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À ce commandement inattendu, la surprise fut grande à bord du Forward.
Shandon regardait fixement Wall. Les ingénieurs stupéfaits hésitaient à descendre dans la chambre de la machine.
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Brunton se dirigea vers l’écoutille ; mais au moment de descendre, il s’arrêta.
Johnson, Bell, Simpson se dirigèrent vers le matelot que la colère mettait hors de lui.
Hatteras s’avança vers lui.
En parlant de la sorte, il arma un revolver et le dirigea sur le matelot.
Un murmure se fit entendre.
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En ce moment, Johnson et Bell désarmèrent Pen, qui ne résista plus et se laissa conduire à fond de cale.
L’ingénieur, suivi de Plover et de Waren, descendit à son poste. Hatteras revint sur la dunette.
Bientôt la vapeur eut acquis une pression suffisante : les ancres du Forward furent levées ; celui-ci, coupant vers l’est, mit le cap sur la pointe Becher, et trancha de son étrave les jeunes glaces déjà formées.
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Le Forward chenalait donc, non sans une extrême difficulté, au milieu des tourbillons de neige. Cependant, avec la mobilité qui caractérise l’atmosphère de ces régions, le soleil reparaissait de temps à autre ; la température remontait de quelques degrés ; les obstacles se fondaient comme par enchantement, et une belle nappe d’eau, charmante à contempler, s’étendait là où naguère les glaçons hérissaient toutes les passes. L’horizon revêtait de magnifiques teintes orangées sur lesquelles l’œil se reposait complaisamment de l’éternelle blancheur des neiges.
Le jeudi, 26 juillet, le Forward rasa l’île Dundas, et mit ensuite le cap plus au nord ; mais alors il se trouva face à face avec une banquise, haute de huit à neuf pieds et formée de petits ice-bergs arrachés à la côte ; il fut obligé d’en prolonger longtemps la courbure dans l’ouest. Le craquement ininterrompu des glaces, se joignant aux gémissements du navire, formait un bruit triste qui tenait du soupir et de la plainte. Enfin le brick trouva une passe et s’y avança péniblement ;
==[[Page:Verne - Voyages et aventures du capitaine Hatteras.djvu/165]]== souvent, un glaçon énorme paralysait sa course pendant de longues heures ; le brouillard gênait la vue du pilote ; tant que l’on voit à un mille en avant, on peut parer facilement les obstacles ; mais au milieu de ces tourbillons embrumés, la vue s’arrêtait souvent à moins d’une encablure. La houle très forte fatiguait. Parfois, les nuages lisses et polis prenaient un aspect particulier, comme s’ils eussent réfléchi les bancs de glace ; il y eut des jours où les rayons jaunâtres du soleil ne parvinrent pas à franchir la brume tenace.
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Enfin, après six jours de cette lente navigation, le 1er août, la pointe Becher fut relevée dans le nord ; Hatteras passa ces dernières heures dans les barres de perroquet ; la mer libre entrevue par Stewart, le 30 mai 1851, vers 76°20’ de latitude, ne pouvait être éloignée, et cependant, si loin qu’Hatteras promenât ses regards, il n’aperçut aucun indice d’un bassin polaire dégagé de glaces. Il redescendit sans mot dire.
==[[Page:Verne - Voyages et aventures du capitaine Hatteras.djvu/166]]== et d’hypothèse ? Et l’on n’a pas voulu me croire, et vous même, Wall, vous avez pris parti contre moi ! Et il rentra dans sa cabine, où il se tenait presque toujours renfermé depuis sa discussion avec le capitaine.
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Cependant, pendant les nuits qui suivirent le 16 août, l’obscurité ne fut jamais profonde ; le soleil, quoique couché, donnait encore une lumière suffisante par réfraction.
Le 19 août, après une assez bonne observation, on releva le cap Franklin sur la côte orientale, et sur la côte occidentale, le cap lady Franklin ; ainsi, au point extrême atteint sans doute par ce hardi navigateur, la reconnaissance de ses compatriotes voulut que le nom de sa femme si dévouée fît face à son
==[[Page:Verne - Voyages et aventures du capitaine Hatteras.djvu/167]]== propre nom, emblème touchant de l’étroite sympathie qui les unit toujours ! Le docteur fut ému de ce rapprochement, de cette union morale entre deux pointes de terre au sein de ces contrées lointaines.
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Le docteur, suivant les conseil de Johnson, s’accoutumait déjà à supporter les basses températures ; il demeurait presque sans cesse sur le pont, bravant le froid, le vent et la neige. Sa constitution, bien qu’il eût un peu maigri, ne souffrait pas des atteintes de ce rude climat. D’ailleurs, il s’attendait à d’autres périls, et constatait avec gaieté même les symptômes précurseurs de l’hiver.
La terre du Prince-Albert, que le Forward prolongeait en ce moment, porte aussi le nom de terre Grinnel, et bien qu’Hatteras, en haine des Yankees, n’eût jamais consenti à lui donner ce nom, c’est cependant celui sous lequel elle est le
==[[Page:Verne - Voyages et aventures du capitaine Hatteras.djvu/168]]== plus généralement désignée. Voici d’où vient cette double appellation : en même temps que l’Anglais Penny lui donnait le nom de Prince-Albert, le commandant de la Rescue, le lieutenant de Haven, la nommait terre Grinnel en l’honneur du négociant américain qui avait fait à New-York les frais de son expédition. Le brick, en suivant ses contours, éprouva une série de difficultés inouïes, naviguant tantôt à la voile et tantôt à la vapeur. Le 18 août, on releva le mont Britannia à peine visible dans la brume, et le Forward jeta l’ancre le lendemain dans la baie de Northumberland. Il se trouvait cerné de toutes parts.
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