
Ma plume sinon vous ne scait autre suget,&nbsp;<br>
E n'esse pas bien fait? or sus, commençon donq,
Mon pié sinon vers vous ne scait autre voiage,&nbsp;<br>
Et chasson loin de nous tout soing et tout malaise.</poem>
Ma langue sinon vous ne scait autre langaige,&nbsp;<br>
 
Et mon oeil sinon vous ne connoit autre objet.&nbsp;<br>
===XIV Que me servent mes vers, et les sons de ma lyre===
Si je souhaite rien, vous estes mon souhait,&nbsp;<br>
<poem>Que me servent mes vers, et les sons de ma lyre,
Vous estes le doux gaing de mon plaisant dommage,&nbsp;<br>
Quand nuit et jour je change et de meurs et de peau,
Vous estes le seul but ou vise mon courage,&nbsp;<br>
Pour en aimer trop une? hé, que l'homme est bien veau
Et seulement en vous tout mon rond se parfait.&nbsp;<br>
Qui aux dames se fie, et pour elles souspire!
Je ne suis point de ceus qui changent de fortune,&nbsp;<br>
Je pleure, je me deux, je cry, je me martire,
Comme un tas d'amoureus, aimans aujourd'huy l'une,&nbsp;<br>
Je fais mile sonnetz, je me romps le cerveau,
Et le lendemain l'autre: helas! j'ayme trop mieus&nbsp;<br>
Et si je suy haï: un amoureus nouveau
Cent fois que je ne dy, et plustost que de faire&nbsp;<br>
Gaigne tousjours ma place, et je ne l'ose dire.
Chose qui peut en rien nostre amytié defaire,&nbsp;<br>
Ah! que ma Dame est fine: el' me tient à mépris,
J'aimerois mieux mourir, tant j'aime vos beaux yeus.&nbsp;<br>
Pource qu'elle voit bien que d'elle suis espris;
XVI&nbsp;<br>
Et que je l'aime trop: avant que je l'aimasse,
Vous ne le voulez pas? et bien, j'en suis contant,&nbsp;<br>
Elle n'aimoit que moi: mais or que j'ai empris
Contre vostre rigueur Dieu me doint patience,&nbsp;<br>
De l'aimer, el' me laisse, et s'en court à la chasse
Devant qu'il soit vingt ans j'en auray la vengence,&nbsp;<br>
Pour en reprendre un autre ainsi qu'elle m'a pris.</poem>
Voiant ternir vos yeus qui me travaillent tant.&nbsp;<br>
 
On ne voit amoureus au monde si constant&nbsp;<br>
===XV Ma plume sinon vous ne scait autre suget===
Qui ne perdist le coeur, perdant sa recompense:&nbsp;<br>
<poem>Ma plume sinon vous ne scait autre suget,
Quant à moi, si ne fust la longue experience,&nbsp;<br>
Mon pié sinon vers vous ne scait autre voiage,
Que j'ay, de soufrir mal, je mourrois à l'instant.&nbsp;<br>
Ma langue sinon vous ne scait autre langaige,
Toutesfois quand je pense un peu dans mon courage&nbsp;<br>
Et mon oeil sinon vous ne connoit autre objet.
Que je ne suis tout seul des femmes abusé,&nbsp;<br>
Si je souhaite rien, vous estes mon souhait,
Et que de plus rusés en ont reçeu dommage,&nbsp;<br>
Vous estes le doux gaing de mon plaisant dommage,
Je pardonne à moimesme, et m'ay pour excusé:&nbsp;<br>
Vous estes le seul but ou vise mon courage,
Car vous qui me trompés en estes coutumiere,&nbsp;<br>
Et seulement en vous tout mon rond se parfait.
Et qui pis est, sur toute en beauté la premiere.&nbsp;<br>
Je ne suis point de ceus qui changent de fortune,
XVII&nbsp;<br>
Comme un tas d'amoureus, aimans aujourd'huy l'une,
Le vintiéme d'Avril couché sur l'herbelette,&nbsp;<br>
Et le lendemain l'autre: helas! j'ayme trop mieus
Je vy, ce me sembloit, en dormant un chevreuil,&nbsp;<br>
Cent fois que je ne dy, et plustost que de faire
Qui çà, puis là, marchoit où le menoit son vueil,&nbsp;<br>
Chose qui peut en rien nostre amytié defaire,
Foulant les belles fleurs de mainte gambelette.&nbsp;<br>
J'aimerois mieux mourir, tant j'aime vos beaux yeus.</poem>
Une corne et une autre encore nouvelette&nbsp;<br>
 
Enfloit son petit front, petit, mais plein d'orgueil:&nbsp;<br>
===XVI Vous ne le voulez pas? et bien, j'en suis contant===
Comme un Soleil luisoit par les prets son bel oeil,&nbsp;<br>
<poem>Vous ne le voulez pas? et bien, j'en suis contant,
Et un carquan pendoit sus sa gorge douillette.&nbsp;<br>
Contre vostre rigueur Dieu me doint patience,
Si tost que je le vy, je voulu courre aprés,&nbsp;<br>
Devant qu'il soit vingt ans j'en auray la vengence,
Et lui qui m'avisa print sa course es forés,&nbsp;<br>
Voiant ternir vos yeus qui me travaillent tant.
Où, se moquant de moi, ne me voulut attendre.&nbsp;<br>
On ne voit amoureus au monde si constant
Mais en suivant son trac, je ne m'avisay pas&nbsp;<br>
Qui ne perdist le coeur, perdant sa recompense:
D'un piege entre les fleurs, qui me lia mes pas,&nbsp;<br>
Quant à moi, si ne fust la longue experience,
Et voulant prendre autrui moimesme me fis prendre.&nbsp;<br>
Que j'ay, de soufrir mal, je mourrois à l'instant.
XVIII&nbsp;<br>
Toutesfois quand je pense un peu dans mon courage
Bien que vous surpassiés en grace et en richesse&nbsp;<br>
Que je ne suis tout seul des femmes abusé,
Celles de ce païs, et de toute autre part,&nbsp;<br>
Et que de plus rusés en ont reçeu dommage,
Vous ne devés pourtant, et fussiés vous princesse,&nbsp;<br>
Je pardonne à moimesme, et m'ay pour excusé:
Jamais vous repentir d'avoir aimé Ronsard.&nbsp;<br>
Car vous qui me trompés en estes coutumiere,
C'est lui, Dame, qui peut avecque son bel art&nbsp;<br>
Et qui pis est, sur toute en beauté la premiere.</poem>
Vous afranchir des ans, et vous faire Deesse:&nbsp;<br>
 
Prométre il peut cela, car rien de lui ne part&nbsp;<br>
===XVII Le vintiéme d'Avril couché sur l'herbelette===
Qu'il ne soit immortel, et le ciel le confesse.&nbsp;<br>
<poem>Le vintiéme d'Avril couché sur l'herbelette,
Vous me responderés qu'il est un peu sourdaut,&nbsp;<br>
Je vy, ce me sembloit, en dormant un chevreuil,
Et que c'est deplaisir en amour parler haut:&nbsp;<br>
Qui çà, puis là, marchoit où le menoit son vueil,
Vous dites verité, mais vous celés aprés,&nbsp;<br>
Foulant les belles fleurs de mainte gambelette.
Que luy, pour vous ouir, s'aproche à vôtre oreille,&nbsp;<br>
Une corne et une autre encore nouvelette
Et qu'il baise à tous coups vôtre bouche vermeille&nbsp;<br>
Enfloit son petit front, petit, mais plein d'orgueil:
Au milieu des propos, d'autant qu'il en est prés.&nbsp;<br>
Comme un Soleil luisoit par les prets son bel oeil,
XIX&nbsp;<br>
Et un carquan pendoit sus sa gorge douillette.
Mais respons, meschant Loir, me rens-tu ce loier,&nbsp;<br>
Si tost que je le vy, je voulu courre aprés,
Pour avoir tant chanté ta gloire et ta louange?&nbsp;<br>
Et lui qui m'avisa print sa course es forés,
As-tu osé, barbare, au milieu de ta fange&nbsp;<br>
Où, se moquant de moi, ne me voulut attendre.
Renversant mon bateau, sous tes eaus m'envoier?&nbsp;<br>
Mais en suivant son trac, je ne m'avisay pas
Si ma plume eut daigné seulement emploier&nbsp;<br>
D'un piege entre les fleurs, qui me lia mes pas,
Six vers, à celebrer quelque autre fleuve estrange,&nbsp;<br>
Et voulant prendre autrui moimesme me fis prendre.</poem>
Quiconque soit celui, fusse le Nil, ou Gange,&nbsp;<br>
 
Comme toi n'eust voulu dans ses eaus me noier:&nbsp;<br>
===XVIII Bien que vous surpassiés en grace et en richesse ===
D'autant que je t'aimoi, je me fiois en toi,&nbsp;<br>
<poem>Bien que vous surpassiés en grace et en richesse
Mais tu m'as bien montré que l'eau n'a point de foi:&nbsp;<br>
Celles de ce païs, et de toute autre part,
N'es-tu pas bien meschant? pour rendre plus famé&nbsp;<br>
Vous ne devés pourtant, et fussiés vous princesse,
Ton cours, à tout jamais du los qui de moi part,&nbsp;<br>
Jamais vous repentir d'avoir aimé Ronsard.
Tu m'as voulu noier, afin d'estre nommé,&nbsp;<br>
C'est lui, Dame, qui peut avecque son bel art
En lieu du Loir, le fleuve où se noya Ronsard.&nbsp;<br>
Vous afranchir des ans, et vous faire Deesse:
XX&nbsp;<br>
Prométre il peut cela, car rien de lui ne part
Amour, tu me fis voir, pour trois grandes merveilles,&nbsp;<br>
Qu'il ne soit immortel, et le ciel le confesse.
Trois seurs, allant au soer, se pourmener sur l'eau,&nbsp;<br>
Vous me responderés qu'il est un peu sourdaut,
Qui croissoient à l'envy, ainsi qu'au renouveau&nbsp;<br>
Et que c'est deplaisir en amour parler haut:
Croissent dans un pommier trois pommettes pareilles.&nbsp;<br>
Vous dites verité, mais vous celés aprés,
Toutes les trois estoient en beauté nompareilles,&nbsp;<br>
Que luy, pour vous ouir, s'aproche à vôtre oreille,
Mais la plus jeune avoit le visage plus beau&nbsp;<br>
Et qu'il baise à tous coups vôtre bouche vermeille
Et sembloit une fleur voisine d'un ruysseau&nbsp;<br>
Au milieu des propos, d'autant qu'il en est prés.</poem>
Qui remire dans l'eau ses richesses vermeilles.&nbsp;<br>
 
Ores je souhaitois la plus vieille en mes voeus,&nbsp;<br>
===XIX Mais respons, meschant Loir, me rens-tu ce loier===
Et ores la moienne, et ores toutes deux,&nbsp;<br>
<poem>Mais respons, meschant Loir, me rens-tu ce loier,
Mais tousjours la petite estoit en ma pensée,&nbsp;<br>
Pour avoir tant chanté ta gloire et ta louange?
Et priois le Soleil de n'enmener le jour:&nbsp;<br>
As-tu osé, barbare, au milieu de ta fange
Car ma veüe en trois ans n'eust pas esté lassée&nbsp;<br>
Renversant mon bateau, sous tes eaus m'envoier?
De voir ces trois Soleilz qui m'enflamoient d'amour.&nbsp;<br>
Si ma plume eut daigné seulement emploier
XXI&nbsp;<br>
Six vers, à celebrer quelque autre fleuve estrange,
Mon ami puisse aimer une femme de ville,&nbsp;<br>
Quiconque soit celui, fusse le Nil, ou Gange,
Belle, courtoise, honeste, et de doux entretien:&nbsp;<br>
Comme toi n'eust voulu dans ses eaus me noier:
Mon haineux puisse aimer au village une fille,&nbsp;<br>
D'autant que je t'aimoi, je me fiois en toi,
Qui soit badine, sote, et qui ne sache rien.&nbsp;<br>
Mais tu m'as bien montré que l'eau n'a point de foi:
Tout ainsi qu'en amour le plus excellent bien&nbsp;<br>
N'es-tu pas bien meschant? pour rendre plus famé
Est d'aimer une femme, et savante; et gentille,&nbsp;<br>
Ton cours, à tout jamais du los qui de moi part,
Aussi le plus grand mal à ceuls qui aiment bien&nbsp;<br>
Tu m'as voulu noier, afin d'estre nommé,
C'est d'aimer une femme indocte, et mal-habille.&nbsp;<br>
En lieu du Loir, le fleuve où se noya Ronsard.</poem>
Une gentille Dame entendra de nature&nbsp;<br>
 
