« Lettres du Nord et du Midi de l’Europe – La Sicile/05 » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
Phe-bot (discussion | contributions)
m Typographie
Phe (discussion | contributions)
m match
Ligne 1 :
==__MATCH__:[[Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 23.djvu/753]]==
 
V - Syracuse
 
Ligne 167 ⟶ 169 :
 
Je m’arrachai de Syracuse, où les ruines et les souvenirs de l’antiquité commençaient à m’intéresser trop, à mon gré, et je pris la route de Noto, mu par un sentiment de curiosité bien différent. Le calme commençait à renaître en Sicile, et il ne restait plus qu’un seul centre d’agitation dans la vallée de Modica, où s’était réfugié, disait-on, le marchesino de Saint-Julien, fils du chef, volontaire ou non, du mouvement politique de Catane. Une sorte de guérilla, composée de jeunes nobles et de paysans, s’était formée dans cette petite vallée peu distante du cap Passero, le dernier point méridional de la Sicile, du côté de l’Afrique. En peu d’heures, on peut se rendre, de ce cap ou de la pointe de Palo, à Malte. Le désir de voir de mes yeux la fin de cette insurrection, dont j’avais vu, par hasard, le berceau, m’entraînait irrésistiblement. Je me remis donc en route, et je suivis la plaine sablonneuse et inculte qui se prolonge le long de la mer jusqu’à Noto. L’ancienne ''Nectum'' était, comme je vous l’ai dit, remplie de magistrats et de fonctionnaires qui cherchaient un toit pour abriter leurs têtes. Sans m’y arrêter, je pris à travers les montagnes, pour me rendre à Modica, une route moins directe que celle qui passe par Spaccaforno. Modica est une belle ville avec de belles églises, des couvens nombreux et une magnifique commanderie de Malte, où la noblesse passe son temps à gémir de la perte des grands privilèges dont elle jouissait, privilèges si grands, que les rois des Deux-Siciles appelaient Modica ''Regnum in Regno''. Les esprits étaient agités, mais la ville était calme. On s’y inquiétait des mouvemens qui avaient lieu dans la vallée ; mais bientôt je pus me convaincre, par mes yeux, que ces inquiétudes n’étaient pas fondées, car en descendant vers la mer, le long de la rivière de Ségura, j’arrivai à la pointe d’Alga au moment où une spéronare, chargée de fugitifs, gagnait le large. Depuis, la Sicile, quoique infestée de brigands et tourmentée par la misère de ses habitans, n’a pas été troublée sous le rapport politique, et il ne tient qu’à son gouvernement de rendre cette tranquillité plus sûre et durable. J’ai déjà dit dans ces lettres, et je répète en les terminant, que des routes, une protection éclairée assurée à l’industrie et au commerce, qu’un peu de prospérité matérielle, en un mot, empêcherait le retour des troubles et déjouerait les espérances des voisins jaloux qui convoitent cette position si importante dans la Méditerranée. Une bonne politique conseille au roi des Deux-Siciles d’agir ainsi ; les sentimens d’humanité, la noblesse d’ame qui distinguent ce jeune prince, lui parleront encore plus haut que la politique en faveur de cette belle et malheureuse moitié de ses états.
 
 
<references/>
</div>