« Périclès/Traduction Guizot, 1862 » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
mise en page, suite
mise en forme, suite
Ligne 1 :
({{Titre|Périclès, prince de Tyr|[[Auteur:William Shakespeare|William Shakespeare]]|1606|Périclès, prince de Tyr}}
 
{{ThéâtreDébut}}
Ligne 106 :
</poem>
 
Triste alternative de cette dernière ligne ! Mais, ô vous, puissances qui avez donné au ciel d'innombrables yeux pour voir les actions des hommes, pourquoi n'obscurcissent-ils pas sans cesse leurs regards, si ce que je viens de lire en pâlissant est véritable ? {{didascalie|(Il prend la main de la princesse.)}} Beau cristal de lumière, je vous aimais et vous aimerais encore si cette noble cassette ne contenait pas le crime ; mais je dois vous dire... Ah ! mes pensées se révoltent, car il n'est pas honnête homme celui qui, sachant que le crime est en dedans, touche la porte. Vous êtes une belle viole, et vos sens en sont les cordes. Touchée par une main légitime, votre harmonie ferait abaisser les cieux et rendrait les dieux attentifs. Mais touchée avant votre temps, c'est l'enfer seul que vos sons discordants réjouissent. En bonne conscience... je renonce à vous.
 
{{personnage|Antiochus : }}Prince Périclès, ne la touchez pas, sous peine de perdre la vie. C'est un point aussi dangereux pour vous que le reste. D'après notre loi, votre temps est expiré : ou devinez, ou subissez votre sentence.
Ligne 164 :
{{personnage|Hélicanus : }}Silence, silence, seigneurs, et laissez parler l'expérience. Ils abusent le roi, ceux qui le flattent. La flatterie est le soufflet qui enfle le crime. Celui qu'on flatte n'est qu'une étincelle à laquelle le souffle de la flatterie donne la chaleur et la flamme, tandis que les remontrances respectueuses conviennent aux rois ; car ils sont hommes, et peuvent se tromper. Quand le seigneur Câlin vous annonce la paix il vous flatte, et déclare la guerre à votre roi. Prince, pardonnez-moi, ou flattez-moi si vous voulez, mais je ne puis me mettre beaucoup plus bas que mes genoux.
 
{{personnage|Périclès : }}Laissez-nous tous ; mais allez visiter le port pour examiner nos vaisseaux et nos munitions, et puis revenez. {{didascalie|(Les seigneurs sortent.)}} Hélicanus, toi, tu m'as ému. Que vois-tu sur mon front ?
 
{{personnage|Hélicanus : }}Un air chagrin, seigneur redoutable.
Ligne 193 :
 
{{personnage|Périclès : }}Tyr, adieu donc ; et je me rends à Tharse, j'y recevrai de tes nouvelles et je me conduirai d'après tes lettres. Je te confie le soin que j'ai toujours eu et que j'ai encore de mes sujets : ta sagesse est assez puissante pour t'en charger, je compte sur ta parole, je ne te demande pas un serment. Celui qui ne craint pas d'en violer un en violera bientôt deux. Mais, dans nos différentes sphères, nous vivrons avec tant de sincérité, que le temps ne donnera par nous aucune preuve nouvelle de cette double vérité. Tu t'es montré sujet loyal, et moi bon prince.
 
{{didascalie|(Ils sortent.)}}
 
{{Scène| 3}}
Ligne 199 ⟶ 200 :
{{didascalie|Tyr. Un vestibule du palais.}}
 
{{didascalie|Entre {{personnage|Thaliard}}}}
 
{{personnage|Thaliard : }}Voici donc Tyr et la cour. C'est ici qu'il me faut tuer le roi Périclès ; et si j'y manque, je suis sûr d'être tué à mon retour. C'est dangereux. Allons, je m'aperçois qu'il fut sage et prudent, celui qui, invité à demander ce qu'il voudrait à un roi, lui demanda de n'être admis à la confidence d'aucun de ses secrets. Je vois bien qu'il avait raison ; car si un roi dit à un homme d'être un coquin, il est obligé de l'être par son serment. Silence. Voici les seigneurs de Tyr. (Hélicanus entre avec Escanès et autres seigneurs.)
 