Quel plaisir c'est d'aimer, l'autre n'en aura cure,&nbsp;<br>
===XX Amour, tu me fis voir, pour trois grandes merveilles===
Se peignant un honneur dedans son esprit sot:&nbsp;<br>
<poem>Amour, tu me fis voir, pour trois grandes merveilles,
Vous l'aurez beau préscher, et dire qu'elle est belle,&nbsp;<br>
Trois seurs, allant au soer, se pourmener sur l'eau,
Sans s'esmouvoir de rien, vous entendra pres d'elle&nbsp;<br>
Qui croissoient à l'envy, ainsi qu'au renouveau
Parler un jour entier, et ne respondra mot.&nbsp;<br>
Croissent dans un pommier trois pommettes pareilles.
XXII&nbsp;<br>
Toutes les trois estoient en beauté nompareilles,
Je crois que je mouroi' si ce n'estoit la Muse&nbsp;<br>
Mais la plus jeune avoit le visage plus beau
Qui deçà et delà fidelle m'acompaigne&nbsp;<br>
Et sembloit une fleur voisine d'un ruysseau
Sans se lasser, par chams, par bois, et par montaigne,&nbsp;<br>
Qui remire dans l'eau ses richesses vermeilles.
Et de ses beaus presens tous mes soucis abuse:&nbsp;<br>
Ores je souhaitois la plus vieille en mes voeus,
Si je suis ennuyé je n'ay point d'autre ruse&nbsp;<br>
Et ores la moienne, et ores toutes deux,
Pour me desennuyer que Clion ma compaigne;&nbsp;<br>
Mais tousjours la petite estoit en ma pensée,
Si tost que je l'apelle, elle ne me dedaigne,&nbsp;<br>
Et priois le Soleil de n'enmener le jour:
Et de me venir voir jamais el'ne s'excuse:&nbsp;<br>
Car ma veüe en trois ans n'eust pas esté lassée
Des presens des neuf Seurs soit en toute saison&nbsp;<br>
De voir ces trois Soleilz qui m'enflamoient d'amour.</poem>
Pleine toute ma chambre, et pleine ma maison,&nbsp;<br>
 
Car la rouille jamais à leurs beaus dons ne touche.&nbsp;<br>
===XXI Mon ami puisse aimer une femme de ville===
Le tin ne fleurit pas aus abeilles si dous&nbsp;<br>
<poem>Mon ami puisse aimer une femme de ville,
Comme leurs beaus presens me sont doux à la bouche,&nbsp;<br>
Belle, courtoise, honeste, et de doux entretien:
Desquels les bons esprits ne furent jamais saouls.&nbsp;<br>
Mon haineux puisse aimer au village une fille,
XXIII&nbsp;<br>
Qui soit badine, sote, et qui ne sache rien.
Mignongne, levés-vous, vous estes paresseuse,&nbsp;<br>
Tout ainsi qu'en amour le plus excellent bien
Ja la gaye alouette au ciel a fredonné,&nbsp;<br>
Est d'aimer une femme, et savante; et gentille,
Et ja, le rossignol frisquement jargonné,&nbsp;<br>
Aussi le plus grand mal à ceuls qui aiment bien
Dessus l'espine assis, sa complainte amoureuse.&nbsp;<br>
C'est d'aimer une femme indocte, et mal-habille.
Debout donq, allon voir l'herbelette perleuse,&nbsp;<br>
Une gentille Dame entendra de nature
Et vostre beau rosier de boutons couronné,&nbsp;<br>
Quel plaisir c'est d'aimer, l'autre n'en aura cure,
Et voz oeillets aimés, ausquels avés donné&nbsp;<br>
Se peignant un honneur dedans son esprit sot:
Hyer au soir de l'eau, d'une main si songneuse.&nbsp;<br>
Vous l'aurez beau préscher, et dire qu'elle est belle,
Hyer en vous couchant, vous me fistes promesse&nbsp;<br>
Sans s'esmouvoir de rien, vous entendra pres d'elle
D'estre plus-tost que moi ce matin eveillée,&nbsp;<br>
Parler un jour entier, et ne respondra mot.</poem>
Mais le someil vous tient encor toute sillée:&nbsp;<br>
 
Ian, je vous punirai du peché de paresse,&nbsp;<br>
===XXII Je crois que je mouroi' si ce n'estoit la Muse ===
Je vois baiser cent fois vostre oeil, vostre tetin,&nbsp;<br>
<poem>Je crois que je mouroi' si ce n'estoit la Muse
Afin de vous aprendre à vous lever matin.&nbsp;<br>
Qui deçà et delà fidelle m'acompaigne
XXIV&nbsp;<br>
Sans se lasser, par chams, par bois, et par montaigne,
Bayf, il semble à voir tes rymes langoreuses,&nbsp;<br>
Et de ses beaus presens tous mes soucis abuse:
Que tu sois seul amant, en France, langoreus,&nbsp;<br>
EtSi queje tessuis compaignonsennuyé neje sontn'ay point amoureus,&nbsp;<br>d'autre ruse
Pour me desennuyer que Clion ma compaigne;
Mais font languir leurs vers desous feintes pleureuses;&nbsp;<br>
Si tost que je l'apelle, elle ne me dedaigne,
Tu te trompes, Bayf; les peines doloreuses&nbsp;<br>
Et de me venir voir jamais el'ne s'excuse:
D'amour autant que toi nous rendent doloreus,&nbsp;<br>
Des presens des neuf Seurs soit en toute saison
Sans nous feindre un tourment: mais tu es plus heureus&nbsp;<br>
Pleine toute ma chambre, et pleine ma maison,
Que nous, à raconter tes peines amoureuses.&nbsp;<br>
Car la rouille jamais à leurs beaus dons ne touche.
Quant à moi, si j'estois ta Francine chantée,&nbsp;<br>
Le tin ne fleurit pas aus abeilles si dous
Je ne serois jamais de ton vers enchantée,&nbsp;<br>
Comme leurs beaus presens me sont doux à la bouche,
Qui se faignant un dueil se fait palir lui-mesme.&nbsp;<br>
Desquels les bons esprits ne furent jamais saouls.</poem>
Non, celui n'aime point, ou bien il aime peu,&nbsp;<br>
 
Qui peut donner par signe à cognoistre son feu,&nbsp;<br>
===XXIII Mignongne, levés-vous, vous estes paresseuse===
Et qui peut raconter le quart de ce qu'il aime.&nbsp;<br>
<poem>Mignongne, levés-vous, vous estes paresseuse,
XXV&nbsp;<br>
Ja la gaye alouette au ciel a fredonné,
Je ne suis variable, et si ne veus apprendre&nbsp;<br>
Et ja, le rossignol frisquement jargonné,
(Desja grison) à l'estre, aussi ce n'est qu'émoi:&nbsp;<br>
Dessus l'espine assis, sa complainte amoureuse.
Je ne dy pas si Jane estoit prise de moi;&nbsp;<br>
Debout donq, allon voir l'herbelette perleuse,
Que tost je n'oubliasse et Marie et Cassandre.&nbsp;<br>
Et vostre beau rosier de boutons couronné,
Je ne suis pas celui qui veus Paris reprendre&nbsp;<br>
Et voz oeillets aimés, ausquels avés donné
D'avoir manqué si tost à Pegasis de foy:&nbsp;<br>
Hyer au soir de l'eau, d'une main si songneuse.
Plutost que d'accuser ce jeune enfant de Roy&nbsp;<br>
Hyer en vous couchant, vous me fistes promesse
D'estre en amour leger, je voudrois le defendre.&nbsp;<br>
D'estre plus-tost que moi ce matin eveillée,
Il fist bien, il fist bien, de ravir cette Helene,&nbsp;<br>
Mais le someil vous tient encor toute sillée:
Cette Helene qui fut de beauté si tres-plene,&nbsp;<br>
Ian, je vous punirai du peché de paresse,
Que du grand Jupiter on la disoit anfant:&nbsp;<br>
Je vois baiser cent fois vostre oeil, vostre tetin,
L'amant est bien guidé d'une heure malheureuse,&nbsp;<br>
Afin de vous aprendre à vous lever matin.</poem>
Quand il trouve son mieus, si son mieus il ne prent,&nbsp;<br>
 
Sans languir tant es bras d'une vieille amoureuse.&nbsp;<br>
===XXIV Bayf, il semble à voir tes rymes langoreuses===
XXVI&nbsp;<br>
<poem>Bayf, il semble à voir tes rymes langoreuses,
C'est grand cas que d'aimer! Si je suis une année&nbsp;<br>
Que tu sois seul amant, en France, langoreus,
Avecque ma maitresse à deviser toujours,&nbsp;<br>
Et àque luites racontercompaignons quellesne sont mespoint amoursamoureus,&nbsp;<br>
Mais font languir leurs vers desous feintes pleureuses;
L'an me semble plus court qu'une seule journée.&nbsp;<br>
Tu te trompes, Bayf; les peines doloreuses
S'une autre parle à moi, j'en ay l'ame gennée:&nbsp;<br>
D'amour autant que toi nous rendent doloreus,
Ou je ne luy di mot, ou mes propos sont lours,&nbsp;<br>
Sans nous feindre un tourment: mais tu es plus heureus
Au milieu du devis s'egarent mes discours,&nbsp;<br>
Que nous, à raconter tes peines amoureuses.
Et tout ainsi que moi ma langue est estonnée.&nbsp;<br>
Quant à moi, si j'estois ta Francine chantée,
Mais quand je suis aupres de celle qui me tient&nbsp;<br>
Je ne serois jamais de ton vers enchantée,
Le coeur dedans ses yeus, sans me forcer me vient&nbsp;<br>
Qui se faignant un dueil se fait palir lui-mesme.
Un propos dessus l'autre, et jamais je ne cesse&nbsp;<br>
Non, celui n'aime point, ou bien il aime peu,
De baiser, de taster, de rire, et de parler:&nbsp;<br>
Qui peut donner par signe à cognoistre son feu,
Car pour estre cent ans aupres de ma maitresse&nbsp;<br>
Et qui peut raconter le quart de ce qu'il aime.</poem>
Cent ans me sont trop cours, et ne m'en puis aller.&nbsp;<br>
 
XXVII&nbsp;<br>
===XXV Je ne suis variable, et si ne veus apprendre ===
E, que me sert, Paschal, ceste belle verdure&nbsp;<br>
<poem>Je ne suis variable, et si ne veus apprendre
Qui rit parmi les prés, et d'ouir les oiseaus,&nbsp;<br>
(Desja grison) à l'estre, aussi ce n'est qu'émoi:
D'ouir par le pendant des colines les eaus,&nbsp;<br>
Je ne dy pas si Jane estoit prise de moi;
Et des vents du printems le gracieus murmure,&nbsp;<br>
Que tost je n'oubliasse et Marie et Cassandre.
Quand celle qui me blesse, et de mon mal n'a cure&nbsp;<br>
Je ne suis pas celui qui veus Paris reprendre
Est absente de moi, et pour croistre mes maus&nbsp;<br>
D'avoir manqué si tost à Pegasis de foy:
Me cache la clarté de ses astres jumeaus,&nbsp;<br>
Plutost que d'accuser ce jeune enfant de Roy
De ses yeus, dont mon coeur prenoit sa nourriture?&nbsp;<br>
D'estre en amour leger, je voudrois le defendre.
J'aimeroi beaucoup mieus qu'il fust hyver tousjours,&nbsp;<br>
Il fist bien, il fist bien, de ravir cette Helene,
Car l'hyver n'est si propre à nourir les amours&nbsp;<br>
Cette Helene qui fut de beauté si tres-plene,
Comme est le renouveau, qui d'aimer me convie,&nbsp;<br>
Que du grand Jupiter on la disoit anfant:
Ainçois de me hayr, puis que je n'ay pouvoir&nbsp;<br>
L'amant est bien guidé d'une heure malheureuse,
En ce beau mois d'Avril entre mes bras d'avoir&nbsp;<br>
Quand il trouve son mieus, si son mieus il ne prent,
Celle qui dans ses yeus tient ma mort et ma vie.&nbsp;<br>
Sans languir tant es bras d'une vieille amoureuse.</poem>
<br>
 
Sonetz en vers de dix à onze syllabes&nbsp;<br>
===XXVI C'est grand cas que d'aimer! Si je suis une année ===
XXVIII&nbsp;<br>
<poem>C'est grand cas que d'aimer! Si je suis une année
Je ne saurois aimer autre que vous,&nbsp;<br>
Avecque ma maitresse à deviser toujours,
Non, Dame, non, je ne saurois le faire:&nbsp;<br>
Et à lui raconter quelles sont mes amours,
Autre que vous ne me sauroit complaire,&nbsp;<br>
L'an me semble plus court qu'une seule journée.
Et fust Venus descendue entre nous.&nbsp;<br>
S'une autre parle à moi, j'en ay l'ame gennée:
Vos yeus me sont si gracieus et dous,&nbsp;<br>
Ou je ne luy di mot, ou mes propos sont lours,
Que d'un seul clin ils me peuvent defaire,&nbsp;<br>
Au milieu du devis s'egarent mes discours,
D'un autre clin tout soudain me refaire,&nbsp;<br>
Et tout ainsi que moi ma langue est estonnée.
Me faisans vivre ou mourir en deux cous.&nbsp;<br>
Mais quand je suis aupres de celle qui me tient
Quand je serois cinq cens mille ans en vie,&nbsp;<br>
Le coeur dedans ses yeus, sans me forcer me vient
Autre que vous, ma mignonne m'amie,&nbsp;<br>
Un propos dessus l'autre, et jamais je ne cesse
Ne me feroit amoureus devenir.&nbsp;<br>
De baiser, de taster, de rire, et de parler:
Il me faudroit refaire d'autres venes,&nbsp;<br>
Car pour estre cent ans aupres de ma maitresse
Les miennes sont de vostre amour si plenes,&nbsp;<br>
Cent ans me sont trop cours, et ne m'en puis aller.</poem>
Qu'un autre amour n'y sauroit plus tenir.&nbsp;<br>
 
