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j’accorderais volontiers que non-seulement les matelots maures, mais les matelots de toutes les nations, grecs, sardes, napolitains, fussent admis indistinctement à naviguer sur les bâtimens expédiés d’Afrique ; je voudrais que toutes les marchandises nécessaires à la fabrication des navires fussent admises en Afrique en franchise de droits, et qu’il fût permis de nationaliser sans difficulté des bâtimens achetés à l’étranger ou appartenant à des étrangers ; en un mot, je comprendrais qu’on essayât pour la navigation algérienne de ce régime de liberté qui a si merveilleusement développé la navigation américaine. Je ne doute pas qu’à ces conditions, l’Afrique ne parvînt bientôt à faire elle-même ses propres transports maritimes et à prendre en outre sa part de la navigation universelle. Je pourrais indiquer bien d’autres choses à faire pour les colons en dehors de l’agriculture proprement dite, mais ils sauront bien les trouver eux-mêmes dès qu’ils seront libres. J’ai parlé de la navigation, parce que c’est l’intérêt le plus pressant, et qu’il s’y attache d’ailleurs une question de défense. Quant aux Arabes, je vais montrer, par un exemple de ce qui est déjà, ce qu’ils peuvent devenir sous un régime libéral et protecteur.

Un soir, pendant notre voyage dans l’intérieur de l’Afrique, nous arrivâmes chez un chef arabe de la vallée du Chéliff, nommé Bou-Alem. Ce chef n’est pas un des plus importans, il n’a que le titre de bach-aga, qui est inférieur à celui de khalifa, il est pourtant d’une famille ancienne et respectée, et il passe pour riche. Bien avant d’arriver à son douar, nous vîmes, de distance en distance, des laboureurs arabes guidant leur charrue. Ces charrues sont tout-à-fait élémentaires, elles ne font que gratter la terre en quelque sorte ; l’une était tirée par une paire de maigres boeufs, l’autre par une vache attelée avec un âne, une autre par un âne tout seul. Le laboureur avait choisi un sol aussi uni que possible ; quand il rencontrait une broussaille, une touffe de palmiers nains, il tournait autour sans s’en inquiéter autrement ; le blé avait été semé d’avance, le trait de charrue n’avait pour but que de le recouvrir. Cette méthode de travail eût paru bien misérable à un laboureur de la Brie ou de la Flandre ; mais, si ces laboureurs étaient négligeas, ils étaient nombreux. Depuis quelques jours, nous ne traversions que des déserts sans culture, et ce spectacle d’activité nous offrit un contraste consolant.

En approchant de la demeure de Bou-Alem, nous vîmes dans les prairies qui bordaient le Chéliff des troupeaux de chevaux, des moutons en très grand nombre, des, centaines de boeufs, de jeunes chameaux. Lui-même vint au-devant de nous avec un groupe de deux à trois cents cavaliers ; son fils, enfant de douze à quinze ans, montait un cheval magnifique né sur ses terres et portait à sa ceinture une paire de pistolets d’un grand prix. Quand les cavaliers eurent fait la fantasia autour de