{{didascalie|(Hélicanus entre avec Escanès et autres seigneurs.)}}
{{personnage|Thaliard : }}Voici donc Tyr et la cour. C'est ici qu'il me faut tuer le roi Périclès ; et si j'y manque, je suis sûr d'être tué à mon retour. C'est dangereux. Allons, je m'aperçois qu'il fut sage et prudent, celui qui, invité à demander ce qu'il voudrait à un roi, lui demanda de n'être admis à la confidence d'aucun de ses secrets. Je vois bien qu'il avait raison ; car si un roi dit à un homme d'être un coquin, il est obligé de l'être par son serment. Silence. Voici les seigneurs de Tyr. (Hélicanus entre avec Escanès et autres seigneurs.)
 
{{personnage|Hélicanus : }}Vous n'avez pas le choix, mes pairs de Tyr, de faire d'autres questions sur le départ de votre roi. Cette commission, marquée de son sceau, qu'il m'a laissée, dit assez qu'il est parti pour un voyage.
Ligne 283 ⟶ 286 :
{{didascalie|Entre Gower.}}
 
{{personnage|Gower : }}Vous venez de voir un puissant roi entraîner sa fille à l'inceste, et un autre prince meilleur et plus vertueux se rendre respectable par ses actions et ses paroles. Tranquillisez-vous donc, jusqu'à ce qu'il ait échappé à la nécessité. Je vous montrerai comment ceux qui, supportant l'infortune, perdent un grain de sable et gagnent une montagne. Le prince vertueux, auquel je donne ma bénédiction est encore à Tharse où chacun écoute ce qu'il dit comme chose sacrée, et, pour éterniser le souvenir de ses bienfaits, lui décerne une statue d'or ; mais d'autres nouveautés vont être représentées sous vos yeux : qu'ai-je besoin de parler ? {{didascalie|(Spectacle muet. Périclès entre par une porte, parlant à Cléon, qui est accompagné d'une suite ; par une autre porte entre un messager avec une lettre pour Périclès ; Périclès montre la lettre à Cléon, ensuite il donne une récompense au messager. Cléon et Périclès sortent chacun de leur côté.)}} -Le bon Hélicanus est resté à Tyr, ne mangeant pas le miel des autres comme un frelon. Tous ses efforts tendent à tuer les mauvais et à faire vivre les bons. Pour remplir les instructions de son prince, il l'informe de tout ce qui arrive à Tyr, et lui apprend que Thaliard était venu avec l'intention secrète de l'assassiner, et qu'il n'était pas sûr pour lui de rester plus longtemps à Tharse. Périclès s'est embarqué de nouveau sur les mers, si souvent fatales au repos de l'homme ; le vent commence à souffler, le tonnerre et les flots font un tel tapage que le vaisseau qui aurait dû lui servir d'asile fait naufrage et se brise ; le bon prince ayant tout perdu est porté de côte en côte par les vagues ; tout l'équipage a péri, lui seul s'échappe ; enfin la fortune, lasse d'être injuste, le jette sur un rivage ; il aborde, heureusement le voici. Excusez le vieux Gower de n'en pas dire davantage, il a été déjà assez long.
 
{{didascalie|(Il sort.)}}
Ligne 480 ⟶ 483 :
 
{{Scène| II}}
 
{{didascalie|Place publique, ou plate-forme conduisant aux lices. Sur un des côtés de la
place est un pavillon pour la réception du roi, de la princesse, et des seigneurs.}}
seigneurs.
 
{{didascalie|Entrent SIMONIDESimonide, THAISAThaisa, des seigneurs ; suite.}}
 
{{personnage|Simonide : }}Les chevaliers sont-ils prêts à commencer le spectacle ?
 
{{personnage|Premier Seigneur : }}Ils sont prêts, seigneur, et n'attendent que votre
arrivée pour se présenter.
 
{{personnage|Simonide : }}Allez leur dire que nous sommes prêts, et que notre fille, en
l'honneur de qui sont célébrées ces fêtes, est ici assise comme la fille de la
beauté que la nature créa pour l'admiration des hommes.
 