XXIX&nbsp;<br>
===XXVII E, que me sert, Paschal, ceste belle verdure ===
Pour aimer trop une fiere beauté,&nbsp;<br>
<poem>E, que me sert, Paschal, ceste belle verdure
Je suis en peine, et si ne saurois dire&nbsp;<br>
Qui rit parmi les prés, et d'ouir les oiseaus,
D'où ni comment, me survint ce martyre,&nbsp;<br>
D'ouir par le pendant des colines les eaus,
Ni à quel jeu je perdi liberté.&nbsp;<br>
Et des vents du printems le gracieus murmure,
Si sçai-je bien que je suis arresté&nbsp;<br>
Quand celle qui me blesse, et de mon mal n'a cure
Au lacs d'amour: et si ne m'en retire,&nbsp;<br>
Est absente de moi, et pour croistre mes maus
Ni ne voudrois, car plus mon mal empire&nbsp;<br>
Me cache la clarté de ses astres jumeaus,
Et plus je veus y estre mal traicté.&nbsp;<br>
De ses yeus, dont mon coeur prenoit sa nourriture?
Je ne di pas, s'elle vouloit un jour&nbsp;<br>
J'aimeroi beaucoup mieus qu'il fust hyver tousjours,
Entre ses bras me garir de l'amour,&nbsp;<br>
Car l'hyver n'est si propre à nourir les amours
Que son present bien à gré je ne prinse.&nbsp;<br>
Comme est le renouveau, qui d'aimer me convie,
E, Dieu du ciel, é qui ne le prendroit,&nbsp;<br>
Ainçois de me hayr, puis que je n'ay pouvoir
Quand seulement de son baiser un Prince,&nbsp;<br>
En ce beau mois d'Avril entre mes bras d'avoir
Voire un grand Roy, bien heureus se tiendroit.&nbsp;<br>
Celle qui dans ses yeus tient ma mort et ma vie.</poem>
XXX&nbsp;<br>
E, que je porte et de hayne et d'envie&nbsp;<br>
 
Au medecin qui vient soir et matin&nbsp;<br>
==Sonetz en vers de dix à onze syllabes==
Sans nul propos tatonner le tetin,&nbsp;<br>
 
Le sein, le ventre et les flans de m'amie.&nbsp;<br>
===XXVIII Je ne saurois aimer autre que vous===
Las! il n'est pas si songneus de sa vie&nbsp;<br>
<poem>Je ne saurois aimer autre que vous,
Comme elle pense: il est mechant et fin,&nbsp;<br>
Non, Dame, non, je ne saurois le faire:
Cent fois le jour ne la vient voir, qu'à fin&nbsp;<br>
Autre que vous ne me sauroit complaire,
De voir son sein qui d'aimer le convie.&nbsp;<br>
Et fust Venus descendue entre nous.
Vous qui avés de sa fievre le soin,&nbsp;<br>
Vos yeus me sont si gracieus et dous,
Je vous supli de me chasser bien loin&nbsp;<br>
Que d'un seul clin ils me peuvent defaire,
Ce medecin, amoureus de m'amie,&nbsp;<br>
D'un autre clin tout soudain me refaire,
Qui fait semblant de la venir penser:&nbsp;<br>
Me faisans vivre ou mourir en deux cous.
Que pleust à Dieu, pour l'en recompenser,&nbsp;<br>
Quand je serois cinq cens mille ans en vie,
Qu'il eust ma peine, et qu'elle fust guarie.&nbsp;<br>
Autre que vous, ma mignonne m'amie,
XXXI&nbsp;<br>
Ne me feroit amoureus devenir.
Dites maitresse, é que vous ai-je fait?&nbsp;<br>
Il me faudroit refaire d'autres venes,
E, pourquoy las! m'estes vous si cruelle?&nbsp;<br>
Les miennes sont de vostre amour si plenes,
Ai-je failly de vous estre fidelle?&nbsp;<br>
Qu'un autre amour n'y sauroit plus tenir.</poem>
Ai-je envers vous commis quelque forfait?&nbsp;<br>
 
Dites maitresse, é que vous ai-je fait?&nbsp;<br>
<poem>XXIX
E, pourquoy las! m'estes vous si cruelle?&nbsp;<br>
Pour aimer trop une fiere beauté,
Ai-je failli de vous estre fidelle?&nbsp;<br>
Je suis en peine, et si ne saurois dire
Ai-je envers vous commis quelque forfait?&nbsp;<br>
D'où ni comment, me survint ce martyre,
Certes nenny: car plutost que de faire&nbsp;<br>
Ni à quel jeu je perdi liberté.
Chose qui deust, tant soit peu, vous déplaire,&nbsp;<br>
Si sçai-je bien que je suis arresté
J'aimerois mieus mille mors encourir.&nbsp;<br>
Au lacs d'amour: et si ne m'en retire,
Mais je voi bien que vous avez envie&nbsp;<br>
Ni ne voudrois, car plus mon mal empire
De me tuer: faites-moy donq mourir,&nbsp;<br>
Et plus je veus y estre mal traicté.
Puis qu'il vous plaît, car à vous est ma vie.&nbsp;<br>
Je ne di pas, s'elle vouloit un jour
XXXII&nbsp;<br>
Entre ses bras me garir de l'amour,
Chacun qui voit ma couleur triste et noire&nbsp;<br>
Que son present bien à gré je ne prinse.
Me dit, Ronsard, vous estes amoureus.&nbsp;<br>
E, Dieu du ciel, é qui ne le prendroit,
Mais cette-là qui me fait langoreus&nbsp;<br>
Quand seulement de son baiser un Prince,
Le sçait, le voit, et si ne le veut croire.&nbsp;<br>
Voire un grand Roy, bien heureus se tiendroit.
E, que me sert que mon mal soit notoire&nbsp;<br>
XXX
A un chacun, quand son coeur rigoreus,&nbsp;<br>
E, que je porte et de hayne et d'envie
Par ne sçai quel desastre malheureus,&nbsp;<br>
Au medecin qui vient soir et matin
Me fait la playe, et si la prend à gloire?&nbsp;<br>
Sans nul propos tatonner le tetin,
C'est un grand cas, que pour cent fois jurer,&nbsp;<br>
Le sein, le ventre et les flans de m'amie.
Cent fois promettre, et cent fois asseurer&nbsp;<br>
Las! il n'est pas si songneus de sa vie
Qu'autre jamais n'aura sus moi puissance,&nbsp;<br>
Comme elle pense: il est mechant et fin,
Qu'elle s'esbat de me voir en langueur:&nbsp;<br>
Cent fois le jour ne la vient voir, qu'à fin
Et plus de moi je lui donne asseurance,&nbsp;<br>
De voir son sein qui d'aimer le convie.
Moins me veut croire, et m'appelle un moqueur.&nbsp;<br>
Vous qui avés de sa fievre le soin,
XXXIII&nbsp;<br>
Je vous supli de me chasser bien loin
Plus que jamais je veus aimer, maitresse,&nbsp;<br>
Ce medecin, amoureus de m'amie,
Vôtre oeil divin, qui me detient ravy&nbsp;<br>
Qui fait semblant de la venir penser:
Mon coeur chez lui, du jour que je le vi,&nbsp;<br>
Que pleust à Dieu, pour l'en recompenser,
Tel, qu'il sembloit celui d'une déesse?&nbsp;<br>
Qu'il eust ma peine, et qu'elle fust guarie.
C'est ce bel oeil qui me paist de liesse,&nbsp;<br>
XXXI
Liesse, non, mais d'un mal dont je vi,&nbsp;<br>
Dites maitresse, é que vous ai-je fait?
Mal, mais un bien, qui m'a toujours suivy,&nbsp;<br>
E, pourquoy las! m'estes vous si cruelle?
Me nourrissant de joye et de tristesse.&nbsp;<br>
Ai-je failly de vous estre fidelle?
Desja neuf ans evanouiz se sont&nbsp;<br>
Ai-je envers vous commis quelque forfait?
Que vos beaus yeus en me riant me font&nbsp;<br>
Dites maitresse, é que vous ai-je fait?
La playe au coeur, et si ne me soucye&nbsp;<br>
E, pourquoy las! m'estes vous si cruelle?
Quand je mourois d'un mal si gracieus:&nbsp;<br>
Ai-je failli de vous estre fidelle?
Car rien ne peut venir de voz beaus yeus&nbsp;<br>
Ai-je envers vous commis quelque forfait?
Qui ne me soit trop plus cher que la vie.&nbsp;<br>
Certes nenny: car plutost que de faire
XXXIV&nbsp;<br>
Chose qui deust, tant soit peu, vous déplaire,
Quand ma maitresse au monde print naissance,&nbsp;<br>
J'aimerois mieus mille mors encourir.
Honneur, Vertu, Grace, Savoir, Beauté&nbsp;<br>
Mais je voi bien que vous avez envie
Eurent debat avec la Chasteté&nbsp;<br>
De me tuer: faites-moy donq mourir,
Qui plus auroit sus elle de puissance.&nbsp;<br>
Puis qu'il vous plaît, car à vous est ma vie.
L'une vouloit en avoir joüyssance,&nbsp;<br>
XXXII
L'autre vouloit l'avoir de son costé,&nbsp;<br>
Chacun qui voit ma couleur triste et noire
Et le debat immortel eust esté&nbsp;<br>
Me dit, Ronsard, vous estes amoureus.
Sans Jupiter, qui leur posa silence.&nbsp;<br>
Mais cette-là qui me fait langoreus
Filles, dit-il, ce n'est pas la raison&nbsp;<br>
Le sçait, le voit, et si ne le veut croire.
Que l'une seule ait si belle maison,&nbsp;<br>
E, que me sert que mon mal soit notoire
Pour-ce je veus qu'apointement on face:&nbsp;<br>
A un chacun, quand son coeur rigoreus,
L'accord fut fait: et plus soudainement&nbsp;<br>
Par ne sçai quel desastre malheureus,
Qu'il ne l'eut dit, toutes également&nbsp;<br>
Me fait la playe, et si la prend à gloire?
En son beau cors pour jamais prindrent place.&nbsp;<br>
C'est un grand cas, que pour cent fois jurer,
XXXV&nbsp;<br>
Cent fois promettre, et cent fois asseurer
Je vous envoye un bouquet de ma main&nbsp;<br>
Qu'autre jamais n'aura sus moi puissance,
Que j'ai ourdy de ces fleurs epanies:&nbsp;<br>
Qu'elle s'esbat de me voir en langueur:
Qui ne les eust à ce vespre cuillies,&nbsp;<br>
Et plus de moi je lui donne asseurance,
Flaques à terre elles cherroient demain.&nbsp;<br>
Moins me veut croire, et m'appelle un moqueur.
Cela vous soit un exemple certain&nbsp;<br>
XXXIII
Que voz beautés, bien qu'elles soient fleuries,&nbsp;<br>
Plus que jamais je veus aimer, maitresse,
En peu de tems cherront toutes flétries,&nbsp;<br>
Vôtre oeil divin, qui me detient ravy
Et periront, comme ces fleurs, soudain.&nbsp;<br>
Mon coeur chez lui, du jour que je le vi,
Le tems s'en va, le tems s'en va, ma Dame:&nbsp;<br>
Tel, qu'il sembloit celui d'une déesse?
Las! le tems non, mais nous nous en allons,&nbsp;<br>
C'est ce bel oeil qui me paist de liesse,
Et tost serons estendus sous la lame:&nbsp;<br>
Liesse, non, mais d'un mal dont je vi,
Et des amours desquelles nous parlons,&nbsp;<br>
Mal, mais un bien, qui m'a toujours suivy,
Quand serons morts n'en sera plus nouvelle:&nbsp;<br>
Me nourrissant de joye et de tristesse.
Pour-ce aimés moi, ce pendant qu'estes belle.&nbsp;<br>
Desja neuf ans evanouiz se sont
XXXVI&nbsp;<br>
Que vos beaus yeus en me riant me font
Gentil barbier, enfant de Podalyre,&nbsp;<br>
La playe au coeur, et si ne me soucye
Je te supply, seigne bien ma maitresse,&nbsp;<br>
Quand je mourois d'un mal si gracieus:
Et qu'en ce mois, en seignant, elle laisse&nbsp;<br>
Car rien ne peut venir de voz beaus yeus
Le sang gelé dont elle me martyre.&nbsp;<br>
Qui ne me soit trop plus cher que la vie.
Encore un peu dans la palette tire&nbsp;<br>
XXXIV
De son sang froid, ains de sa glace épesse,&nbsp;<br>
Quand ma maitresse au monde print naissance,
A celle fin qu'en sa place renaisse&nbsp;<br>
Honneur, Vertu, Grace, Savoir, Beauté
Un sang plus chaut qui de m'aimer l'inspire.&nbsp;<br>
Eurent debat avec la Chasteté
Ha! velelà, c'estoit ce sang si noir&nbsp;<br>
Qui plus auroit sus elle de puissance.
Que je n'ay peu de mon chaud émouvoir&nbsp;<br>
L'une vouloit en avoir joüyssance,
En soupirant pour elle mainte année.&nbsp;<br>
L'autre vouloit l'avoir de son costé,
Ha c'est assez, cesse gentil barbier,&nbsp;<br>
Et le debat immortel eust esté
Ha je me pâme! et mon ame estonnée&nbsp;<br>
Sans Jupiter, qui leur posa silence.
S'evanouist en voiant son meurtrier.&nbsp;<br>
Filles, dit-il, ce n'est pas la raison
XXXVII&nbsp;<br>
Que l'une seule ait si belle maison,
J'aurai tousjours en une hayne extréme&nbsp;<br>
Pour-ce je veus qu'apointement on face:
Le soir, la chaire, et le lit odieus,&nbsp;<br>
L'accord fut fait: et plus soudainement
Où je fus pris, sans y penser, des yeus&nbsp;<br>
Qu'il ne l'eut dit, toutes également
Qui pour aimer me font hayr moi-mesme.&nbsp;<br>
En son beau cors pour jamais prindrent place.
J'aurai tousjours le front pensif et bléme&nbsp;<br>
XXXV
Quand je voirray ce bocage ennuieus,&nbsp;<br>
Je vous envoye un bouquet de ma main
Et ce jardin de mon aise envieus,&nbsp;<br>
Que j'ai ourdy de ces fleurs epanies:
Où j'avisay cette beauté supréme.&nbsp;<br>
Qui ne les eust à ce vespre cuillies,
J'aurai toujours en haine plus que mort&nbsp;<br>
Flaques à terre elles cherroient demain.
Le mois de Mai, le lyerre, et le sort&nbsp;<br>
Cela vous soit un exemple certain
Qu'elle écrivit sus une verte feille:&nbsp;<br>
Que voz beautés, bien qu'elles soient fleuries,
J'auray tousjours cette lettre en horreur,&nbsp;<br>
En peu de tems cherront toutes flétries,
Dont pour adieu sa main tendre et vermeille&nbsp;<br>
Et periront, comme ces fleurs, soudain.
Me feit present pour me l'empreindre au coeur.&nbsp;<br>
Le tems s'en va, le tems s'en va, ma Dame:
XXXVIII&nbsp;<br>
Las! le tems non, mais nous nous en allons,
E, Dieu du ciel, je n'eusse pas pensé&nbsp;<br>
Et tost serons estendus sous la lame:
Qu'un seul depart eust causé tant de pene!&nbsp;<br>
Et des amours desquelles nous parlons,
Je n'ai sur moi nerf, ni tendon, ni vene,&nbsp;<br>
Quand serons morts n'en sera plus nouvelle:
Faie, ni coeur qui n'en soit offensé,&nbsp;<br>
Pour-ce aimés moi, ce pendant qu'estes belle.
Helas! je suis à-demi trespassé,&nbsp;<br>
XXXVI
Ains du tout mort, las! ma douce inhumaine&nbsp;<br>
Gentil barbier, enfant de Podalyre,
Avecques elle, en s'en allant, enmaine&nbsp;<br>
Je te supply, seigne bien ma maitresse,
Mon coeur captif de ses beaus yeus blessé.&nbsp;<br>
Et qu'en ce mois, en seignant, elle laisse
Que pleust à Dieu ne l'avoir jamais veue!&nbsp;<br>
Le sang gelé dont elle me martyre.
Son oeil gentil ne m'eust la flamme esmeue,&nbsp;<br>
Encore un peu dans la palette tire
Par qui me faut un tourment recevoir,&nbsp;<br>
De son sang froid, ains de sa glace épesse,
Tel, que ma main m'occiroit à cette heure,&nbsp;<br>
A celle fin qu'en sa place renaisse
Sans un penser que j'ai de la revoir,&nbsp;<br>
Un sang plus chaut qui de m'aimer l'inspire.
Et ce penser garde que je ne meure.&nbsp;<br>
Ha! velelà, c'estoit ce sang si noir
XXXIX&nbsp;<br>
Que je n'ay peu de mon chaud émouvoir
Ha, petit chien, que tu serois heureus&nbsp;<br>
En soupirant pour elle mainte année.
Si ton bon heur tu sçavois bien entendre,&nbsp;<br>
Ha c'est assez, cesse gentil barbier,
D'ainsi coucher au giron de Cassandre,&nbsp;<br>
Ha je me pâme! et mon ame estonnée
Et de dormir en ses bras amoureus.&nbsp;<br>
S'evanouist en voiant son meurtrier.
Mais, las! je vy chetif et langoreus,&nbsp;<br>
XXXVII
Pour sçavoir trop mes miseres comprendre:&nbsp;<br>
J'aurai tousjours en une hayne extréme
Las! pour vouloir en ma jeunesse aprendre&nbsp;<br>
Le soir, la chaire, et le lit odieus,
Trop de sçavoir, je me fis malheureus.&nbsp;<br>
Où je fus pris, sans y penser, des yeus
Mon Dieu, que n'ai-je au chef l'entendement&nbsp;<br>
Qui pour aimer me font hayr moi-mesme.
Aussi plombé qu'un qui journelement&nbsp;<br>
J'aurai tousjours le front pensif et bléme
Béche en la vigne ou fagotte au bocage!&nbsp;<br>
Quand je voirray ce bocage ennuieus,
Je ne serois chetif comme je suis,&nbsp;<br>
Et ce jardin de mon aise envieus,
Le trop d'esprit ne me seroit domage,&nbsp;<br>
Où j'avisay cette beauté supréme.
Et ne pourrois comprendre mes ennuis.&nbsp;<br>
J'aurai toujours en haine plus que mort
<br>
Le mois de Mai, le lyerre, et le sort
Sonetz en vers heroiques&nbsp;<br>
Qu'elle écrivit sus une verte feille:
XL&nbsp;<br>
J'auray tousjours cette lettre en horreur,
D'une belle Marie en une autre Marie,&nbsp;<br>
Dont pour adieu sa main tendre et vermeille
Belleau, je suis tombé, et si dire ne puis&nbsp;<br>
Me feit present pour me l'empreindre au coeur.
De laquelle des deux plus l'amour je poursuis,&nbsp;<br>
XXXVIII
Car j'en aime bien l'une, et l'autre est bien m'amie.&nbsp;<br>
E, Dieu du ciel, je n'eusse pas pensé
On dit qu'une amitié qui se depart demie&nbsp;<br>