{{didascalie|(Un seigneur sort.)}}
{{personnage|Thaisa : }}Mon père, vous aimez à mettre ma louange au-dessus de mon
 
mérite.
{{personnage|Thaisa : }}Mon père, vous aimez à mettre ma louange au-dessus de mon mérite.
 
{{personnage|Simonide : }}Cela doit être ; car les princes sont un modèle que les dieux
font semblable à eux. Comme les bijoux perdent leur éclat si on les
Ligne 498 ⟶ 507 :
hommage. C'est maintenant un honneur qui vous regarde, ma fille,
d'expliquer les vues de chaque chevalier dans sa devise.
 
{{personnage|Thaisa : }}C'est ce que je ferai pour conserver mon honneur.
 
{{didascalie|(Entre un chevalier. Il passe sur le théâtre, et son écuyer offre son écu à la princesse.)}}
princesse.)
 
{{personnage|Simonide : }}Quel est ce premier qui se présente ?
 
{{personnage|Thaisa : }}Un chevalier de Sparte, mon illustre père. Et l'emblème qu'il
porte sur son bouclier est un noir Éthiopien qui regarde le soleil ; la devise
est : Lux tua vita mihi.
 
{{personnage|Simonide : }}Il vous aime bien celui qui tient la vie de vous. {{didascalie|(Un second
chevalier passe.)}} Quel est le second qui se présente ?
 
{{personnage|Thaisa : }}Un prince de Macédoine, mon noble père ! L'emblème de son
bouclier est un chevalier armé, vaincu par une dame ; la devise est en
espagnol : Più per dulçura que per fuerça.
 
{{didascalie|(Un troisième chevalier passe.)}}
 
{{personnage|Simonide : }}Et quel est le troisième ?
 
{{personnage|Thaisa : }}Le troisième est d'Antioche ; son emblème est une guirlande de
chevalier, avec cette devise : Me pompæ provehit apex.
 
{{didascalie|(Un quatrième chevalier passe.)}}
 
{{personnage|Simonide : }}Quel est le quatrième ?
 
{{personnage|Thaisa : }}Il porte une torche brûlante renversée, avec ces mots : Quod me
alit me extinguit.
 
{{personnage|Simonide : }}Ce qui veut dire que la beauté a le pouvoir d'enflammer et de
faire périr.
 
{{didascalie|(Un cinquième chevalier passe.)}}
 
{{personnage|Thaisa : }}Le cinquième a une main entourée de nuages, tenant de l'or
éprouvé par une pierre de touche. La devise dit : Sic spectanda fides.
 
{{didascalie|(Un sixième chevalier passe.)}}
 
{{personnage|Simonide : }}Et quel est le sixième et dernier, qui t'a présenté lui-même
son bouclier avec tant de grâce ?
 
{{personnage|Thaisa : }}Il paraît étranger ; mais son emblème est une branche flétrie qui
n'est verte qu'à l'extrémité, avec cette devise : In hac spe vivo.
 
{{personnage|Simonide : }}Charmante devise ! Dans l'état de dénûment où il est, il
espère que par vous sa fortune se relèvera.
 
{{personnage|Premier Seigneur : }}Il avait besoin de promettre plus qu'on ne doit
attendre de son extérieur ; car, à son armure rouillée, il semble avoir plus
l'usage du fouet que de la lance.
 
{{personnage|Second Seigneur : }}Il peut bien être un étranger, car il vient à un noble
tournoi avec un étrange appareil.
 
TROISIÈME{{personnage|Troisième SEIGNEUR.Seigneur : }}C'est à dessein qu'il a laissé jusqu'à ce jour son
armure se rouiller, pour la blanchir dans la poussière.
 
{{personnage|Simonide : }}C'est une folle opinion qui nous fait juger l'homme par son
extérieur. Mais en voilà assez : les chevaliers s'avancent ; plaçons-nous
dans les galeries.
 
{{didascalie|(Il sortent. Acclamations ; cris répétés de : Vive le pauvre chevalier !)}}
 
{{Scène| III}}
 
Salle d'apparat. Banquet préparé.
SIMONIDE entre avec THAISA, les SEIGNEURS, les CHEVALIERS et