Qu'un seul depart eust causé tant de pene!
Ne dure pas long tems, et n'aporte qu'ennuis,&nbsp;<br>
Je n'ai sur moi nerf, ni tendon, ni vene,
Mais ce n'est qu'un abus: car tant ferme je suis&nbsp;<br>
Faie, ni coeur qui n'en soit offensé,
Que, pour en aimer une, une autre je n'oublie.&nbsp;<br>
Helas! je suis à-demi trespassé,
Tousjours une amitié plus est enracinée,&nbsp;<br>
Ains du tout mort, las! ma douce inhumaine
Plus long tems elle dure, et plus est ostinée&nbsp;<br>
Avecques elle, en s'en allant, enmaine
A soufrir de l'amour l'orage vehement:&nbsp;<br>
Mon coeur captif de ses beaus yeus blessé.
E, ne sçais-tu, Belleau, que deux ancres getées&nbsp;<br>
Que pleust à Dieu ne l'avoir jamais veue!
Dans la mer, quand plus fort les eaus sont agitées,&nbsp;<br>
Son oeil gentil ne m'eust la flamme esmeue,
Tiennent mieus une nef qu'une ancre seulement?&nbsp;<br>
Par qui me faut un tourment recevoir,
XLI&nbsp;<br>
Tel, que ma main m'occiroit à cette heure,
Quand je serois un Turc, un Arabe, ou un Scythe,&nbsp;<br>
Sans un penser que j'ai de la revoir,
Pauvre, captif, malade, et d'honneur devestu,&nbsp;<br>
Et ce penser garde que je ne meure.
Laid, vieillard, impotent, encor' ne devrois tu&nbsp;<br>
XXXIX
Estre, comme tu es, envers moi si dépite:&nbsp;<br>
Ha, petit chien, que tu serois heureus
Je suis bien asseuré que mon coeur ne merite&nbsp;<br>
Si ton bon heur tu sçavois bien entendre,
D'aimer en si bon lieu, mais ta seule vertu&nbsp;<br>
D'ainsi coucher au giron de Cassandre,
Me force de ce faire, et plus je suis batu&nbsp;<br>
Et de dormir en ses bras amoureus.
De ta fiere rigueur, plus ta beauté m'incite.&nbsp;<br>
Mais, las! je vy chetif et langoreus,
Si tu penses trouver un serviteur qui soit&nbsp;<br>
Pour sçavoir trop mes miseres comprendre:
Digne de ta beauté, ton penser te deçoit,&nbsp;<br>
Las! pour vouloir en ma jeunesse aprendre
Car un Dieu (tant s'en faut un homme) n'en est digne.&nbsp;<br>
Trop de sçavoir, je me fis malheureus.
Si tu veus donq aimer, il faut baisser ton coeur:&nbsp;<br>
Mon Dieu, que n'ai-je au chef l'entendement
Ne sçais-tu que Venus (bien qu'elle fust divine)&nbsp;<br>
Aussi plombé qu'un qui journelement
Jadis pour son ami choisit bien un pasteur?&nbsp;<br>
Béche en la vigne ou fagotte au bocage!
XLII&nbsp;<br>
Je ne serois chetif comme je suis,
Dame, je ne vous puis ofrir à mon depart&nbsp;<br>
Le trop d'esprit ne me seroit domage,
Sinon mon pauvre coeur, prenés-le je vous prie:&nbsp;<br>
Et ne pourrois comprendre mes ennuis.
Si vous ne le prenés, jamais une autre amie&nbsp;<br>
(J'en jure par voz yeus) jamais n'y aura part.&nbsp;<br>
Sonetz en vers heroiques
Je le sen déjà bien, comme joyeus il part&nbsp;<br>
XL
Hors de mon estomac, peu songneus de ma vie,&nbsp;<br>
D'une belle Marie en une autre Marie,
Pour s'en aller chés vous, et rien ne le convie&nbsp;<br>
Belleau, je suis tombé, et si dire ne puis
D'y aller (ce dit-il) que vôtre dous regard.&nbsp;<br>
De laquelle des deux plus l'amour je poursuis,
Or si vous le chassés, je ne veus plus qu'il vienne&nbsp;<br>
Car j'en aime bien l'une, et l'autre est bien m'amie.
Vers moi, pour y r'avoir sa demeure ancienne,&nbsp;<br>
On dit qu'une amitié qui se depart demie
Hayssant à la mort ce qui vous deplaira:&nbsp;<br>
Ne dure pas long tems, et n'aporte qu'ennuis,
Il m'aura beau conter sa peine et son malaise,&nbsp;<br>
Mais ce n'est qu'un abus: car tant ferme je suis
Comme il fut paravant plus mien il ne sera,&nbsp;<br>
Que, pour en aimer une, une autre je n'oublie.
Car je ne veus rien voir chés moi, qui vous deplaise.&nbsp;<br>
Tousjours une amitié plus est enracinée,
XLIII&nbsp;<br>
Plus long tems elle dure, et plus est ostinée
Rossignol mon mignon, qui dans cette saulaye&nbsp;<br>
A soufrir de l'amour l'orage vehement:
Vas seul de branche en branche à ton gré voletant,&nbsp;<br>
E, ne sçais-tu, Belleau, que deux ancres getées
Degoisant à l'envy de moi, qui vois chantant&nbsp;<br>
Dans la mer, quand plus fort les eaus sont agitées,
Celle qui faut tousjours que dans la bouche j'aie,&nbsp;<br>
Tiennent mieus une nef qu'une ancre seulement?
Nous soupirons tous deux, ta douce vois s'essaie&nbsp;<br>
XLI
De flechir celle-là, qui te va tourmentant,&nbsp;<br>
Quand je serois un Turc, un Arabe, ou un Scythe,
Et moi, je suis aussi cette-là regrettant,&nbsp;<br>
Pauvre, captif, malade, et d'honneur devestu,
Qui m'a fait dans le coeur une si aigre plaie.&nbsp;<br>
Laid, vieillard, impotent, encor' ne devrois tu
Toutesfois, Rossignol, nous differons d'un point.&nbsp;<br>
Estre, comme tu es, envers moi si dépite:
C'est que tu es aimé, et je ne le suis point,&nbsp;<br>
Je suis bien asseuré que mon coeur ne merite
Bien que tous deux aions les musiques pareilles,&nbsp;<br>
D'aimer en si bon lieu, mais ta seule vertu
Car tu flechis t'amie au dous bruit de tes sons,&nbsp;<br>
Me force de ce faire, et plus je suis batu
Mais la mienne, qui prent à dépit mes chansons,&nbsp;<br>
De ta fiere rigueur, plus ta beauté m'incite.
Pour ne les escouter se bouche les oreilles.&nbsp;<br>
Si tu penses trouver un serviteur qui soit
XLIV&nbsp;<br>
Digne de ta beauté, ton penser te deçoit,
Si vous pensés que Mai, et sa belle verdure&nbsp;<br>
Car un Dieu (tant s'en faut un homme) n'en est digne.
De vôtre fievre quarte effacent la langueur,&nbsp;<br>
VousSi voustu trompésveus beaucoupdonq aimer, il faut premierbaisser monton coeur&nbsp;<br>:
Ne sçais-tu que Venus (bien qu'elle fust divine)
Garir du mal qu'il sent, et si n'en avés cure.&nbsp;<br>
Jadis pour son ami choisit bien un pasteur?
Il faut donque premier me garir la pointure&nbsp;<br>
XLII
Que voz yeus dans mon coeur me font par leur rigueur,&nbsp;<br>
Dame, je ne vous puis ofrir à mon depart
Et tout soudain apres vous reprendrés vigueur,&nbsp;<br>
Sinon mon pauvre coeur, prenés-le je vous prie:
Quand vous l'aurés gary du tourment qu'il endure.&nbsp;<br>
LeSi malvous quene vousle avésprenés, nejamais vientune d'autre raison,&nbsp;<br>amie
(J'en jure par voz yeus) jamais n'y aura part.
Sinon de moi, qui fis aus Dieus une oraison&nbsp;<br>
Je le sen déjà bien, comme joyeus il part
Pour me venger de vous, de vous faire malade.&nbsp;<br>
Hors de mon estomac, peu songneus de ma vie,
E, vraiment c'est bien dit; é, vous voulez garir,&nbsp;<br>
Pour s'en aller chés vous, et rien ne le convie
Et si ne voulez pas vôtre amant secourir,&nbsp;<br>
D'y aller (ce dit-il) que vôtre dous regard.
Que vous gaririez bien seulement d'une oeillade.&nbsp;<br>
Or si vous le chassés, je ne veus plus qu'il vienne
XLV&nbsp;<br>
Vers moi, pour y r'avoir sa demeure ancienne,
J'ay cent fois desiré et cent encores d'estre&nbsp;<br>
Hayssant à la mort ce qui vous deplaira:
Un invisible esprit, afin de me cacher&nbsp;<br>
Il m'aura beau conter sa peine et son malaise,
Au fond de vôtre coeur, pour l'humeur rechercher&nbsp;<br>
Comme il fut paravant plus mien il ne sera,
Qui vous fait contre moi si cruelle aparoistre.&nbsp;<br>
Car je ne veus rien voir chés moi, qui vous deplaise.
Si, j'estois dedans vous, aumoins je serois maistre,&nbsp;<br>
XLIII
Maugré vous, de l'humeur qui ne fait qu'empescher&nbsp;<br>
Rossignol mon mignon, qui dans cette saulaye
Amour, et si n'auriez nerf, ne poux sous la chair&nbsp;<br>
Vas seul de branche en branche à ton gré voletant,
Que je ne recherchasse afin de vous cognoistre.&nbsp;<br>
Degoisant à l'envy de moi, qui vois chantant
Je sçaurois une à une et voz complexions,&nbsp;<br>
Celle qui faut tousjours que dans la bouche j'aie,
Toutes voz voluntés, et voz conditions,&nbsp;<br>
Nous soupirons tous deux, ta douce vois s'essaie
Et chasserois si bien la froideur de vos venes,&nbsp;<br>
De flechir celle-là, qui te va tourmentant,
Que les flammes d'Amour vous y allumeriez:&nbsp;<br>
Et moi, je suis aussi cette-là regrettant,
Puis quand je les voirrois de son feu toutes plenes,&nbsp;<br>
Qui m'a fait dans le coeur une si aigre plaie.
Je redeviendrois homme, et lors vous m'aimeriez.&nbsp;<br>
Toutesfois, Rossignol, nous differons d'un point.
XLVI&nbsp;<br>
Pour-ceC'est que tu sçaises bienaimé, queet je t'aimene trople mieussuis point,&nbsp;<br>
Bien que tous deux aions les musiques pareilles,
Trop mieus dix mille fois que je ne fais ma vie,&nbsp;<br>
Car tu flechis t'amie au dous bruit de tes sons,
Que je ne fais mon coeur, ma bouche, ni mes yeus,&nbsp;<br>
Mais la mienne, qui prent à dépit mes chansons,
Plus que le nom de mort tu fuis le nom d'amie.&nbsp;<br>
Pour ne les escouter se bouche les oreilles.
Si je faisois semblant de n'avoir point envie&nbsp;<br>
XLIV
D'estre ton serviteur, tu m'aimerois trop mieus,&nbsp;<br>
Si vous pensés que Mai, et sa belle verdure
Trop mieus dix mille fois que tu ne fais ta vie,&nbsp;<br>
De vôtre fievre quarte effacent la langueur,
Que tu ne fais ton coeur, ta bouche, ni tes yeus.&nbsp;<br>
Vous vous trompés beaucoup, il faut premier mon coeur
C'est d'amour la coustume, alors que plus on aime&nbsp;<br>
Garir du mal qu'il sent, et si n'en avés cure.
D'estre tousjours hay: je le sçai par moi-mesme&nbsp;<br>
Il faut donque premier me garir la pointure
Qui suis hay de toi, seulement quand tu m'ois&nbsp;<br>
Que voz yeus dans mon coeur me font par leur rigueur,
Jurer que je suis tien: helas! que doi-je faire?&nbsp;<br>
Et tout soudain apres vous reprendrés vigueur,
Tout ainsi qu'on garist un mal par son contraire,&nbsp;<br>
Quand vous l'aurés gary du tourment qu'il endure.
Si je te haïssois, soudain tu m'aimerois.&nbsp;<br>
Le mal que vous avés ne vient d'autre raison,
XLVII&nbsp;<br>
Sinon de moi, qui fis aus Dieus une oraison
Quand je vous dis adieu, Dame, mon seul apuy,&nbsp;<br>
Pour me venger de vous, de vous faire malade.
Je laissé dans voz yeus mon coeur pour sa demeure&nbsp;<br>
E, vraiment c'est bien dit; é, vous voulez garir,
En gaige de ma foi: et si ay, depuis l'heure&nbsp;<br>
Et si ne voulez pas vôtre amant secourir,
Que je le vous laissay, tousjours vescu d'ennuy&nbsp;<br>
Que vous gaririez bien seulement d'une oeillade.
Mais pour Dieu je vous pri, me le rendre aujourd'huy&nbsp;<br>
XLV
Que je suis retourné, de peur que je ne meure:&nbsp;<br>
J'ay cent fois desiré et cent encores d'estre
Car je mourois sans coeur, ou, que vôtre oeil m'asseure&nbsp;<br>
Un invisible esprit, afin de me cacher
Que vous me donnerez le vôtre en lieu de lui.&nbsp;<br>
Au fond de vôtre coeur, pour l'humeur rechercher
Las! donez-le moi donq, et de l'oeil faittes signe&nbsp;<br>
Qui vous fait contre moi si cruelle aparoistre.
Que vôtre coeur est mien, et que vous n'avés rien&nbsp;<br>
Si, j'estois dedans vous, aumoins je serois maistre,
Qui ne soit fort joieus, vous laissant, de me suivre:&nbsp;<br>
Maugré vous, de l'humeur qui ne fait qu'empescher
Ou bien si vous voyés que je ne sois pas digne&nbsp;<br>
Amour, et si n'auriez nerf, ne poux sous la chair
D'avoir chés moi le vôtre, aumoins rendés le mien,&nbsp;<br>
Que je ne recherchasse afin de vous cognoistre.
Car sans avoir un coeur je ne saurois plus vivre.&nbsp;<br>
Je sçaurois une à une et voz complexions,
XLVIII&nbsp;<br>
Toutes voz voluntés, et voz conditions,
Tu as beau, Jupiter, l'air de flammes dissouldre,&nbsp;<br>
Et chasserois si bien la froideur de vos venes,
Et faire galloper tes haux-tonnans chevaus,&nbsp;<br>
Que les flammes d'Amour vous y allumeriez:
Ronflans deçà delà dans le creux des nuaus,&nbsp;<br>
Puis quand je les voirrois de son feu toutes plenes,
Et en cent mille esclats tout d'un coup les descoudre,&nbsp;<br>
Je redeviendrois homme, et lors vous m'aimeriez.
Ce n'est pas moi qui crains tes esclairs, ni ta foudre&nbsp;<br>
XLVI
Comme les coeurs poureus des autres animaus:&nbsp;<br>
Pour-ce que tu sçais bien que je t'aime trop mieus,
Il y a trop lon tems que les foudres jumeaus&nbsp;<br>
Trop mieus dix mille fois que je ne fais ma vie,
Des yeus de ma maitresse ont mis le mien en poudre.&nbsp;<br>
JeQue n'aije plusne nifais tendonsmon coeur, nima arteresbouche, ni nerfsmes yeus,&nbsp;<br>
Plus que le nom de mort tu fuis le nom d'amie.
Venes, muscles, ni poux: les feux que j'ai soufferts&nbsp;<br>
Si je faisois semblant de n'avoir point envie
Au coeur pour trop aimer me les ont mis en cendre.&nbsp;<br>
D'estre ton serviteur, tu m'aimerois trop mieus,
Et je ne suis plus rien (ô estrange meschef)&nbsp;<br>
Trop mieus dix mille fois que tu ne fais ta vie,
Qu'un Terme qui ne peut voir, n'oüyr, ni entendre,&nbsp;<br>
Que tu ne fais ton coeur, ta bouche, ni tes yeus.
Tant la foudre d'amour est cheute sus mon chef.&nbsp;<br>
C'est d'amour la coustume, alors que plus on aime
XLIX&nbsp;<br>
D'estre tousjours hay: je le sçai par moi-mesme
Donques pour trop aimer il fault que je trépasse,&nbsp;<br>
Qui suis hay de toi, seulement quand tu m'ois
La mort, de mon amour sera donq le loyer:&nbsp;<br>
Jurer que je suis tien: helas! que doi-je faire?
L'homme est bien malheureus qui se veut emploier&nbsp;<br>
Tout ainsi qu'on garist un mal par son contraire,
Par travail meriter d'une ingrate la grace:&nbsp;<br>
MaisSi je te prihaïssois, di moi, que veussoudain tu que jem'aimerois. face?&nbsp;<br>
XLVII
Quelle preuve veus-tu afin de te ployer&nbsp;<br>
Quand je vous dis adieu, Dame, mon seul apuy,
A pitié, las! veus-tu que je m'aille noyer,&nbsp;<br>
Je laissé dans voz yeus mon coeur pour sa demeure
Ou que de ma main propre à mort je me deface?&nbsp;<br>
En gaige de ma foi: et si ay, depuis l'heure
Es tu quelque Busire, ou Cacus inhumain,&nbsp;<br>
Que je le vous laissay, tousjours vescu d'ennuy
Pour te souler ainsi du pauvre sang humain?&nbsp;<br>
Mais pour Dieu je vous pri, me le rendre aujourd'huy
E, di, ne crains-tu point Nemesis la Déesse,&nbsp;<br>
Que je suis retourné, de peur que je ne meure:
Qui redemandera mon sang versé à tort?&nbsp;<br>
Car je mourois sans coeur, ou, que vôtre oeil m'asseure
E, di, ne crains-tu point la troupe vengeresse&nbsp;<br>
Que vous me donnerez le vôtre en lieu de lui.
Des Soeurs, qui puniront ton crime apres la mort?&nbsp;<br>
Las! donez-le moi donq, et de l'oeil faittes signe
L&nbsp;<br>
Que vôtre coeur est mien, et que vous n'avés rien
Veus-tu sçavoir, Brués, en quel estat je suis?&nbsp;<br>
Qui ne soit fort joieus, vous laissant, de me suivre:
Je te le conterai: d'un pauvre miserable&nbsp;<br>
Ou bien si vous voyés que je ne sois pas digne
Il n'i a nul estat, tant soit il pitoiable&nbsp;<br>
D'avoir chés moi le vôtre, aumoins rendés le mien,
Que je n'aille passant d'un seul de mes ennuis.&nbsp;<br>
Car sans avoir un coeur je ne saurois plus vivre.
Je tien tout, je n'ay rien, je veus, et si ne puis,&nbsp;<br>
XLVIII
Je revy, je remeurs, ma plaie est incurable.&nbsp;<br>
Tu as beau, Jupiter, l'air de flammes dissouldre,
Qui veut servir Amour, ce tyran execrable,&nbsp;<br>
Et faire galloper tes haux-tonnans chevaus,
Pour toute recompense il reçoit de tels fruis.&nbsp;<br>
Ronflans deçà delà dans le creux des nuaus,
Pleurs, larmes, et souspirs acompagnent ma vie,&nbsp;<br>
Et en cent mille esclats tout d'un coup les descoudre,
Langueur, douleur, regrets, soupçon, et jalousie,&nbsp;<br>
Ce n'est pas moi qui crains tes esclairs, ni ta foudre
Avecques un penser qui ne me laisse avoir&nbsp;<br>
Comme les coeurs poureus des autres animaus:
Un moment de repos: et plus je ne sens vivre&nbsp;<br>
Il y a trop lon tems que les foudres jumeaus
L'esperance en mon coeur, mais le seul desespoir&nbsp;<br>
Des yeus de ma maitresse ont mis le mien en poudre.
Qui me guide à la mort, et je le veus bien suivre.&nbsp;<br>
Je n'ai plus ni tendons, ni arteres, ni nerfs,
LI&nbsp;<br>
Venes, muscles, ni poux: les feux que j'ai soufferts
Ne me di plus, Imbert, que je chante d'Amour,&nbsp;<br>
Au coeur pour trop aimer me les ont mis en cendre.
Ce traistre, ce mechant; comment pouroi-je faire&nbsp;<br>
Et je ne suis plus rien (ô estrange meschef)
Que mon esprit voulust loüer son adversaire,&nbsp;<br>
Qu'un Terme qui ne peut voir, n'oüyr, ni entendre,
Qui ne donne à sa peine un moment de sejour!&nbsp;<br>
Tant la foudre d'amour est cheute sus mon chef.
Si m'avoit fait aumoins quelque petit bon tour,&nbsp;<br>
XLIX
Je l'en remercirois, mais il ne veut se plaire&nbsp;<br>
Donques pour trop aimer il fault que je trépasse,
Qu'à rengreger mon mal, et pour mieus me défaire&nbsp;<br>
La mort, de mon amour sera donq le loyer:
Me met devant les yeux ma Dame nuit et jour.&nbsp;<br>
L'homme est bien malheureus qui se veut emploier
Bien que Tantale soit miserable là-bas,&nbsp;<br>
Par travail meriter d'une ingrate la grace:
Je le passe en malheur; car si ne mange pas&nbsp;<br>
Mais je te pri, di moi, que veus tu que je face?
Le fruit qui pend sur lui, toutesfois il le touche,&nbsp;<br>
Quelle preuve veus-tu afin de te ployer
Et le baise, et s'en joue: et moi, bien que je sois&nbsp;<br>
A pitié, las! veus-tu que je m'aille noyer,
Aupres de mon plaisir, seulement de la bouche&nbsp;<br>
Ou que de ma main propre à mort je me deface?
Ni des mains, tant soit peu, toucher ne l'oserois.&nbsp;<br>
Es tu quelque Busire, ou Cacus inhumain,
LII&nbsp;<br>
Pour te souler ainsi du pauvre sang humain?
Quiconque voudra suivre Amour ainsi que moi,&nbsp;<br>
E, di, ne crains-tu point Nemesis la Déesse,
Celui se delibere en penible tristesse&nbsp;<br>
Qui redemandera mon sang versé à tort?
Mourir ainsi que moi: il pleust à la Déesse&nbsp;<br>
E, di, ne crains-tu point la troupe vengeresse
Qui tient Cypre en ses mains de faire telle loi.&nbsp;<br>
Des Soeurs, qui puniront ton crime apres la mort?
Apres mainte misere et maint fascheus émoi&nbsp;<br>
L
Il lui faudra mourir, et sa fiere maitresse,&nbsp;<br>
Veus-tu sçavoir, Brués, en quel estat je suis?
Le voiant au tombeau, sautera de liesse&nbsp;<br>
Je te le conterai: d'un pauvre miserable
Sus le corps de l'amant, mort pour garder sa foy.&nbsp;<br>
Il n'i a nul estat, tant soit il pitoiable
Allez-donq maintenant faire service aus Dames,&nbsp;<br>
Que je n'aille passant d'un seul de mes ennuis.
Offrez-leur pour present et voz corps et voz ames,&nbsp;<br>
Je tien tout, je n'ay rien, je veus, et si ne puis,
Vous en receverés un salaire bien dous.&nbsp;<br>
Je revy, je remeurs, ma plaie est incurable.
Je croi que Dieu les feit afin de nuire à l'homme:&nbsp;<br>
Qui veut servir Amour, ce tyran execrable,
"Il les feit, Pardaillan, pour nostre malheur, comme&nbsp;<br>
Pour toute recompense il reçoit de tels fruis.
Les tygres, les lyons, les serpens, et les lous.&nbsp;<br>
Pleurs, larmes, et souspirs acompagnent ma vie,
LIII&nbsp;<br>
Langueur, douleur, regrets, soupçon, et jalousie,
J'avois cent fois juré de jamais ne revoir&nbsp;<br>
Avecques un penser qui ne me laisse avoir
(O serment d'amoureus) l'angelique visage&nbsp;<br>
Un moment de repos: et plus je ne sens vivre
Qui depuis quinze mois en penible servage&nbsp;<br>
EmprisonneL'esperance en mon coeur, et nemais le puisseul desespoir ravoir.&nbsp;<br>
Qui me guide à la mort, et je le veus bien suivre.
J'en avois fait serment: mais je n'ai le pouvoir&nbsp;<br>
LI
M'engarder d'y aller, car mon forcé courage,&nbsp;<br>
Ne me di plus, Imbert, que je chante d'Amour,
Bien que soit maugré moi surmonté de l'usage&nbsp;<br>
Ce traistre, ce mechant; comment pouroi-je faire
D'amour, tousjours m'y mene, abusé d'un espoir.&nbsp;<br>
Que mon esprit voulust loüer son adversaire,
Le destin, Pardaillan, est une forte chose!&nbsp;<br>
Qui ne donne à sa peine un moment de sejour!
L'homme dedans son coeur ses affaires dispose&nbsp;<br>
Si m'avoit fait aumoins quelque petit bon tour,
Et le ciel fait tourner ses dessains au rebours.&nbsp;<br>
Je l'en remercirois, mais il ne veut se plaire
Je sçai bien que je fais ce que je ne doy faire,&nbsp;<br>
Qu'à rengreger mon mal, et pour mieus me défaire
Je sçay bien que je sui de trop folles amours:&nbsp;<br>
Me met devant les yeux ma Dame nuit et jour.
Mais quoy, puis que le ciel delibere au contraire.&nbsp;<br>
Bien que Tantale soit miserable là-bas,
LIV&nbsp;<br>
Je le passe en malheur; car si ne mange pas
Ne me sui point, Belleau, allant à la maison&nbsp;<br>
Le fruit qui pend sur lui, toutesfois il le touche,
De celle qui me tient en douleur nompareille:&nbsp;<br>
Et le baise, et s'en joue: et moi, bien que je sois
E ne sçais-tu pas bien ce que dit la corneille&nbsp;<br>
Aupres de mon plaisir, seulement de la bouche
A Mopse, qui suivoit la trace de Jason?&nbsp;<br>
Ni des mains, tant soit peu, toucher ne l'oserois.
Profete, dit l'oiseau, tu n'as point de raison&nbsp;<br>
LII
De suivre cet amant qui de voir s'apareille&nbsp;<br>
Quiconque voudra suivre Amour ainsi que moi,
Sa Dame: en autre part va, suy le et le conseille,&nbsp;<br>
Celui se delibere en penible tristesse
Mais ore de le suivre il n'est pas la saison.&nbsp;<br>
Mourir ainsi que moi: il pleust à la Déesse
Pour ton profit, Belleau, je ne vueil que tu voye'&nbsp;<br>
Qui tient Cypre en ses mains de faire telle loi.
Celle qui par les yeus la plaie au coeur m'envoye,&nbsp;<br>
Apres mainte misere et maint fascheus émoi
De peur que tu ne prenne' un mal au mien pareil.&nbsp;<br>
Il lui faudra mourir, et sa fiere maitresse,
Il suffist que sans toi je sois seul miserable:&nbsp;<br>
Le voiant au tombeau, sautera de liesse
Reste sain, je te pri, pour estre secourable&nbsp;<br>
Sus le corps de l'amant, mort pour garder sa foy.
A ma douleur extréme, et m'y donner conseil.&nbsp;<br>
Allez-donq maintenant faire service aus Dames,
LV&nbsp;<br>
Offrez-leur pour present et voz corps et voz ames,
Si j'avois un hayneus qui me voulust la mort&nbsp;<br>
Vous en receverés un salaire bien dous.
Pour me venger de luy je ne voudrois lui faire&nbsp;<br>
Je croi que Dieu les feit afin de nuire à l'homme:
Que regarder les yeus de ma douce contraire,&nbsp;<br>
"Il les feit, Pardaillan, pour nostre malheur, comme
Qui si fiers contre moi me font si dur effort.&nbsp;<br>
Les tygres, les lyons, les serpens, et les lous.
Ceste punition, tant son regard est fort,&nbsp;<br>
LIII
Luy seroit peine extréme, et se voudroit deffaire:&nbsp;<br>
J'avois cent fois juré de jamais ne revoir
Ne lit, ne pain, ne vin ne luy sauroient complaire,&nbsp;<br>
(O serment d'amoureus) l'angelique visage
Et sans plus au trespas seroit son reconfort.&nbsp;<br>
Qui depuis quinze mois en penible servage
Tout cela que lon dit d'une Meduse antique&nbsp;<br>
Emprisonne mon coeur, et ne le puis ravoir.
Au prix d'elle n'est rien que fable poëtique:&nbsp;<br>
J'en avois fait serment: mais je n'ai le pouvoir
Meduse seulement tournoit l'homme en rocher,&nbsp;<br>
M'engarder d'y aller, car mon forcé courage,
Mais cette-cy en-roche, englace, en-eaue, en-foue&nbsp;<br>
Bien que soit maugré moi surmonté de l'usage
Ceus qui ozent sans peur de ses yeus approcher:&nbsp;<br>
D'amour, tousjours m'y mene, abusé d'un espoir.
Et si en les tuant vous diriez qu'el' se joue.&nbsp;<br>
Le destin, Pardaillan, est une forte chose!
LVI&nbsp;<br>
L'homme dedans son coeur ses affaires dispose
Amour se vint cacher dans les yeus de Cassandre,&nbsp;<br>
Et le ciel fait tourner ses dessains au rebours.
Comme un tan, qui les boeufs fait mouscher par les bois,&nbsp;<br>
Je sçai bien que je fais ce que je ne doy faire,
Puis il choisit un trait sur tous ceus du carquois,&nbsp;<br>
Je sçay bien que je sui de trop folles amours:
Qui piquant sçait le mieus dedans les coeur descendre.&nbsp;<br>
Mais quoy, puis que le ciel delibere au contraire.
Il élongna ses mains, et feit son arc estendre&nbsp;<br>
LIV
En croissant, qui se courbe aus premiers jours du mois,&nbsp;<br>
Ne me sui point, Belleau, allant à la maison
Puis me lascha le trait, contre qui le harnois&nbsp;<br>
De celle qui me tient en douleur nompareille:
D'Achille, ni d'Hector ne se pourroit defendre.&nbsp;<br>
E ne sçais-tu pas bien ce que dit la corneille
Apres qu'il m'eut blessé, en riant s'en volla,&nbsp;<br>
A Mopse, qui suivoit la trace de Jason?
Et par l'air mon esprit avec lui s'en alla:&nbsp;<br>
Profete, dit l'oiseau, tu n'as point de raison
Mais toutefois au coeur me demoura la playe,&nbsp;<br>
De suivre cet amant qui de voir s'apareille
Laquelle pour neant cent fois le jour j'essaye&nbsp;<br>
Sa Dame: en autre part va, suy le et le conseille,
De la vouloir garir, mais tel est son efort&nbsp;<br>
Mais ore de le suivre il n'est pas la saison.
Que je voy bien qu'il faut que maugré moi je l'aye,&nbsp;<br>
Pour ton profit, Belleau, je ne vueil que tu voye'
Et que pour la garir le remede est la mort.&nbsp;<br>
Celle qui par les yeus la plaie au coeur m'envoye,
LVII&nbsp;<br>
De peur que tu ne prenne' un mal au mien pareil.
Dame, je meurs pour vous, je meurs pour vous, ma dame,&nbsp;<br>
Il suffist que sans toi je sois seul miserable:
Dame, je meurs pour vous, et si ne vous en chaut:&nbsp;<br>
Reste sain, je te pri, pour estre secourable
Je sens pour vous au coeur un brasier si treschaut,&nbsp;<br>
A ma douleur extréme, et m'y donner conseil.
Que pour ne le sentir je veus bien rendre l'ame.&nbsp;<br>
LV
Ce vous sera pour-tant un scandaleus diffame,&nbsp;<br>
Si j'avois un hayneus qui me voulust la mort
Si vous me meurdrissés sans vous faire un defaut:&nbsp;<br>
Pour me venger de luy je ne voudrois lui faire
E, que voulés vous dire? Esse ainsi comme il faut&nbsp;<br>
Que regarder les yeus de ma douce contraire,
Par pitié refroidir de vôtre amant la flamme?&nbsp;<br>
Qui si fiers contre moi me font si dur effort.
Non, vous ne me povés reprocher que je sois&nbsp;<br>
Ceste punition, tant son regard est fort,
Un effronté menteur, car mon teint, et ma voix,&nbsp;<br>
Luy seroit peine extréme, et se voudroit deffaire:
Et mon chef ja grison vous servent d'asseurance,&nbsp;<br>
Ne lit, ne pain, ne vin ne luy sauroient complaire,
Et mes yeus trop cavés, et mon coeur plein d'esmoi:&nbsp;<br>
Et sans plus au trespas seroit son reconfort.
E, que feroi-je plus, puis que nulle creance&nbsp;<br>
Tout cela que lon dit d'une Meduse antique
Il ne vous plait donner aus tesmoins de ma foy?&nbsp;<br>
Au prix d'elle n'est rien que fable poëtique:
LVIII&nbsp;<br>
Meduse seulement tournoit l'homme en rocher,
Il ne sera jamais, soit que je vive en terre,&nbsp;<br>
Mais cette-cy en-roche, englace, en-eaue, en-foue
Soit qu'aus enfers je sois, ou là-haut dans les cieus,&nbsp;<br>
Ceus qui ozent sans peur de ses yeus approcher:
Il ne sera jamais que je n'aime trop mieus&nbsp;<br>
Et si en les tuant vous diriez qu'el' se joue.
Que myrthe ou que laurier la feuille de lierre.&nbsp;<br>
LVI
Sus elle cette main qui tout le coeur me serre&nbsp;<br>
Amour se vint cacher dans les yeus de Cassandre,
Trassa premierement de ses doigts gracieus&nbsp;<br>
Comme un tan, qui les boeufs fait mouscher par les bois,
Les lettres de l'amour que me portoient ses yeus,&nbsp;<br>
Puis il choisit un trait sur tous ceus du carquois,
Et son coeur qui me fait une si douce guerre.&nbsp;<br>
Qui piquant sçait le mieus dedans les coeur descendre.
Jamais si belle fueille à la rive Cumée&nbsp;<br>
Il élongna ses mains, et feit son arc estendre
Ne fut par la Sibylle en lettres imprimée&nbsp;<br>
En croissant, qui se courbe aus premiers jours du mois,
Pour bailler par écrit aus hommes leur destin,&nbsp;<br>
Puis me lascha le trait, contre qui le harnois
Comme ma Dame a paint d'une espingle poignante&nbsp;<br>
D'Achille, ni d'Hector ne se pourroit defendre.
Mon sort sus le lierre: é Dieu, qu'amour est fin!&nbsp;<br>
Apres qu'il m'eut blessé, en riant s'en volla,
Est-il rien qu'en aimant une Dame n'invente.&nbsp;<br>
Et par l'air mon esprit avec lui s'en alla:
LIX&nbsp;<br>
Mais toutefois au coeur me demoura la playe,
J'aurai toujours au coeur attachés les rameaus&nbsp;<br>
Laquelle pour neant cent fois le jour j'essaye
Du lierre, où ma Dame oza premier écrire&nbsp;<br>
De la vouloir garir, mais tel est son efort
(Douce ruze d'amour) l'amour qu'el'n'osoit dire,&nbsp;<br>
Que je voy bien qu'il faut que maugré moi je l'aye,
L'amour d'elle et de moy, la cause de noz maus:&nbsp;<br>
Et que pour la garir le remede est la mort.
Sus toi jamais, sus toi orfrayes ny corbeaus&nbsp;<br>
LVII
Ne se viennent brancher, jamais ne puisse nuire&nbsp;<br>
Dame, je meurs pour vous, je meurs pour vous, ma dame,
Le fer à tes rameaus, et à toi soit l'empire&nbsp;<br>
Dame, je meurs pour vous, et si ne vous en chaut:
Pour jamais, dans les bois, de tous les arbrisseaus.&nbsp;<br>
Je sens pour vous au coeur un brasier si treschaut,
Non pour autre raison (ce croi-je) que la mienne,&nbsp;<br>
Que pour ne le sentir je veus bien rendre l'ame.
Bacchus orna de toi sa perruque Indienne,&nbsp;<br>
Ce vous sera pour-tant un scandaleus diffame,
Que pour recompenser le bien que tu lui fis,&nbsp;<br>
Si vous me meurdrissés sans vous faire un defaut:
Quand sus les bords de Die Ariadne laissée&nbsp;<br>
E, que voulés vous dire? Esse ainsi comme il faut
Luy feit sçavoir par toi ses amoureus ennuys,&nbsp;<br>
Par pitié refroidir de vôtre amant la flamme?
Ecrivant dessus toi s'amour et sa pensée.&nbsp;<br>
Non, vous ne me povés reprocher que je sois
LX&nbsp;<br>
Un effronté menteur, car mon teint, et ma voix,
Je mourois de plaisir voyant par ces bocages&nbsp;<br>
Et mon chef ja grison vous servent d'asseurance,
Les arbres enlassés de lierres épars,&nbsp;<br>
Et mes yeus trop cavés, et mon coeur plein d'esmoi:
Et la lambruche errante en mille et mille pars&nbsp;<br>
E, que feroi-je plus, puis que nulle creance
Es aubepins fleuris prés des roses sauvages.&nbsp;<br>
Il ne vous plait donner aus tesmoins de ma foy?
Je mourois de plaisir oyant les dous langages&nbsp;<br>
LVIII
Des hupes, et coqus, et des ramiers rouhars&nbsp;<br>
Il ne sera jamais, soit que je vive en terre,
Sur le haut d'un fouteau bec en bec fretillars,&nbsp;<br>
Soit qu'aus enfers je sois, ou là-haut dans les cieus,
Et des tourtres aussi voyant les mariages.&nbsp;<br>
Il ne sera jamais que je n'aime trop mieus
Je mourois de plaisir voyant en ces beaus mois&nbsp;<br>
Que myrthe ou que laurier la feuille de lierre.
Sortir de bon matin les chevreuilz hors des bois,&nbsp;<br>
Sus elle cette main qui tout le coeur me serre
Et de voir fretiller dans le ciel l'alouëtte.&nbsp;<br>
Trassa premierement de ses doigts gracieus
Je mourois de plaisir, où je meurs de soucy,&nbsp;<br>
Les lettres de l'amour que me portoient ses yeus,
Ne voyant point les yeus d'une que je souhette&nbsp;<br>
Et son coeur qui me fait une si douce guerre.
Seule, une heure en mes bras en ce bocage icy.&nbsp;<br>
Jamais si belle fueille à la rive Cumée
LXI&nbsp;<br>
Ne fut par la Sibylle en lettres imprimée
A pas mornes et lents seulet je me promene,&nbsp;<br>
Pour bailler par écrit aus hommes leur destin,
Non-challant de moi-mesme: et quelque part que j'aille&nbsp;<br>
Comme ma Dame a paint d'une espingle poignante
Un importun penser me livre la bataille,&nbsp;<br>
Mon sort sus le lierre: é Dieu, qu'amour est fin!
Et ma fiere ennemie au devant me ramene:&nbsp;<br>
Est-il rien qu'en aimant une Dame n'invente.
Penser, un peu de treve, et permets que ma pene&nbsp;<br>
LIX
Se soulage un petit, et tousjours ne me baille&nbsp;<br>
J'aurai toujours au coeur attachés les rameaus
Argument de pleurer pour une qui travaille&nbsp;<br>
Du lierre, où ma Dame oza premier écrire
Sans relasche mon coeur, tant elle est inhumaine.&nbsp;<br>
(Douce ruze d'amour) l'amour qu'el'n'osoit dire,
Ou si tu ne le fais, je te tromperay bien:&nbsp;<br>
L'amour d'elle et de moy, la cause de noz maus:
Je t'assure ma foy que tu perdras ta place&nbsp;<br>
Sus toi jamais, sus toi orfrayes ny corbeaus
Bien-tost, car je mouray pour ruïner ton fort.&nbsp;<br>
Ne se viennent brancher, jamais ne puisse nuire
Puis, quand je seray mort, plus ne sentiray rien&nbsp;<br>
Le fer à tes rameaus, et à toi soit l'empire
(Tu m'auras beau pincer) que ta rigueur me face,&nbsp;<br>
Pour jamais, dans les bois, de tous les arbrisseaus.
Ma dame, ni amour: car rien ne sent un mort.&nbsp;<br>
Non pour autre raison (ce croi-je) que la mienne,
LXII&nbsp;<br>
Bacchus orna de toi sa perruque Indienne,
Pourtant si ta maitresse est un petit putain,&nbsp;<br>
Que pour recompenser le bien que tu lui fis,
Tu ne dois pour cela te courrousser contre elle&nbsp;<br>
Quand sus les bords de Die Ariadne laissée
Voudrois-tu bien hayr ton ami plus fidelle&nbsp;<br>
Luy feit sçavoir par toi ses amoureus ennuys,
Pour estre un peu jureur, ou trop haut à la main?&nbsp;<br>
Ecrivant dessus toi s'amour et sa pensée.
Il ne faut prendre ainsi tous pechés à dedain,&nbsp;<br>
LX
Quand la faute en pechant n'est pas continuelle:&nbsp;<br>
Je mourois de plaisir voyant par ces bocages
Puis il faut endurer d'une maitresse belle&nbsp;<br>
Les arbres enlassés de lierres épars,
Qui confesse sa faute, et s'en repent soudain.&nbsp;<br>
Et la lambruche errante en mille et mille pars
Tu me diras qu'honneste et gentille est t'amie,&nbsp;<br>
Es aubepins fleuris prés des roses sauvages.
Et je te respondrai qu'honneste fut Cynthie,&nbsp;<br>
Je mourois de plaisir oyant les dous langages
L'amie de Properce en vers ingenieus,&nbsp;<br>
Des hupes, et coqus, et des ramiers rouhars
Et si ne laissa pas de faire amour diverse.&nbsp;<br>
Sur le haut d'un fouteau bec en bec fretillars,
Endure donc, Ami, car tu ne vaus pas mieus&nbsp;<br>
Et des tourtres aussi voyant les mariages.
Que Catulle valut, que Tibulle et Properce.&nbsp;<br>
Je mourois de plaisir voyant en ces beaus mois
LXIII&nbsp;<br>
Sortir de bon matin les chevreuilz hors des bois,
Amour, voiant du ciel un pescheur sur la mer,&nbsp;<br>
Et de voir fretiller dans le ciel l'alouëtte.
Calla son aisle bas sur le bord du navire,&nbsp;<br>
Je mourois de plaisir, où je meurs de soucy,
Puis il dit au pescheur: je te pri que je tire&nbsp;<br>
Ne voyant point les yeus d'une que je souhette
Ton ret, qu'au fond de l'eau le plomb fait abymer.&nbsp;<br>
Seule, une heure en mes bras en ce bocage icy.
Un daulphin, qui savoit le feu qui vient d'aimer,&nbsp;<br>
LXI
Voiant Amour sur l'eau, à Tethis le va dire:&nbsp;<br>
A pas mornes et lents seulet je me promene,
Tethys, si quelque soing vous tient de vôtre empire,&nbsp;<br>
Non-challant de moi-mesme: et quelque part que j'aille
Secourés-le, ou bien tost il est prest d'enflammer.&nbsp;<br>
Un importun penser me livre la bataille,
Tethys laissa de peur sa caverne profonde,&nbsp;<br>
Et ma fiere ennemie au devant me ramene:
Haussa le chef sur l'eau, et vit Amour sur l'onde&nbsp;<br>
Penser, un peu de treve, et permets que ma pene
Qui peschoit à l'escart: las, dit el', mon nepveu,&nbsp;<br>
Se soulage un petit, et tousjours ne me baille
Oustés-vous, ne bruslés mes ondes, je vous prie:&nbsp;<br>
Argument de pleurer pour une qui travaille
N'aiés peur, dit Amour, car je n'ay plus de feu,&nbsp;<br>
Sans relasche mon coeur, tant elle est inhumaine.
Tout le feu que j'avois est aus yeus de Marie.&nbsp;<br>
Ou si tu ne le fais, je te tromperay bien:
LXIV&nbsp;<br>
Je t'assure ma foy que tu perdras ta place
Calliste mon amy, je croi que je me meurs,&nbsp;<br>
Bien-tost, car je mouray pour ruïner ton fort.
Je sens de trop aimer la fievre continue,&nbsp;<br>
Puis, quand je seray mort, plus ne sentiray rien
Qui de chaud, qui de froid jamais ne diminue,&nbsp;<br>
(Tu m'auras beau pincer) que ta rigueur me face,
Ainçois de pis en pis rengrege mes douleurs:&nbsp;<br>
Ma dame, ni amour: car rien ne sent un mort.
Plus je vueil refroidir mes bouillantes chaleurs,&nbsp;<br>
LXII
Plus Amour les ralume: et plus je m'esvertue&nbsp;<br>
Pourtant si ta maitresse est un petit putain,
De rechaufer mon froid, plus la froideur me tue,&nbsp;<br>
Tu ne dois pour cela te courrousser contre elle
Pour languir au meilleu de deux divers malheurs.&nbsp;<br>
Voudrois-tu bien hayr ton ami plus fidelle
Un ardent apetit de joüir de l'aimée&nbsp;<br>
Pour estre un peu jureur, ou trop haut à la main?
Tient tellement mon ame en pensers alumée,&nbsp;<br>
Il ne faut prendre ainsi tous pechés à dedain,
Et ces pensers douteus me font réver si fort,&nbsp;<br>
Quand la faute en pechant n'est pas continuelle:
Que diette, ne just, ni section de vene&nbsp;<br>
Puis il faut endurer d'une maitresse belle
Ne me sauroient garir, car de la seule mort&nbsp;<br>
Qui confesse sa faute, et s'en repent soudain.
Depend, et non d'ailleurs, le secours de ma pene.&nbsp;<br>
Tu me diras qu'honneste et gentille est t'amie,
LXV&nbsp;<br>
Et je te respondrai qu'honneste fut Cynthie,
Je veus lire en trois jours l'Iliade d'Homere,&nbsp;<br>
L'amie de Properce en vers ingenieus,
Et pour-ce; Corydon, ferme bien l'huis sur moi:&nbsp;<br>
Et si ne laissa pas de faire amour diverse.
Si rien me vient troubler, je t'asseure ma foi,&nbsp;<br>
Endure donc, Ami, car tu ne vaus pas mieus
Tu sentiras combien pesante est ma colere.&nbsp;<br>
Que Catulle valut, que Tibulle et Properce.
Je ne veus seulement que nôtre chambriere&nbsp;<br>
LXIII
Vienne faire mon lit, ou m'apreste de quoi&nbsp;<br>
Amour, voiant du ciel un pescheur sur la mer,
Je menge, car je veus demeurer à requoi&nbsp;<br>
Calla son aisle bas sur le bord du navire,
Trois jours, pour faire apres un an de bonne chere.&nbsp;<br>
Puis il dit au pescheur: je te pri que je tire
Mais si quelcun venoit de la part de Cassandre,&nbsp;<br>
Ton ret, qu'au fond de l'eau le plomb fait abymer.
Ouvre lui tost la porte, et ne le fais attendre:&nbsp;<br>
Un daulphin, qui savoit le feu qui vient d'aimer,
Soudain entre en ma chambre, et me vien acoustrer,&nbsp;<br>
Voiant Amour sur l'eau, à Tethis le va dire:
Je veus tanseulement à lui seul me monstrer:&nbsp;<br>
Tethys, si quelque soing vous tient de vôtre empire,
Au reste, si un Dieu vouloit pour moi descendre&nbsp;<br>
Secourés-le, ou bien tost il est prest d'enflammer.
Du ciel, ferme la porte, et ne le laisse entrer.&nbsp;<br>
Tethys laissa de peur sa caverne profonde,
LXVI&nbsp;<br>
Haussa le chef sur l'eau, et vit Amour sur l'onde
J'ai l'ame pour un lit de regrets si touchée,&nbsp;<br>
Qui peschoit à l'escart: las, dit el', mon nepveu,
Que nul, et fusse un Roy, ne fera que j'aprouche&nbsp;<br>
Oustés-vous, ne bruslés mes ondes, je vous prie:
Jamais de la maison, encor moins de la couche&nbsp;<br>
N'aiés peur, dit Amour, car je n'ay plus de feu,
Où je vy ma maitresse, au mois de May couchée.&nbsp;<br>
Tout le feu que j'avois est aus yeus de Marie.
Un somme languissant la tenoit mi-panchée.&nbsp;<br>
LXIV
Dessus le coude droit, fermant sa belle bouche,&nbsp;<br>
Calliste mon amy, je croi que je me meurs,
Et ses yeus, dans lesquels l'archer Amour se couche,&nbsp;<br>
Je sens de trop aimer la fievre continue,
Ayant tousjours la fleche en la corde encochée.&nbsp;<br>
Qui de chaud, qui de froid jamais ne diminue,
Sa teste en ce beau mois, sans plus, estoit couverte&nbsp;<br>
Ainçois de pis en pis rengrege mes douleurs:
D'un riche escofion ouvré de soie verte,&nbsp;<br>
Plus je vueil refroidir mes bouillantes chaleurs,
Où les Graces venoient à l'envy se nicher,&nbsp;<br>
Plus Amour les ralume: et plus je m'esvertue
Et dedans ses cheveus choysissoient leur demeure.&nbsp;<br>
De rechaufer mon froid, plus la froideur me tue,
J'en ai tel souvenir que je voudrois qu'à l'heure&nbsp;<br>
Pour languir au meilleu de deux divers malheurs.
(Pour jamais n'y penser) son oeil m'eust fait rocher.&nbsp;<br>
Un ardent apetit de joüir de l'aimée
LXVII&nbsp;<br>
Tient tellement mon ame en pensers alumée,
Douce, belle, gentille, et bien fleurente Rose,&nbsp;<br>
Et ces pensers douteus me font réver si fort,
Que tu es à bon droit à Venus consacrée,&nbsp;<br>
Que diette, ne just, ni section de vene
Ta delicate odeur hommes et Dieus recrée,&nbsp;<br>
Ne me sauroient garir, car de la seule mort
Et bref, Rose, tu es belle sur toute chose.&nbsp;<br>
Depend, et non d'ailleurs, le secours de ma pene.
La Grace pour son chef un chapellet compose&nbsp;<br>
LXV
De ta feuille, et tousjours sa gorge en est parée,&nbsp;<br>
Je veus lire en trois jours l'Iliade d'Homere,
Et mille fois le jour la gaye Cytherée&nbsp;<br>
Et pour-ce; Corydon, ferme bien l'huis sur moi:
De ton eau, pour son fard, sa belle joue arrose.&nbsp;<br>
Si rien me vient troubler, je t'asseure ma foi,
Hé Dieu, que je suis aise alors que je te voi&nbsp;<br>
Tu sentiras combien pesante est ma colere.
Esclorre au point du jour sur l'espine à requoy,&nbsp;<br>
Je ne veus seulement que nôtre chambriere
Dedans quelque jardin pres d'un bois solitere!&nbsp;<br>
Vienne faire mon lit, ou m'apreste de quoi
De toi les Nymphes ont les coudes et le sein:&nbsp;<br>
Je menge, car je veus demeurer à requoi
De toi l'Aurore emprunte et sa joue, et sa main,&nbsp;<br>
Trois jours, pour faire apres un an de bonne chere.
Et son teint celle-là qui d'Amour est la mere.&nbsp;<br>
Mais si quelcun venoit de la part de Cassandre,
LXVIII&nbsp;<br>
Ouvre lui tost la porte, et ne le fais attendre:
R. Que dis-tu, que fais-tu, pensive tourterelle&nbsp;<br>
Soudain entre en ma chambre, et me vien acoustrer,
Desus cest arbre sec? T. Helas je me lamente.&nbsp;<br>
Je veus tanseulement à lui seul me monstrer:
R. Et pourquoi, di-le moi? T. De ma compagne absente,&nbsp;<br>
Au reste, si un Dieu vouloit pour moi descendre
Plus chere que ma vie. R. En quelle part est-elle?&nbsp;<br>
Du ciel, ferme la porte, et ne le laisse entrer.
T. Un cruel oyselleur par glueuse cautelle&nbsp;<br>
LXVI
L'a prise, et l'a tuée: et nuit et jour je chante&nbsp;<br>
J'ai l'ame pour un lit de regrets si touchée,
Son trespas dans ces bois, nommant la mort méchante&nbsp;<br>
Que nul, et fusse un Roy, ne fera que j'aprouche
Qu'elle ne m'a tuée aveques ma fidelle.&nbsp;<br>
Jamais de la maison, encor moins de la couche
R. Voudrois-tu bien mourir aveques ta compaigne?&nbsp;<br>
Où je vy ma maitresse, au mois de May couchée.
T. Oui, car aussi bien je languis de douleur,&nbsp;<br>
Un somme languissant la tenoit mi-panchée.
Et toujours le regret de sa mort m'acompaigne.&nbsp;<br>
Dessus le coude droit, fermant sa belle bouche,
R. O gentils oysellets, que vous estes heureus&nbsp;<br>
Et ses yeus, dans lesquels l'archer Amour se couche,
D'aimer si constamment, qu'heureus est vôtre coeur,&nbsp;<br>
Ayant tousjours la fleche en la corde encochée.
Qui, sans point varier, est tousjours amoureus!&nbsp;<br>
Sa teste en ce beau mois, sans plus, estoit couverte
LXIX&nbsp;<br>
D'un riche escofion ouvré de soie verte,
Le sang fut bien maudit de ceste horrible face&nbsp;<br>
Où les Graces venoient à l'envy se nicher,
Qui premier engendra les serpens venimeus:&nbsp;<br>
Et dedans ses cheveus choysissoient leur demeure.
Helene, tu devois quand tu marchas sus eus,&nbsp;<br>
J'en ai tel souvenir que je voudrois qu'à l'heure
Non sans plus les arner, mais en perdre la race.&nbsp;<br>
(Pour jamais n'y penser) son oeil m'eust fait rocher.
Nous estions l'autre jour dans une verte place,&nbsp;<br>
LXVII
Cuillants, m'amie, et moi, les fraiziers savoureux,&nbsp;<br>
Douce, belle, gentille, et bien fleurente Rose,
Un pot de cresme estoit au meillieu de nous deux,&nbsp;<br>
Que tu es à bon droit à Venus consacrée,
Et sur le jonc du laict treluisant comme glace.&nbsp;<br>
Ta delicate odeur hommes et Dieus recrée,
Quand un villain serpent, de venin tout couvert,&nbsp;<br>
Et bref, Rose, tu es belle sur toute chose.
Par ne sçai quel malheur sortit d'un buisson vert&nbsp;<br>
La Grace pour son chef un chapellet compose
Contre le pied de celle à qui je fais service,&nbsp;<br>
De ta feuille, et tousjours sa gorge en est parée,
Pour la blesser à mort de son venin infect;&nbsp;<br>
Et mille fois le jour la gaye Cytherée
Et lors je m'écriay, pensant qu'il nous eut faict&nbsp;<br>
De ton eau, pour son fard, sa belle joue arrose.
Moi, un second Orphée, et elle, une Eurydice.&nbsp;<br>
Hé Dieu, que je suis aise alors que je te voi
LXX<br>
Esclorre au point du jour sur l'espine à requoy,
Marie, tout ainsi que vous m'avés tourné&nbsp;<br>
Dedans quelque jardin pres d'un bois solitere!
Mon sens, et ma raison, par vôtre voix subtile,&nbsp;<br>
De toi les Nymphes ont les coudes et le sein:
Ainsi m'avés tourné mon grave premier stile,&nbsp;<br>
De toi l'Aurore emprunte et sa joue, et sa main,
Qui pour chanter si bas n'estoit point destiné:&nbsp;<br>
Et son teint celle-là qui d'Amour est la mere.
Aumoins si vous m'aviés, pour ma perte, donné&nbsp;<br>
LXVIII
Congé de manier vôtre cuisse gentile,&nbsp;<br>
R. Que dis-tu, que fais-tu, pensive tourterelle
Ou si à mes baisers vous n'estiés dificile,&nbsp;<br>
Desus cest arbre sec? T. Helas je me lamente.
Je n'eusse regretté mon stile abandonné.&nbsp;<br>
R. Et pourquoi, di-le moi? T. De ma compagne absente,
Las, ce qui plus me deut, c'est que vous n'êtes pas&nbsp;<br>
Plus chere que ma vie. R. En quelle part est-elle?
Contente de me voir ainsi parler si bas,&nbsp;<br>
T. Un cruel oyselleur par glueuse cautelle
Qui soulois m'élever d'une muse hautaine:&nbsp;<br>
L'a prise, et l'a tuée: et nuit et jour je chante
Mais, me rendant à vous, vous me manquez de foy,&nbsp;<br>
Son trespas dans ces bois, nommant la mort méchante
Et si me traités mal, et sans m'outer de peine&nbsp;<br>
Qu'elle ne m'a tuée aveques ma fidelle.
Tousjours vous me liés, et triomphés de moi.<br>
R. Voudrois-tu bien mourir aveques ta compaigne?
</p>
T. Oui, car aussi bien je languis de douleur,
Et toujours le regret de sa mort m'acompaigne.
R. O gentils oysellets, que vous estes heureus
D'aimer si constamment, qu'heureus est vôtre coeur,
Qui, sans point varier, est tousjours amoureus!
LXIX
Le sang fut bien maudit de ceste horrible face
Qui premier engendra les serpens venimeus:
Helene, tu devois quand tu marchas sus eus,
Non sans plus les arner, mais en perdre la race.
Nous estions l'autre jour dans une verte place,
Cuillants, m'amie, et moi, les fraiziers savoureux,
Un pot de cresme estoit au meillieu de nous deux,
Et sur le jonc du laict treluisant comme glace.
Quand un villain serpent, de venin tout couvert,
Par ne sçai quel malheur sortit d'un buisson vert
Contre le pied de celle à qui je fais service,
Pour la blesser à mort de son venin infect;
Et lors je m'écriay, pensant qu'il nous eut faict
Moi, un second Orphée, et elle, une Eurydice.
LXX
Marie, tout ainsi que vous m'avés tourné
Mon sens, et ma raison, par vôtre voix subtile,
Ainsi m'avés tourné mon grave premier stile,
Qui pour chanter si bas n'estoit point destiné:
Aumoins si vous m'aviés, pour ma perte, donné
Congé de manier vôtre cuisse gentile,
Ou si à mes baisers vous n'estiés dificile,
Je n'eusse regretté mon stile abandonné.
Las, ce qui plus me deut, c'est que vous n'êtes pas
Contente de me voir ainsi parler si bas,
Qui soulois m'élever d'une muse hautaine:
Mais, me rendant à vous, vous me manquez de foy,
Et si me traités mal, et sans m'outer de peine
Tousjours vous me liés, et triomphés de moi.</poem>
 
 
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